Canyon et grottes du plateau du Lassithi

J5 : Jeudi 15 septembre 2022


Nous étions déjà montés sur le plateau de Katharo il y a quelques jours. Aujourd’hui notre objectif est le plateau du Lassithi, beaucoup plus connu et plus grand mais curieusement situé à une altitude moindre que le précédent.

Tel un joyau enchâssé dans les montagnes du Dicté, le plateau du Lassithi (alt. 800 mètres) est un monde à part de vergers et de potagers, de villages séculaires et de légendes ancestrales. Au sens géologique, il s’agit plus précisément d’un polje, c’est-à-dire une dépression dans un terrain calcaire entouré de montagnes.

Parmi les différentes routes qui rejoignent le plateau depuis la côte, nous optons pour celle passant par Agios Konstantinos et Zelia en longeant la partie basse des gorges d’Adrianos sur une route tortueuse à travers des paysages arides et dénudés. Le trajet requiert près d’une heure et demie, nous quittons notre villa à 7 h 30 pour atteindre le plateau vers 9 heures.

Comme les jours précédents, une randonnée est au programme de ce début de matinée, plus précisément dans le canyon d’Havga que le guide Rother (n°52) qualifie de « simple traversée de gorge » et auquel il attribue la couleur bleue pour « facile ».

Ce canyon nous a tapé dans l’œil, non seulement pour la relative facilité à le parcourir, mais aussi parce qu’il cache une curiosité naturelle spectaculaire, un énorme boulder parfaitement rond coincé entre deux parois rocheuses, dominant une marmite de géant dénommé Neraidokolimbos, ce qui signifie « étang des fées ». Curieusement le guide Rother n’en fait pas état.

Pour en donner une idée, voici les images qui nous avaient attirés : d’abord le boulder entouré de beaucoup d’eau (sans doute au printemps) puis avec beaucoup moins d’eau, ce à quoi il faut sans doute s’attendre en fin d’été. A moins qu’il n’y ait plus d’eau du tout !

En tout cas, ce matin, la température de seulement 13 degrés nous oblige à enfiler un pull, d’autant que le canyon sera encore à l’ombre au début. C’est donc bien couverts que nous prenons le départ peu après 9 heures sur une portion du sentier E4, sorte de GR crétois parcourant la Crète d’ouest en est. Il longe pour commencer un bassin de retenue recueillant les eaux de fonte au printemps qui est aujourd’hui quasiment à sec tout comme l’est la rivière dont nous suivrons le lit.

Bien qu’étant encadrée de falaises de près de 200 mètres de haut, c’est une gorge assez « ouverte » dans laquelle il est facile de se repérer grâce à un balisage sous forme de points jaunes et de cairns bien placés. Nous passons régulièrement d’une berge à l’autre pour trouver le meilleur passage alors que sur les pentes environnantes les chèvres n’ont pas besoin de prendre de telles précautions. 😉

Au bout d’un kilomètre et demi environ, le sentier E4 grimpe vers les hauteurs. Nous continuons, quant à nous, dans la gorge en contournant à présent quelques rochers plus gros obstruant le lit.

Au bout d’une bonne heure, nous atteignons une accumulation de masses rocheuses barrant toute la largeur du défilé. L’endroit situé à 923 mètres d’altitude correspond exactement à l’image illustrant la page 217 du guide Rother dont la légende précise que « de gros rochers marquent l’endroit où il faut faire demi-tour ».

Mince alors, dans ce cas où est le fameux boulder ? Nous continuons à escalader les rochers sur quelques centaines de mètres, sans succès. Pensant que le canyon avait pu subir des modifications notamment après les fortes pluies de 2019 et 2020, nous avons préféré ne pas insister et faire demi-tour, un peu déçus de ne pas avoir trouvé ou atteint Neraidokolimbos, mais néanmoins ravis de notre balade par ailleurs facile, agréable et variée.

Cet aller/retour de 3,3 kilomètres avec un dénivelé de 102 mètres nous a pris 2 heures. Nous sommes de retour à la voiture peu après 11 heures et ce n’est qu’à ce moment-là que nous croisons les premiers poursuivants (deux couples). Jusque-là nous avons été une nouvelle fois tout seuls.

11 h 15 : il est encore trop tôt pour déjeuner mais nous pouvons commencer à nous avancer vers la localité dans laquelle j’ai repéré l’adresse du jour. Il s’agit du Café Kronio, recommandé par les guides Rother et Routard. Il se trouve à Tzermiado, village du plateau dédié à la culture maraîchère et fruitière, jalonné de tavernes et de kafenios ainsi que de quelques boutiques d’artisanat local.

Pour l’heure, il nous reste suffisamment de temps pour aller jeter un coup d’œil à la grotte de Trapeza, à 400 mètres à l’est de ce village, qui servait de caverne funéraire à l’époque minoenne. Quelques concrétions mais rien de spectaculaire au niveau géologique.

Une autre grotte plus réputée est au programme de cet après-midi, mais allons d’abord manger.

Le café Kronio, au centre de Tzermadio, tenu par Vassili et Christine, un couple franco-crétois, n’a plus à faire ses preuves. Beaucoup d’habitués fréquentent cette adresse, des vacanciers fidèles depuis longtemps qui reviennent année après année pour faire honneur à la cuisine du Kronio et à l’accueil chaleureux de Vassili, parfait polyglotte, maniant avec aisance l’anglais, le français, l’allemand et bien sûr le grec. Ayant envie d’une moussaka depuis le début de notre séjour, nous optons pour ce plat accompagné d’une copieuse (trop !) salade du Lassithi. La moussaka laisse un peu à désirer car ici les véritables spécialités de la maison sont l’agneau ou la chèvre à la casserole accompagnés de légumes locaux. En revanche, le baklava en dessert compense la légère déception précédente tout comme les nombreuses attentions du patron (vin doux de sa fabrication accompagné de crudités en apéro, assiette de fruits en dessert et raki offerts). Une adresse vraiment sympa !

Bon, on n’est pas d’ici et Zeus nous fait signe du fond de son antre ! Alors on lève le camp à 14 heures, cap vers la grotte de Dicté encore appelée grotte de Psychro (du nom du village le plus proche) ou grotte de Zeus car, selon la légende, le roi des dieux y aurait été caché par sa mère peu après sa naissance. La cavité de près de 100 mètres de profondeur étant un incontournable des tour-opérateurs, nous ne sommes pas étonnés de trouver beaucoup de monde à l’entrée du site où sont également regroupés nombre de cafés et restaurants. A cette heure, la plupart des touristes sont néanmoins encore à table, ce qui fait que nous pourrons visiter les lieux relativement tranquillement. Oui, mais d’abord il faut grimper à pied au sommet du site. Cela représente 20 à 30 minutes de montée sur un sentier grossièrement pavé, très escarpé et peu ombragé à cette heure. Avec l’estomac plein, la grimpette devient une véritable petite épreuve ! 😉

On pénètre dans la grotte par la salle supérieure (35 mètres de long sur 16 mètres de profondeur) qui ressemble plutôt à un abri sous roche. Elle est composée de deux cavités dont la première est ouverte et bien éclairée, mais ne comporte pas de stalactites. On accède ensuite par un escalier raide à la salle inférieure, composée de cinq cavités plus ou moins grandes, avec un petit lac à son extrémité. Elle est garnie de très nombreuses colonnes de stalagmites et stalactites.

La grotte n’a pas le prestige des grottes françaises et son entretien ne connaît pas les mêmes précautions non plus. C’est en revanche l’une des cavités les plus impressionnantes de Crète et un lieu de culte avéré depuis l’époque minoenne jusqu’à l’époque grecque archaïque comme en témoignent de nombreuses fouilles archéologiques.

Les alentours de la grotte apparaissent également comme un balcon panoramique privilégié sur le plateau du Lassithi.

Après avoir admiré la vue et bu un dernier verre dans un café au pied du site, nous reprenons le chemin de la côte. Depuis ce matin, les températures sont largement remontées, nous incitant à un bain d’abord en mer, sur la plage très peu fréquentée de Karavostasi, puis comme tous les soirs dans notre piscine. Nous sommes de retour à la villa à 17 h 45, quelle journée !