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Journal d’un jeune incompris

Mercredi 27 mai

Vous qui lisez en secret mes feuillets, je vais aller à l’encontre de tous vos lieux communs et autres clichés et vous dire que la jeunesse n’est pas ce que vous pensez, surtout pas un âge d’or. En effet, je vais sur mes vingt ans et j’ai donc parcouru de bout en bout cet âge délicat que vous appelez adolescence, et cela m’autorise à l’embrasser d’un regard détaché et sensé.

N’allez pas vite en besogne en pensant que j’étais un garçon malheureux qui garde encore les séquelles des traumatismes d’une période de vie qui est allée de travers. Que je me sois heurté, par moments, à quelques contretemps, cela va de soi. L’ essentiel est que, dans l’ensemble, mon existence d’adolescent est allée son petit bonhomme de chemin sans gros accrocs et surtout sans vagues ni remous.

«Nous sommes ravis qu’il ne te soit rien arrivé et que, pour toi, tout soit allé bien, mais pourquoi tant d’aigreur transparaissant à travers ta voix?» me dites-vous.

Votre sollicitude me va droit au cœur, toutefois, pour vous répondre tout en allant au plus court je vous dirai que ce qui me manque se résume en un mot: l’aventure. A mes yeux, une existence doit aller de pair avec risque, aléa et imprévu. Hélas, je n’ai rien vécu de tout cela, pourtant ce n’était pas faute d’envie: j’étais prêt à aller au-devant de gros problèmes pour goûter à la joie d’une vie sur le fil du rasoir; je serais allé volontiers droit à ma perte si l’on m’avait promis un instant de nirvana.

Il semble que je suis allé trop loin dans mes révélations. Il serait préférable que j’aille au tapis pour le compte en attendant d’échapper à la tutelle de mes vieux. En effet, il ne me reste que quelques mois pour gagner une totale indépendance et à ce moment-là j’irai jusqu’au bout de mes rêves.

Mohamed Néjib TAYEB