Frédérique Woerther

CNRS – Centre Jean Pépin UMR 8230


La réception arabe de la Poétique : transmission, traduction(s), et intégration du traité dans le corpus logique d’Aristote

D’après le Fihrist d’Ibn al-Nadīm, deux traductions arabes de la Poétique au moins auraient été réalisées. L’une d’elles, aujourd’hui conservée dans le Parisinus Arabus 2346, a été exécutée par Abū Bišr Mattā ibn Yūnus à partir d’une version syriaque (elle-même identifiée par les spécialistes comme étant le résultat de la traduction gréco-syriaque d’Isḥāq ibn Ḥunayn).

Mon intervention tentera tout d'abord, à partir de remarques historiques et philologiques sur le texte arabe de la Poétique, de retracer l’histoire de cette traduction – en expliquant les raisons de son existence, en caractérisant ses obscurités, et en examinant la traduction de certains termes qui, cruciaux dans le texte grec, n’ont pas pu trouver de correspondants en langue arabe, faute d’un décalage chronologique et culturel trop important.

Il s’agira dans un deuxième temps de considérer la façon dont les philosophes arabes de tradition grecques, les falāsifa, ont lu et interprété la Poétique en l’intégrant dans le corpus dit “élargi” de l’Organon aristotélicien, en forgeant le concept de “syllogisme poétique”, redéfinissant dans le même geste la notion d’“imagination”.

Je conclurai ces remarques en évoquant le Commentaire d’Averroès à la Poétique et sa traduction arabo-latine par Hermann l’Allemand au 13e siècle, et en esquissant brièvement la postérité de ce texte latin dans l’Occident médiéval.