Oui, aussi étonnant que cela puisse paraître, plusieurs élus issus de la majorité du maire ont quitté brusquement le conseil avant sa fin, au moment où je commençais à lire un texte. D'après le compte-rendu de ce conseil : "Madame Charvin, Madame Mory, Monsieur Henriot, Monsieur Da Silva et Monsieur Mellouk quittent la salle du Conseil municipal."
En effet, comme je l’ai déjà évoqué dans le troisième épisode, en fin de conseil, le maire recueille en bloc les questions ouvertes des élus minoritaires, puis y répond en bloc aussi, avant de clore le conseil (sans qu’aucun débat ne soit possible).
Lorsque j’ai commencé, dans ce cadre, à lire un texte dans lequel je me proposais d’informer le conseil, à date, sur les accusations dont j’ai fait l’objet (et qui ont servi de prétexte à mon éviction), au bout de quelques phrases, entendant du bruit, j’ai levé le nez de mes notes pour voir avec stupéfaction plusieurs élus de la majorité se lever et quitter la salle.
Je me suis interrompu quelques secondes puis ai repris ma lecture sans plus d’interruptions, ces élus ayant quitté l’hôtel de ville.
N’ayant reçu ni explications a posteriori, ni excuses de la part de ces conseillers pour ce comportement surprenant, voire grossier, j’en suis réduit aux conjectures.
Durant ce conseil, j’avais préparé trois textes (que je joins en annexe) :
- le premier concernait la protection fonctionnelle demandée au conseil par le maire (point 5) : celui-là, je n’ai pas pu le lire, le maire ne m’ayant pas fourni d’espace d’expression. En effet, comme la demande référait à la citation pour diffamation déposée par mes avocats à son encontre, le maire et moi devons sortir de la salle durant la délibération pour que nous ne puissions influencer le vote. Devinant que le maire ne me proposerait pas de m’exprimer avant la délibération (par exemple via une suspension de séance), j’avais préalablement envoyé ce texte à tous les membres du conseil. De fait, ma position a déjà dû mettre la majorité mal à l’aise, la disparité de traitement entre le maire et moi étant manifeste.
- le second texte évoquait le rapport de la Cour Régionale des Comptes (point 10). Si, dans son introduction au débat, le maire a affirmé que ce rapport était laudatif, j’ai pris le contre-pied de cette thèse et ai réaffirmé, dans la suite de mon analyse du budget 2025, comme la Cour l’écrit que « la situation financière de la commune (est) dégradée ». Mais j’ai aussi évoqué le fait que le maire avait levé un emprunt de 850 000€ en décembre 2024, à mon avis tout à fait inapproprié dans la situation actuelle. Ce faisant, j’ai évoqué les difficultés que j’avais eues à obtenir du maire des documents pourtant publics à tel point que j’ai dû aller jusqu’en justice pour pouvoir y avoir accès, concluant sur la nécessaire transparence démocratique. Cet envoi n’a sans doute pas contribué à rasséréner les conseillers majoritaires, puisque je mettais en évidence des pratiques indéfendables, à la fois par rapport à la loi, mais aussi à l’éthique.
- le troisième texte, lu lors des questions ouvertes, se proposait d’informer le conseil sur les évolutions judiciaires qui se sont fait jour à propos des accusations dont j’ai été l’objet de la part du maire. Peut-être leur départ anticipait-il sur ce qu’ils ne voulaient sans doute pas entendre. À savoir :
- que le maire avait été cité à comparaître devant le tribunal correctionnel d’Évry le 2 septembre ;
- que la police judiciaire m’avait innocenté de toutes les accusations portées par le maire.
Le fait que des élus majoritaires quittent une séance au moment où un élu minoritaire commence à parler pourra être perçu comme une tentative de bâillonner ou d’ignorer la voix d’un élu, ce qui va à l’encontre des fondements de la démocratie locale et du bon fonctionnement de l’assemblée municipale.
Une telle attitude pose un problème politique et déontologique majeur : elle nuit à la qualité des débats du conseil municipal. Elle interroge sur les représentations de la vie démocratique locale qui sont celles de la majorité : une chose est claire, ces conceptions sont orthogonales aux miennes.
Annexes
Premier texte, sur la protection fonctionnelle demandée par le maire
Courriel envoyé à tous les conseillers municipaux le 15 octobre 2025
Comme il est probable que je ne puisse ni m’exprimer, ni voter lors du point numéro 5 du conseil du 16 octobre, relatif à l’octroi de la protection fonctionnelle à un élu, j’envoie ce message à l’ensemble des membres du conseil.
Je rappelle que, lors du CM du 26 juin, le conseil municipal a voté sur une demande analogue me concernant. Un tiers des votants, dont plusieurs membres de la majorité, n’a pas voulu me refuser le bénéfice de la protection fonctionnelle, montrant bien un certain trouble de l’assemblée.
Si j’ai l’opportunité de participer à ce vote, je voterai pour le bénéfice de la protection fonctionnelle à M. Darmon, considérant qu’elle devrait être accordée à tout élu dans une telle situation, quelle qu’elle soit.
J’estime, en effet, qu’un élu devrait bénéficier de ce droit tant que l’affaire justifiant la demande n’est pas jugée ou clôturée.
En effet, l’engagement des élus et les risques liés à leur statut sont déjà très importants : la prise en charge préalable des frais d’avocats me semble d’autant plus légitime que la délibération précise bien que « Cette réparation se fait sans préjudice d’une éventuelle action récursoire ou en restitution de la commune en cas de faute personnelle. »
Mon cas l’illustre bien, puisque, dans la seule enquête indépendante, celle du procureur de la République, le classement sans suite par la police judiciaire du signalement opéré par le maire a démontré que ses accusations étaient infondées.
Par chance, et vous l’ignoriez, j’ai pu jusqu’ici assurer mes frais d’avocats, déjà plus de 10 000€ en six mois ; mais qu’en aurait-il été si je n’avais pas eu cette opportunité ? Je n’aurai alors pas pu du tout me défendre : est-ce votre conception de la justice ?
Je vous propose d’y réfléchir et, sans rancune vis à vis des conseillers qui m’ont refusé cette protection, j’invite l’assemblée à voter ce bénéfice au maire.
Didier MISSENARD
Deuxième texte, à propos du rapport de la CRC
Mesdames, Messieurs, bonsoir.
Même s’il s’est fait attendre, le maire n’ayant daigné nous le fournir que quasiment au terme légal minimum, j’attendais avec impatience d’avoir en main ce rapport.
En effet, lors du vote du budget primitif en avril, j’ai donné à entendre un argumentaire précis et chiffré qui a justifié mon vote contre ce budget, et à propos duquel je n’ai d’ailleurs jamais eu ni contradiction, ni réponses aux questions que je posais.
J’y pointais une trajectoire financière qui m’inquiète depuis plusieurs années, inquiétude que je n’avais tu que par respect de notre accord politique municipal.
J’étais donc impatient de savoir, de la part de professionnels, si je faisais fausse route ou non.
Ce rapport est précieux, car il donne à lire, en 90 pages, une vision externe, experte et exhaustive des finances de la commune : sa lecture est sans appel, et je ne vais détailler oralement ici, que quelques points édifiants, qui confortent et complètent mon analyse du mois d’avril.
Je mettrai ultérieurement en ligne sur mon site une étude intégrale de ce long document technique, qui donne à voir l’impéritie de la politique financière de ces dernières années.
Dans sa synthèse, la cour pointe (je cite) « une situation financière dégradée », du fait d’une augmentation des dépenses qui n’a pas voulu prendre en compte la baisse des recettes.
Elle indique que (je cite) « La commune mise essentiellement sur la rénovation énergétique de son parc bâti pour réduire les charges courantes. Toutefois, cette démarche n’en est qu’à ses débuts et les investissements afférents ainsi que les économies qui en sont attendues ne se sont pas encore concrétisées. » (fin de citation)
Or, on sait que les retombées de ce type de travaux, très onéreux, s’ils sont indéniablement vertueux, ne suffiront qu’à long terme à réduire nos charges de fluides et d’énergie. Les récentes dépenses, par exemple la rénovation du terrain synthétique de football ou la matérialisation de la piste cyclable de le rue de l’Yvette, m’apparaissent inconséquentes, car elles nous éloignent du rétablissement demandé par la cour, et m’inquiètent : le futur maire, quel qu’il soit, héritera le 22 mars 2026 d’une commune en très grande difficulté financière.
Si le niveau de service aux habitants a été développé au fil des années, cela s’est fait sans aucune vision de long terme : les recettes ne couvrent plus les coûts et les charges. La cour pointe, par exemple le fait que les charges de gestion de la commune sont de 20% plus élevées que celles des communes analogues, que les charges de personnel ont augmenté de 22%, et les effectifs de 10%.
Pour résumer, la cour regrette que (je cite) « il n’est (…) pas fait référence à une trajectoire pluriannuelle incluant les dépenses de fonctionnement courant, la masse salariale et les effectifs ou encore les investissements » (fin de citation). Cette demande de prospective long terme, je l’ai portée, comme d’autres conseillers d’ailleurs, depuis longtemps sans avoir été entendu alors que l’émergence des nouveaux quartiers du plateau de Saclay vont péjorer encore la trajectoire financière de la commune.
Au-delà de ce rapport, emblématique des dérives de la gestion actuelle, je veux pointer l’emprunt fait en décembre dernier à hauteur de 850 000 € à la Banque Postale, car il s’est fait à des conditions très défavorables : en effet, son taux actuariel est de 4,15% quand le taux actuariel moyen auxquelles les autres communes empruntent est de 3%. Ce constat montre sans doute la défiance que les banques ont désormais envers la commune du fait de sa situation financière critique.
Du fait de son emploi à la Poste, le maire m’avait demandé de signer cet engagement, ce que j’ai fait en confiance, sans en connaître les conditions : pour comprendre de quelle façon ce prêt a été négocié, j’ai demandé au maire, comme la loi m’en donne le droit, communication du dossier de négociation, mais je n’ai eu aucune réponse à ce jour. Devrais-je en passer par la CADA (la Commission d’Accès aux Documents Administratifs) puis par le tribunal administratif en référé, comme j’ai dû le faire pour obtenir l’historique des frais de bouche des maires et du directeur de cabinet ?
PS : j'ai, sans doute grâce à cette adresse, obtenu enfin le dossier dès le 20 octobre, et ai pu en rendre compte dans l'épisode 2.
Conseillères et conseillers majoritaires, assumez-vous le fait que le maire refuse de communiquer des documents notoirement publics ? Ce refus de transparence en dit long sur la conception de la démocratie qui est portée ici : c’est celle-là même qui éloigne nos concitoyens des urnes, ou les fait se tourner vers des partis illibéraux.
Durant 17 ans, comme conseiller municipal, puis conseiller délégué, puis maire-adjoint, enfin premier adjoint, j’ai fait partie d’une coalition acceptée : si j’ai toujours manifesté mes divergences d’avec certains aspects des politiques publiques portées, j’ai néanmoins pu faire avancer, même si cela a été souvent avec difficulté, plusieurs actions de portée écologique ou visant à la transparence ; j’ai aussi contribué à faire avancer des dossiers simplement techniques, apportant par mon implication un appui politique à l’administration : comme ceux de la communauté d’agglomération, les agents de la commune ne l’ont pas oublié et me le disent.
Ayant été utile à la collectivité, je ne regrette rien de mon action mais je n’ai pu obtenir que les décisions essentielles dans les domaines financiers, de l’urbanisme opérationnel, de la gestion des ressources humaines ne soient pas cantonnées aux cabinets des deux maires.
Ma conception, elle, est tout autre, et prône, en démocratie, une transparence absolue, une implication résolue de la population dans les choix des politiques publiques de la ville et, pour suivre les préconisations du rapport, un respect scrupuleux de la réglementation et des lois.
C’est là le chemin qui nous sortira des ornières dans lesquelles se sont embourbés nos maires, et tous les partis politiques, comme la crise actuelle de la représentation nationale le démontre à l’envi.
C’est ce chemin que je veux faire suivre à Orsay, et que je vous invite à emprunter à votre tour.
Troisième texte, relatif à l’évolution judiciaire des accusations qui m’ont été faites
Mesdames, Messieurs, je souhaite faire un point d’information au conseil, six mois après l’accusation qui a servi de prétexte au retrait de mes délégations, le situation ayant évolué, en bien, pour ce qui me concerne au moins.
Vous savez peut-être que deux enquêtes ont été ouverte à ce propos.
Évoquons d’abord l’enquête administrative du CIG (le Centre Interdépartemental de Gestion). Il faut savoir à son sujet, qu’elle a été largement à la main du maire, qui décide des témoignages et éléments fournis à l’inspecteur. Je n’ai réussi à obtenir, et seulement avec difficulté, en recourant à la CADA (la Commission d’Accès aux Documents Administratifs), qu’une version très caviardée du rapport de cette enquête.
Pour illustrer sa partialité, je donnerai un unique exemple, cocasse.
Parmi les éléments non caviardés, figurait une phrase isolée surprenante. Je cite : « Lors d'un échange de mail entre M. MISSENARD et un administré, l'administré écrit < la personne qui nous demande des compléments d'informations est désolée mais complétement débile et ne comprend rien à rien... >. »
J’ai mis longtemps à savoir d’où cette phrase émanait : en fait, elle figure dans un échange, que j’ai finalement retrouvé, et que j’ai eu avec une habitante dans le cadre de mon mandat d’adjoint à l’urbanisme, et où cette personne se plaignait d’un agent du service instructeur.
Le seul intérêt que j’imagine à la communication par le maire au CIG de cet échange, est, qu’isolée, la phrase laissait entendre que l’habitante affirmait que la personne débile, c’était moi ! Cette initiative me laisse pantois du fait de sa maladresse et de sa naïveté, mais elle illustre bien la partialité de ce document, et peut-être aussi la panique de ses initiateurs.
Un élément intéressant est néanmoins que l’inspecteur n’a pas porté de signalement au titre de l’article 40 du code pénal (qui oblige tout fonctionnaire à dénoncer au Procureur crimes et délits), comme il aurait dû y procéder impérativement s’il avait estimé qu’il y avait délit : de facto, cette enquête invalide l’accusation du maire me visant.
L’enquête conclut aussi de façon surprenante car aucunement argumentée : ainsi, j’ai quand même à nouveau sollicité la CADA pour avoir une version qui ne soit caviardée qu’à la hauteur de ce que cette instance demandait dans son avis, c’est à dire uniquement l’anonymisation et la non-identification des personnes citées.
L’autre enquête, bien plus probante, est celle qui a été sollicitée par le procureur d’Évry à la suite du signalement opéré par le maire au titre de l’article 40 précité.
Celle-là est réellement indépendante de l’administration communale, puisque menée par la police judiciaire : et nous avons vu récemment, dans une affaire au retentissement national, que nous pouvons tous être fiers de l’indépendance de notre justice.
J’ai été longuement auditionné en juin par le commissaire, chef du service local de police judiciaire : Il y a quelques semaines, il m’a avisé directement du fait que le procureur classerait sans suite le signalement, m’innocentant ainsi de l’accusation portée par le maire.
J’avoue en avoir été immensément soulagé, même si je m’attendais à ce dénouement : en effet, si, après la façon déloyale dont le maire m’avait attaqué en mars, j’ai pu me dire, alors stupéfié, que, si un maire, seul agent de l’État parmi nous, prenait une telle mesure à mon égard, c’est que j’avais dû mal agir. Fonctionnaire toute ma vie, c’est ce que j’ai été porté à penser un moment, sous le coup de la sidération. Or, quelques jours passant, avec l’aide de mes proches, il m’a fallu me rendre à l’évidence : je n’avais absolument rien, rien à me reprocher, ni sur le plan moral, ni a fortiori sur le plan pénal.
Il faut savoir que l’agente que le maire m’accuse d’avoir harcelée n’avait jamais eu le projet de procéder d’elle-même à un quelconque signalement de ce très bref épisode, situé dans un contexte privé, et datant de plus d’un an. En fait, le dimanche 16 mars, devait se tenir une réunion où la constitution d’une liste écologiste autonome pour les élections à venir était à l’ordre du jour. La supérieure hiérarchique directe de l’agente, qui avait eu vent de l’épisode et peut-être de la réunion, l’a convoquée au début de cette même semaine, ce qui a été le déclencheur de ce signalement, qui est donc tout, sauf spontané.
Le calendrier interroge évidemment quant aux raisons de cette convocation : ne serait-elle pas surtout politique ?
Sur le plan judiciaire, si je suis maintenant innocenté, cela ne sera peut-être pas le cas d’autres protagonistes de ce triste drame.
Vous avez entendu tout à l’heure que j’attaque M. Darmon en diffamation pour avoir porté sur le fil Facebook de la mairie (dont il est directeur de publication) une annonce qui a suscité la publication de deux articles de presse dans lesquels figurent côte à côte, et mon nom, et l’accusation de harcèlement sexuel : ils m’ont nui et ils nuiront longtemps, à moi et à ma famille, car ce sont ces articles qui viennent désormais, et pour longtemps, au prompt de mon nom sur tous les moteurs de recherche. De ce fait, je tente désormais de réparer les dégâts que l’initiative du maire a provoqué chez mes huit enfants.
Le maire répondra donc devant la justice : il a déjà été cité à comparaitre devant le tribunal correctionnel d’Évry le 2 septembre dernier, ce qui augure, je crois, assez mal du futur désormais incertain de la carrière politique d’un homme qui aura mis sur pied un dispositif aussi amoral que, in fine, contre-productif.
Je vais peut-être vous surprendre, mais je tiens néanmoins à remercier M. Darmon, car, s’il a hélas efficacement contribué à l’explosion de ma famille et de mon réseau d’amis, il m’a permis une expérience de vie certes cruelle mais instructive : je me faisais encore beaucoup d’illusions quant à la solidité de l’honnêteté intellectuelle de femmes et d’hommes que j’ai côtoyés, parfois depuis longtemps, et de leur propension à ne pas suivre le courant sans s’interroger.
J’aime apprendre aux autres : cela a été ma profession, durant 45 ans, et j’aime apprendre moi-même : là, j’ai appris, et j’ai beaucoup appris !
De cette épreuve, je sors finalement plus instruit, plus résilient, un peu moins naïf, mais toujours intimement persuadé que la vérité et la transparence doivent être le ciment de notre vie sociale.
C’est sur ces piliers que devront se fonder les futures politiques publiques d’Orsay.