Un regard vers le ciel
Hideyuki Ishibashi
Un regard vers le ciel
Une exposition de Hideyuki Ishibashi
en conversation avec une sélection d’œuvres du Cnap organisée par La Capsule
Exposition du 10 octobre 2019 au 04 janvier 2020
Avec François Despatin et Christian Gobeli, Hideyuki Ishibashi, Luigi Ghirri, Olivier Umhauer, Thomas Ruff
Commissariat : Arnaud Lévénès, directeur de La Capsule et Hideyuki Ishibashi artiste en résidence
«Curieux de savoir comment le monde visible se présentât émancipé de notre œil percevant…”
Le monde pour soi et le monde pour nous par August Strindberg, 1894
Les Célestographies de l’auteur suédois August Strindberg ont été produites en 1893-1894 en pleine période d’industrialisation et de modernisation, à l’aube du 20ème siècle. L’invention de la plaque au gélatino-bromure d’argent simplifie grandement la prise d’images, ce qui permet le développement de nouvelles techniques scientifiques telles que l’astrophotographie, la chronophotographie et la radiographie. En d’autres termes, c’est l’époque durant laquelle la photographie devient la “rétine du scientifique”, comme le dit l’astronome français Pierre-César Jules Janssen. De plus en plus, un nouveau monde alors invisible émerge, révélé par la science, bouleversant nos conceptions de distance, de simultanéité, de temps, de sensorialité et de mémoire. Cette révolution provoque malaise, doutes mais aussi suscite l’espoir chez Strindberg et ses contemporains. Tout comme le téléphone, le phonographe ou encore le cinéma en leurs temps ont réécrit nos perceptions et l’usage de nos sens qui sont aujourd’hui de nouveau questionnés par l’apparition d’innovations technologiques.
L’une des caractéristiques majeures des Célestographies, résultat d’une fusion de la sciences naturelles et de l’occultisme, est l’absence de chambre et d’optique. Dans le but de démontrer que notre perception du monde était une illusion car soumise aux limites de notre oeil et de sa construction, Strindberg exposa directement des plaques de verres face à la Lune, le Soleil et les étoiles pour en capturer la lumière et la vraie forme. Il obtint comme résultat un motif irrégulier de petits points, comme une trace de lumière, pensant capturer le ciel constellé. Mais l’on sait en réalité que les informations capturées sur ces plaques ne sont pas la lumière des étoiles. En revanche, ces images de “ ciel nocturne ” nous rappellent le lien invisible entre la matière photosensible et le sujet, car la relation avec celui-ci n’est pas directe mais implicite. Tout comme les philosophes naturalistes et les mystiques ont parfois utilisé la photographie pour décrypter des phénomènes observés, tentant de capturer leur nature cachée, l’alchimiste chez Strindberg apprécia également la poésie et le surnaturel de l’image apparaissant lors des réactions chimiques, la «nature intérieure» du médium photographique. C’est la raison pour laquelle certaines Célestographies sont non fixées afin de rendre l’image photographiée même à la nature. (Quelque chose fait par la nature aussi bien qu’un morceau de nature). [...]
Ici, je tente de faire émerger la forme originale sous différents angles et à différentes époques, différentes techniques photographiques et de questionner la relation entre l’imagination et l’image photographique.
Que pouvons-nous apprendre de ces images « non fixées » après 125 ans ?
Hideyuki Ishibashi
L'Exposition "Un regard vers le ciel" présentée par La Capsule dans le cadre de L’engagement, une manifestation nationale organisée par le Réseau Diagonal en partenariat avec le Cnap et le soutien du ministère de la Culture-DGCA et de l’ADAGP.