Citations de Kierkegaard
Ce n’est pas le chemin qui est difficile, mais c’est le difficile qui est le chemin
Les hommes essayent de se persuader que les objections au christianisme proviennent du doute. Les objections au christianisme proviennent plutôt de l’insubordination, de l’aversion contre l’obéissance, de la rébellion contre toute forme d’autorité. En conséquence, les hommes ont jusqu'ici brassé du vent en luttant contre les objections, parce qu’ils se sont battus intellectuellement avec le doute au lieu de se battre moralement contre la rébellion.
Tu nous as aimés le premier, toi notre Dieu, et nous te disons cela comme si tu ne nous avais aimés le premier qu’une seule fois, au commencement de toute histoire. Mais c’est sans cesse, tout au long des jours et de la vie, que tu nous aimes le premier. Quand nous nous éveillons le matin et que nous nous tournons vers toi, tu es le premier, lu nous aimes le premier. Même si c’est à la seconde même de mon réveil que je t’adresse ma prière, déjà tu me devances, déjà tu es le premier à m’aimer. Quand je me retire de mon travail et de mes activités quotidiennes pour penser à toi, déjà tu m’attends. Il en est toujours ainsi, et nous parlons comme des ingrats, comme si tu ne nous avais aimés le premier qu’une seule fois.
La raison d'être de la chrétienté (Église établie, institutionnelle telle que « l'Église danoise » par exemple) est de rendre si possible le christianisme impossible
Le feu prit un jour dans les coulisses d'un théâtre. Le bouffon vint en avertir le public. On crut à un mot plaisant et l'on applaudit - il répéta, les applaudissements redoublèrent. C'est ainsi, je pense, que le monde périra dans l’allégresse générale des gens spirituels persuadés qu’il s’agit d’une plaisanterie.
Il y a deux façons de se tromper :
L'une est de croire ce qui n'est pas,
L'autre de refuser de croire ce qui est
L'impossibilité de la communication directe est le secret de la souffrance du Christ
La chrétienté a aboli le christianisme sans trop le savoir
Les gens exigent la liberté d'expression pour compenser la liberté de pensée qu'ils préfèrent éviter
Dans le vrai rapport de la prière, ce n'est pas Dieu qui entend ce qu'on lui demande, mais celui qui prie, qui continue de prier jusqu'à être lui-même, celui qui entend ce que Dieu veut
Dans le possible, le croyant détient l'éternel et sûr antidote du désespoir - car Dieu peut tout à tout instant.
C'est là la santé de la foi, qui résout les contradictions.
On ne souffre qu'une fois - on vainc pour l'éternité
Je me suis rendu compte que j'avais de moins en moins de choses à dire, jusqu'au moment où, finalement, je me suis tu.
Dans le silence, j'ai découvert la voix de Dieu.
C’est par la foi qu’Abraham quitta le pays de ses pères et fut étranger en terre promise.
Il laissa une chose, sa raison terrestre, et en prit une autre, la foi - sinon, songeant à l’absurdité du voyage, il ne serait pas parti.
C’est par la foi qu’il fut un étranger en terre promise où rien ne lui rappelait ce qu’il aimait, tandis que la nouveauté de toutes choses mettait en son âme la tentation d’un douloureux regret.
Cependant, il était l’élu de Dieu, en qui l’Éternel avait sa complaisance !
Certes, s’il avait été un déshérité, banni de la grâce divine, il eût mieux compris cette situation qui semblait une raillerie sur lui et sur sa foi.
Il y eut aussi dans le monde celui qui vécut exilé de sa patrie bien-aimée.
Il n’est pas oublié, ni ses complaintes où, dans la mélancolie, il chercha et trouva ce qu’il avait perdu.
Abraham n’a pas laissé de lamentations.
Il est humain de se plaindre, humain de pleurer avec celui qui pleure, mais il est plus grand de croire, et plus bienfaisant de contempler le croyant.
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C’est par la foi qu’Abraham reçut la promesse que toutes les nations de la terre seraient bénies en sa postérité.
Le temps passait, la possibilité restait, Abraham croyait.
Le temps passa, l’espérance devint absurde.
Abraham crut.
On vit au monde celui qui eut une espérance.
Le temps passa, le soir fut à son déclin, et cet homme n’eut point la lâcheté de renier son espoir - aussi ne sera-t-il jamais oublié lui non plus.
Puis il connut la tristesse, et le chagrin, loin de le décevoir comme la vie, fit pour lui tout ce qu’il put et, dans ses douceurs, lui donna la possession de son espérance trompée.
Il est humain de connaître la tristesse, humain de partager la peine de l’affligé, mais il est plus grand de croire et plus réconfortant de contempler le croyant...
Mais Abraham crut et garda fermement la promesse à laquelle il aurait renoncé s’il avait chancelé...
... Abraham, père vénérable ! Quand tu revins chez toi de Morija, tu n’eus aucunement besoin d’un panégyrique pour te consoler d’une perte - car, n’est-ce pas, tu avais tout gagné, et gardé Isaac ?
Désormais, le Seigneur ne te le prit plus, et l’on te vit joyeux à table avec ton fils dans ta demeure, comme là-haut pour l’éternité.
Abraham, père vénérable !
Des milliers d’années se sont écoulées depuis ces jours, mais tu n’as pas besoin d’un admirateur attardé pour arracher par son amour ta mémoire aux puissances de l’oubli - car toute langue te rappelle - et pourtant, tu récompenses qui t’aime plus magnifiquement que personne - tu le rends là-haut bienheureux en ton sein, et tu captives ici-bas son regard et son coeur, par le prodige de ton action.
Abraham, père vénérable Second père du genre humain !
Toi qui le premier as éprouvé et manifesté cette prodigieuse passion qui dédaigne la lutte terrible contre la fureur des éléments et les forces de la création pour combattre avec Dieu, toi qui le premier as ressenti cette passion sublime, expression sacrée, humble et pure de la divine frénésie, toi qui as fait l’admiration de païens, pardonne à celui qui a voulu parler à ta louange, s’il s’est mal acquitté de sa tâche.
Il a parlé humblement, selon le désir de son coeur - il a parlé brièvement comme il convenait - mais il n’oubliera jamais qu’il t’a fallu cent ans pour recevoir contre toute attente le fils de la vieillesse, et que tu as dû tirer le couteau pour garder Isaac - il n’oubliera jamais qu’à cent trente ans, tu n’étais pas allé plus loin que la foi.
Søren KIERKEGAARD, Crainte et Tremblement.
Dans les plus petites choses comme dans les plus grandes, son amour était toujours prêt.
Il ne se concentra point en quelques moments solennels, comme si quelques heures déterminées de la vie quotidienne étaient placées en dehors des exigences de la Loi, il fut le même en tout instant, pas davantage lorsqu'il expira sur la croix qu’au moment où il accepta de venir au monde.
Ce fut le même amour qui dit "Marie a choisi la meilleure part" et qui punissait ou absolvait Pierre d’un regard - ce fut le même amour lorsqu’il accueillit ses disciples à leur retour joyeux, après qu’ils eurent fait des miracles en son nom - et le même amour lorsqu'il les trouva dormant.
Son amour ne réclama rien à un autre homme, ni son temps, ni sa force, ni son assistance, ni son service, ni son amour en retour.
Car ce que le Christ réclama de chacun c’était uniquement le Bien de l’intéressé lui-même et il ne l’exigea que pour l’amour de l’autre - aucun homme ne vécut avec lui qui s’aimât autant que le Christ l’aimait.
Dans son amour il n’existait pas d’accord négocié, de concessions, de coterie avec un autre homme qui pût rivaliser avec les exigences infinies de la Loi - le Christ en son amour ne réclama aucune exception pour lui, pas la moindre.
Son amour ne fit aucune différence.
Il ne fit même pas la plus tendre des différences, celle qui eût pu exister entre sa mère et le reste des hommes - car il dit, désignant ses disciples : "C’est ceux-ci qui sont ma mère".
Et inversement il n’aimait pas ses disciples sous prétexte qu’ils représentaient quelque chose de particulier - car son unique désir était que chacun pût devenir son disciple et il le désirait pour l’amour de chaque homme pris individuellement.
Son amour ne fit pas non plus de différence entre ses disciples - car son amour, à la fois divin et humain, était exactement le même à l’égard de tous les hommes - il voulait les racheter tous et il était le même à l’égard de tous ceux qui voulaient se laisser sauver.
Sa vie ne fut qu’amour.
Søren KIERKEGAARD, Vie et règne de l'Amour.