04- La Loire et les ponts en pierre de Blois
-D'une rive à l'autre.
Un premier pont en bois
Il est certain qu'un pont en bois fut le premier ouvrage reliant la ville de Blois à une des îles situées au milieu du fleuve et de cette île à Vienne-lez-Blois.
"Les vestiges de 304 pieux de bois répartis sur 115m de long, ont été identifiés comme le plus ancien pont. La position de cet ouvrage se situe rive droite au niveau de l'ancienne halle Louis XII et rive gauche au niveau de la rue Munier.
Son édification est estimée au 1er siècle voir au milieu du second.
Les piles sont distantes d'environ 11m et ont une largeur de 5.40m pour une longueur de 18 à 19m.
La chaussée devait être large d'environ 8m."
"Le pont de pierre qui servait à traverser le bras le plus petit de la Loire, et qui a été détruit par les glaces en 1716, devait être aussi du même style que les autres, à en juger par les dessins qui nous en restent.
L'analogie nous fait également penser que avant d'être bâti en pierres, il devait être appuyé sur des îlots que l'on remarque près de lui sur des plans du seizième siècle.
Ces îlots furent emportés sans doute à l'époque où la construction des quais, en resserrant le lit du fleuve,augmenta beaucoup dans cet endroit la rapidité du courant."
Les ponts en pierre
Selon les ouvrages que j'ai pu consulter sur l'histoire du premier pont en pierre de Blois, certains documents pencheraient vers l'élévation d'un seul pont construit au XIéme siècle, détruit lors de la débâcle des glaces en 1716 il fut remplacé en 1717 par le pont Jacques Gabriel construit en amont du vieux pont.
Selon d'autres ouvrages et gravures, deux ponts auraient été construit avant ce dernier, le premier daterait du XIéme siècle et le second du XVème siècle.
Je pense qu'il y a bien eu trois ponts en pierre reliant Blois à Vienne-lez-Blois, le troisième étant l'actuel pont de Jacques Gabriel.
En effet, il y a très peut de textes sur le premier pont en pierre (XIéme siècle), ce qui expliquerait la confusion des auteurs entre le pont du XIéme siècle et celui du XVéme siècle.
Voici quelques extraits.
"on remarque quatre époques dans la construction du pont de Blois. Au moyen âge, il était en bois et sinon tout à fait libre, du moins peu chargé d'édifices. Depuis Louis XII il s'obstrue complètement. Ensuite il devient mi-partie de bois et de maçonnerie ; enfin, au XVIIe siècle, se solidifie tout en maçonnerie en se dégageant peu à peu de nouveau. Son dernier état après les réparations de 1678 et 1679 doit être celui où le trouva la débâcle de 1716."
"La chapelle de Saint-Fiacre, placée sur le pont, près d'une tour qui en protégeait le milieu, d'après le système des fortifications en vigueur pendant tout le moyen âge, devait remonter à une haute antiquité, puisqu'il fallut la rebâtir au XVe siècle."
"Le pont de pierre, ruiné par les guerres, a été rétabli sous le règne de Henri III et le gouvernement de Philippe Hurault en l'année 1580; cette qualification pont de pierre, rapportée au XVIe siècle, démontre encore que cet édifice ne se solidifie pas tout en maçonnerie au XVIIe et qu'il était ainsi constitué longtemps auparavant.
Le pont de Blois a subi, comme tous les anciens ponts de la Loire, des accidents plus ou moins graves aux époques d'inondations et de débâcles des glaces, qui ont ruiné ses piliers et renversé plusieurs de ses arches."
Mémoires de la Société Archéologique et Historique de l'Orléanais - Tome 26 - H. HERLUISON - 1895 - GallicaLa rareté des archives
Il est souvent mentionné dans les rares documents reprenant les archives de la ville de Blois, des dates de documents sur des donations ou des travaux apportés au "pont", sans préciser de nom ou de particularité qui permettrait d'identifier le type de pont.
Par exemple, les ouvrages du XVII au XXème siècles de différents historiens de la ville de Blois, relatant l'abandon par Thibault V aux religieux de Saint Laumer de la moitié de la dîme de deux moulins sur la rivière "Loyre", laissent à penser qu'il s'agissait obligatoirement des moulins du pont de Blois et de cette pensée, qu'il n'y avait qu'un seul pont qui était depuis très longtemps équipé de moulins.
Hors dans le texte original en latin, il s'agit de deux moulins et écluses situés en Vienne le long de la Loire et non ceux du pont de Blois.
Les origines des ponts
Je n'ai pas trouvé de documents indiquant précisément la construction et la destruction du pont du XI éme siècle ni de documents concernant la construction d'un pont au XVème siècle, en revanche, comme l'indiquent les gravures ci-dessous, deux ponts bien différents y sont représentés.
Malheureusement une grande partie des archives de la ville fut détruite au cours des années par des catastrophes, des guerres ou par négligence et seule une petite partie pu arriver jusqu'à nous.
Les archives ont été entreposées au château de Blois; dans la tour du pont du XVème siècle, dans l'abbaye de Notre dame du Bourg Moyen et à la mairie.
Certaines archives, entreposées dans le grenier de la Mairie, furent vendues au XIXème siècle et se retrouvèrent chez des particuliers.
Au XXéme siècle, la mairie de Blois, qui était située à la sortie du pont Jacques Gabriel vers le quai Saint Jean, fut détruite lors des bombardements de la seconde guerre mondiale avec les archives de la ville.
Donc très peut d'archives concernant la ville et de ses monuments purent être sauvés.
Toutefois, une partie, jugée à une certaine époque comme "obsolètes", furent préservées soit par un stockage dans des bâtiments communaux en dehors du centre ville, soit par des copies aux archives départementales.
Toutefois dans l'ouvrage "Mémoires de la Société Archéologique et Historique de l'Orléanais, Tome 26",l'auteur indique que le pont fut détruit à plusieurs reprises par des guerres ou des débâcles et qu'il fut "rebâtit" au XV éme siècle.
"On croïoit son commencement aussi ancien que le pont à qui on donnoit plus de huit cents ans, mais on le croïoit rebâti du tems de Louis XII, comte de Blois et roy de France"
Mémoires de la Société Archéologique et historique de l'Orléanais Tome 34-GallicaMa théorie
Et pourquoi pas en Amont du pont du XI éme siècle, rebâtir ne veut pas forcement dire au même emplacement.
La définition que donne le Petit Larousse est "bâtir de nouveau ce qui a été détruit", la fragilité des arches ne permettait sans doute pas de les restaurer.
Certains textes comme celui-ci:
" Le petit bourg de Vienne, est joint à Blois par un pont en pierre, que le roi Henry troisième fit remettre l'an mil cinq cens quatre-vingt-quatre."
Extrait de l'ouvrage le Monde, ou la description générale de LEUROPE quatrième partie du monde - Tome II - M. DC XLIII - Gallicaindiquent qu'il ne s'agit pas d'un pont mais de plusieurs ponts qui furent réparés ou reconstruits au fil des catastrophes, des guerres ou des crues.
Par exemple, Jean des Vignes (Johannes de Vineis), bourgeois de Blois (burgensis Blesis), de la paroisse Saint-Solenne,qui, dès 1375, fit son testament et indiqua ces clauses fort curieuses, entre autres legs, celui d'une somme de 3 francs à l'OEuvre du Pont de Blois, destinée à l'achat d'une rente annuelle et perpétuelle de 5 sous, celui d'une somme de 5 sous aux Ponts Châtrés, et de 5 sous aussi aux Ponts Saint-Michel,
L'auteur Jacques SOYER à traduit fabrice pontis Blesis dans le texte en OEuvre du Pont de Blois alors que l'on pourrait traduire par construction d'un pont à Blois.
Les archives n'étant pas toujours claires, il est difficile de s'y retrouver dans la description des ouvrages concernés.
Encore un exemple, dans l'ouvrage COMPTE DES RECETTES ET DÉPENSES DE LA VILLE DE BLOIS EN L'AN 1404 - (mémoires de la société des Sciences et Lettres de Loir-et-Cher - quatorzième volume du 31 mars 1900, consultable sur le site Gallica), de multiples factures concernent des réparations sur divers ponts dont celui au dessus de la Loire mais aussi les ponts au dessus de l'Arrou.
La création des levées et leurs élévations dans le temps et tout au long du fleuve ont élevées le niveau de l'étiage (Niveau moyen le plus bas d'un cours d'eau) du fleuve.
Les anciens ponts conçus pour des crues de 5m ne pouvaient pas résister à des crues de 6m ou plus.
La construction de ponts adaptés aux élévations des levées devenaient indispensables.
Voici ci-dessous, les éléments sur lesquels je fonde ma théorie d'un premier pont en pierre:
Les gravures
Le premier pont en pierre
Les premières gravures du XVème siècle, représentant la ville, Vienne-lez-Blois et un pont de 8 à 9 arches .
Un seul texte et des gravures m'ont permis de le situer exactement par rapport à la ville, c'est la position de l'église de l'abbaye de l'Ordre de saint Augustin appelée Notre Dame du Bourg Moyen (son véritable nom étant Notre-Dame de Blois) qui était située au niveau de la place Valin de la Vaissière vers la place Louis XII (voir plus bas pour les cartes)
Ce premier pont est représenté de la même façon sur ces trois gravures, reconnaissable à son duit, ouvrage en forme de "V", situé en amont du pont, à son bâtiment central avec une porte d'entrée vers la ville et à ses arches au nombre de 9 contrairement aux 20 arches du second pont.
Le second pont en pierre
La seconde datant de 1573 représentant la ville, Vienne-lez-Blois et un pont de 16 arches et couvert de tours, de l'église Saint Fiacre ainsi que des moulins situés en aval du pont.
Ce dernier pont ressemble plus au pont détruit par la débâcle au XVIIIème siècle et qui possédait en réalité 20 arches.
Ce ne sont pas les seules gravures de ce type, vous pouvez consulter les différentes gravures ICI: sur Culture 41
Identification des ponts sur site:
Mais c'est surtout grâce à un niveau très bas du fleuve en 2015, que j'ai pu repérer les anciennes piles des ponts de Blois et les comparées avec les différentes gravures.
Voici donc une représentation personnelle des trois ponts de Blois depuis le XIème siècle.
De gauche à droite: le Vieux Pont (XIéme), le Pont du (XVéme) et le Pont Jacques Gabriel (XVIIIéme) KMZ importé sur Google Earth