Distinguer

esprit et Esprit

Nous en arrivons à une question très importante. Il s’agit de déterminer si l’anthropologie ternaire de Jésus en Maria Valtorta se rapproche davantage de celle de saint Irénée ou de celle d’Origène.

Tout d'abord, il importe de rappeler qu'aucune de ces deux anthropologie ne remet en cause la présence en l'homme de l'Esprit divin. Comme saint Paul et toute la grande Tradition, l'anthropologie ternaire affirme l'habitation de l'Esprit saint dans le coeur de l'homme. "Votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous, que vous avez reçu de Dieu" (1 Cor 6, 19). En EMV 353, Jésus réaffirme cet doctrine en utilisant la très belle image de l'infusion:

"C'est l'Esprit de Dieu qui, infusé en vous, vous donne la Vie".

Comme nous l’avons vu, chez certains auteurs, comme saint Irénée, la partie la plus élevée de l’homme serait l’Esprit divin Lui-même. Chez d’autres auteurs, comme Origène e saint Ephrem, l’esprit est distinct de l’Esprit divin. Qu’en est-il dans l’œuvre de Maria Valtorta?

Le passage suivant semble fortement indiquer qu’il y ait distinction entre esprit et Esprit. L’usage d’une Majuscule pour l’Esprit divin est calquée sur l’édition italienne, et est présente dans les autres passages étudiés. Resterait à vérifier avec les manuscrits.

116.8 – Ce qui est engendré par l’Esprit est esprit,

et vit en revenant à l’Esprit qui l’a engendré,

après l’avoir élevé à l'âge parfait

après avoir élevé jusqu’à l’âge parfait

son propre esprit.

Le Royaume des Cieux ne sera habité que

par des êtres parvenus

à l’âge spirituel parfait de l’esprit.

L’esprit engendré de l’Esprit doit donc retourner à l’Esprit en s’élevant à l’âge parfait de l’esprit. C’est là toute la vocation de l’homme, dont nous parlerons plus loin.

En 17.2, il est question de l’état de l’homme avant la faute originelle, et de ce fait, il nous indique quel est l’intention divine en ce qui concerne l’homme en ses trois dimensions.

17.2 - Si vous saviez interroger votre âme, elle vous apprendrait la signification véritable, exacte, aussi vaste que la création, de ce mot “qu’il domine” : “Pour que l’homme domine sur tout. Sur ses trois niveaux :

le niveau inférieur, animal ;

le niveau intermédiaire, moral ;

et le niveau supérieur, spirituel.

Tous trois tendent à une seule fin : posséder Dieu.” Le posséder en le méritant par cette maîtrise absolue qui tient assujetties toutes les forces du “ moi ” pour les faire servir à ce seul but : mériter de posséder Dieu.

Les trois niveaux, et donc le niveau spirituel aussi, tendent à posséder Dieu. Puisque ce niveau supérieur et spirituel correspond à l’esprit, il faut comprendre que l’esprit n’est pas l’Esprit de Dieu.

Un peu plus loin, en 17.6, Jésus attribue à l’esprit la désobéissance à Dieu, ce qui n’aurait aucun sens si l’esprit était l’Esprit de Dieu.

17.6 – C'est par elle [Ève] que l'homme est devenu rebelle à Dieu et qu'il a connu la luxure et la mort. C'est par elle qu'il n'a plus su dominer ses trois règnes:

de l'esprit, parce qu'il a permis que l'esprit désobéisse à Dieu;

de la conduite morale, parce qu'il a permis que les passions le dominent;

de la chair, parce qu'il l'a rabaissée au niveau des lois instinctives des brutes.

"Le Serpent m'a séduite" dit Ève. "La femme m'a offert le fruit et j'en ai mangé" dit Adam. Et la triple concupiscence s’attache alors aux trois règnes de l'homme.

Tout ceci nous porte à croire que l’anthropologie ternaire de Jésus, dans l’œuvre de Maria Valtorta, correspond davantage à celle d’Origène qu’à celle de saint Irénée. Rappelons le schémas que nous en avons

Divinité/Majesté (Esprit de Dieu en l’homme)

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esprit de l’homme (ouverture ou fermeture à Dieu)

âme (psychisme)

corps physique

Ce schéma hiérarchisé à l’avantage de mettre en évidence ce qui est supérieur et inférieur en l’homme. Mais on pourrait aussi faire usage d’un schéma concentrique qui mettrait en évidence ce qui est plus caché et intérieur par rapport à ce qui est plus manifeste et extérieur.

Nous voyons ici comment saint Jean de la Croix et sainte Thérèse d’Avila se rejoignent, c’est-à-dire, comment ce qui est supérieur correspond à ce qu’il y a de plus intérieur, et comment ce qui est le plus inférieur correspond à ce qu’il y a de plus extérieur. Cette représentation concentrique de l’homme se rapproche beaucoup de l’architecture des temples.