Un acheteur ne peut pas prendre en compte une condamnation antérieure à 3 ans pour exclure un candidat à une procédure de passation d’un contrat de la commande publique
Un acheteur ne peut pas prendre en compte une condamnation antérieure à 3 ans pour exclure un candidat à une procédure de passation d’un contrat de la commande publique
Dans le cadre d’un marché public de travaux pour la construction d’un collège dans un commune des Bouches-du-Rhône, le Conseil départemental a exclu une société ayant candidaté sur un lot.
La raison de cette exclusion est un jugement de 2022 ayant condamné cette société pour avoir « entrepris d’influer indûment sur le processus décisionnel de l’acheteur » dans une autre procédure de passation.
Par une ordonnance du 7 septembre 2023, le Tribunal administratif de Marseille a annulé en référé cette décision sur recours de la société.
Le Conseil départemental s’est donc pourvu en cassation et le Conseil d’Etat a rendu un arrêt le 16 février 2024 « Département des Bouches-du-Rhône ».
Dans sa décision, le Conseil d’Etat mentionne l’alinéa 1er de l’article L. 2141-8 du code de la commande publique qui dispose que : « l’acheteur peut exclure de la procédure de passation d’un marché les personnes qui (…) ont entrepris d’influer indûment sur le processus décisionnel de l’acheteur ou d’obtenir des informations confidentielles susceptibles de leur donner un avantage indu lors de la procédure de passation du marché, ou ont fourni des informations trompeuses susceptibles d’avoir une influence déterminante sur les décisions d’exclusion, de sélection ou d’attribution ».
L’article L. 2141-11 du même code ajoute que l’opérateur économique concerné doit : « fournir des preuves qu’[il] a pris des mesures de nature à démontrer sa fiabilité et, le cas échéant, que sa participation à la procédure de passation du marché n’est pas susceptible de porter atteinte à l’égalité de traitement des candidats ».
Les dispositions régissant le code de la commande publique étant de source communautaire, le juge s’appuie sur la directive n° 2014/24/UE. Elle précise que : « Lorsque la durée de la période d’exclusion n’a pas été fixée par jugement définitif, elle ne peut dépasser […] trois ans ».
Le Conseil d’Etat interprète ces dispositions en ce sens : un opérateur économique ne peut pas être écarté d’une procédure de passation pour des faits ayant entraîné une condamnation antérieure à 3 ans.
En l’espèce, pour exclure la société, le départemental des Bouches-du-Rhône a retenu qu’un jugement du Tribunal correctionnel de Marseille de 2022 avait condamné l’associé majoritaire de la société pour des faits de corruption active lors procédures de passation de marchés publics commis entre le 1er janvier 2012 et le 26 mai 2016. Il était alors dirigeant de cette même société.
Pour le Conseil d’Etat, la date à retenir pour fixer le point de départ du délai de 3 ans n’était donc pas le 26 mai 2016 mais bien la date de condamnation, soit le 2 décembre 2022.
A ce titre, le département des Bouches-du-Rhône pouvait donc légalement exclure la société des candidats à la procédure de passation du marché de travaux pour la construction du collège.
Sources :
Arrêt rendu le 16 février 2024 par le Conseil d’Etat :
https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000049156234
Article L. 2141-8 du code de la commande publique :
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037703607
Article L. 2141-11 du Code de la commande publique :
https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037703613/
Directive de l’Union européenne n° 2014/24/UE :
https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:32014L0024