Bouillet-Chassang
Quinault, Philippe, poète dramatique, né en 1635 à Paris ou à Felletin, m. en 1688, était fils d'un boulanger. Protégé dans sa jeunesse par Tristan-l'Ermite, qui lui inspira le goût de la poésie, il donna dès l'âge de 18 ans une comédie, les Rivales, qui eut du succès. Voulant se faire un état, il travailla chez un avocat et devint lui-même avocat au parlement; il acheta ensuite une charge d'auditeur en la chambre des comptes, puis de valet de chambre du roi. Il n'en cultivait pas moins les lettres, et donnait chaque année une nouvelle pièce, comédie ou tragédie. Celles qui eurent le plus de succès furent : l’Amant indiscret (1654), la Mère coquette (1665), comédies; la Mort de Cyrus, Agrippa ou le Faux Tiberinus (1661), Astrate (1664), tragédies. Ce n'est qu'assez tard qu'il commença à s'exercer dans le genre lyrique, qui fait aujourd'hui toute sa réputation : il donna en 1672 son premier opéra, et depuis il ne cessa, pendant 14 ans, de produire des tragédies lyriques, dont plusieurs sont des chefs-d'œuvre; Lulli les mettait en musique. II renonça en 1686, par scrupule de religion, à travailler pour le théâtre. Il avait été reçu à l'Académie Française dès 1670. Louis XIV le décora du cordon de St-Michel et lui fit une pension de 2000 livres. Ses principaux opéras sont : Cadmus, 1672; Alceste, 1674 ; Thésée, 1675 ; Atys, 1676 ; Isis, 1677 ; Proserpine, 1680 ; Persée, 1682 ; Phaéton, 1683 ; Amadis, 1684; Roland, 1685, et Armide, 1686, son chef-d'œuvre; tous sont en 5 actes. Il travailla aussi avec Molière et P. Corneille à Psyché, tragédie-ballet, dont il fit toute la partie chantée. Ses œuvres ont été imprimées avec sa vie à Paris, 1739 et 1778, 5 vol. in-12 ; ses Œuvres choisies ont été publiées en 1824 et 1842. Quinault peut être considéré comme le créateur de la tragédie lyrique, et il l'a tout d'un coup portée à la perfection. Ses vers sont remarquables par la douceur et l'harmonie, mais ils ne manquent au besoin ni de noblesse, ni d'énergie. Boileau l'a sévèrement jugé ; mais ses critiques s'adressent surtout à la 1re époque de Quinault, à celle où il n'avait pas encore trouvé sa voie.
Bouillet et Chassang, Dictionnaire universel d'histoire et de géographie, Paris, Hachette, 1878