Il s'agit d'un sujet très sensible, je vais essayer de clarifier les notions avec quelques exemples pris au travers de mes fonctions
On parle souvent de faute en mélangeant ca qui est du ressort
de l'être humain: quiconque peut le faire (faute personnelle)
du fonctionnaire: telle faute a été commise pendant le service mais dans un autre cadre, l'accident ne serait pas arrivé (faute personnelle non détachable de la fonction)
du fonctionnaire qui a "oublié sa fonction" durant son service : faute personnelle détachable de la fonction
du fonctionnaire qui en service et sans faute de sa part, assisté à un accident: faute de service
ces entrées sont souvent confuses: un enseignant qui a une classe très difficile donne une gifle à un élève n'a pu commettre cette faute que parce qu’il était en service, faute personnelle détachable ou non de la fonction?
un élève se retourne et reçoit dans l'oeil la plume de son camarade: faute de service? ou faute personnelle non détachable de la fonction?
Le Code civil prévoit que chacun est tenu de réparer le dommage qu’il cause à autrui. (texte de portée générale applicable à tous)
Le droit administratif en revanche, prévoit que la responsabilité personnelle de l’agent ne peut être engagée que lorsque la faute commise se détache des conditions normales d’exercice du service. Le droit administratif distingue la faute personnelle imputable à l’agent ou détachable du service) de la faute de service imputable à l’administration (non détachable du service)
La distinction entre la faute de service et la faute personnelle repose sur une jurisprudence ancienne du Tribunal des conflits, selon laquelle la faute personnelle est la faute d’un agent «comportant une intention de nuire ou présentant une gravité inadmissible » (TC, 30 juillet 1873, Pelletier).
La victime peut poursuivre l’agent lorsque celui-ci a commis une faute dite « personnelle». Il n’existe en effet aucune raison de faire endosser à l’administration la faute qui relève exclusivement des agissements fautifs d’un de ses agents. La faute par un agent en dehors de l’exercice de ses fonctions doit naturellement être considérée comme une faute relevant de la seule responsabilité de l’agent (CE, 23 juin 1954, Veuve Litzler). Le problème devient plus complexe lorsque la faute commise par l’agent est commise dans l’exercice de ses fonctions. Selon Édouard Laferrière, la faute personnelle est celle qui « révèle l’homme avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences ». La faute personnelle est donc celle qui laisse transparaître l’homme pris individuellement et non l’agent public. Pour mettre en évidence la faute personnelle, la jurisprudence administrative retient deux séries d’hypothèses, la faute intentionnelle commise dans le cadre du service mais détachable du service(1) et la faute détachable du service mais non dépourvue de tout lien avec le service.
La faute est commise dans le cadre du service mais elle est détachable du service car l’agent par son comportement trahi une préoccupation personnelle. par exemple: demander à un élève d'aller faire des courses pour l'enseignant durant le temps de classe fait réel),
un autre exemple consiste en des détournements de fonds dans le cadre de l'OCCE
1.1.1.1 La faute intentionnelle
Le juge administratif retiendra la faute personnelle même dans le cadre du service lorsque se manifeste, dans le comportement de l’agent, une intention malveillante ou un désir de nuire. Par exemple, constituent une faute personnelle des propos injurieux adressés par un agent à l’encontre d’un administré, ou les violences infligées par un agent de la poste à un usager (TC, 14 janvier 1980, Dame Técher). La faute est également réputée personnelle lorsque l’agent a entendu poursuivre, à travers l’exercice de ses fonctions un intérêt exclusivement personnel. Par exemple l’agent qui a commis un détournement de fonds à l’occasion de sa participation au service commet une faute personnelle (CE, 21 avril 1937, Delle Quesnel).
1.1.1.2 La faute d’une gravité inadmissible
La faute commise par un agent peut être qualifiée de faute personnelle si elle dépasse la moyenne des fautes auxquelles on peut s’attendre d’un agent qui effectue ses missions avec une diligence normale. Le plus souvent cette faute doit être « manifeste et d’une exceptionnelle gravité ». Un commissaire de police laissant abattre une personne qui s’était réfugiée dans son commissariat commet une faute grave (TC, 9 juillet 1953, Veuve Bernadas). De même, commet une faute grave le pompier qui provoque un incendie en jetant, par négligence, une cigarette allumée dans une grange (CE, 27 février 1981, Commune de Chonville-Malaumont).
autre exemple: pendant une période de deux ans un instituteur à infligé des violences consistant notamment en gifles et coups, sur une quinzaine d’enfants de l’école primaire où il travaillait.
La faute est commise en dehors de l’exercice normal des fonctions (en dehors du service) il s’agit donc d’une faute personnelle. Toutefois, la faute est commise soit à l’occasion du service soit avec les moyens du service. Dans ce cas, la faute est donc liée au fonctionnement de l’administration. Par exemple, un officier qui manipule son arme de service à son domicile et blesse mortellement sa femme.
La faute de service se présente comme l’envers de la faute personnelle. Le juge retient la faute de service chaque fois que le fait à l’origine du dommage subi par la victime ne laisse pas apparaître la personnalité d’un agent. Dans ce cas, c’est à l’administration de répondre des conséquences de la faute. La faute de service est la faute commise par un agent qu’aurait pu commettre n’importe quel autre agent placé dans la même situation. Elle correspond également aux situations dans lesquelles le dommage s’explique par une succession de faute qui s’imbriquent les une dans les autres pour arriver au dommage sans que l’on puisse dire qu’une faute est plus déterminante qu’une autre.
Le rôle traditionnel que remplit la faute de service, est de fonder la compétence de la juridiction administrative et de conditionner le recours intenté par la victime contre la puissance publique.
des exemples: accident dans la cour de récréation jonchée de feuilles (ou de neige)
LA PROTECTION JURIDIQUE
Depuis la loi du 16 décembre 1996 le statut général de la fonction publique prévoit que la protection est due aux fonctionnaires mais aussi aux agents non titulaires, aux stagiaires ainsi qu’aux retraités. Cette protection s’applique enfin aux agents placés en disponibilité, détachés ou mis à la disposition d’un organisme privé si la demande de protection résulte de faits qui ont été commis dans l’exercice de leurs fonctions au sein d’un organisme public.A noter que cette protection est due aux agents par la collectivité dont ils dépendent à la date à laquelle il est statué sur leur demande précise le Conseil d’Etat ( arrêt du 5 décembre 2005, Commune de Cendre)
Par ailleurs, ajoutons que deux lois du 18 mars 2003 et du 24 novembre 2009 sont venues étendre la protection fonctionnelle aux proches de certains agent publics pour cause de décès du fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions ou, en raison d’atteintes portées à l’encontre des membres de la famille de ce dernier.
Comment est-elle accordée ou refusée ?
Le fonctionnaire victime d’une agression ou poursuivi devant une juridiction répressive en informe son administration et présente une demande motivée ; aucun délai précis ne lui est imposé pour formuler sa demande et l’administration précise la circulaire, devra « dans toute la mesure du possible y apporter une réponse écrite ».
Spécialement, concernant les agressions physiques ou verbales subies par un fonctionnaire de l’Éducation nationale, il s’agira pour l'agent victime d'une telle agression de la déclarer à son chef d'établissement dans les meilleurs délais. L'agent victime de tels faits, qu’il soit ou non en service, et quel qu'en soit le lieu, devra pour se voir attribuer le bénéfice de la protection, établir le lien d'imputabilité au service étant le lien entre le dommage subi et ses fonctions d'agent. Il devra porter plainte à titre personnel auprès des services de police ou de gendarmerie s'il désire solliciter la protection juridique auprès du recteur.
Le chef d'établissement, qui n'a pas en principe à porter plainte en tant que tel, transmettra directement au recteur (service juridique) avec copie à l'inspecteur d'académie :
Le recteur dispose d'une compétence exclusive pour accorder la protection statutaire dès lors qu'un lien avec le service est établi dans le dossier. Ainsi, c’est au recteur qu’il reviendra de saisir par écrit le Procureur de la République en lui demandant d'engager une procédure judiciaire contre l'auteur de l'agression ou contre X, c’est également lui qui prendra en charge les frais de procédure du fonctionnaire (honoraires d'avocat ... ) non pris en charge par son assureur privé. Quant aux dégradations des biens appartenant aux fonctionnaires de l’Éducation nationale, notons qu’il s’agit la pour l'essentiel des dégradations des véhicules automobiles.
Dans ce cas, le chef d'établissement transmettra directement et dans les meilleurs délais, les mêmes documents que précédemment, avec copie à l'inspecteur d'académie. Comme précédemment, le lien d'imputabilité au service devra être établi. En effet, il ne faut pas confondre le dommage causé au véhicule d'un fonctionnaire au cours de son service et le dommage causé au véhicule d'un fonctionnaire du fait de ses fonctions. Seul ce dernier cas est concerné par la protection statutaire, que le fonctionnaire soit ou non en service. Le fonctionnaire devra informer son assureur et porter plainte.