Objectif
Utiliser un boitier de vote pour aider les élèves à prioriser le modèle à institutionnaliser grâce à son utilisation réussie dans la résolution répétée de questions conceptuelles. L’activité doit respecter une contrainte temporelle suffisante par cours (~15 min) pour garantir à l’enseignant de terminer le programme à enseigner le long de l’année.
La problématique
Comment favoriser l'utilisation du modèle à institutionnaliser (MàI) chez les élèves, en suivant les suggestions du modèle de prévalence, à travers l'utilisation d'un artefact ?
La présence de modèles naïfs dans le raisonnement des élèves est connue depuis longtemps. Elle est d'ailleurs continuellement au centre du débat scientifique. Les recherches récentes [1] ont mis en évidence que les modèles naïfs restent les premiers modèles de référence à travers lesquels on saisit une situation. Ils ne peuvent être éliminés. Ils peuvent toutefois coexister avec des modèles corrects, définis par l'enseignement comme des modèles à institutionnaliser (MàI).
Un modèle d'enseignement basé sur le modèle de prévalence s'avère plus efficace qu'un enseignement classique [1]. Dans le modèle de prévalence, la conception naïve ne peut pas être évincée. Elle est plutôt déclassée parce qu'elle conduit à une solution qui ne marche pas pour la situation proposée. Il ne s'agit donc pas de remplacer le modèle, mais de faire en sorte que les élèves, après avoir connu le MàI (scientifiquement correct), repèrent la nécessité d'utiliser le MàI et puissent le privilégier au modèle naïf. Potvin et al. identifient la clé pour la réussite dans la résolution répétée avec succès en utilisant le MàI, des situations contre-intuitives à résoudre le moyen pour renforcer la prévalence conceptuelle.
Des recherches sur l'apprentissage coopératif [2] ont souligné l'importance fondamentale de l'argumentation afin d’augmenter l'efficacité des apprentissages. Si l'élève doit argumenter pour expliquer son point de vue ou sa compréhension de la problématique ou s'il est déstabilisé par les idées/solutions différentes des paires, la réorganisation cognitive des acquis crée des nouvelles associations et intégratiosns : l'apprentissage est donc augmenté. La puissance de l'argumentation peut être aussi utilisée pour aider les élèves à s'approprier le modèle désiré.
L’ensemble des travaux présentés par Darnon et al. [3] montrent que les situations de conflit cognitif peuvent entraîner des progrès. Cette utilisation du conflit n'est pas en contraste avec l'enseignement basé sur le modèle de prévalence présenté par Potvin et al : l'élève se confronte à la situation de conflit après avoir reçu l'enseignement du MàI. En outre, ces conflits peuvent se présenter pendant les échanges entre les élèves, où chacun a l'occasion de se confronter avec des idées ou solutions différentes. Toutefois, Darnon et al. [3] soulignent également le fait que "plusieurs travaux montrent que si le conflit s’insère dans une situation compétitive il perd ses bénéfices". Dans cette optique, le choix d’un artefact qui propose un boitier de vote anonyme et la forte contrainte temporelle qui s’impose sur l’activité nous permet d’éviter toute dérive compétitive.
Conjectures à tester
- L'introduction de situations contre-intuitives permet aux élèves d'appliquer avec succès le MàI où le modèle naïf échoue.
- Les élèves utiliseront plus facilement un modèle mental approprié s'ils ont la possibilité de l'exercer avec succès d'une manière répétitive.
- Les apprentissage des élèves qui s'engagent dans l'argumentation et l’explication de leurs raisonnements sont plus efficaces grâce à un investissement cognitif plus élevé ainsi qu'une reconstruction et une réorganisation cognitive.
- Évoquer l'existence d'autres modèles (phénomène de décentration cognitive) aide les élèves à relativiser l'importance de leur modèle.
Figure 1 : CJ-Map à la base de ce travail.
Artefact choisi
En résumé : L'outil numérique Plickers qui est un boîtier de vote. Cet outil nous permet de poser des questions à choix multiples (QCM). Ce format est adapté à des questions de type conceptuel. Selon Mazur [4], ce type de questions teste mieux la compréhension des élèves que la résolution d'exercices numériques. Plickers est particulièrement adapté, puisqu'il permet à l'enseignant de décider du temps alloué aux élèves pour la résolution des questions. De plus, cet outil diminue l'envie des élèves de donner une réponse trop à l'avance pour donner une place et de l'importance à la réflexion.
L'utilité de l'artefact est multiple :
Il permet de donner un feedback individualisé et immédiat à chaque élève, ce qui ne serait évidemment possible sans l'utilisation de l'artefact. Ce qui nous intéresse est de favoriser le recours au MàI et la motivation derrière la réponse donnée. Le fait que les questions soient posées sous forme de QCM permet aux élèves de s'auto-évaluer selon une dichotomie vrai/faux, plus facile à saisir.
Puisque chaque élève doit donner une réponse, l'artefact crée de active learning, ce qui ne serait pas forcement le cas pour un cours n'utilisant pas des systèmes à réponse individuelle.
Le modèle utilisé est soit validé soit invalidé, sans que les différentes formulations des motivations entrent en ligne de compte dans la discussion. Cela a l'avantage, pour l'enseignant-e, de limiter les nombres de modèles qui apparaissent lors de la discussion. En particulier, cela lui permet de désigner un seul modèle comme correct.
L'utilisation de ce type d'artefact technologique permet, finalement, d'obtenir instantanément des résultats des réponses (Figure 1), triés par élève et par question, et de les sauvegarder pour une analyse successive.
D'autres artefacts technologiques, qui permettent de poser des questions sous forme de QCM (et en effet on pourrait d'ailleurs le faire même sans utiliser d'artefact technologique), auraient pu être choisis. En particulier, quatre éléments nous ont fait opter pour Plickers :
D'abord, cette application ne demande pas aux élèves d'être connecté-e-s au réseau et ne requiert pas l'utilisation de portables. Cette seconde condition est généralement dictée dans les établissements du C.O.
Ensuite, Plickers rend particulièrement difficile pour les élèves d'intercepter les réponses des autres. Ils/Elles peuvent se positionner par rapport aux questions sans se faire a priori influencer par le reste de la classe.
Troisièmement, Plickers n'est pas pensé premièrement comme un jeu qu'il faut gagner (à différence, par exemple, de Kahoot ou Socrative). Nous avons déjà cité, plus haut, comme un des prérequis nécessaire pour l'utilité du conflit cognitif réside dans un climat de classe non compétitif, faute de quoi ce sera une régulation relationnelle et non épistémique à guider les réponses des élèves.
Finalement, Plickers permet à l'enseignant-e de gérer le temps de réponse, car il/elle peut varier le moment où la scansion des réponses est faite. Cela permet donc de faire un ajustement fine, en situation, du temps dédié à la résolution, selon les signaux envoyés par les élèves. Et puisque les élèves non seulement n'ont aucun avantage à donner la réponse en avance, mais ne peuvent pas le faire, iels doivent se préoccuper uniquement de donner la bonne réponse.
Figure 2 : Exemple d'un tableau résumé rendu par l'artefact Plickers
Implémentation pédagogique
En résumé : Deux questions conceptuelles sont données par semaine sous forme de QCM via Plickers. Ce procédé dure quatre semaines avec de nouvelles questions chaque semaine.
Structure répartie en 15 minutes :
Question 1 - Résolution individuelle : 3’ + Discussion en commun : 8’ + Question 2 - Résolution individuelle 3’ + Discussion en commun 2'
Pendant un mois, de façon hebdomadaire, nous avons utilisé l'artefact Plickers pour poser aux élèves des questions de type QCM concernant un principe ou un MàI relatif au cours de physique. Les questions sont en lien immédiat avec ce qui a été enseigné avant la passation des questions. L'objectif est en effet de confirmer ce modèle par un exercice permettant à l'élève de se confronter avec des situations qui nécessitent de l'application du MàI. L'évaluation est ainsi formative, mais ce n'est pas en ce moment que les élèves découvrent le MàI.
Le choix du sujet des questions sera fait selon la classe d'enseignement et la partie du programme traitée entre janvier et mars : chaque enseignant-e s'occupera, pour des raisons d'alignement curriculaire, de créer ses propres questions, possiblement différentes de celles des autres. Malgré cela, ce qui nous intéresse est d'appliquer un même protocole, que nous estimons être efficace pour atteindre les objectifs que nous nous fixons.
Avant l'activité, des feuilles sont distribuées par l'enseignant-e.
Déroulement de l'activité :
~ 3 min. : les élèves répondent à la première question affichée par l'enseignant-e au tableau. Ils/Elles marquent leur réponse et la motivent, en écrivant sur la feuille. À la fin de cette courte phase, l'enseignant-e demande aux élèves d'afficher leur QR code (unique à chacun-e) avec leur réponse choisie ;
~ 8 min. : l'enseignant-e projette les résultats à l'écran. Chaque élève a un feedback immédiat sur sa réponse. L'enseignant-e initie la discussion en demandant à un-e élève qui a donné la bonne réponse de la motiver et d'expliciter le modèle/principe dont il/elle s'est servi-e. Selon la qualité de l'intervention de l'élève, l'enseignant-e peut institutionnaliser rapidement, en mettant en évidence les éléments clés du modèle. Ensuite, l'enseignant-e demande à des élèves qui ont donné la mauvaise réponse d'expliciter le modèle/principe qu'ils/elles ont utilisé. Il évoque avec la classe des raisons de l'échec de ce modèle. Pendant ce temps, les élèves peuvent prendre des notes ou corriger leur réponse. Cette étape n'est pas obligatoire. Le nombre de faux modèles discutés pendant cette phase varie selon le temps à disposition. L'enseignant-e peut noter ces différents modèles au tableau afin de rendre plus explicite la présence simultanée de plusieurs modèles aux yeux des élèves.
~ 3 min. : les élèves répondent à la seconde question comme exemple affichée par l'enseignant-e à l'écran. Cette phase se déroule selon les mêmes modalités qu'avant ;
~ 2 min. : l'enseignant-e projette les résultats au tableau et explique la bonne réponse, en faisant référence explicite aux modèles précédents.
Fin de l'activité : le cours reprend ''normalement''.
Deux commentaires sur le timing :
- Le temps alloué pour la correction de la première question (8 minutes) peut paraître très court. Remarquons pourtant qu'il ne s'agit pas en ce moment d'expliquer le modèle ou le principe ex novo. Les élèves sont censé-e-s déjà avoir au moins compris la théorie sous-jacente. Ce qui nous intéresse ici est d'aider les élèves à renforcer le recours au MàI en brisant l'automatisme qui les amène à utiliser le modèle naïf. Il s'agit d'un travail voué surtout à expliciter les modèles et à montrer qu'un seul d'entre eux est payant en termes de réponse correcte ;
- Le temps dédié à la correction de la deuxième question (2 minutes) est extrêmement court : en effet, les questions sont construites pour faire référence au même modèle. Du moment que nous attendons de la part des élèves une reprise des éléments clés de résolution de la première question, nous nous attendons à ce qu'un retour rapide de la part de l'enseignant-e sur les modèles issus de la question précédente soit suffisant pour que les élèves comprennent les raisons de leurs erreurs.
L'étape de construction des questions est cruciale. Elle nécessite une analyse a priori très fine. Afin de démasquer la présence de plusieurs modèles et affirmer la primauté d'un seul d'entre eux par sa capacité à permettre de trouver la réponse correcte, il est nécessaire que les quatre alternatives de réponse à une question satisfassent les conditions suivantes :
- Seule l'utilisation du MàI entraîne le choix de la réponse correcte. Il faut donc veiller à éviter des pièges qui conduiraient à une mauvaise réponse même avec l'utilisation du MàI ;
- L'utilisation de tout autre modèle que le MàI conduit à donner une réponse fausse.
Ceci est fondamental. Si un-e élève réussissait à donner la bonne réponse en utilisant un mauvais modèle, il/elle ne verrait pas l'intérêt à se donner de la peine pour changer sa façon d’appréhender le sujet. Vice-versa, un-e élève qui utilise le MàI et trouve une réponse fausse pourrait remettre en question ce modèle !
Les Figures 3 et 4 montrent deux exemples de paires de questions.
Figure 3 : Exemple de question 1 (gauche) et de question 2 (droite) pour le cours d'électricité au cycle d'orientation.
Figure 4 : Exemple de question 1 (gauche) et de question 2 (droite) pour le cours de Physique OS de première année du collège.
Après la première question, l'enseignant-e peut également recueillir, de façon plus ou moins informelle, les réactions des élèves. Il est utile, par exemple, d'observer l'incrédulité qui suit la correction ainsi que ce que peuvent dire les élèves. Cela permet à l'enseignant-e d'apporter une observable supplémentaire à l'ensemble de la séquence.
Nous insistons sur la présence d'une phase de discussion/réflexion/correction entre les deux questions. Plusieurs raisons nous poussent à cela. Premièrement, si on posait les deux questions de suite, on risquerait que les élèves appliquent le même modèle (faux ou correct) dans les deux situations. La valeur ajoutée de la deuxième question n'existerait pas. Autant dans ce cas ne donner qu'une seule question. Deuxièmement, le temps et l'espace dédiés à la correction sont nécessaires pour faire émerger explicitement la présence de plusieurs modèles. Au moment de répondre à la deuxième question, on s'attend à ce que les élèves conscientisent le choix du modèle, qu'ils/elles ne retombent pas dans une application automatique du modèle naïf. Finalement, et pour faire en sorte que le choix du modèle soit sensé et opportun, on peut mettre en évidence les raisons qui motivent la réussite d'un modèle et l'échec de l'autre pendant la phase de discussion. Ainsi les élèves, au moment de répondre, pourront suivre ces mêmes raisonnements pour choisir le modèle à appliquer. Cela renforcerait leur capacité à faire prévaloir le MàI, à travers la répétition (non automatique, demandant un engagement intellectuel). Cette répétition serait alors fructueuse et déclencherait un mécanisme de renforcement du MàI.
Effets attendus
La répétition, couronnée de succès, et l'explicitation du choix du MàI devraient aider les élèves à mieux acquérir le modèle interrogé lors de chaque question. Elles permettent d'utiliser cet MàI à bon escient pour trouver la réponse correcte. Nous nous attendons à une amélioration du taux de réponses correctes sur deux niveaux :
- entre la première et la deuxième question : la phase de correction entre les deux devrait permettre aux élèves de conscientiser leur choix de modèle et donc de l'améliorer ;
- au fil des semaines : une utilisation du modèle insérée dans la durée devrait faciliter le recours à ce modèle (même si le cadre d'application changera à chaque cours).
Néanmoins, les modèles naïfs sont tenaces [1]. Nous ne nous attendons pas à une disparition complète et définitive des fausses réponses dues à l'utilisation de ces modèles. Pour la même raison, il sera possible que, même après une ou plusieurs utilisations du MàI de la part d'un-e élève, il/elle recommence à utiliser le modèle naïf privilégié auparavant. Nous nous attendons - du moins nous l'espérons - à observer une augmentation systématique, inscrite dans la durée, au niveau de la classe comme au niveau de chaque élève, du nombre de réponses correctes. Qualitativement, nous aimerions remarquer qu'il soit généralement plus facile pour les élèves de recourir au MàI, de manière consciente et explicite.
Lors de la mise en œuvre en classe, chaque enseignant-e créera des questions centrées autour du contenu du programme traité. Nous pouvons donc nous attendre à des variations de la persistance des modèles naïfs selon les classes et les sujets traités. Si des différences à ce niveau sont possibles, dans tous les cas nous nous attendons à observer une amélioration dans le taux de réponses correctes.
Observables
L'observable principale de notre travail est le pourcentage des réponses correctes et son évolution au fil du temps.
Ceci se décline en deux dimensions principales :
- Progression individuelle/de la classe ;
- Progression intra-cours (entre première et deuxième question) / inter-cours (entre premières ou deuxièmes questions des semaines successives).
Pendant la correction des questions et l'explicitation des modèles, les discussions entre élèves, et avec l'enseignant-e, pourront faire l'objet d'une analyse qualitative (facilité des élèves à identifier différents modèles, capacité à discriminer les bons et mauvais modèles, aisance dans la description et l'explicitation des modèles).
Nous pouvons ainsi observer une éventuelle amélioration de la cohérence des raisonnements des élèves dans leur argumentation des réponses, sans pouvoir néanmoins le mesurer quantitativement.
Résultats
Utilisation au cycle d’orientation
En résumé :
Taux de réussite : tendance à l’amélioration sur les semaines, mais taux de réussite de la deuxième question plus bas que celui de la première ;
Amélioration dans l’argumentation et dans l’utilisation du langage disciplinaire ;
Amélioration dans la posture et dans la participation en classe. Désir de plus de questions.
L’artefact a été utilisé pour trois classes du Cycle d’Orientation du Renard. Il s’agissait d'une demi-classe mixte 11ème (9 élèves LS et 2 élèves LC) d'une demi-classe 11ème LS (13 élèves) et d'une demi-classe 10ème LS (13 élèves). Au niveau de l'analyse statistique, les 11èmes et la 10ème représentent des populations différentes : les élèves de 11ème représentent une population plus hétérogène à cause de l’obligation du cours de physique. Pour les élèves de 10ème année, les cours font partie des options à choix. La population est donc composée d'élèves intéressés par les sciences et qui ne présentent pas de grosses difficultés face aux enjeux de la discipline. Ainsi, les résultats des deux années de scolarité présentent des différences sensibles, de même que la différence des programmes d'études.
Résultats
Avec les deux classes de 11ème, l’artefact a été utilisé lors de la séquence d'apprentissage de la masse volumique. Les questions concernaient les masses volumiques, masses et volumes d’objets de différentes substances, ainsi que sur le critère de flottaison appliquée à des objets solides dans différents milieux liquides. Les questions sont basées sur des questions conceptuelles proposées soit dans le site middleschoolchemistry de l'American Chemical Society [5], soit pendant le cours Atelier de physique A à l'IUFE de Genève [6].
Les résultats des deux groupes de 11ème sont présentés aussi sous forme de graphiques dans la Figure 5.
Figure 5 : Taux de réussite en fonction du nombre de passages hebdomadaires pour les élèves de 11ème, groupe A (gauche) et groupe B (droite).
Avec la classe de 10ème, l’artefact a été utilisé durant la séquence d'apprentissage de l'électricité. Les questions concernaient la condition de fonctionnement d'une lampe et sont basées sur les questions du test DIRECT [7]. Les taux de réussite des élèves de la classe de 10ème sont présentés dans la Figure 6.
Figure 6 : Taux de réussite en fonction du nombre de passages pour la 10ème
Les taux de réussite de la première question sont pour la plupart du temps plus élevés que ceux de la deuxième question. Cela peut être dû à deux facteurs : la difficulté additionnelle ajoutée dans la deuxième question conceptuelle et la tendance des élèves à appliquer, sans réflexion adéquate, le raisonnement de la première question. Les taux de réussite des classes de 11èmes augmentent avec l’utilisation de l’artefact, indiquant une meilleure maîtrise du MàI par les élèves. Une déformation de l’allure du graphique peut être présente : les premiers taux pourraient être baissés à cause de la non-familiarité des élèves avec l’artefact. Pour la classe de 10ème, à l'exclusion du premier passage, les taux de réussite pour la deuxième question augment avec l'exercice. Par contre, le taux de la première question diminue légèrement et présente une chute lors du troisième passage qui correspond à la rentrée après les vacances de février.
La Figure 7 montre l’évolution du taux global de réussite des deux groupes de 11ème en fonction du nombre de passages. Une évolution positive est clairement visible en indiquant une meilleure maîtrise des notions par le groupe de classe. De plus, aussi dans cette analyse, une distorsion vers le bas des taux des premiers passages peut être présente à cause de la nouveauté de l’artefact.
Figure 7 : Taux global de réussite en fonction du nombre de passages pour les deux groupes de 11èmes.
Un comportement différent est présent avec la classe de 10ème, en Figure 8. Le taux de réussite décroît initialement avec comme minimum la période de rentrée des vacances. Il remonte ensuite.
Figure 8 : Taux global de réussite en fonction du nombre de passages pour la classe de 10ème.
Deux questions par passages ne permettent pas une analyse quantitative de l’évolution de chaque élève. Quelques informations qualitatives peuvent être ajoutées grâce aux observations de l’enseignante. Globalement les élèves semblent avoir senti le bénéfice de l’utilisation de l’artefact. Les élèves paraissent plus sûrs dans leurs raisonnements et l’exercice de l’argumentation a favorisé leur maîtrise du langage propre à la discipline. L’utilisation de l’artefact et le retour individuel étaient attendus avec impatience par les élèves, en particulier par les élèves d’un niveau scolaire plus faible. Ces derniers ont protesté en demandant plus de questions par passage. En outre, l'utilisation de l'artefact a généré un clair changement de posture d'un élève en échec, qui avait initialement montré un refus à la mise au travail.
Utilisation au collège
En résumé :
Le débat semble permettre l'émergence du MàI.
Élèves plus à l’aise avec le MàI pendant le reste du cours
Élèves OS : l'émergence du MàI se maintient dans le court terme.
Difference entre DF et OS :
Élèves DF : pas d'amélioration dans le taux de réussite entre Q1 et Q2
Élèves DF n'ont pas eu assez de temps pour s'approprier du MàI
Élèves DF n'ont pas apprécié que l’enseignant a modifié la façon de donner le cours.
Intérêt moindre en semaine 4 (divertissement temporaire)
Nous avons réalisé des questions conceptuelles sur la dynamique, visant en particulier des applications de la loi de Newton et la fausse conception ''adhérence force-vitesse''. Ces questions ont occasionnellement été inspirées et adaptées de Mazur [4]. Les classes dans lesquelles la passation a été effectuée sont une 1ère DF du collège Calvin, une 2ème DF du collège Sismondi et une 1ère OS de l'école Moser. La classe de Calvin a traité le sujet de manière moins poussée que les deux autres classes, en fonction du degré et de l'affectation.
Voici les résultats pour le taux de réussite des trois classes :
Classe de 1ère DF :
Classe de 2ème DF :
Classe de 1ère OS :
Première constat pour la 2DF et 1OS : la dernière question est apparue trop difficile pour les deux classes. Nous ne la considérerons donc pas dans notre analyse.
Pour la classe 1DF, la tendance est positive pour les taux de réussite entre Q1 et Q2. Toutefois, il n'y a pas eu d'amélioration significative au fur et à mesure des semaines. Une explication possible est que le choix de la difficulté des questions reste très variable. Alors que le cours avance, il n'est pas toujours facile de développer des questions de niveau constant. Une autre explication du niveau stable au fil des semaines serait que les élèves ont montré de moins en moins d'intérêt à l'utilisation de cet artefact. D'ailleurs, la dernière semaine illustre un moins bon résultat pour Q2 que pour Q1, bien qu'il ne soit pas significatif. Ceci peut aussi s'expliquer par le fait que les élèves ont montré un comportement de doute. Il est possible qu'iels s'attendaient à un piège, alors qu'il fallait utiliser le même MàI.
Pour la classe 2DF, nous ne remarquons pas d'évolution dans les taux de réussite que nos conjectures nous permettaient d'espérer. Cela est probablement dû au fait que ces élèves n'ont pas eu assez de temps pour s'approprier le modèle et l'utiliser correctement. Il s'agissait aussi de la première fois lors de laquelle les élèves étaient confronté-e-s à des questions conceptuelles. Les compétences demandées relèvent en effet plutôt de l'application de formules et du calcul de manière générale. Les élèves semblaient en tout cas peu intéressé-e-s par ce type de questions. Iels manifestaient cela en questionnant l'enseignant : ''on peut les faire en devoirs ?'' ''quelle formule il faut utiliser'' ''ça sera dans l'évaluation ?''.
Pour la classe 1OS, l'enseignant a fait répondre chaque question deux fois de suite, avant et après le débat des élèves (mais sans avoir fourni de validation pendant ce temps). Les explications ont été données uniquement entre Q1 et Q2, mais après avoir fait répondre la deuxième fois à Q1. Les données suggèrent les effets suivants :
L'utilisation du MàI semble être de plus en plus difficile dans les questions. Le taux de réussite pour Q1 premier essai diminue chaque semaine ;
Le débat en début de cours semble permettre l'émergence et donc la disponibilité cognitive du MàI. Les élèves peuvent alors y adhérer, ce qui semble être la raison de l'amélioration lors du deuxième essai Q1 ;
Cette disponibilité semble se maintenir dans le court terme, car les résultats de Q2 sont très élevés et constants pour le premier comme pour le deuxième essai.
Discussion et conclusions
Cycle d'Orientation :
En résumé :
L’utilisation de l’artefact a été apprécié par les élèves.
Plusieurs indices suggèrent que l’aspect ludique n’est pas la seule chose retenue
Tendance positive du taux de réussite :
application avec succès le MàI où le modèle naïf échouait (CJ1)
maîtrise du modèle à institutionnaliser améliorée (CJ2)
Phase de mise en commun et débat n’a pas été exploité à fond :
Impossibilité d’évaluer si l’amélioration dépend de la CJ3
Meilleure maîtrise du langage scientifique et capacité d’argumentation.
Persistance des connaissances : testées dans une épreuve un mois après.
Les données à disposition n'ont pas permis une analyse statistiquement solide et un résultat statistiquement significatif. En général, nous pouvons observer une tendance positive du taux de réussite des classes en fonction du nombre de passages, en particulier pour la deuxième question de la série dans les classes plus âgées. Cette tendance indique que la maîtrise du modèle à institutionnaliser s'est améliorée grâce à l'activité et que la confrontation avec des situations contre-intuitives a permis aux élèves d'appliquer avec succès le MàI où le modèle naïf échouait. En outre, elle indique aussi que les élèves utilisent plus facilement le MàI s'ils ont la possibilité de l'exercer avec succès d'une manière répétitive.
Au cycle d'orientation, la phase d'argumentation n'a pas été entièrement exploitée, certains élèves avaient des difficultés à expliquer leur raisonnement à la classe entière. Nous ne savons pas si les progrès observés sont attribuables à la troisième et à la quatrième conjecture qui lie les apprentissages à l'argumentation. Une possible amélioration de l'utilisation de l'artefact pour tester cette conjecture est proposée plus en bas.
Néanmoins, l’enseignante a observé que les élèves, surtout ceux d'un niveau scolaire moyen et fort, ont gagné en maîtrise du langage scientifique et en capacité d’argumentation. Une bonne progression et amélioration de l’attitude vers la discipline a été observé pour les élèves d’un niveau scolaire plus faible ou en posture de refus. L'utilisation de l'artefact a été, donc, en général positive.
Les élèves ont demandé plus de questions par passage. Cela pourrait être lié à l'aspect ludique de l'artefact, mais des indices nous suggèrent que l'intérêt des élèves ne se réduit pas uniquement à cet aspect. Certains élèves attendaient avec impatience la feuille avec les questions, les réponses correctes et la performance de l'élève que l'enseignante distribuait la leçon suivante. Une distribution au cours de la même leçon aurait été plus efficace, mais malheureusement l'organisation du cours ne permettait pas à l'enseignante de l'imprimer et la distribuer immédiatement après l'activité. En outre, l'enseignante a pu remarquer l'effort supplémentaire fourni par certains élèves plus faibles pour donner la réponse, ce qui reflète leur implication dans l'activité. Une utilisation à plus long terme ou avec plus de questions par passage pourrait donc être envisageable, étant donné l'amélioration de la maîtrise du MàI, du langage disciplinaire et de l'habilité d'argumentation.
Comme dernier argument à support d'une utilisation plus intense, les élèves de 10ème ont tous correctement répondu à une question conceptuelle pendant une épreuve passée un mois après la fin de cette étude.
Collège :
En résumé :
Différences entre DF et OS (effet Pygmalion) : les DF n’arrivent pas à utiliser le MàI car ils/elles ne l'ont pas compris. Il s'agit plus d'un problème de ZDP que du choix du modèle correct ;
Dans toutes les classes, amélioration de la capacité à argumenter et à utiliser un langage correct ;
L'évocation du MàI rend plus facile son utilisation correcte : les résultats confirment cette conjecture ;
Le désalignement curriculaire de cette activité amène certains élèves à se plaindre de l’activité. Par exemple, ces questions ne sont pas représentatives des exercices dans les évaluations.
Tout comme pour le Cycle d'Orientation, les données ne peuvent pas être considérées comme statistiquement significatives. Toutefois, une tendance semble émerger, au moins pour la classe d'OS, confirmant qu'une phase de débat entre élèves permet l'émergence du MàI et que celui-ci semble s'imposer par des arguments de contenu et non d'autorité. Pour les classes de DF, au delà d'un travail supplémentaire sur le modèle, il serait souhaitable que l'enseignant réussisse à donner du sens à ce travail de type conceptuel vis-à-vis des élèves. Toutefois, il semble donner des résultats sur la tenue de classe et d'une sérénité lors des autres activités de la séance. Cela reste donc un aspect positif pour créer une atmosphère agréable lors de l'apprentissage.
Il est aussi possible (et souhaitable !) d'analyser nos conjectures à la lumière de ces résultats et des observations faites en classe par les enseignants :
Les conjectures 1 et 2 ne semblent pas, à première vue, être confirmées par les résultats des classes de DF, car on ne voit presque pas d'évolution positive pour l'utilisation du MàI. Le problème est selon nous ailleurs : les élèves ne semblent tout simplement pas s'être approprié le modèle. Les taux de réponses restent (presque) toujours en dessous du seuil du 50% et les observations en classe par l'enseignant, ainsi que les retours des élèves, semblent suggérer que les difficultés des élèves naissent non pas de la difficulté d'utilisation du modèle, mais bien en amont, au niveau de sa compréhension et de son appropriation. Le conflit cognitif qui devrait s'engager ne semble pas être suffisamment profitable aux élèves, car il ne se situe pas dans leur zone proximale de développement.
La conjecture 3, pour laquelle les taux de réponses ne constituent pas un indicateur suffisant, confirme néanmoins notre avis par les observations faites en classe. Pendant les activités et les cours suivants traitant les mêmes sujets, nous avons pu remarquer une nette amélioration du niveau des débats entre élèves et de la rigueur du langage. Quelques fois, les différents modèles, naïfs et à institutionnaliser, ont été explicitement évoqués par les élèves, pour argumenter leurs réponses (par exemple : ''Non, là tu es en train d'utiliser le modèle de l'élan, il faut faire avec Newton.'')
Finalement, en ce qui concerne la conjecture 4, les résultats de la classe d'OS sembleraient la confirmer (pour les élèves de DF, le discours est le même que pour les conjectures 1 et 2, c-à-d que si le MàI n'est pas présent, évoquer d'autres modèle ne peut pas servir à grande chose). En effet, les taux de réponse sensiblement plus hauts lors des deuxième, troisième et quatrième passations semblent indiquer que les difficultés rencontrées dans les réponses aux premières questions sont aussi dues à un manque de disponibilité cognitive du MàI. Une prévalence du modèle naïf semble donc exister comme attendu. Les observations en classe et les traces d'élèves semblent confirmer cette idée, par des références explicites au modèle à institutionnaliser (par exemple : au moment des premiers tours de justifications, les exclamations du type ''Ah oui c'est ça, il faut utiliser la deuxième loi de Newton là...'').
Améliorations possibles et développements futurs
En résumé :
Clarifier le but de l’activité aux élèves, ainsi que préciser que la deuxième question est différente mais fait appel au même MàI ;
Amélioration des questions :
Les adapter aux différentes classes -> le conflit cognitif doit se situer dans la ZPD ;
Éviter les analogies de surface entre les premières et deuxièmes questions;
Utilisation systématique tout au long de l’année :
Pour tester la compréhension des élèves pendant le cours ;
Pour tester la permanence des acquis (re-proposer d'anciennes questions) ;
La fréquence hebdomadaire pourrait ne pas être suffisante pour garantir la disponibilité immédiate du MàI. Il est recommandé d'évoquer en tout cas le modèle précédemment étudié à chaque cours ;
L'introduction d’une phase d’échange entre pairs [4] pour la compréhension et l’argumentation. Dans les classes où cela a été fait, les résultats semblent avoir un impact positif ;
Attention à l'effet Pygmalion : les classes de DF ne sont a priori pas moins doués pour répondre à des questions conceptuelles ;
Exercice de création des questions par les élèves-mêmes (à condition de satisfaire : ‘’MàI ⇔ réponse correcte’’).
Considérant l'appréciation des élèves au cycle d'orientation, une utilisation plus fréquente devrait être considérée pour tester la compréhension après l'exposition du MàI.
Une amélioration de la formulation des questions serait nécessaire. L'enseignante a pu attribuer le taux de fautes à la deuxième question à l'application automatique du même raisonnement de la question précédente. Les analogies de surface des deux questions ont induit les élèves à ne pas relever la différence. Réduire les analogies pourrait aider les élèves. En alternative, en début d'activité, l'enseignante pourrait alerter les élèves à la possibilité de cette erreur.
La conjecture 3 se focalisait sur l'argumentation pour la reconstruction et la réorganisation cognitive et la 4 sur la décentration cognitive. Les deux s'appuyaient sur la phase de mise en commun qui n'a pas été exploitée à plein à cause de la difficulté des élèves à partager spontanément leurs modèles avec toute la classe. L'utilisation d'une phase d'échange entre pairs, comme prévu par Mazur, pourrait être mise en place pour permettre aux élèves de confronter leur modèle avec un camarade. L'échange en binôme est normalement moins difficile que le partage d'un raisonnement avec toute la classe. Un deuxième passage Plickers de la même question pourrait être proposé pour évaluer l'efficacité des échanges entre pairs. L'enseignante pourrait ensuite demander à un élève de présenter le raisonnement et le valider.
Un autre changement de la procédure concerne la distribution de la feuille pour les notes du raisonnement. Aucun élève au cycle d'orientation l'a utilisée. L'enseignante n'a pas insisté sur l'utilisation en considérant plus important que les élèves focalisassent leur effort à la compréhension du problème et à la formulation orale. Le moment d'échange entre pairs pourrait efficacement substituer la phase d'écriture.
Troisième, l'extension de l'utilisation de l'artefact permettrait de proposer à nouveau des anciennes questions, pour permettre de tester l'évolution de la prévalence du MàI et de la renforcer pour empêcher que le modèle naïf redevienne dominant.
Les résultats de l'activité au collège sont positifs, bien qu'ils ne soient pas encore satisfaisants pour les classes de DF. Globalement, nous avons identifié plusieurs éléments qui pourraient bénéficier d'une amélioration :
Il est probable que pour les classes de DF les questions proposées ne se situaient pas encore dans la zone proximale de développement des élèves. Elles n'étaient pas uniquement trop difficiles, mais plutôt inadaptées pour faire émerger comme 'meilleur' le MàI. Ceci s'explique par la non-appropriation de la part des élèves du MàI, empêchant son application avec succès. Vis-à-vis de l'avancement des connaissances des élèves, la temporalité de l'activité est donc à revoir ;
Après discussion tout au long de cette recherche, nous remarquons que nous avons très souvent fait une distinction nette entre élèves de DF et d'OS. Nos discours et notre argumentation nous dévoilent que nous avons des préjugés forts à l'encontre de certaines classes. Nous nous attendions, comme si c'était dans l'ordre des choses, que les résultats des DF soient largement inférieurs à ceux des OS. Cela a finalement été le cas. Pourtant, ne pourrait-il pas s'agir d'une conséquence ? Autrement dit, notre auto-analyse nous fait craindre d'avoir été victimes, nous et nos élèves, du classique effet Pygmalion... ;
Une modification possible qui permettrait à l'enseignant de réduire son travail de préparation et voir plus favorablement une continuation de l'activité sur le long terme, serait de proposer aux élèves de créer eux-mêmes des questions à poser en classe. Cela aurait le grand avantage de leur proposer un investissement cognitif (et personnel) plus important, avec des bénéfices immédiats et profonds sur leur compréhension. Nous voyons cependant une difficulté à cela : si nous souhaitons utiliser ces questions pour notre activité, telle que nous l'avons conçue, nous devons nous assurer qu'elles respectent certains conditions : comme décrit auparavant, celles-ci doivent en effet satisfaire la condition bijective MàI<->réponse correcte unique. Il est difficile que les élèves puissent faire attention à cet aspect, car cela demande une compréhension du sujet plus approfondie. Il est par contre possible que l'enseignant.e se base sur les questions créées par les élèves pour en élaborer de meilleures.
Les résultats dans la classe d'OS semblent montrer que le simple fait d'évoquer le MàI favorise sa bonne application. En l'occurrence, ces mêmes résultats montrent que, sans cette évocation, les élèves continuent à se servir prioritairement du modèle naïf. Celui-ci semble, d'une semaine à l'autre, regagner son statut de prévalence. Il serait alors utile, malgré que le temps et l'avancement du programme ne permettent pas de faire une session de questions à chaque cours, d'évoquer le MàI à chaque cours, pour essayer d'en augmenter la disponibilité cognitive.
Conclusions
Pour aider les élèves à prioriser le modèle à institutionnaliser grâce à son utilisation réussie dans la résolution répétée de questions conceptuelles, l'utilisation d'un boîtier de vote semble intéressante et prometteuse. Notre implémentation de l'artefact et l'utilisation que nous en avons faite n'est pourtant pas entièrement satisfaisante à l'heure actuelle. Pour qu’elle soit pleinement efficace, elle nécessite des améliorations présentées plus haut.
Le nombre de participants étant bien sûr petit, nos résultats ne peuvent être significatifs. Ils peuvent néanmoins faire observer certaines tendances qu'il est possible de mieux analyser en nous basant sur des résultats à plus grande échelle. Par exemple, les recherches de Mazur [4] sont d'une très bonne richesse.
Pour rendre cette phase d'enseignement plus profitable aux élèves, il incombe à l'enseignant.e d'identifier des questions en droite ligne avec la zone proximale de développement du groupe. Ceci permettrait une meilleure motivation des élèves qui pourront par la suite mettre un sens plus manifeste à l'utilité de cette méthode, tout en ayant conscience qu'iels évoluent dans la bonne direction, c'est-à-dire dans l'utilisation plus diligente du MàI.
Présentation du 12 mai 2021
Bibliographie
Potvin, P., Sauriol, É. and Riopel, M. (2015), Experimental evidence of the superiority of the prevalence model of conceptual change over the classical models and repetition. J Res Sci Teach, 52: 1082-1108. https://doi.org/10.1002/tea.21235
Buchs, C., Lehraus, K., & Butera, F. (2006). Quelles interactions sociales au service de l’apprentissage en petits groupes. In E. Gentaz & Ph. Dessus (Eds.), Apprentissage et enseignement. Sciences cognitives et éducation (pp. 183-199). Paris : Dunod.
Darnon, C., Butera, F., & Mugny, G. (2008). Des conflits pour apprendre, Presses universitaires de Grenoble. extraits-intranet(resumes-ch1-conclu).pdf
Mazur, E. (1997), Peer Instruction: A User's Manual: Upper Saddle River, NJ: Prentice Hall. extraits-intranet.pdf | FCI | FCI-vs-acad-results Prepost.jpg
J. Kessler, P. Galvan, and A. M. Boyd for the American Chemical Society, https://www.middleschoolchemistry.com.
Atelier A - Physique, IUFE, Gèneve, année accademique 2019-2020.
P. Engelhardt and R. Beichner, Students' Understanding of Direct Current Resistive Electrical Circuits, American Journal of Physics (2003) 72. https://doi.org/10.1119/1.1614813, https://arxiv.org/abs/physics/0304040.
Références sans être citées :
Pekrun, R., Frenzel, A. C., Goetz, T., & Perry, R. P. (2007). The control-value theory of achievement emotions : An integrative approach to emotions in education. In Emotion in education (p. 13‑36). Elsevier. | intranet.pdf
Buchs, C., Lehraus, K., & Butera, F. (2006). Quelles interactions sociales au service de l’apprentissage en petits groupes. In E. Gentaz & Ph. Dessus (Eds.), Apprentissage et enseignement. Sciences cognitives et éducation (pp. 183-199). Paris : Dunod. Extraits-intranet.pdf
Darnon, C., Butera, F., & Mugny, G. (2008). Des conflits pour apprendre: Presses universitaires de Grenoble. extraits-intranet(resumes-ch1-conclu).pdf
Zittoun T., Conflit socio-cognitif Note sur la notion de conflit socio-cognitif, Tania Zittoun
"Ces interactions, en tant que rencontres de points de vues distincts, ne suscitent toutefois de réel progrès cognitif que si deux conditions sont remplies: d'une part, l'enfant doit être, d'un point de vue développemental, "prêt" à acquérir certaines compétences; d'autre part, il doit y avoir une gestion de la diversité des points de vues non pas relationnelle ou affective, mais bien cognitive - un conflit socio-cognitif."
Vygotski L. (1985), Pensée et Langage Terrains / Éditions Sociales
Vous présentez un exemples d'usage des Plicker convaincant (après Mazur). Votre projet révisé développe une réflexion plus claire et concise et propose de très riches données. Elles paraissent bien ciblées sur votre question de recherche, et sont des indicateurs convaincants des effets attendus. Votre discussion est déjà intéressante.
Y a-t-il des points de votre CJ-map ( les ED?) que vous avez adapté lors des passations : ce sont des points intéressants qui révèlent des "savoirs cachés dans l'action" et les rendent visible et analysables. Ce peut être intéressant de les discuter pour en exploiter la pertinence ou éviter les effets négatifs.
Quelques pistes pour poursuivre l'analyse :
Pour ce 3ème essai qui est plus bas dans quelques graphiques et des baisses observées dans d'autes cas, vous pourrier discuter aussi comment la remise en question des certitudes initiales que la didacticienne de la physique Laurence Viennot a analysées :
Viennot, L. (2016). Développements conceptuel et critique en physique : À la recherche de cohérence. 9e rencontres de l’ARDIST, LENS, France. pdf
Viennot, L., & Décamp, N. (2020). Developing Critical Thinking in Physics : The Apprenticeship of Critique. Springer International Publishing. https://doi.org/10.1007/978-3-030-43773-2
Une autre approche est d'en discuter en termes de difficulté à se défausser de ce qu'on a choisi préalablement
Aronson, E., Wilson, T. D., & Akert, R. M. (2010). Social Psychology (7th ed.). Englewood Cliffs, NJ: PrenticeCh 6 -The Need to Justify Our Actions The Costs and Benefits of Dissonance Reduction
Est-il possible de donner quelques exemples des observations qui fondent les remarques comme "les élèves ont montré un comportement de doute. Il est possible qu'iels s'attendaient à un piège, alors qu'il fallait utiliser le même MàI." cela soulève la question du sens perçu des activités. Il peut être intéressant de discuter des ED complémentaires ou de les modifier ?
Votre conclusion - encore un peu centrées sur la passation - peut encore mieux revenir sur votre problématique et p. ex. articuler la réponse autour de votre CJ-map (proposer une CJ-map finale ?)
Il me semble qu'il y a de quoi apporter des éléments de réponse et une belle discussion !
Orange
Votre projet est bien structuré et vous avez pris la peine d'élaborer une CJ-Map qui synthétise bien votre conceptualisation actuelle et permet d'en discuter. Comme le F3MiTIC je pense qu'il est étayé avec soin et très intéressant. Vous vous référez à des auteurs, c'est bien, mais je ne suis pas sûr qu'ils reconnaitraient l'essentiel de leurs idées dans ce que vous en tirez... :-/ En effet, ces références sont utilisées dans le but général de motiver notre travail et non pour illustrer spécifiquement le fond de notre recherche.
Votre fascination pour les boitiers de vote et les chiffres qu'ils permettent facilement d'obtenir aurait-elle pris le dessus sur le fond ? Tel quel je crains que vous ne puissiez pas bien répondre à votre QdR qui est implicite d ans l'"objectif". Au colloque vos données (chiffres observations, etc) doivent être une base empirique pour discuter une réponse à proposer aux autres sur la question Comment "Aider les élèves à dépasser l'utilisation automatique des modèles naïfs en physique et leur permettre de choisir et d'utiliser le modèle scientifique adapté à la situation. " Il pourrait en résulter une CJ-Map révisée qui montre bien le chemin que ce projet est en train de vous faire faire. Nous avons modifié et mieux expliqué nos objectifs et essayé de renforcer les liens entre ceux-ci et la CJ-Map, qui a aussi été revue.
Discussion à partir de la CJ-Map
L'idée de la mise en échec des modèles naïfs qui sous-tend une part importante de votre CJ-Map n'est plus d'actualité - et Potvin que vous citez - indique explicitement que cela peut avoir un effet de renforcement. je vous encourage à réviser la CJ1 et 2. La CJ3 semble aussi dans une conceptualisation de changement conceptuel. Potvin et d'autres montrent que vous n'effacerez pas ( CJ1 et 2) les modèles naifs, que vous ne les changerez pas (CJ3) mais que vous pouvez aider les élèves à utiliser avec succès de manière répétée le MàI ce qui aura pour effet d'augmenter sa prévalence : l'élève y recourra plus facilement dans ce contexte (cours de phy), il aura plus de satisfactions (Pekrun). Nous savons bien que les résultats de recherche montrent la persistence des modèles naïfs. Lorsqu'on parle de décentration cognitive on veut faire référence à la possibilité de l'élève de faire recours à de la métacognition et donc de repérer 'dans sa tête' la présence simultanée de plusieurs modèles, et de pouvoir opérer un choix. La version précédente de la CJ-map pouvait pourtant prêter à confusion sur ce point (d'où vos commentaires) et nous l'avons donc modifiée pour mieux expliciter notre idée.
Puisque le statut des conceptions initiales ne semble pas facilement pouvoir être diminué au moyen de conflits cognitifs, on propose de plutôt tenter de faire entrer le plus rapidement possible les conceptions désirées dans la course. C'est la première étape, qui propose de décrire dès le départ aux apprenants les modèles scientifiques à faire apprendre;
La deuxième étape consiste à installer des réflexes inhibiteurs qui vont entraîner les apprenants à reconnaître les circonstances où ils devraient résister à utiliser leurs conceptions personnelles et plutôt employer les conceptions apprises lors de l'étape 1 ;
La troisième étape consiste quant à elle à automatiser l'emploi des conceptions à faire apprendre et à étendre leur utilisation au plus grand nombre possible de contextes où elles s'appliquent de manière utile;
Potvin, P. (2019). Faire apprendre les sciences et la technologie à l’école : Épistémologie, didactique, sciences cognitives et neurosciences au service de l’enseignant. Presses de l’université Laval. Ch2 qui traite entre autres de changement conceptuel et des nouvelles manières de conceptualiser l'apprentissage des sciences Potvin-2019-Faire apprendre les sciences-echnologie-apport-neurosci-CH2-fin.pdf
Le changement dans la CJ-map semble finalement assez mineur à ce stade mais il est profond dans la préparation, la gestion en classe, et l'acquisition et la discussion des données.
Suggestions :
Reformuler CJ1, 2, 3 en termes d'exercer le MàI avec succès ( donc pas trop difficile au début) pour favoriser sa prévalence, …). Nous avons modifié notre CJ-map, dans le but d'y répondre.
Selon Potvin il faut que le MàI soit présenté expliqué préalablement (ED) . Notre intention est de présenter le MàI avant tout essai. Il n'est pas question ici de recueuillir les misconceptions des élèves avant l'apprentissage.
Comme le F3MiTIC, dans la CJ-map, je suis pas très convaincu par le passage entre effets attendus et les effets mesurés :
EA1 mesurer la satisfaction des élèves, leur sentiment de compétence serait plus judicieux. (Vous avez du voir de nombreux rubric dans ce sens avec A. Mueller)
EA3 : il s'agit plutot de savoir dans quel cas le MàI est pertinent ou non (l'électronique, le transistor, etc)
EA2 4 : Compréhension = capacité à prédire expliquer en utilisant le MàI - EO 2 meilleure réussite des questions "conceptuelles" au sens de Mazur ( vous en citez)
EA4 : pas mesurable et ambitieux ( vous aurez de la peine à défendre ce point au colloque)
Nous n'avons probablement pas compris votre définition de EA et EO. Nous nous sommes dit que des effets attendus pouvaient être non mesurables, mais ''logiques'' selon les conjectures, et pourtant avoir des conséquences mesurables. Quelque chose du type : on donne ce qu'on croit être un bon cours, donc EA : les élèves comprennent ; donc EO : les résultats de l'épreuve (qui sont bons). Si nous avons compris, au contraire, pour vous les EA et les EO doivent, les deux, êtres observables, mais les deuxièmes permettent une mesure et une quantification : on donne ce qu'on croit être un bon cours, donc EA : les élèves font correctement les exercices et interagissent avec l'enseignant et entre eux en faisant preuve de compréhension ; EO : les résultats de l'épreuve (qui sont bons). Nous avons donc modifié notre CJ-map pour adhérer à cette deuxième définition de EA et EO, qui d'ailleurs est plus scientifique car effectivement observables dans tous ses aspects. Dans le cas où cette dernière interprétation ne soit pas correcte, nous vous prions de nous en informer.
Vous mentionnez aussi Darnon et al, et l'importances des situations de conflit cognitif, mais ils insistent sur une condition : régulation épistémique et non relationnelle des conflits. Or si c'est l'enseignant qui contre-argumente ( ED4), il y a un risque très grand que l'argument d'autorité ( vous êtes l'autorité) régule les conflits et dans ce cas il n'y a guère d'apprentissage ni de réorganisation cognitive. Peut-être reformuler la CJ dans le sens de Darnon et al et l'ED4 pour maximiser les discussions entre pairs (Comme Mazur le propose et les focaliser sur l'usage du MàI : est-ce qu'il permet de répondre correctement ? Comment l'appliquer pour trouver la réponse , etc?
Nous avons comme contrainte dans notre utilisation de l'artefact une limitation temporelle. Une discussion entre pairs demande énormément plus de temps de ce que nous nous proposons d'avoir à disposition. Il s'agit pourtant d'éviter le recours à l'argument d'autorité : nous ne dirons pas tout de suite à nos élèves quelle est la réponse correcte, mais laisserons quelques élèves proposer leurs modèles (on commence toutefois par demander à un élève qui a donné la bonne réponse sa motivation, pour être sûr que le MàI soit présent dans la discussion des modèles)(à nouveau, à cause du fait que le temps à disposition est court, et pas tous les modèles pourront être traités).
Comme le F3 MiTIC et vous que la bonne construction des questions QCM est primordiale et représente un gros travail !
Oui, c'est ce que nous avons souligné. Nous avons fait de notre mieux ! Souhaitez-vous qu'on vous joigne ici un échantillon plus élargi de nos questions pour avoir un retour de votre part ?
N'oubliez pas de prendre note des observations que vous pourrez faire lors de la passation (exclamations des élèves "ah mais alors ça veut dire que … Donc si on applique le MàI on arrive bien à la bonne réponse , Ah en fait j'avais pas bien appliqué le modèle , Mais comment on peut appliquer le modèle à ce cas ? mai c'est pas croyable, c'est pas naturel ça… j'y crois pas meme si ça explique bien ce qui se passe. ...." : classez-les en catégories (satisfaction, difficulté à appliquer le modèle, incrédulité, etc...) elles se révèleront très instructives, en plus des chiffres : notez bien le type de question que les élèves posent, discutent entre eux (Comme Mazur le fait, regardez bien son texte)
À nouveau, c'est dans des contraintes temporelles (et de surcharge de l'enseignant-e) que nous travaillons, et pour cela nous n'avons pas décidé pour une récolte systématique de ce type de données. Pourtant, nous nous proposons de collecter ces indices le plus possible.
Votre projet est potentiellement très riche et vaut la peine de le poursuivre pour fournir au colloque de belles réponses à votre QdR
Comment "Aider les élèves à dépasser l'utilisation automatique des modèles naïfs en physique et leur permettre de choisir et d'utiliser le modèle scientifique adapté à la situation. "
Projet intéressant qui adresse une Q° centrale dans l'enseignement des sciences.
Je ne suis pas sûr que le modèle naïf puisse être surmonté…
Vos CJ sont formulées comme des hypothèses à tester dans le paradigme expérimental. Les conditions que vous pourrez mettre en oeuvre ne permettront pas de les tester sérieusement et lors de la présentation il y aura bien quelqu'un qui mettra en évidence la faiblesse de vos données, l'échantillon insuffisant, le biais que vos croyances en cette approche par prévalence induit chez vous et chez les élèves etc.
De plus la littérature offre des réponses assez solides à vos CJ : des données sérieuses suggèrent (référencées dans le texte de Potvin et d'autres) très fortement que "La répétition est nécessaire pour obtenir cet effet"
Dans cet atelier il s'agit d'optimiser le comment on implémente cela dans le concret d'une classe : vous le prévoyez un peu avec "quel nombre de répétitions est nécessaire, "
p. ex. que faire avec les résultats obtenus : les partager avec les élèves (cf. Mazur sur ce point ) Notez que cela diminue encore la validité des mesures si vous étiez dans le paradigme expérimental mais les aide à apprendre, éthiquement vous n'avez guère le choix !
Les ED : ce que vous mettez en oeuvre pour aider à ce que la CJ se réalise est ici crucial.
La question porte sur l'optimisation de ces ED, - ils sont le métier d'enseignant.
La répétition n'est pas en soi le point central du modèle de prévalence : c'est l'usage avec succès répété qui compte.
Veillez a ce que les élèves prennent conscience que l'usage du modèle produit des effets satisfaisants
Par exemple si cela leur permet de comprendre ( prédire ou expliquer) des phénomènes dans des situations qui ont du sens pour eux
Faites leur bien savourer le plaisir de comprendre ( émotions épistémiques)
La structuration de la discussion est sans doute très importante argumenter scientifiquement (résolution épistémique plutôt que relationnelle des conflits d'idée) cf.
Essayez aussi de prévoir des Q° pour aider à délimiter le domaine de validité du modèle ( peut-être dans un deuxième temps ) bien mettre en évidence quand le modèle à institutionnaliser (MàI) est et n'est pas pertinent. ( parquer sa voiture à l'ombre...)
Notez bien qu'on vise ici à déterminer les conditions dans lesquelles cette approche par prévalence fonctionne le mieux
Il faut donc des observables en rapport avec vos ED : p. ex est-ce que les discussions entre élèves portent sur les aspects cruciaux du MàI ? Les discussions sont-elles centrées sur la puissance explicative des modèles (régulation épistémique) ou sur des références à l'autorité ( du prof, de celle ou celui qui est "très fort en physique) ou encore "la paix dans les ménages" etc. = régulation relationnelle)
Construisez une CJ-map qui met en relation ces CJ, ED, EO (exemple ici) pour vous aider à structurer
Votre projet vaut la peine d'être développé pour réaliser le potentiel qu'il a
je me réjouis de le voir prendre forme
F.Lo
Commentaires A Conti: 1. Quelle place allez-vous attribuez à la discussion des diverses réponses fournies ? OK Correction rapide signifie souvent simple validation de la réponse correcte attendue. 2. encouragerez-vous des discussions collectives avant de donnez une réponse ? OK Quelle stratégie allez-vous mettre en place ? OK