Les céréales

Site scientifique à but non lucratif créé par Riad BALAGHI et Mohammed JLIBENE 

Effets de la pluviométrie sur les rendements des céréales 

Pour plus de détails, se référer à : Jlibene, M. 2021. Partition of   rainfall variation effect on crop productivity into amount and distribution effects.  First edition of the International E-Conference on Nexus Perspectives: Water, Food and Biodiversity. Proceedings : Abstract June 2020. ISBN : 978-9920-39-662-2.

Corrélation entre la pluviométrie et le rendement

A l’échelle nationale, le rendement est corrélé positivement à la pluviométrie cumulée au cours de la saison (septembre à mai). Les corrélations, calculées sur la série 1980-2019, sont :

Espèce

Corrélation r

Orge

0,65

Blé dur

0,57

Blé tendre

0,56

Céréales

0,60

 

 

 

 

Le graphe-1 ci-dessous illustre bien cette corrélation. Dans l’ensemble, lorsque la pluviométrie diminue lors d’une campagne, le rendement diminue, et à l’inverse il augmente quand la pluviométrie augmente.

Cependant, il y a des exceptions où le rendement augmente alors que la pluviométrie diminue et où le rendement diminue alors que la pluviométrie augmente, indiqué en + ou en dans le graphe. On constate également que les lignes ne sont pas parfaitement parallèles, indiquant que les deux variables n’évoluent de façon proportionnelle.  

Ceci est dû à la qualité de la pluviométrie, c’est-à-dire sa répartition à l’intérieur de la saison.

Graphe-1 : Coévolution de la pluviométrie et du rendement national des céréales confondues, depuis 1980 à 2019, au Maroc (Sources de données : INRA pour la pluviométrie et ONICL pour les rendements).

Or, les corrélations ainsi obtenues sont calculées sur la base du cumul saisonnier de la pluviométrie, sans distinction de sa répartition. Les effets de la pluviométrie (quantité) et de sa répartition (qualité) sont donc confondus.

 

Séparation des effets ‘quantité’ et ‘répartition’ de la pluviométrie

Approche de séparation

L’effet de la quantité de pluviométrie sur le rendement peut être isolé dans le cas où il n’y a pas d’interférence de la répartition ; c’est-à-dire dans le cas d’une répartition idéale.

Une répartition idéale correspond à celle qui permet le meilleur rendement pour une même quantité de pluie, et donc une meilleure productivité de la pluviométrie. C’est celle où permet de satisfaire au mieux les besoins hydriques variés de la culture à différents stades de développement. La productivité de la pluviométrie est définie par le ratio du rendement sur la pluviométrie, exprimé en kg/mm. Les 20% des rendements résultant d’une productivité de la pluviométrie maximale sont utilisés (points en rouge dans le Graphe-2).

Durant les 40 campagnes de la série utilisée, la pluviométrie a varié dans un ratio de 1 à 7 alors que le rendement a varié dans un ratio de 1 à 2,5, quelle que soit l’espèce. La variation du rendement qui ne varie pas de la même magnitude que la pluviométrie est probablement due aux systèmes de production qui ne permettent pas de valoriser les niveaux extrêmes de pluviométrie, inférieurs à 100mm et supérieurs à 550mm.

Graphe-2 : Régression du rendement national céréalier sur la pluviométrie. La ligne frontale en rouge correspond aux rendements résultant d’une forte productivité de la pluviométrie, donc d’une bonne répartition pluviométrique, permettant d’évaluer l’effet de la quantité de pluviométrie sur le rendement, indépendamment de la répartition. La ligne en bleu correspond aux rendements de toute la série ; i.e. tous les niveaux de productivité de la pluviométrie. Dans ce cas, la quantité de pluviométrie et sa répartition sont confondues.

La ligne frontale de régression (en rouge) donne une estimation de l’effet de la quantité de pluviométrie sur le rendement céréalier, indépendamment de la répartition.

La ligne en bleu donne une estimation de l’effet confondu de la quantité et de la répartition de la pluviométrie sur le rendement céréalier.

La différence entre les deux lignes donne une estimation de l’effet de la répartition de la pluviométrie sur le rendement (Graphe-2). Cela correspond à l’aire entre les deux lignes de régression.

Les équations de régression pour les trois espèces sont au Tableau-1 ci-après.

 

Effet de la quantité de pluviométrie sur le rendement

La régression linéaire (Rendement = a + b* Pluviométrie), fait ressortir deux coefficients : ‘a’ une constante qui traduit l’efficience d’extraction de l’eau et ‘b’ qui traduit l’efficience d’utilisation de la pluviométrie.

Les trois espèces céréalières diffèrent quant à ces deux coefficients. Les deux coefficients sont supérieurs pour le blé tendre, intermédiaires pour le blé dur et inférieurs pour l’orge.

L’efficience d’extraction ‘a’ est maximale pour le blé tendre (968kg), suivie du blé dur (930kg) et de l’orge (578). L’efficience d’utilisation ‘b’ de la pluviométrie est supérieure pour le blé tendre (5,03kg/mm), suivie de celle du blé dur (4,86kg/mm) puis de l’orge (3,54kg/mm). Elle est de 4,62kg/mm pour toute céréale confondue (Tableau-1).

Tableau-1 : Equations de régression (R = b * P + a) du rendement (R) sur la quantité de pluviométrie (P). L’utilisation de la série complète des rendements donne les effets confondus de la quantité et de la répartition sur le rendement ; la série restreinte des rendements à forte productivité de la pluviométrie donne les effets isolés de la quantité ; les effets de la répartition sont obtenus par différence.

Espèce

Tous les rendements : Quantité et répartition confondues (A)

Rendements supérieurs : Quantité de pluviométrie (B)

Répartition de la pluviométrie (A-B)

Blé tendre

R = 4,19 *  P + 544; r² = 0,56

R = 5,03 * P + 968; r² = 0.96

R =  - 0,84 * P - 424

Blé dur

R = 4,24 * P + 436; r² = 0.57

R = 4,86 * P + 930; r² = 0.97

R =  - 0,62 * P - 494

Orge

 R = 3,60 * P + 178; r² = 0. 65

R = 3,54 * P + 578; r² = 0.97

R = + 0,06 * P - 400

Toute céréale

R = 3,98 * P + 357; r² = 0.60

R = 4,62 * P + 781; r² = 0.99

R =  - 0,64 * P - 424

 

Les différences dans l’efficience d’extraction et l’efficience d’utilisation de la pluviométrie, ne sont pas exclusivement d’origine génétique, car les données pluviométriques utilisées dans la régression ne sont pas différenciées par zone géographique de culture de chaque espèce.

Effet de la répartition de la pluviométrie sur le rendement céréalier

L’aire entre les deux lignes de régression illustre l’effet de la répartition de la pluviométrie sur le rendement (Graphe-2). Cet effet de la répartition est décomposé en effet sur l’efficience d’extraction et effet sur l’efficience d’utilisation de la pluviométrie (Tableau-2).

Les effets de la répartition de la pluviométrie sur le rendement sont négatifs aussi bien au niveau de l’efficience d’extraction qu’au niveau de l’efficience d’utilisation de la pluviométrie. Exprimés en pourcentage (Tableau-2), ils sont plus marqués au niveau de l’efficience d’extraction, variant de 44% à ­ 69%, selon l’espèce (Tableau-2), qu’au niveau de l’efficience d’utilisation de la pluviométrie (1,70% à 16 ,70% selon l’espèce).

L’orge est la céréale qui semble être la plus affectée au niveau de l’efficience d’extraction (69%) suivie du blé dur (53%) puis du blé tendre (44%).

A l’inverse, les effets de la répartition de la pluviométrie sur le rendement au niveau de l’efficience d’utilisation de la pluviométrie sont faibles pour l’orge (1,70%), intermédiaires pour le blé dur (12,76%) et plus élevées pour le blé tendre (16,70%).

Tableau-2 : Effets de la répartition de la pluviométrie sur le rendement des différentes espèces aux niveaux de l’efficience d’extraction et de l’efficience d’utilisation de la pluviométrie, par rapport aux efficiences en absence de la répartition, en valeur absolues et en pourcents.

Espèce Efficience extraction Efficience d’utilisation

              Kg/ha %           Kg/mm.ha %

Blé tendre 424 / 968   44%   0,84 / 5,03 16,70%

Blé dur 494 / 930   53%   0,62 / 4,86 12 ,76%

Orge 400 / 578   69%   0,06 / 3,54 01,70%

Toute Céréale 424 / 781   54%   0,64 / 4,62 13,85%


Les pertes totales de rendement dues à la répartition, par niveau de pluviométrie

Les pertes totales de rendement dues à la répartition pluviométrique intègrent celles occasionnées au niveau l’efficience d’extraction et celles occasionnées au niveau de l’efficience d’utilisation de la pluviométrie. Elles sont inversement proportionnelles à la pluviométrie ; plus élevées en conditions de faible pluviométrie, intermédiaire en conditions de pluviométrie moyenne et faibles en conditions de pluviométrie élevée (Tableau-3).

Les pertes totales sont plus élevées pour l’orge, variant de 50% à 20% selon le niveau de pluviométrie, intermédiaires pour le blé dur (43% à 25%) et relativement moindres pour le blé tendre (37% à 25%).

 

Tableau-3 : Pertes totales des rendements dues à la répartition de la pluviométrie des trois espèces céréalières, en valeurs absolues et en pourcents, et les rendements pour trois niveaux de pluviométrie : minimal, moyen et maximal.

Rendement (kg/ha) par niveau de pluviométrie (bas, moyenne, et haut) Perte de rendement (kg/ha) due à la répartition par niveau de pluviométrie %Perte due à la répartition, par niveau de pluviométrie

Espèce 64.2mm 219mm 447mm 64.2mm 219mm 447mm 64.2mm 219mm 447mm

Blé tendre 1291 2070 3216 478 607 800 37% 29% 25%

Blé dur 1242 1994 3102 534 630 771 43% 32% 25%

Orge 805 1353 2160 404 413 427 50% 31% 20%

Toute Céréale 1078 1793 2846 465 564 710 43% 32% 25%


 Conclusion

L’une des limites de cette étude est la non-disponibilité des données météorologiques issues des aires de culture de chaque espèce. La répartition géographique des trois espèces n’est pas la même ; bien qu’elles se chevauchant sur les différentes aires géographiques, l’orge se trouve principalement en zones arides et semi-arides, le blé dur dans les zones semi-aride à subhumide et le blé tendre dans les zones semi-aride, subhumide et humide.

La série pluviométrique utilisée est celle de Rommani, une station météorologique située dans la partie centre du pays, à climat semi-aride à subhumide. Cette station météorologique se trouve être corrélée pour le rendement des céréales aux autres stations météorologiques du pays. Par conséquent, s’il y a différence en matière de pluviométrie entre les stations, cette différence relèverait beaucoup plus du niveau de pluviométrie que de la répartition. Dans ce cas, l’argument est en faveur de la validité des conclusions émises concernant le comportement des trois espèces par rapport à la répartition de la pluviométrie.


Leçons de cette campagne

Campagne 2013-2014

La campagne 2013-2014 a démarré avec un retard de pluie; les mois de septembre et octobre n'ont enregistré que 34 mm, contre une demande atmosphérique ET0 de 300 mm. Ce retard ressemble à celui de la campagne 1994-1995. 

Campagne 2012-2013

La campagne 2012-2013 a démarré normalement par une pluviométrie d'une vingtaine de mm en fin septembre qui a permis la levée des adventices et les labours, suivie d'une phase humide à la dernière décade d'octobre (70 mm) et durant le mois de novembre qui a enregistré une centaine de mm en 14 jours. Les semis ont été effectués à l'arraché. Le mois de décembre a été relativement sec jusqu'à la dernière semaine où il a plu. 

A fin décembre, les semis précoces (de fin octobre à mi-novembre) sont au stade début tallage à mi tallage. Les semis de décembre sont au stade 1- 3 feuilles. Les opérations de désherbage des champs de céréales peuvent être effectuées au stade 3-feuilles de la culture, en utilisant les herbicides appropriés. On peut enchaîner par une application d'azote de couverture.

Il faut rompre avec l'habitude de désherber et d'appliquer l'azote tard si l'on veuille améliorer les rendements. Plus on retarde le désherbage plus les dégâts sont élevés pouvant dépasser 50% des pertes. L'azote est plus utile entre début tallage et montaison. Il y a une période de deux mois pour appliquer tout l'azote qu'il faut pour le rendement visé.

Les semences

La gamme actuelle de variétés n’est pas efficacement exploitée. Les variétés nouvelles sont capables de transformer les autres facteurs de production en grain avec une grande efficacité, même en conditions difficile de stress hydrique, thermique, minéral ou biologique.  L’agriculteur doit cultiver la variété qui convient le mieux à son milieu.  Il y a des variétés qui profitent des intrants plus que d’autres donc qui profitent des bonnes campagnes plus qu’ils ne le font durant les mauvaises campagnes. A l’opposé, il y a des variétés qui produisent moins durant les bonnes campagnes mais mieux durant les campagnes mauvaises. L’agriculteur est amené à choisir entre la variété productive  et la variété stable.  Celui qui a la possibilité de faire des traitements phytosanitaires en cas d’attaque de maladies foliaires ou insectes, pourra utiliser les variétés productives même s’ils sont sensibles aux maladies.  Pour plus d’information sur les variétés contacter les services concernés à l’INRA.

Il est conseillée d’utiliser la semence sélectionnée et traitée. Si l’agriculteur n’en a pas les moyens, il doit utiliser la semence sélectionnée, au moins une fois tous les trois ans, ou bien une semence traitée. On pourra se permettre de renouveler la semence à une fréquence plus grande si on économise sur la dose de semis. Les risques d’une semence non traitée et non certifiée sont énormes: la fonte de semis, le retour des maladies systémiques (charbons, caries, helmintosporioses), les mauvaises herbes nouvelles et d’autres problèmes. Cependant, toutes les variétés sont sensibles au charbons et caries.

 

Les engrais

La fertilisation est recommandée actuellement pour l’azote et le phosphore principalement.  Le potassium parait être disponible dans le sol en quantité suffisante.  Des petites quantités sont quand même recommandées.

Mode d’application: il y a deux types d’application, comme engrais de fond ou engrais de couverture.  L’engrais de fond est enfouis dans le sol, au semis ou avant.  Il y a des semoirs combinés qui peuvent semer à la fois l’engrais et la semence.  Les engrais sont sous forme de granule ou poudre.  Dans certains pays l’engrais liquide est utilisé.  Les engrais contiennent généralement, l’azote, le phosphore et le potassium, séparés ou en mélange selon des proportions indiquées.  L’engrais de fond se décompose lentement et il n’est pas sujet à des pertes importantes.  L’engrais de couverture est appliqué après la levée, autant de fois qu’il y a des chances ou chutes de pluie. 

 

Les machines et outils