Eloge funèbre Louis Traufler

Eloge funèbre prononcée lors des funérailles de Louis Traufler

Eglise de Flawinne, lundi 4 mai 2015

(par Paul-M. RENARD, secrétaire national)

POTIUS MORI QUAM FOEDARI ... plutôt la mort que l’esclavage, telle était la devise de Louis depuis les premières heures du 10 mai 40 quand il dépose dans les boîtes aux lettres, au nez et à la barbe de l’envahisseur, les premières feuilles de ce qui sera appelé bien plus tard, la Presse Clandestine.

Il faut faire quelque chose et bien ce sera de soutenir le moral des autres qu’il choisira refusant de baisser les bras. Il est très limité en moyens d’actions. Il est âgé de 16 ans. Il devra patienter jusqu’à 18 ans pour rejoindre les Services de Renseignement et d’Action. C'est le réseau Zéro, plus de 5000 membres couvrant tout le territoire belge qui l'accueille, fl sera un courrier efficace et discret, deux qualités que Louis conservera toute sa vie, même si la fougue de la jeunesse aidant, il ne renoncera pas à prendre quelques risques avec les saboteurs du Groupe G.

Son éducation familiale stricte lui a montré le chemin. Il sera un de ces 18.800 ARA (Agents de Renseignement et d’Action). Un de ces civils secrets et , dévoués jusqu’à la mort toujours probable, qui inlassablement et quotidiennement, va passer entre les mailles d’un filet qui se resserre chaque jour. Face aux amis qui tombent, Louis tiendra ces propos qui le classent parmi les vrais Résistants : « pourquoi ai-je survécu ?». Car ces civils, femmes et hommes comme vous et moi, agissaient pour la liberté du pays, « Notre » Belgique, et oeuvraient telles les taupes creusant leurs galeries sous les pieds des occupants.

Les Services de Renseignement et d’Action rassemblent plus de 129 réseaux d’informateurs secrets fournissant des informations économiques, sociales et militaires à la Sûreté de l’Etat du gouvernement belge retranché à Londres. Ils permettent la prise d’importantes décisions par les commandements militaires alliés.

Ce vendredi soir, à la télévision, sur La Une, passera une émission qui leur est consacrée, LA MAISON DE VERRE. Louis est un de ces hommes de l’ombre d’une rare efficacité. Les informations qu’il transmet permettront la prise de décisions très importantes pour passer à l’action sur le terrain, d’où le nom des Services de Renseignement et... d’Action.

Des noms comme Clarence, Luc-Marc, Zéro, Groupe G, Comète, Samoyède, Socrate, Baboon-Othello, Bayard, ... vous sont peut-être connus, certes, mais

la multitude de ces réseaux ou services démontrent combien chaque citoyen a un rôle à accomplir pour son pays dans le milieu où il vit ... et cela reste vrai encore aujourd’hui, en 2015. C’est l’exemple que nous lègue Louis.

Après ce film sur La Une, LA MAISON DE VERRE, vous aurez l’occasion de voir comment un de ces services ou réseaux fonctionnait, à savoir COMETE, qui ramenait en Angleterre des Résistants « brûlés » et surtout des pilotes d’avions tombés non seulement parce que leur avion venait d’être abattu par la défense aérienne (la terrible DCA), mais aussi à cause des mauvaises conditions climatiques, ou de pannes mécaniques. Pouvez-vous imaginer un pilote australien de grande taille à la chevelure rousse ne parlant que l’anglais, accompagné de la gare du midi à Bruxelles jusqu’à Gibraltar, par un relai d’accompagnateurs voire accompagnatrices ne parlant que le français ... et passant avec succès de nombreux contrôles policiers sur le trajet ? Il fallait traverser les rivières (ils ne savaient pas tous nager !) et les Pyrénées par tous les temps (certains n’étaient pas en état physique de la faire) !

C’est dire que les résultats de ces ARA ont été exceptionnels au point que ces 18.800 agents reconnus l’ont été avec la reconnaissance « au front » et avec des grades militaires. Même des femmes qui en faisaient partie se sont vues attribuer des grades d’officiers. Mais à une époque où il n’y avait pas de femme à l’armée si ce n’est dans le service social, c’est quand même quelque chose d’important à signaler.

VIVRE, c'est aimer, donner et se donner !

Qui mieux que Louis l’a prouvé dans toutes ses très nombreuses activités familiales aussi, mais surtout d’homme profondément engagé pour les autres, (Louis a milité pour la défense des valeurs sociales des travailleurs quand il était encore actif dans le monde du travail), et jamais il n’a cessé de militer pour son Pays, La Belgique.

La Grandeur d’un homme n’est pas dans ce que les autres en racontent, mais ce qu’il a accompli discrètement pour les autres.

Quand résonnera la Brabançonne, sentons en nous tout l’Amour de Louis pour son Pays, son Roi et son Drapeau qu’il a porté avec dignité pendant de très nombreuses années.

Merci Louis, tu nous montres la voie à suivre. Maintenant que tu nous suis de là-haut, guide nos pas ici-bas. Rends-nous forts et puissants quand il s’agit de défendre notre pays, la Belgique.