Résumé : l'existence du libre-arbitre est niée par la physique classique mais elle est compatible avec la physique quantique.
Les sciences de la Nature sont-elles compatibles avec l'existence du libre arbitre ?
Les lois de la Nature énoncent des nécessités naturelles. Elles disent que ce qui est ne peut pas être autrement. Elles affirment que dès que certaines conditions sont réunies certains effets vont se produire. Les événements ont toujours des causes antérieures. Si tout est déterminé par des causes antérieures alors tout est écrit d'avance. Mais le libre arbitre suppose que l'avenir n'est pas écrit d'avance, que ce qui sera aurait pu être autrement.
Des lois sont déterministes lorsqu'elles imposent que l'état instantané d'un système détermine tous ses états futurs. Le futur est complètement déterminé par le présent ou le passé.
Si l'Univers obéit à des lois déterministes, toutes les destinées de tous les êtres qu'il contient sont comme écrites par avance. S'il y a un créateur, il a créé l'Univers, son passé, son présent et son avenir en une seule décision, d'un seul coup. Tout se passe comme si l'avenir avait déjà été créé même s'il ne s'est pas encore produit.
Il semble qu'un Univers déterministe ne laisse pas de place pour la liberté. Si tout est écrit d'avance, personne n'est libre de choisir sa destinée, la liberté est seulement une illusion, nous croyons que nous prenons librement nos décisions mais il était écrit d'avance, avant même notre naissance, que nous les prendrions.
Parfois nos actes sont irréfléchis. C'est une source d'embarras parce qu'on doit assumer la responsabilité d'actes qu'on n'a pas vraiment voulus. On a envie de dire comme les enfants qu'on ne l'a pas fait exprès.
Parfois les décisions semblent s'imposer d'elles-mêmes. La question ne se pose même pas. Pas place pour le doute, pas besoin de réfléchir.
Quand nous prenons le temps de réfléchir, d'anticiper les conséquences d'une décision, de peser le pour et le contre, de douter, d'hésiter, chaque étape de ce cheminement a des causes antérieures. Rien n'interdit de supposer que toute la réflexion qui a conduit à la décision était écrite d'avance.
Si tout est écrit d'avance, une délibération qui précède une décision ressemble à un faux procès. La condamnation a été prononcée avant que le procès commence.
Les lois de la Nature sont-elles déterministes ? Il n'y a pas de réponse simple.
La physique classique (de Newton à Einstein) est franchement déterministe. Les lois fondamentales sont des équations différentielles qui déterminent complètement l'évolution d'un système à partir de son état initial.
La physique quantique est en même temps déterministe et probabiliste. Comme la physique classique elle détermine l'évolution d'un système à partir de son état initial avec une équation différentielle, l'équation de Schrödinger. Elle est donc déterministe. Mais la règle de Born interprète les états quantiques (calculés avec l'équation de Schrödinger) avec des probabilités de résultats observés. De ce point de vue la physique quantique est probabiliste. Il n'y a pas de contradiction parce que l'équation de Schrödinger détermine les probabilités calculées avec la règle de Born.
Lorsque la physique quantique décrit l'évolution d'un observateur, elle lui attribue un arbre de destinées possibles. A partir d'un état initial, l'observateur a devant lui un nombre incalculable de destinées possibles, qui ont toutes une probabilité non-nulle de se réaliser.
Si je suis libre de prendre mes décisions, c'est moi qui décide, pas le hasard. Il semble donc que même des lois fondamentalement probabilistes, telles que les lois quantiques, ne résolvent pas le problème du libre arbitre. Que les lois de la Nature déterminent des probabilités d'évolution plutôt que l'évolution elle-même semble ne pas laisser plus de place à la liberté.
Une théorie probabiliste de nos destinées est cependant compatible avec les principaux axiomes du libre arbitre :
Les décisions ne sont pas écrites d'avance. Une décision n'est pas complètement déterminée par des causes antérieures.
Le pouvoir de décision donne un pouvoir de contrôle sur l'avenir, parce qu'une décision prise a des conséquences.
Il y a du sens à réfléchir avant de se décider, parce qu'une réflexion même hasardeuse donne des chances de trouver de bonnes raisons pour se décider, alors que l'absence de réflexion ne laisse aucune chance de trouver de telles raisons.
La physique quantique est donc compatible avec l'existence du libre arbitre.