christelle
elle m’a offert quelques gestes de
gentillesse, que je puisse sortir de la maison ;
en arrivant à me faufiler par un autre chemin,
j’étais affranchie comme après une guerre ;
je me suis libérée, mais ce n’était pas vrai ;
j’y suis retournée, aux tréfonds de ma peine,
et ce qu’elle a fait, ce n’était que de renforcer
mes remords comme anciennement, et cela
restait tout aussi difficile.
roecken
quand le soleil se couche
il y a un endroit pas trop éloigné,
ourlé en odeurs d’ambre, en trois
sépulcres, un duvet immaculé
sous des vignes et des mûres.
pièce lacustre
deux hommes en costumes germaniques anciens
contemplaient la lumière agreste d’une soirée
qu’une brume avait enveloppée. aussitôt le lac
s’étalait en charpente muette.
l’un d’eux tenait les psaumes dans la main gauche,
le regard fixé sur un moignon flottant à la surface
au loin. le compagnon suivit des yeux un pêcheur
s’affairant et près duquel des poissons se
chevauchaient crapuleusement. puis, sous la nappe
d’eau, la souche fit apparaître l’otage aux aguets
porté par deux ou trois stylets qui sortirent ensuite
délicieusement de l’immense orifice
lorsque toute une sainteté en découlait
et montait au chant plaintif des aïeuls.
il y eut un moment paisible, un moment
semblable à la réconciliation qui était tellement
prenante que l’on ne discernait plus l’horizon
de l’eau. le torrent monta aux paroles des saints,
se déchaîna et avala lentement le pays.
© Editions Mémoire vivante