En 1963, Robert Mundell[1] énonce son fameux « triangle d’incompatibilité », baptisé depuis « trilemme » par les Anglo-saxons : il est impossible de faire coexister (i) un régime de changes fixes, (ii) la libre circulation des capitaux, et (iii) l’efficacité de la politique monétaire (de fixation des taux d’intérêt ou de contrôle de la masse monétaire). Avec le passage généralisé à un système de change flexible, dix ans plus tard, ce théorème semblait garantir l’autonomie des politiques monétaires nationales et clore le débat qui avait enflammé des générations d’économistes.
La réflexion sur le système monétaire international (SMI) était donc un peu passée de mode. Mais les crises de la dette en Asie et Amérique du sud, les relations tumultueuses de la Chine avec les Etats-Unis, la crise financière de 2008, puis celle de l’euro de 2011, ont montré des interdépendances, dans un monde financièrement intégré, bien plus fortes qu’on ne l’imaginait et obligent les économistes à revisiter la problématique de l’autonomie, celle des politiques monétaires, mais aussi celle des politiques financières nationales. Ces deux ordres de questions sont désormais à ce point mêlées, qu’il n’est plus sûr que l’on puisse parler du SMI indépendamment du Système Financier International (SFI). Enfin, eu égard aux déboires de ces sept dernières années, la préoccupation du risque systémique et de la stabilité financière doit être prise en compte dans toute tentative de remise en ordre de l’économie mondiale. Les réflexions du G20 et des instances en charge de la régulation progressent d’ailleurs en ce sens et de nouvelles réglementations ont vu le jour sur lesquelles il faut s’interroger.
[1] Robert Mundell, « Capital mobility and stabilization policy under fixed and flexible exchange rates », Canadian Journal of Economics, 29, pp. 475-485.