Topographie


Depuis le début, la topographie fait partie intégrante de la spéléo. Elle est une étape obligatoire de toute découverte, de toute étude, de toute publication.

Même si les principes de base restent sensiblement identiques aux méthodes anciennes (topofil, boussole, clinomètre...), la technologie nous offre désormais une aide précieuse dans cette activité indispensable. Nos activités souterraines n'étant pas financièrement intéressantes pour les industriels, il faut une fois de plus mettre un peu la main à la pâte...

Parmi les nombreuses techniques et programmes utilisés, voici une petite sélection que je bricole ou utilise, et qui donne satisfaction (en fait, une fois qu'on a essayé, il est difficile de revenir en arrière). Je décrirai succinctement et donnerai des liens pour que les intéressés puissent se documenter. Je vous conseillerais pour commencer "La topographie souterraine pour les nuls" et le site de Beat Heeb, qui développe ses outils de "topo spéléo sans papier": à l'utilisation, une vraie révolution !

La Topographie Souterraine Pour Les Nuls V21.pdf

DistoX: appareil de mesure "tout-en-un"

Certains ont peut-être connu le Shetland Attack Pony, premier instrument électronique pour spéléos qui permettait de mesurer à la fois la pente et l'azimut. Aujourd'hui, l'instrument universel est sans conteste le DistoX.

Ce montage est basé sur un télémètre laser Leica, auquel on rajoute un module développé par Beat Heeb. Cette modification lui permet de mesurer en une seule fois la distance, l'azimut et la pente (dans toutes les positions), de les afficher, mémoriser et transmettre par liaison Bluetooth.

Nous en sommes actuellement à la version 2, avec un nouveau modèle de Disto Leica, mais le principe et les prix restent similaires: +/- 180€ pour le disto (neuf; en occase c'est moins cher), et environ la même somme pour le kit (ce qui est finalement sensiblement le coût d'un classique Tandem Suunto). Nous verrons ce que nous réserve l'avenir...

Ce kit comporte toutes les petites pièces à remplacer et des indications claires sur le montage et étalonnage. Bref c'est accessible avec un minimum d'outillage et de soin. Pour vous aider, d'autres sites traitent également de la construction, de l'étalonnage, de la démagnétisation des accus, ou du déport de ceux ci (ci contre).

Il y d'autres bricoleurs sur le coup, l'avenir devrait donc encore nous réserver des surprises (numérisation par scanner 3D et autres... voir en bas de page).

Montage de l'ancien et du nouveau modèle
DistoX

Cet instrument permet d'être beaucoup plus rapide et précis que les méthodes conventionnelles. Le laser pointé sur la cible, une pression sur le bouton suffit, et la la visée n'impose plus les contorsions de lecture vécues auparavant.

Les erreurs de lecture ou de report n'existent plus. La précision des mesures d'angles est fortement améliorée (p. ex. galeries à forte pente). L'étalonnage doit être fait régulièrement, ce qui est rare avec les appareils classiques. Mais il faut encore faire attention à la manipulation et aux masses magnétiques.

Pour éviter le souci, j'ai déjà réalisé des batteries déportées, par exemple...

"Carnet topo" électronique

Bien que pas mal de spéléos reportent encore manuellement les mesures de leur DistoX sur un carnet topo, celui-ci est prévu pour fonctionner de manière plus moderne, en association avec un appareil à écran tactile. Celui ci recevra en temps réel les données de mesures (bluetooth), en affichera directement le report (en plan, coupe et section), et permettra le dessin à l'échelle sur l'écran in situ, ce qui évite oublis et approximations.

Le matériel est très simple à trouver: un vieux PDA, Palm ou smartphone d'occasion à quelques dizaines d'euros fera l'affaire (j'ai eu un IPAQ complet à 40€). Le principal problème est de lui confectionner un emballage étanche et antichoc, ensuite installez un de ces logiciels spécialisé, libres et gratuits:

    • Pocket Topo pour un PC, PDA, ou smartphone (Beat Heeb)

    • Auriga pour les Palm (merci à Luc Le Blanc)

    • TopoDroid pour un smartphone ou tablette Android


DistoX - Pocket Topo
Pocket Topo

Puisqu'une visée prend environ 2 secondes et que le report est automatique, on peut multiplier les mesures et changer ses habitudes de travail par rapport à la topo classique. Les bénéfices sont incomparables, par exemple avec Pocket Topo:

  • On décrit d'abord l'environnement complet de la station de départ par des visées de points significatifs ou destinés à l'habillage. On n'est plus limité aux habituels LRUD (gauche, droite, haut, bas), peu précis et nullement significatifs sur la forme de la galerie. Ces visées peuvent désormais s'effectuer dans toutes les directions. En les choisissant judicieusement, on a donc des valeurs du positionnement réel (et plus estimé) des parois, plafond, concrétions, etc.

  • Ensuite pointer la station suivante par 3 mesures consécutives (interprétées par le logiciel comme une seule mesure de cheminement). La tolérance de variation est réduite, ce qui offre en fait une double vérification pour plus de précision.

  • Ces visées s'affichent dans le logiciel et se dessinent à l'écran (directement reportées à l'échelle en plan et en coupe, avec n° de station); il n'y a plus qu'à dessiner avec le stylus. Le dessin à l'échelle sur site est très confortable, les mesures d'environnement vous donnent des repères précis, vous pouvez zoomer avec quadrillage d'échelle, plusieurs couleurs sont disponibles, on peut se déplacer pour mieux visualiser, pas de risque d'oublier à la sortie...

  • Faire des sections parfaites est un jeu d'enfant: on réalise une série de mesures "en éventail", et on relie tous ces points. Les dessins de section (dans plusieurs axes) sont liés à une station, mais elle sont déjà dessinées à côté de la galerie dans le logiciel.

  • Diverses notes ou dessins peuvent compléter ces informations, chacun reste lié aux visées et disponible par la suite dans les programmes.

  • Les données peuvent être sauvegardées en triple (DistoX + mémoire interne du PDA + carte mémoire). On peut même dans certains cas se passer de PDA sous terre et décharger toutes les mesures du DistoX en rentrant, en repérage d'explo rapide par ex...

  • Enfin, au retour les données peuvent être exportées directement dans divers programmes de topo et de graphisme vectoriel pour la mise au net; plus de fastidieuses séances de copies, encodages ou dessins. De plus, dans certains programmes, si un bouclage par ex. amène à une modification de la topo, le dessin se déforme automatiquement pour suivre cette correction.

Il existe des stages, manuels et formations pour se rappeler les bases de la topographie, et se former à ces nouvelles techniques.

Logiciels de Topo et de dessin

Les logiciels de topographie souterraine ont été principalement développés par des spéléos pour des spéléos, et sont donc disponibles gratuitement.

Ces programmes ne s'occupent souvent que de la partie topo proprement dite, c'est à dire le traitement et l'analyse synthétique des données (plan, coupe, sections, diagramme d'orientation, rendu 3D...). Le rendu des contours réels et éléments remarquables de la cavité ainsi que les légendes et annotations s'effectuent en aval dans un logiciel de dessin vectoriel classique (Autocad, Inkscape, Illustrator...).

Personnellement, je préfère les logiciels "all-in", qui prennent en charge ces deux parties et les maintiennent en relation. Ainsi, on reste dans un même univers, les dessins restent intimement liés aux données, les symboles internationaux sont inclus, les légendes et indications automatiques, etc. En cas de modification des données (correction d'erreur, nouveau réseau, bouclage...) le dessin suivra automatiquement par morphose (déformation adaptative) sans devoir tout recommencer, ce qui est impossible avec les logiciels classiques. La gestion des nouvelles séries, des galeries superposées, du dessin par zones, la génération d'atlas interactifs, etc. sont également de nets avantages.

Il y a par exemple Topo Calc'R de J-P Héreil, GHtopo avec son module GHCaveDraw, développé par J-P Cassou, et Therion développé par Stacho Mudrák et Martin Budaj. C'est ce dernier que j'utilise et que je vais décrire brièvement.



Therion

Therion est un logiciel complet pour traiter des topos complexes et générer des vues 2D et 3D adaptatives par rapport aux données. Il est open source et fonctionne sous PC, Mac et Linux (top pour le travail collectif, les découvertes en cours, etc.), y compris sur des mini machines.

Il se présente comme un simple compilateur de lignes de commandes en format texte. Du coup, on peut lui faire faire énormément de choses: "il suffit" de le programmer en ajoutant les bonnes lignes... C'est ce qui fait sa puissance et sa polyvalence, mais aussi son côté informatique assez rebutant. Idem pour l'interface graphique qui n'est pas très WYSIWYG.

L'apprentissage de tout nouveau programme demande un peu d'effort, mais ça vaut le coup. Il existe une documentation détaillée, principalement en anglais mais aussi en français, ainsi que des tutoriels avec exemples.


Bible Therion fr.pdf

Et à l'avenir ?

Il va sans dire que nous en sommes toujours à l'âge des cavernes... La topo par scanner 3D, balayage laser, lidar, photogrammétrie, etc. sont en train de révolutionner le domaine ! Il y a aussi moyen d'expérimenter soi-même. Pour ceux que ça intéresse, voici un peu de lecture :)

KARSTOLOGIA63-Jaillet.pdf
creg_j096_2016.pdf

Caveatron

a DIY 3D lidar scanner