26 août 2022

Axe 3 - Questionnements méthodologiques: positionnalité et inégalités épistémiques


8H QC

Présentation de l'axe 3

Kelly Russo (UERJ) / Corina Borri-Anadon (UQTR)

9H QC

Plénière


9H30 QC


Pause


Présentation des étudiant.e.s



10H QC

Vertige dans le positionnement et la réflexivité: nem aqui, nem lá

Roberta de Oliveira Soares (UdeM)

Brève description : À Montréal, les élèves qui sont jugés comme n’étant pas capables de parler le français suffisamment pour être envoyés directement vers la classe ordinaire, doivent passer un séjour en classe d’accueil. Ces élèves passent notamment par deux classements : un pour entrer et un autre pour sortir de la classe d’accueil (ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport, 2011, 2014). Le classement des élèves en classe d’accueil pourrait être lié aux jugements scolaires, à la discrimination linguistique et aux inégalités scolaires, surtout de traitement (Armand, 2016; Blanchet, 2013; Bressoux, 2003, 2018; Candelier, 2008; Cho, 2017; Crahay, 2012; Duru-Bellat, 2002; Felouzis et al., 2016; Monseur & Lafontaine, 2012). Ainsi, ma recherche de doctorat propose : 1) un portrait inédit du processus de classement des élèves avant et après leur séjour en classe d’accueil à Montréal; 2) des pistes, voire des protocoles, pour orienter les décisions de classement de ces élèves dans une perspective d’éducation inclusive et d’équité; 3) une réflexion à propos des modèles théoriques communément utilisés pour réfléchir sur les processus de classement; 4) d’éclairer la discussion à propos des bonnes pratiques concernant les élèves en classe d’accueil. Afin de comprendre les différents chemins possibles pour ces élèves surtout après le séjour en classe d’accueil (classe ordinaire, adaptation scolaire, formation générale des adultes), certains concepts considérés comme interprétatifs sont notamment utiles comme : habitus et types de capital (Bourdieu, 1986), normalisation et pouvoir disciplinaire (Foucault, 1975) et stigmatisation (1986); en plus du concept critique d’intersectionnalité (Crenshaw, 1989; Collins & Bilge, 2016). Cette recherche qualitative ethnographique utilise comme techniques : analyse de documents, observations participante et entretiens individuels semi-dirigés (Cellard, 1997; Foucault, 1969; Goffman, 1959; Hunting, 2014; May, 2011; Rodriguez, 2019; Pepin, 2011; Vienne, 2005) et réalise une analyse inductive et déductive des types et des thèmes liés aux catégories sociales (Becker, 1971; Beaud & Weber, 2012; Bilge, 2009; Rodriguez, 2019).


Justification de l'axe :

Toutefois, il existe des questionnements concernant l’utilité ou non de la posture épistémologique interprétative ou de la posture épistémologique critique et si ces deux types pourraient être considérés comme critiques et quelles seraient leurs limites en termes de changement social ou de reproduction sociale. En considérant les concepts sociologiques utilisés, la place de la sociologie dans le champ de l’éducation, en tant que sociologie de l’éducation ou en tant que sociologie en éducation, peut être aussi questionnée étant donné que ces deux champs semblent avoir des différentes façons de réaliser la recherche et, par conséquent, avoir de différentes attentes en termes de ce que la recherche devrait apporter en termes de résultats.

De plus, afin de pouvoir réaliser une recherche considérée comme critique, il est attendu que le positionnement de la chercheuse soit précisé. Les concepts de stigmatisation (Goffman, 1986) et d’intersectionnalité (Crenshaw, 1989; Collins & Bilge, 2016) sont utiles pour réfléchir sur les participants de la recherche (élèves et intervenants scolaires) et sur le positionnement de la chercheuse, puisque cela peut influencer la conceptualisation de la recherche.

Pour ces raisons, nous considérons qu’il est important de proposer certains questionnements concernant la réalisation de la recherche et le positionnement dans la recherche, par exemple : qui a le droit d’étudier quoi et qui? Qui a le droit de citer qui? Et quel est le but de faire de la recherche?



10H40 QC

Réflexions sur l'enseignement de la langue des signes brésilienne dans un programme de formation pour éducateurs autochtones

Ana Carolina Machado Ferrari (UFMG)

Brève description : L'objectif de cette étude est de réfléchir à l'enseignement de la langue des signes brésilienne (Libras) dans des cursus d'enseignement supérieur pour la formation d'éducateurs indigènes, en tenant compte des Directives curriculaires nationales (DCN) pour la formation des enseignants indigènes dans l'enseignement supérieur et secondaire, établies par la résolution 01 (BRASIL, 2015), en particulier les alinéas II et IV de l'article 1 et les alinéas II et VI de l'article 7. Les années 1980 et 1990 ont été prometteuses en ce qui concerne les propositions de politiques publiques visant l'éducation scolaire indigène (EEI) et l'éducation spéciale (EE), en prônant le respect de la diversité et le droit à la différence. Les peuples indigènes sont parvenus, par la résistance, les revendications et les négociations, à garantir leur droit à une éducation différenciée tenant compte de leurs cultures et favorisant une éducation bilingue ainsi qu’une valorisation des cultures (BRASIL, 2009). Cependant, l’examen des questions concernant spécifiquement les populations indigènes atteintes de surdité, leurs droits linguistiques et l'accessibilité communicationnelle dans leur langue des signes, montre l'absence de politiques spécifiques répondant aux besoins de ce public, les politiques linguistiques étant destinées seulement aux personnes atteintes de surdité vivant dans les centres urbains. Cette absence de politiques linguistiques spécifiques s’étend même à la formation des enseignants indigènes, dont les cursus de formation initiale comportent dans leur matrice curriculaire la langue des signes brésilienne (Libras) comme matière obligatoire, sans tenir compte des questions liées aux langues des signes indigènes ni des tensions entre le décret, qui exige l'insertion de ce contenu curriculaire, et les Directives curriculaires nationales pour la formation des enseignants indigènes. Ayant pour objectif d’enquêter sur les langues des signes indigènes et leur interculturalité avec la langue des signes brésilienne (Libras) en s’appuyant sur la formation d'enseignants indigènes, cette étude se caractérise comme une recherche ethnographique, avec pour base théorique et méthodologique la Théorie de l’Acteur-Réseau (TAR) (LATOUR, 2012). La TAR nous permet de décrire les agences des acteurs dans la construction d'un réseau, ce qui est essentiel pour étudier les langues des signes indigènes dans leurs territoires et une possible interculturalité avec la Libras, cette interculturalité étant comprise comme une « coexistence dialogique » (NASCIMENTO, 2016, p.6). Dans cette perspective, on comprend que les langues des signes indigènes circulent symétriquement à la Libras dans les territoires, notamment à l'école, à partir du moment où les enseignants indigènes sont en contact avec cette langue, initialement reconnue par la législation comme la « langue naturelle des Brésiliens sourds » (BRASIL, 2002). Étant donné les nouvelles exigences issues de la COVID-19, telles que la distanciation sociale et l'interdiction des terres indigènes à l'entrée de personnes non indigènes, la recherche sur le terrain - qui comprend des interactions virtuelles avec les étudiants du cursus de formation interculturelle pour éducateurs indigènes (FIEI- FaE-UFMG), ainsi que le suivi des classes de Libras - sera réalisée en distanciel, au moyen d'entretiens non directifs et de cercles de parole en ligne, comportant la présentation des signes identifiés sur le territoire et leur comparaison avec la Libras. Pour cela, il est nécessaire d'utiliser différentes applications de visioconférence, telles que Google Meet et WhatsApp, en se souciant de l'accessibilité des personnes qui les utilisent. La réalisation d'appels vidéo dans le cadre des études sur la surdité est essentielle, car nous pourrons observer non seulement les gestes des enseignants indigènes et surtout ceux des indigènes sourds utilisant leurs langues des signes respectives (ces derniers pouvant être invités à participer aux cercles de parole).

Justification de l'axe : Les politiques visant à l'éducation des personnes atteintes de surdité, la loi n ° 10.436/2002 (BRASIL, 2002) a reconnu la Libras comme la langue naturelle des Brésiliens sourds (UZIAN et al., 2008), et l'exigence de son enseignement dans les cursus de licence et d'orthophonie réglementés par le décret 5626/2005 (BRASIL, 2005). Cependant, bien que cette reconnaissance existe, des recherches brésiliennes ont posé les bases de discussions sur l'existence de langues des signes spécifiques dans plusieurs territoires indigènes, indiquant la nécessité d'une étude plus approfondie du thème et d’une cartographie de ces langues, recherche essentielle si l’on veut assurer le droit linguistique de ces personnes. Dans cette perspective, des études ont été consacrées à cette mise en valeur, focalisant sur cette question dans différentes ethnies, comme les Kaingang (GIROLETTI, 2008), les Terena (VILHALVA, 2009 ; SUMAIO, 2014 ; ARAÚJO, 2018 ; SOARES, 2018), les Guarani Kaiowá (COELHO, 2011 ; 2019 ; LIMA, 2013), Sateré-Mawé (AZEVEDO, 2015), Akwê Xerente (BARRETO, 2016), Paitér Suruí (COSTA, 2017 ; ELER, 2017 ; GREGIANINI, 2017), Pataxó (DAMASCENO, 2017 ; JESUS, 2018) et Tapeba (LOPES, 2020). Selon les données du recensement de 2010 réalisé par l'Institut brésilien de géographie et de statistique (IBGE), le Brésil compte actuellement 896 000 personnes qui se disent indigènes, dont 36,2 % vivent dans des zones urbaines et 63,8 % dans des zones rurales. Cette population est répartie entre 305 groupes ethniques et compte environ 274 langues différentes. Ajouté à cela, lorsque nous vérifions les Lignes directrices curriculaires nationales pour la formation des enseignants indigènes dans les cursus d'enseignement supérieur et secondaire (BRASIL, 2015), nous observons comme principe, entre autres, la nécessité de considérer l'interculturalité et la valorisation des langues indigènes dans l'organisation du curriculum des cours de formation initiale et continue des enseignants indigènes.



11H20 QC

Collaborer avec les communautés : analyse d’une recherche collaborative et des tensions associées au processus de collaboration pour la co-construction de savoirs

Karine Gélinas (UQTR)

Brève description : Étudier les génocides en contexte de classe soulève certains défis pour le personnel enseignant. La complexité de ces phénomènes, le manque de consensus sur la manière d’en parler et la définition même du concept de « génocide » peuvent d’ailleurs l’amener à éviter ce thème sensible (Hirsch et Moisan, 2022). Or, l’actualité – découverte de sépultures non identifiées d'enfants sur les terrains d’anciens pensionnats autochtones, invasion de l'Ukraine par l’armée russe, notamment – ne cesse de mettre en évidence la nécessité pour l’école de former des citoyennes et des citoyens capables de contribuer à un meilleur vivre-ensemble, mais aussi de reconnaître et de comprendre le processus génocidaire afin d’être en mesure, du moins à l’échelle individuelle, de contribuer à sa prévention. Cela s’avère d’autant plus important lorsque l’on sait que l’idéologie sur laquelle reposent les génocides est le racisme (Moisan et coll., à paraître). Si aborder les génocides se révèle un thème sensible à l’école, il en est de même dans un contexte de recherche, et ce, pour des raisons relativement similaires à celles évoquées précédemment. De ce fait, les ressources – humaines et matérielles – consultées, les mots employés et les événements choisis pour parler d’un génocide importent grandement. D’un côté, ces éléments peuvent contribuer au processus de guérison des victimes, et de l’autre, alimenter les thèses négationnistes ou les préjugés envers certaines communautés. Plus encore, ils peuvent participer au maintien d’un rapport de pouvoir entre les groupes et à une hiérarchisation des savoirs. Jonglant avec cette complexité, Hirsch et Moisan (2022) ont développé une approche interdisciplinaire pour analyser et enseigner les génocides au 2e cycle du secondaire dans les programmes d’éthique et d’histoire. Cette approche propose d’analyser neuf génocides du XXe siècle, dont celui des Premiers Peuples au Canada, à partir de la définition du concept de génocide proposée par l’ONU (1948) et d’une version simplifiée de la grille en dix étapes de Gregory H. Stanton (2016). Explicitée dans le guide "Étudier les génocides" (www.education-genocide.ca), elle consiste en l’aboutissement d’une longue recherche collaborative menée avec des experts, des praticiens, mais aussi des membres de communautés ayant été touchées par un génocide. Notre projet de recherche, qui mobilise notamment les concepts de « collaboration » et de « communauté », découle de cette expérience. Il poursuit les deux objectifs suivants : 1) documenter et analyser le processus de cette recherche collaborative et 2) identifier et interroger les tensions associées au processus de collaboration pour la co-construction de savoirs avec les membres de communautés concernés par ces derniers. Ce projet s’inscrit dans une étude de cas, une méthodologie qui permet d’approfondir la compréhension d’un phénomène dans son contexte et donc de produire des connaissances concrètes et pratiques ancrées dans celui-ci (Flyvbjerg, 2006). Pour ce faire, la conduite d’entretiens individuels semi-dirigés et l’analyse de documents écrits sont par ailleurs envisagées.


Justification de l'axe : Notre projet de recherche contribue à l’axe 3 « Questionnements méthodologiques: positionnalité et inégalités épistémiques » pour différentes raisons. De manière générale, il se veut une réflexion sur la recherche collaborative, soit un type de recherche qui s’inscrit dans la grande famille des recherches participatives (Couture et coll., 2007; Desgagné et coll. 2001) et qui vise des rapports plus symétriques de co-construction des savoirs. Plus précisément, il s’intéresse au processus d’une recherche collaborative réalisée avec les membres de communautés notamment touchées par un génocide (Hirsch et Moisan, 2022) pour coconstruire des savoirs qui « les concernent de près et sur lesquels ils ont des éléments de compréhension à apporter » (Bednarz, 2013). Or, il faut savoir que, selon leur histoire, les communautés impliquées dans cette recherche ont connu, voire connaissent toujours, des rapports sociaux inégalitaires. Certains pans de leur expérience et de leurs connaissances sont donc méconnus, non considérés, voire erronés. En ce sens, notre projet porte un regard critique sur les rapports de pouvoir observés lors du processus de recherche, sur le rôle des acteurs et actrices de la recherche, sur la hiérarchisation des savoirs ainsi que sur la légitimité de parole. De ce fait, il amène des éléments de réponses à la question suivante : comment faire de la recherche avec et pour?


12H QC


Pause-repas


Présentation des étudiant.e.s



13H QC

Pratiques éducatives d'auto-représentation (self-advocacy) au Brésil: une recherche collaborative

Flavio Murahara (McGill)

Brève description : Les barrières sociales qui empêchent le plein développement des personnes handicapées sont historiquement combattues ; il s'agit d'un long parcours de lutte contre la discrimination et l'exclusion (Stiker, 1999). Les années 60 et 70, en particulier, ont été significatives, car elles ont vu naître le mouvement social « Rien sur nous, sans nous », dans lequel les personnes handicapées ont revendiqué d'être placées au centre des prises de décision concernant leur propre vie, ce qui auparavant était le fait de professionnels ou de proches. Cette initiative a été définie comme un mouvement de self-advocacy ou auto-représentation (Wehmeyer, 2013). Depuis cette période, un certain progrès a eu lieu pour rendre les sociétés plus inclusives, comme nous pouvons le voir dans l'avancée de politiques publiques sur l'inclusion et la participation sociale (Januzzi, 2006).

Cependant, les défis présents dans la vie des personnes handicapées sont nombreux, en particulier chez les personnes souffrant de déficiences intellectuelles. Celles-ci font encore face à des obstacles complexes qui empêchent leur pleine participation à la société.

Même les politiques d'inclusion les plus récentes, telles que la loi brésilienne sur l'inclusion, ne définissent pas de manière claire la façon de promouvoir l'auto-représentation/la participation sociale au cours du développement de l'individu, c'est-à-dire qu'il n'existe pas de lignes directrices claires sur la manière dont les écoles peuvent promouvoir l'auto-représentation / la participation sociale de leurs apprenants.

Ainsi, la présente recherche vise à étudier les pratiques d'auto-représentation dans des écoles brésiliennes au moyen de la conception et de l'évaluation d'un programme de formation pour les éducateurs fondé sur l'expérience collaborative d'un groupe d'auto-représentants dans la municipalité de São Paulo.

Ce projet de recherche a été structuré en deux phases. Dans un premier temps, un groupe d'auto-représentants (N=13) a été interviewé dans le but de comprendre son expérience en matière d'auto-représentation à travers les trajectoires scolaires des membres et leurs expériences actuelles au sein du groupe. La première étape de la recherche se conclut par l'élaboration d'un programme de formation pour les éducateurs et d'un protocole de pratiques éducatives d'auto-représentation.

La deuxième phase de la recherche vise à mettre en place le programme de formation des éducateurs et le protocole de pratiques d'auto-représentation dans six écoles publiques du Sud-Est du Brésil. Deux écoles dans les municipalités de São Paulo, de Rio de Janeiro et de Belo Horizonte seront recrutées pour le projet de recherche. Dans chaque école, il est prévu de travailler avec des éducateurs (N=6) qui interviennent dans le service éducatif spécialisé (Atendimento Educacional Especializado, AEE) de l'école et avec un groupe d'apprenants présentant une déficience intellectuelle et / ou des troubles du développement (N=36).

Actuellement, la recherche est en cours de recrutement des écoles pour la deuxième phase, pendant que le programme de formation des éducateurs, qui s'appuie sur la collaboration du groupe d'auto-représentants, s'élabore. Cette méthodologie de construction collaborative (Kristiansen et Bloch-Poulsen, 2012) repose sur un processus d'implication des participants en tant que collaborateurs et co-constructeurs du savoir. Les spécificités de ce processus, telles que la relation de pouvoir entre le chercheur et les participants et la prise de décision, seront discutées comme autant d'éléments clés du concept d'auto-représentation.

Justification de l'axe : La présente recherche s'aligne sur le troisième axe de discussion relatif aux questions méthodologiques car elle s'interroge sur le rôle du participant à la recherche en tant que collaborateur qui co-construit le savoir sur le thème de la recherche (Kristiansen et Bloch-Poulsen, 2012). S’agissant d'une recherche sur l'auto-représentation (self-advocacy), dont les thèmes centraux sont la prise de décision et la question de la représentativité, il est nécessaire de réfléchir à la structure méthodologique de la recherche qui est fondée sur la production d'un savoir construit en collaboration. Ainsi, dans la présente recherche, le soin apporté à la transparence des objectifs et des processus s’exerce constamment, depuis le premier contact avec les participants jusqu'à la proposition de communication de la recherche. Ainsi, conformément au concept d'auto-représentation, les participants collaborent tant sur le plan de la confidentialité et de l'utilisation de noms propres dans la recherche que sur le traitement des données et les décisions concernant la diffusion de celle-ci.

Il faut souligner que la question d'une universalité du concept d'auto-représentation peut être comprise comme faisant partie des discussions des critical disability studies, où l'hégémonie des études produites sur le sujet, qui adoptent communément la perspective du Nord global, est remise en question (Meekosha, 2011). Par conséquent, à l’examen des aspects relevés par une compréhension de l'auto-représentation qui adopte le point de vue des auto-représentants eux-mêmes, nous proposons une approche collaborative et de recherche-action qui remette en cause l'universalité du concept d'auto-représentation. En résumé, la possibilité de construction concrète d'un savoir transformateur à appliquer à l'éducation inclusive (formation des éducateurs) renvoie à une proposition de recherche qui échappe à un récit centré sur le dommage et qui s'aligne sur une perspective décoloniale (Tuck, 2009).


13H40 QC

Où est Haïti dans l’espace scolaire ? Analyse du processus de formation identitaire des « ti dyaspora » haïtiens au Brésil dans la relation famille d’origine et l'école publique

Marc Donald Jean Baptiste (UEL)

Brève description : L’objectif de cette thèse est d’analyser l'influence du milieu scolaire brésilien et de la famille haïtienne sur la construction identitaire des enfants d’origine haïtienne au Brésil. En effet, le tremblement de terre qui a passé en Haïti en 2010 a permis aux immigrants haïtiens de bénéficier des politiques migratoires mises en place par les gouvernements de Luiz Inácio Lula da Silva (2003- 2011) et de Dilma Rousseff (2011- 2016) pour rentrer au Brésil comme des « réfugiés humanitaires ». Ce qui fait qu’entre 2010 à 2017, le flux migratoire d’Haïtiens en terre brésilienne s’élève à 94 000 personnes, selon Handerson (2019).

Et c’est ainsi, durant cette période, nous avons observé, que certains Haïtiens appellent leurs enfants, qui généralement ne parlent pas créole (la langue d’origine de leur parent), de ti blan (petit blanc). Pourquoi les Haïtiens appellent-ils leurs petits-enfants noirs de blancs ? Qu’est-ce que ça démontre dans la construction de l’identité de ces enfants ? Comment le milieu scolaire brésilien et le milieu familial des enfants d'immigrants haïtiens influencent-ils leur formation identitaire ?

C’est une recherche qualitative réalisée en trois moments : recherche documentaire, revue de littérature et la recherche de terrain. L’échantillon a été composé de trois éducatrices ; quatre parents et douze enfants de huit à treize ans inscrits dans une école primaire dans la ville de Cambé au Brésil. La collecte de données a été réalisée par des entrevues semi-dirigées avec les éducatrices et parents, un atelier de dessin avec les enfants, l’observation du quotidien des parents et élèves, et un journal ethnographique.

Les résultats partiels démontrent que :

  • La catégorie de « ti dyaspora » (petit diaspora) est la découverte centrale de la thèse. C’est une conception de l’enfance développée par certaines familles haïtiennes au Brésil. Certaines familles haïtiennes au Brésil construisent l’identité de « ti dyaspora » pour leurs enfants comme un lieu de prestige social pour se démarquer d’un enfant qui vit en Haïti. C’est une réalité multidimensionnelle et transfrontière dans les relations entre le pays d’origine et le pays d’installation. Au Brésil, un « ti dyaspora » est perçu comme un quasi brésilien, un quasi blanc et s’opérationnalise comme une stratégie identitaire des familles pour contourner le racisme existant contre les Haïtiens, puisqu’elles perçoivent le racisme comme de la xénophobie. Le racisme brésilien vise exclusivement les étrangers selon leur conception.

  • Il existe une invisibilité des élèves haïtiens dans le projet politique et pédagogique du contexte scolaire étudié et dans le Plan municipal d'éducation (2014-2024), la diversité est peu présente ;

  • Les familles haïtiennes ont une vision mitigée sur l’école brésilienne comme positive sur certains points et négative sur d’autres (résultat de certains chocs culturels).

  • Le sentiment d’auto-déqualification des familles haïtiennes dans leur relation avec l’école et leurs stratégies développées pour répondre aux exigences de suivi scolaire des enfants.

Justification de l'axe : Les enjeux méthodologiques de cette recherche s’inspirent dans l’approche de Gilberto Velho (2013) et se trouvaient dans notre double chapeau (chercheur et Haïtien) qui nous a permis de jeter un regard plus profond sur certaines pratiques dans le quotidien des immigrants haïtiens. Nous avons cherché à nous distancer des pratiques familières, et de nous familiariser avec d’autres distantes de notre réalité. L’usage quotidien de “blan” (réalité familière) et l’organisation communautaire des immigrants autour d’une église (réalité distante) sont deux exemples de ce processus.

Ensuite, les écrits (COHN, 2003, 2005 ; QVORTRUP 2010 ; AMÂNCIO, 2016) consultés sur le concept d'enfance dans cette recherche montrent qu'il s'agit d'une catégorie socio-historique et culturelle, qui s'exprime avec de nombreuses variations et particularités d'un contexte à un autre. Ce qui renforce l’enfance est loin d'être une réalité homogène ; l'expérience des enfants est culturelle et contextuelle (COHN, 2005).

Dans cette perspective, Cohn (2005) a développé sa théorie sur l'anthropologie de l'enfant et non de l'enfance, qui est une manière particulière, et non universelle, de penser l'enfant, puisqu'elle part de la question de savoir quel système symbolique l'enfant est inséré pour produire ces actions. Dès lors, le point de départ de cette logique analytique est de répondre : qu'est-ce qu’un enfant dans le dit système symbolique ? Comment vivent et pensent les enfants ? Quand est-ce que l’enfance commence et se termine ?

Cette démarche nous a permis de réaliser la recherche avec et pour les enfants en impliquant les adultes qui les entourent. En s’appuyant sur l’approche de Cohn (2005) qu’un enfant n'est pas un être immature, mais différent.


14H20 QC

Retour sur la journée

  • Comment faire de la recherche avec et pour?

  • Quelles sont les approches prometteuses?

  • Comment tendre vers une recherche décoloniale?

  • Comment prendre en compte la position du chercheur et la colonialité du savoir dans les choix méthodologiques ?

  • Comment la recherche narrative, la recherche qui valorise les récits de vie et la recherche participative en général peuvent-elles contribuer à ce débat ?