Pascale Flavigny
Le Havre
Mouettes qui volent au-dessus du port, qui captent
dans leurs yeux les influx lumineux, qui piquent pour
intercepter, saisir leur aquatique aliment et moi
je les regarde et mon œil capte leur mouvement,
mon corps doit se tendre pour accompagner leur descente,
leurs cris me vrillent le tympan, les mouettes se
transforment en nourriture pour moi, elles sont mon
aliment, je les saisis, j'ai faim d'elles, fusion d'une
seconde dans l'oubli de la condition humaine, de toute
pensée, je suis un chasseur sans fusil, un prédateur,
je les happerai
***
Par l'absence
l'espace se dépouille de ses erreurs
le temps enfin
ouvre ses silences
le calme étrange présidant l'absence
quand s'épure le sens.
***
La brèche
Dans la solitude se dit le passage / dans le repliement
du cœur / sphère pleine / se cherche l'ouverture /
une crispation, un écart / un écartèlement / qui font
se mouvoir / le monde / parce qu'il se trouve une brèche /
une faille d'accès / à l'essentiel // de l'espace solitaire
bleui / surgit l'éclat d'une évidence.
***
Petit cauchemar
Un glacier
déroule
sa langue
comme
ce papier
blanc
qui est
langue
appelant
les mots
langue
qui se tend
hors de
la bouche
et s'enroule
dans une autre
bouche
étouffant
les
mots
***
L'échancrure du jour sur la rosée
Déploie peu à peu son empreinte
Nous sommes des somnambules qui saluons
Qui admirons la lumière dorée
La lumière zélée que nous aimons marier avec la nuit
Pour nous surprendre dans des oublis
Pour nous surprendre dans d'immatérielles caresses
Dans les échancrures renouvelées de nos chairs
Nous sommes des ancres et des oiseaux.