Site scientifique à but non lucratif créé par Riad BALAGHI et Mohammed JLIBENE
Géographie et climat
Le Maroc est situé à l’extrémité nord-ouest du continent africain, bordé au nord par la mer Méditerranée et à l’ouest par l’océan Atlantique. Grâce à cette position géographique, le pays bénéficie d’une large ouverture maritime, avec un littoral s’étendant sur 3 446 km :
512 km sur la Méditerranée, de Saïdia à Cap Spartel,
et 2 934 km sur l’Atlantique, de Cap Spartel à Lagouira.
Le territoire marocain est également marqué par un relief contrasté, dominé par quatre chaînes de montagnesmajeures.
Au nord, les montagnes du Rif (dont le nom signifie « extrémité » en berbère) bordent la Méditerranée. Elles culminent au Jbel Tidighine, à 2 456 m d’altitude.
À l’intérieur du pays, les chaînes de l’Atlas – le Moyen Atlas, le Haut Atlas et l’Anti-Atlas – s’étendent en diagonale du nord-est au sud-ouest.
Le Moyen Atlas, long d’environ 350 km, est situé entre le Rif et le Haut Atlas. Il couvre une superficie de 2,3 millions d’hectares, avec une transition marquée au niveau du col Touahar, près de la ville de Taza.
Le Haut Atlas, le plus vaste et le plus élevé des trois, traverse le pays d’ouest en est sur 750 km, depuis l’Atlantique jusqu’aux montagnes frontalières de l’Algérie. Il comprend le point culminant de l’Afrique du Nord : le Jbel Toubkal, à 4 165 m d’altitude.
En contraste, certaines zones comme la Sebkha Tah se situent en dessous du niveau de la mer, atteignant –55 m.
Cette diversité topographique délimite deux grands ensembles géographiques :
à l’ouest, les plaines atlantiques, fertiles et densément peuplées,
à l’est et au sud, les plateaux pré-sahariens, plus arides et étendus.
La transition du littoral vers l’intérieur des terres suit généralement une progression depuis les terres basses côtières, en passant par les plaines centrales, jusqu’aux plateaux, piémonts et zones montagneuses, offrant ainsi une grande variété de conditions climatiques et agroécologiques.
Jbel Tizi'n'Toubkal (photo wikipedia)
Le climat du Maroc est remarquablement diversifié. Il se caractérise par une forte variabilité spatiale, allant du climat méditerranéen au nord, au climat océanique à l’ouest, en passant par un climat continental à l’intérieur des terres, et un climat désertique saharien au sud.
Cette diversité est largement influencée par :
la position géographique du pays, s’étendant en latitude entre zones tempérées et arides ;
la présence des façades maritimes (océan Atlantique à l’ouest et mer Méditerranée au nord), qui apportent humidité et modération thermique ;
la proximité du Sahara à l’est et au sud, qui induit des effets d’assèchement et des vents chauds ;
et surtout, la complexité du relief (montagnes du Rif et chaînes de l’Atlas), qui module localement les températures et précipitations.
Rôle des masses d’air et des reliefs
Les variations climatiques internes (microclimats) sont fortement déterminées par l’interaction entre trois facteurs principaux : la mer, la montagne et le désert.
Les zones côtières bénéficient d’un climat tempéré avec des étés doux et des hivers relativement cléments grâce à l’effet régulateur de la mer, qui atténue les écarts de température et augmente l’humidité de l’air.
À l’intérieur des terres, le climat devient plus extrême. Il varie selon l’altitude, avec :
des étés chauds et secs, souvent accentués par le chergui – un vent sec et brûlant en provenance du Sahara. Ce vent traverse les montagnes de l’Atlas et redescend sur les plaines occidentales en s’échauffant par compression adiabatique, ce qui lui confère des caractéristiques anticycloniques et asséchantes.
des hivers froids et humides, marqués par des pluies, du gel et des chutes de neige fréquentes en altitude.
L’effet de fœhn
Le relief montagneux joue un rôle central dans la formation de microclimats par le biais de l’effet de fœhn. Lorsqu’un vent humide venu de l’océan rencontre une chaîne montagneuse, il s’élève le long du versant au vent (flanc ouest), se refroidit, et sa vapeur d’eau se condense, provoquant nuages et précipitations. En perdant son humidité, l’air devient plus sec.
Une fois passé le sommet, l’air redescend sur le versant sous le vent (flanc est) en se comprimant, ce qui le réchauffe à nouveau. Ce processus produit un air plus chaud et plus sec qu’à l’origine, créant ainsi des conditions désertiques à l’est des montagnes : étés torrides et hivers secs et rigoureux.
Influence du désert
Cette dynamique est renforcée par la vaste ouverture méridionale du Maroc sur le Sahara. Même les régions dites « non sahariennes » du sud du pays sont fortement influencées par le climat désertique, ce qui les rend naturellement arides.
Par ailleurs, certains couloirs géographiques, comme ceux de Touahar à l’est, Midelt au centre et Agadir au sud, permettent l’infiltration de vents chauds et secs venant de l’est ou du sud, accentuant encore les contrastes thermiques.
La température est influencée par la latitude, l’altitude, la mer et le désert. La température diminue en latitude, en raison de la courbature du globe et de l’inclinaison des rayons solaires par rapport au tropique. En conséquence, les régions au sud du pays sont plus chaudes que celles au nord. En montagne (sur les chaînes de l’Atlas et du Rif) les températures sont plus faibles. En raison de ces faibles températures en montagne, les neiges précipitent en hiver et parfois au printemps. Les longues côtes maritimes (de 3446 Km) exercent une action adoucissante sur les zones côtières. En été, les températures sont douces similaires à celles de la montagne, et en hiver, elles sont modérées, ce qui crée un environnement de faible amplitude thermique
Les températures moyennes varient de 22° à 24 °C en été et de 12° à 14°C en hiver. Les hivers sont froids et pluvieux avec gels et neiges fréquents en altitude. Les plus faibles températures sont rencontrées en montagne, et les plus fortes dans le désert. La température moyenne peut exceptionnellement descendre jusqu’à - 20° C en montagne. La présence de la mer atténue les écarts de température et tempère les saisons.
. (Balaghi R. Données source: www.worldclim.org)
La température minimale du mois le plus froid évolue de -15°C à +13°C et diminue de la côte vers la montagne. Les températures minimales les plus élevées se rencontrant dans les zones désertiques.
(Balaghi R. Données source: www.worldclim.org)
La température maximale du mois le plus chaud, généralement le mois de juillet, évolue de 22°C à 46°C, avec les températures les plus chaudes se trouvant dans les régions désertiques et les températures maximales les plus faibles se trouvant en montagne mais aussi sur la côte maritime.
(Balaghi R. Données source: www.worldclim.org)
L’amplitude thermique évolue de -5,7°C à +17,5°C, avec la plus élevée rencontrée en montagne et à leur voisinage. La plus faible amplitude est rencontrée le long des côtes maritimes. La température agit sur le métabolisme de la plante. La plupart des réactions biochimiques sont réalisées dans une fourchette de températures favorables se situant entre 16 et 24°C. La température agit aussi sur la culture essentiellement par la demande en eau à travers l’évapotranspiration.
Précipitations
Le régime pluviométrique du Maroc est principalement régi par trois grandes oscillations atmosphériques :
l’oscillation sud-atlantique,
l’oscillation méditerranéenne,
et l’oscillation nord-atlantique (ou européenne).
Un élément clé de cette dynamique est l’anticyclone des Açores, une zone de haute pression semi-permanente située au-dessus de l’Atlantique.
En hiver, le centre de cet anticyclone se déplace vers l’ouest ou le sud-ouest de l’océan, permettant à l’air froid et humide d’atteindre le Maroc, entraînant ainsi des précipitations importantes.
En fin d’hiver et en été, l’anticyclone remonte vers des latitudes plus élevées et bloque l’arrivée des perturbations atlantiques, qui sont alors repoussées au nord du 45e parallèle (au niveau du nord de l’Espagne). Cela entraîne une diminution marquée des précipitations et favorise la montée d’un air tropical sec traversant le Sahara.
Les formes de précipitations
Au Maroc, l’eau atmosphérique se manifeste sous quatre formes principales : pluie, neige, grêle et rosée.
La pluie constitue la forme la plus abondante et la plus déterminante pour l’agriculture.
La neige, fréquente en altitude, notamment dans le Moyen Atlas, joue un rôle crucial dans l’alimentation des nappes et des cours d’eau. Elle fond progressivement avec la hausse des températures et constitue une réserve d’eau différée.
La grêle, bien que rare, survient de façon brutale sous forme d’orages localisés, généralement lorsque des masses d’air traversent une zone de basse température.
La rosée, souvent sous-estimée, peut représenter une source d’humidité salvatrice pour les cultures en période de sécheresse. Elle est fréquente dans les dépressions centrales et sur les zones côtières.
Moyenne de la pluviométrie cumulée de septembre à mai (réalisée par Balaghi R. à partir des données www.Worldclim.org à la résolution spatiale de 1km, Série de 1950 à 2000, Hijmans et al., 2005)
Les chaînes montagneuses du Rif, du Moyen Atlas et du Haut Atlas forment une barrière naturelle qui intercepte l’humidité océanique.
En automne, cette humidité se condense en pluie.
En hiver, elle donne lieu à des précipitations neigeuses ou pluvieuses selon l’altitude et la température.
Au-delà de cette barrière orographique, les régions situées à l’est et au sud entrent dans un régime climatique aride à présaharien.
Les montagnes de l’Atlas sont ainsi souvent qualifiées de « château d’eau » du Maroc, car elles alimentent les principaux fleuves du pays :
vers l’Atlantique : Sebou, Oum Er-Rbia, Bouregreg, Loukkos, Souss ;
vers la Méditerranée : Moulouya ;
vers le désert : Ziz.
Le Moyen Atlas, massif long de 350 km, est la région la plus riche en zones humides naturelles d’Afrique du Nord : lacs, rivières, sources fraîches. Il constitue la principale zone de recharge hydrique des bassins versants.
Le Maroc est confronté à une disponibilité en eau très inégalement répartie dans l’espace et fortement variable dans le temps, sous l’effet combiné des caractéristiques géographiques et de la pression croissante du changement climatique.
Un gradient pluviométrique marqué
Les précipitations suivent un double gradient décroissant :
du nord vers le sud,
et de l’ouest vers l’est,
avec une concentration élevée sur les reliefs du Rif et des chaînes de l’Atlas, véritables châteaux d’eau du pays. Les zones montagneuses reçoivent la majorité des apports annuels.
Répartition spatiale des ressources
Près de 70 % des ressources de surface se trouvent dans les bassins du Nord (Loukkos, Sebou, Oum Er-Rbia), qui ne couvrent que 15 % du territoire national.
En particulier :
Les bassins versants de l’Oum Er-Rbia, du Sebou et du Bouregreg représentent à eux seuls plus des deux tiers du potentiel hydrique total.
65 % des ressources mobilisables en eau de surface sont concentrées dans les bassins atlantiques du nord et du centre.
Les seuls Sebou et Oum Er-Rbia concentrent près de 50 % des écoulements de surface.
Cette concentration accentue les pressions locales sur les ressources hydriques et rend d’autres régions, notamment l’est et le sud, particulièrement vulnérables à la sécheresse.
Nappes profondes et vulnérabilité
Les nappes phréatiques profondes sont peu renouvelées par les précipitations actuelles et sont donc considérées comme ressources fossiles, dont l’exploitation doit être strictement encadrée pour éviter une surexploitation irréversible.
L’analyse des apports d’eau de surface sur la période 1945 à 2023 met en évidence une dégradation progressive et structurelle du régime hydrologique du pays, illustrée par trois phases distinctes :
1945–1979 : période de relative abondance, avec une moyenne annuelle de 22,1 milliards de m³, bien que marquée par une forte variabilité interannuelle.
1980–2014 : phase de transition, avec une baisse du volume moyen à 15,6 milliards de m³, tout en maintenant une forte variabilité d’une année à l’autre (entre 3 et 42 milliards de m³).
2015–2023 : phase critique, marquée par un effondrement des volumes moyens à 8,7 milliards de m³ par an, soit moins de 40 % des niveaux des décennies précédentes. Cette période se distingue également par une réduction de la variabilité interannuelle, traduisant un changement climatique structurel du régime pluviométrique.
Cette évolution met en évidence la vulnérabilité croissante du Maroc face au stress hydrique, aggravée par :
la raréfaction structurelle des apports en eau,
la concentration spatiale des ressources,
et la baisse de renouvellement des nappes profondes.
Face à cette situation, la gestion durable et intégrée de l’eau, l’adaptation des usages agricoles, et l’optimisation des infrastructures hydrauliques deviennent des priorités absolues pour la sécurité hydrique du pays.