Tal Terny 7e Cie

Récit de Jean BAUDOU, affecté le 30 mars 1957 à la 7e compagnie du II/7e RI.

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Vaudon Roger II/7e RI

Né le 21 juillet 1938, il est appelé de la classe 58/2A le 1er septembre 1958 à la 2e Compagnie du Centre d'Instruction n°4 stationné en Allemagne. À l'issue de sa formation il est affecté en AFN. Il embarque à Marseille le 25 janvier 1959 et débarque à Oran le lendemain. Il rejoint le 14 février 1959 la 11e Compagnie du III/7e RI pendant 2 mois, puis la CCAS du même bataillon. Le 2 juin 1959, sa nouvelle affectation le conduit à la 7e Compagnie du II/7e RI à Tal Terny à 40 km sud de Tlemcen, garnison perchée à 1390 m d'alt. Il sert alors comme tireur FM et participe à toutes les opérations de son unité.

Le 25 mai 1960 vers les 18 heures, la 7e Compagnie effectue une mission de ratissage à l'Oued Guettara à 15 km SE de Tlemcen. Le tireur FM Vaudon est atteint par un projectile tiré par un rebelle embusqué dans un fourré. La balle de fusil "garant" l'atteint à la main gauche, puis à la main droite et au sein droit provocant une grosse hémorragie du poignet droit. Après les soins donnés sur place. Vaudon est évacué par hélicoptère sur l'Hôpital militaire de Tlemcen.

À l'issue de son hospitalisation il est affecté à la Compagnie Administrative Régionale n° 4 de Bordeaux, la commission de réforme le maintient bon pour le "service armée" le 8 mars 1961. En permission de fin de service de 28 jours il est rayé des contrôles le 5 avril 1961.

La 1ère classe Vaudon est titulaire de la médaille commémorative AFN du 1er mai 1959 et de la croix de la valeur militaire avec étoile de vermeil du 10 août 1960. Le 29 mai 1978, la Médaille Militaire lui est conféré.

L'oued El Guetara

Le 22 avril 2020, je recevais un mail de monsieur Christophe Vaudon : « Je m'intéresse à la Guerre d'Algérie, (période que je connais mal, je suis né en 1965) et j'ai vu votre annonce sur un site internet. J'ai beaucoup d'affection pour mon oncle qui a vécu ce moment terrible. Mon oncle, Dieu merci ! Est toujours vivant. Il a 82 ans et vit à Bordeaux. Je lui ai parlé de votre demande. C'est Roger Vaudon. Il était au 7ème RI, d'abord deux mois à la 11ème compagnie, puis au PC du 3ème Bataillon et enfin à la 7ème compagnie du 2ème Bataillon. Si cela vous intéresse j'ai quelques documents que je peux vous transmettre ».

Ma réponse fut précise et rapide ! « Oui vos documents m'intéressent, car cela me permettra de voir où et quand nos chemins se sont croisés... »

À la réception des documents, je lus son ordre de citation en date du 10 août 1960. « … le 25 mai dans la vallée de l'oued Guetara, à 15 km au sud-est de Tlemcen... » Roger Vaudon avait réagi en combattant aguerri lors de l'accrochage de son Unité avec une bande de fels. J'en fus très ému et fortement intrigué. Ému, car Roger Vaudon avait été grièvement blessé et avait agi dans l’intérêt de tous ses camarades en risquant sa vie... Intrigué, car le nom de cet oued éveillait en moi des souvenirs. Aussitôt je « bondis » sur mes cartes d’état-major au 1/50 000, vieilles de plus de soixante ans et classées dans le bas de ma bibliothèque ! J'en retins immédiatement deux : celle de Terni et celle des Béni Smiel. Elles représentaient la région la plus tourmentée des « Monts de Tlemcen », allant des massifs du djebel Tesser Mramet (1484 m d'altitude) au Djebel Hadjar (1556 m d'altitude), alors que l'altitude des vallées, très encaissées et bordées de hautes falaises aux nombreuses grottes, ne descendait pas en dessous de 1042 m ! Les hivers étaient très froids et neigeux, les étés chauds et secs. Cette zone montagneuse était traversée par trois routes principales. À l'ouest celle de Marnia à Sebdou, au centre celle de Tlemcen à Sebdou et à l'est celle de Oued Chouly à Sebdou. Je me rendis compte en dépliant mes cartes que la zone de l'accrochage de ce 25 mai 1960 - (15 km au sud-est de Tlemcen) - pouvait être à la jonction des deux cartes. Après les avoir assemblées, je partis à la recherche de l'oued El Guetara, gêné par tous les « gribouillis » que j'avais faits, en tant que chef de section, au cours des nombreuses opérations menées pendant deux ans dans cette zone hostile et refuge des fels qui venaient du Maroc. En respectant la direction indiquée sur l'ordre de citation, je ne trouvais rien dans un cercle de trois km de rayon qui englobait le djebel Bou Hadjar avec ses nombreux oueds et falaises. Je cherchais donc dans la zone nord de la maison forestière de Merbach, objet de nombreuses opérations. Rien ! Faisant confiance à mes « gribouillis » je remontais vers le nord, dans le secteur des marabouts de Sidi Moussa et de Sidi Mokhfi, puis près du poste et du regroupement de Yebdar. Bien m'en prit ! Deux km à l'est de ce hameau de misères l'oued El Guetara se jetait dans l'oued Tebdar. Sa source se trouvait tout près du col du Djebel El Demamene (1446 m d'altitude). Après cette heureuse découverte, il y en eut une seconde. Dans un « gribouillis », à deux km à l'ouest de la maison forestière d'Aïn el Souk, je vois, face à des falaises, un trait au crayon barrant la piste qui venait du col du Djebel El Demamene, or cette piste à partir de ce col reliait Yebdar à cette maison forestière en suivant l'oued El Guetara dans sa partie ouest. J'avais donc participé avec mon Unité à une opération dans ce secteur. Mais quand ? Autres recherches. La réponse vint et fut claire. Mon « gribouillis » de la maison forestière d'Aïn el Souk remontait à l'intervention de notre « Bataillon de Marche » dans ce secteur les 7 et 8 février 1960. C'était d'ailleurs la dernière grande opération que j'effectuais ; notre glorieux « Bataillon de Marche » était dissous en mars. Fin juin 1960 les 6é et 11é Cie étaient dissoutes et le 1er Bataillon rejoignait la Kabylie, dans le secteur de Oued-Zenati. Pour le 7 RI et tous ceux qui le servaient et l'avaient servi c'était une bien triste « Bérésina ».

En revenant aux documents transmis par Christophe Vaudon, je remarquais que lorsque son oncle Roger Vaudon était à la CCAS du 3éme Bataillon, à Sidi Snoussi, j'y arrivais le 18 mai et j'y restais jusqu'à la fin du mois, avant d'être affecté à la 12ème Cie qui était en poste à la ferme Toro, au nord de Turenne.

Lorsqu'il était affecté à la 7ème Cie du 2ème Bataillon et jusqu'à sa blessure en opération, nos chemins se sont croisés, sans aucun doute, dans les nombreuses opérations effectuées dans le secteur des monts de Tlemcen, dits « Montagne des douze apôtres », lui au sein de la section, moi, jeune officier, à la tête de la « 1ère section de la 12 Cie du 7 RI ». C'est ce que nous allons découvrir ensemble. Grâce à lui et à son action dans l'oued El Guetara je revis les moments émouvants et je revois des lieux qui ont marqué ma vie.

Merci Roger de rejoindre la longue liste des anciens du 7 RI.

Ce 8 mai 2020, 75ème anniversaire de la victoire de 1945, sur les hordes allemandes. J'avais 8 ans ! J-Charles Point.