Savoyards de Drouot, 44 rue Louis David à Bagnolet

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C'est ici, en décembre 2009, au 44 rue Louis David à Bagnolet, que les policiers de l'Office Central de lutte contre le trafic de Biens Culturels ont découvert une vraie caverne d'Ali Baba d'objets volés à Drouot

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Les Savoyards

Ceux que l'on appelait les "Savoyards" y entreposaient, depuis de nombreuses années, le fruit de leurs rapines à Drouot, le célèbre hôtel des ventes parisien. L'affaire remonte à 2003, avec la disparition d'un tableau de Gustave Courbet, subtilisé par des commissionnaires de la salle des ventes, en charge de la manutention. Les "Savoyards" ou "Cols rouges" en ont le monopole depuis que Napoléon III le leur a attribué après 1860, en remerciement du rattachement de la Savoie à la France.  

Réunis en une société en nom collectif, en parallèle de leur travail normal, ils ciblent les successions de personnes âgées, sans héritier connu, et s'arrangent pour faire "disparaître" une partie des objets, avant que l'inventaire ne soit réalisé par les commissaires-priseurs. 

L'Enquête 

C'est alors qu'en février 2009 le tuyau d'un indic met les enquêteurs de l'OCBC sur la piste d'un commissionnaire de Drouot qui tente d'écouler le tableau. L'enquête financière et les écoutes téléphoniques mises en place révèlent l'existence d'une vraie filière d'écoulement d'objets volés au sein même de l'hôtel ou lors de déménagements. 

Une série de perquisitions est lancée et une descente a lieu le 1er décembre simultanément à Drouot et à Bagnolet. Les découvertes s'enchaînent alors: un Chagall, des diamants, des infos sur des patrimoines et des comptes bancaires bien trop fournis. Rue Louis David, dans l'entrepôt de 5.000 m2, une zone est aménagée depuis une dizaine d'années, avec des conteneurs en bois de 10m3, les uns à côté des autres, chaque Savoyard disposant d'un de ces boxes personnels. On en retrouvera la liste nominative dans le disque dur d'un PC. A l'ouverture c'est pas moins de 6.000 pièces qui sont découvertes. Dans la centaine de conteneurs, à raison de 2.5 tonnes de contenu moyen, on se trouve face à un trésor de 250 tonnes!  

L'Inventaire  

Il est rigoureux et méthodique. Allant du bibelot à l'oeuvre d'art, on y trouve parmi une foule d'autres: 

Un poignard inca, plusieurs lustres, un bouclier en fer avec anneau, un fossile de fougères, une toile représentant un couple champêtre sans signature, des peintures encadrées, dont une avec au dos l'inscription "le président de la République, avec ses remerciements et ses meilleurs voeux" signée de François Mitterrand et datée de 1988. Tout est rangé dans des caisses vertes ou rouges siglées UCHV (Union des commissionnaires de l'hôtel des ventes) avec, chaque fois, trois numéros inscrits au feutre. Sur l'une d'elles, par exemple: 39/18/26. Des chiffres correspondant aux numéros des cols rouges qui ont effectué le déménagement et récupéré ces "prises".

La scène va se répéter des heures durant. Les policiers, qui viennent désormais avec une machine à café, dressent un long et surprenant inventaire du contenu des boxes. L'opération met au jour une brocante géante faite de souvenirs personnels, des lettres, des photos de familles, des sabres, un fusil, des chaises longues... Du dérisoire, comme cette paire de pneus, à des manteaux en vison ou griffés Yves Saint Laurent en passant par un costume de scène du mime Marceau

Il y a beaucoup de dessins et peintures. Des croûtes sans valeur côtoient de précieuses estampes. Des ouvrages d'art se mêlent à des emprunts russes, des livres de la Pléiade, un exemplaire de Mein Kampf. Des médailles, de la porcelaine, des ménagères en argent, des tapis, du gros électroménager comme cette machine à laver, des films porno, des vins par caisses entières...

Les Condamnations

Des premières alertes avaient déjà eu lieu, avec deux commissionnaires condamnés pour vol en 1984 et en 2005. Mais rien ne pouvait ressembler au procès qui s'ouvre en septembre 2016, pour 41 cols rouges (sur 110) et 7 commissaires-priseurs, au motif d'association de malfaiteurs, vol ou complicité de vol en bande organisée, recel et blanchiment

Du fait de la prescription, seuls les vols postérieurs à septembre 2006 peuvent être poursuivis. 11 des 49 prévenus sont relaxés. Pour les autres, ce sont des peines allant jusqu'à 6 ans de prison, dont la 1/2 avec sursis,  et jusqu'à 60.000 €uros d'amende qui sont prononcées. Aujourd'hui, à Drouot, le monopole des Savoyards est dissous, aucun des anciens commissionnaire n'exerce plus et le déménagement des oeuvres d'arts, réparti entre plusieurs sociétés, fait maintenant l'objet d'appels d'offres.

voir ce récit en ligne sur MDL (mémoire des lieux de geneanet) >> geneanet.org/lieux/?id_marqueur=31330

voir la 1ère compilation des articles ayant pu mener à ce récit

>> sites.google.com/site/leslilasavant2/base/savoyards-de-drouot/savoyardscompil