Aristote

Aristote et Platon (source : Commons)

En guise de préface : un hommage à Aristote


Le commencement de toutes les sciences est l’étonnement de ce que les choses sont ce qu’elles sont. (Aristote, Métaphysique livre A 983a10)


Aristote a rêvé de la science mais avant lui elle n'existait pas alors il l'a faite. Il est le fondateur de la science. Il a été le meilleur élève de Platon. Il a prouvé qu'il était digne de son maître en étant meilleur que lui. Il a enseigné qu'il faut donner de bonnes preuves pour faire la science. Par exemple il donne comme preuve de la rondeur de la Terre son ombre sur la Lune. Il est le premier a avoir enseigné des règles du raisonnement logiquement correct. Il nous a montré comment faire la différence entre les bons raisonnements, avec lesquels on fait la science, et les sophismes ou les paralogismes, avec lesquels on impose l'ignorance. Il a enseigné les quatre causes : la cause matérielle, la cause motrice, la cause finale et l'essence. Depuis Aristote la science a progressé et nous comprenons ces causes mieux qu'en son temps. Nos réponses sont parfois différentes mais les questions sont les mêmes.

La cause matérielle : de quoi c'est fait ?

La cause motrice : quel effet ça fait ?

La cause finale : qu'est-ce qui doit être fait ?

L'essence : qu'est-ce que c'est ?

Pour connaître les causes matérielles, il faut connaître la constitution des matériaux et des constructions. Par exemple on peut connaître la constitution d'une molécule en connaissant tous ses atomes, leurs positions et leurs liaisons. On peut aussi connaître les plans d'ingénieur pour une machine ou un bâtiment.

Pour connaître les causes motrices, il faut connaître l'enchaînement des causes et des effets. Quelles sont les conditions préalables des effets produits ? Quels sont les effets qu'on peut attendre des conditions déjà réunies ?

La connaissance des causes motrices explique l'origine et le mode de production de tout ce qui apparaît. D'où cela vient-il ? Comment est-ce produit ? Comment le fabriquer ?

Elle donne les moyens de prévoir : quelles sont les conséquences à venir des conditions présentes ?

Elle requiert la connaissance des causes matérielles parce que pour savoir ce que ça fait il faut savoir de quoi c'est fait.

Les causes finales sont fondamentales pour trois disciplines scientifiques : la biologie, la psychologie et l'éthique.

Toutes les parties d'un être vivant rendent service aux autres parties. La santé de l'organisme, y compris sa fertilité, est la cause finale ultime de toutes ses parties. La sélection naturelle retient seulement ce qui contribue à la santé d'un individu. C'est pourquoi les molécules, les cellules, les tissus et les organes d'un être vivant ont toujours des fonctions, autrement dit, des causes finales.

La connaissance des causes finales requiert la connaissance des causes motrices, parce qu'il ne suffit pas d'identifier les fins, il faut aussi savoir comment elles sont atteintes, l'enchaînement des causes et des effets. Comme un moyen peut lui-même être considéré comme une fin, pour laquelle il faut réunir d'autres moyens, les causes finales sont liées les unes aux autres de la même façon que les causes motrices.

En se donnant des intentions un esprit choisit lui-même les causes finales qu'il poursuit. On explique les comportements volontaires en connaissant les buts, les directives, les règles, le programme qu'un esprit se donne à lui-même. Les intentions sont en même temps des causes finales et des causes motrices parce qu'elles nous mettent en mouvement.

L'éthique est la science du bien de l'esprit. Le bien est la cause finale ultime pour tous les esprits. Le bien et tous les biens sont en même temps des causes finales et des causes motrices. Par exemple Aristote a rêvé de la science en pensant qu'elle est un bien. Ce rêve du bien l'a poussé à faire la science.

La connaissance des essences est la connaissance théorique des concepts. On connaît les êtres en leur attribuant des concepts, c'est à dire des propriétés ou des relations. Mais comment connaît-on les concepts ? Qu'est-ce que c'est qu'avoir une certaine propriété ou une certaine relation ?

On détermine les concepts de deux façons complémentaires, l'une est emprique, l'autre est théorique. Un concept est déterminé de façon empirique quand on connaît les systèmes d'observation qui détectent sa présence. Il est déterminé de façon théorique quand on connaît les théories à partir desquelles on raisonne avec lui. Une théorie est un système de principes. Les principes sont des axiomes ou des définitions. Connaître les essences, c'est connaître les axiomes et les définitions qui déterminent les concepts.

La connaissance des essences est fondamentale pour la connaissance des trois autres causes, parce que les causes matérielles, motrices et finales sont connues avec des théories et les concepts qu'elles déterminent. Elle est par excellence le savoir du savant, scientifique ou philosophe.

Les quatre causes posent les questions les plus fondamentales auxquelles toutes les sciences sont invitées à répondre. En enseignant les quatre causes Aristote a donné le programme de recherche de toutes les sciences. Aristote a fondé la science en donnant un bon programme de recherches pour toutes les sciences, parce que la cause finale, le programme, est aussi la principale cause motrice.

Les principes de la science sont de deux sortes. Les uns sont des lois fondamentales avec lesquelles on explique la réalité. Les autres sont des presciptions. Ils déterminent l'idéal de la science, les objectifs et les règles, les programmes de travail et de recherche que nous nous donnons pour faire la science. L'idéal de la science est en même temps la principale cause motrice et la cause finale de la science.

Cette leçon est générale : pour bien travailler, il faut se donner des bons principes qui font un bon programme. Cela vaut dans tous les domaines.