La femme fardée

LA FEMME FARDEE Françoise SAGAN

Françoise SAGAN avait habitué ses lecteurs et lectrices à des romans plus minces ; voilà un livre volumineux qui raconte une croisière de luxe, émaillée de paradisiaques escales en Méditerranée. L’auteure croque avec une féroce délectation le microcosme snob et mondain qui peut se payer de tels loisirs : mets fins, service impeccable, alcool à volonté et grande musique. L’ouvrage campe une dizaine de personnages, les très riches, héritiers ou parvenus, et ceux qui tournent autour, escroc ou gigolo, sans oublier le capitaine caricatural, son second et la diva, sensuelle et capricieuse, chargée de divertir ces privilégiés. De livre en livre, la romancière a peint une société oisive, souvent rongée par l’ennui et les relations factices, qu’elle a bien connu. La femme fardée brocarde avec talent un prédateur financier obsédé par la Bourse, une femme du monde qui évoque avec nostalgie ses succès d’antan auprès des hommes, un metteur en scène en vogue qui s’offre une liaison avec une jeune actrice en attente d’un rôle, un intellectuel affichant des idées de gauche mais époux d’une richissime héritière. Si beaucoup jouent avec les sentiments , il existe de rares individus égarés dans ce milieu frelaté à prendre l’amour au sérieux, et le drame couve. A côté de rapports marqués par la vénalité, l’intérêt, l’hypocrisie, ou la force, il existe des êtres moins cyniques, moins violents, moins désabusés. Dans l’ambiance confinée du bateau où jalousies et rivalités s’exacerbent on assiste à la naissance d’un couple, en toute authenticité. La femme trop fardée, piégée par le mariage, se découvre soudain très belle, sans maquillage, et prête à changer le cours de sa destinée.