La pêche industrielle

«Ce n'est pas parce que les poissons sont incapables de crier que leur mort est moins violente. Ramasser des oiseaux sauvages dans un filet et les noyer lentement, en les plongeant dans l'eau, semble difficilement acceptable et pourtant c''est l'équivalent de la pêche commerciale. Que dirait-on aussi d'une industrie qui installerait verticalement des filets mesurant plusieurs centaines de mètres de hauteur et s'étendant sur plusieurs kilomètres à travers champs et forêts, dans le but d'accrocher au passage tous les oiseaux sauvages, migrateurs ou autres, et les laisserait mourir là ? Ce n'est pas parce que cette pratique a lieu sous les mers qu'elle devient acceptable.»

Albert Simon

La consommation mondiale de produits aquatiques a doublé ces 30 dernières années, passant de 6 à 16 kg/personne/an. En 2006, la production mondiale s'élevait 144 millions de tonnes de poissons, mollusques et crustacés, dont 92 millions de tonnes pour la pêche et 52 pour l’aquaculture.

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« Les stocks de poissons sont actuellement pillés ou exploités à un rythme insoutenable à travers le monde. Il s’agit d’un échec majeur de la gestion de nos ressources, cet échec prendra des proportions monumentales s’il n’est pas pris en compte rapidement. » explique Achim STEINER, secrétaire adjoint de l’ONU et directeur exécutif du PNUE.

1% de la flotte mondiale assure à elle seule 50% de la capacité de la pêche mondiale avec des chalutiers immenses ( dont certains ont la capacité de 7 boeings 747 ! ) et des bateaux-usines à proximité pour accélérer la commercialisation des produits de la mer. (source animal-cross.org)

La demande accrue de produits de la mer a très vite généré une course au profit : 10 milliards de dollars / an pour ce qu’on appelle la pêche-pirate. Elle se pratique soit sous pavillon de complaisance (que l’on peut acheter sur le net !) soit au sein d’une flotte officielle, en général le long des côtes africaines qui sont les moins surveillées. Dans tous les cas il s’agit de navires non-autorisés qui n’hésitent pas à prélever des espèces hors des zones attribuées par les concessions de pêche, parfois même jusque dans les zones de reproduction. Ces prélèvements sont rapidement traités dans les navires-usines à proximité. La traçabilité de la pêche devient vite impossible …..et les étals de nos commerces regorgent de poissons braconnés.

La situation en France est à ce propos révélatrice : c’est un des grands pays pêcheurs de l’Union Européenne - depuis les années 90, les pêcheries débarquent environ 600 000 tonnes/an de produits de la mer - mais la production nationale ne couvre qu’un tiers environ de la demande, d’où de fortes importations. En effet les Français sont, en Europe, parmi les plus grands consommateurs de produits de la mer : en moyenne 36 kg/habitant/an .(source animal-cross.org)

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Les "prises accessoires "

Chaque année, plus de 300 000 petits cétacés (baleines, dauphins, marsouins) meurent empêtrés dans les filets de pêche. De très nombreuses tortues subissent le même sort, dont des espèces en danger ou en voie d’extinction (250 000 tortues caouanes et tortues luth). La pêche cause aussi une mortalité considérable parmi les oiseaux marins (fous, guillemots, macareux, albatros, pétrels...) : ils plongent pour capturer des poissons et se trouvent pris dans des filets ou avalent un hameçon appâté fixé à une palangre. La moitié des 125 espèces de pétrels et 16 des 21 espèces d’albatros sont considérées en danger d’extinction. ( source : Viande.info )

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La "pêche fantôme"

La « pêche fantôme » désigne la prise d’animaux par des équipements de pêche perdus ou abandonnés en mer (filets, pièges et nasses). Selon un rapport de la FAO et du PNUE publié en mai 2009, ces équipements représenteraient 10% des déchets marins (soit 640 000 tonnes). Ils causent la mort d’innombrables animaux, altèrent les fonds marins et constituent des dangers pour la navigation. Ainsi, quand un filet maillant est perdu ou abandonné, il continue à pêcher tout seul pendant des mois ou des années. L’extrémité du filet est ancrée au fond de la mer et des bouchons sont attachés au sommet. Ainsi, il forme un mur vertical sous-marin long de 600 à 10 000 mètres, dans lequel vont se prendre toutes sortes d’animaux.( source : Viande.info )

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  • Plus de 40 % des océans sont très endommagés et très peu d’eaux marines restent vierges.

En 2009, 154 000 000 000 kilos de poissons ont été pêchés ou produits, soit pas loin de 4,9 tonnes de poissons chaque seconde. Autrement dit, les pêches de capture et l'aquaculture ont produit en 2009 plus de 154 millions de tonnes de poissons, soit 4.883 kilos par seconde ! ( source : Planetoscope )

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Les 10 espèces de poisson le plus pêchées sont l’anchois du Pérou, le lieu de l’Alaska, la bonite à ventre rayé, le hareng de l’Atlantique, le merlan bleu, le maquereau blanc, le chinchard du Chili, l’anchois du Japon, le poisson-sabre commun et le thon albacore.

En 2008, près de 81% de la production halieutique mondiale étaient destinés à la consommation humaine, le reste servant principalement à la production de farine ou d’huile de poisson, l’élevage, l’appâtage et les utilisations pharmaceutiques.

La congélation représentait près de 50% du total du poisson transformé destiné à la consommation humaine et 20,5% de la production totale de poisson en 2008 . ( source : Planetoscope )

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Dans la pêche à la seine tournante et enveloppante, le bateau encercle un banc de poissons avec un filet (seine), qui est ensuite resserré, puis hissé et généralement vidé dans de la saumure liquide maintenue sous 0°C. Ceux qui ne meurent pas écrasés ou étouffés sont victimes de choc thermique. Cette méthode, employée pour pêcher les thon à nageoires jaunes, a provoqué une tempête de protestations en faveur des dauphins qui nagent au-dessus des thons et se prennent dans le filet avec eux. Mais peu de voix se sont élevées contre la mort qui est administrée aux thons eux-mêmes. Et les thons sont eux aussi des animaux sensibles aux vibrations, dont il est clair qu'ils sont eux aussi terrorisés et blessés par les canots à moteur et les explosions sous-marines qui rassemblent les dauphins en un lieu. L'onde de pression d'une détonation sous-marine peut rompre la vessie natatoire d'un poisson.(...)

Dans la pêche au chalut, un bateau se déplace en traînant derrière lui à travers l'eau un énorme filet. Tous les poissons qui y entrent sont poussés par le mouvement de traction en direction de son extrémité en cul de sac effilé. Pendant un temps qui peut durer de une à quatre heures, les poissons pris sont tirés et pressés à hue et à dia les uns contre les autres, ensemble avec divers débris et cailloux que ramasse le filet sur le fond. Dans Distant Water : The Fate of the North Atlantic Fisherman, William Warner écrit d'une capture : « le frottement des poissons les uns contre les autres du à l'agitation et à la compression prolongées dans le filet leur avait usé les écailles acérées ». « Les frottements, en fait, leur avaient complètement mis les flancs à vif. »

La décompression que subissent les poissons devient insoutenable dès lors que leur remontée forcée a lieu depuis une certaine profondeur. La chute de la pression provoque une dilatation du gaz enfermé dans leur vessie natatoire, qui ne peut pas être compensée assez rapidement par une absorption dans la circulation sanguine. Il arrive souvent que la pression interne qui en résulte fasse éclater la vessie natatoire, ou sortir les yeux de leurs orbites, ou l'oesophage et l'estomac par la bouche. « Beaucoup parmi eux n'avaient que des trous vides là où auraient dû se trouver les yeux », rapporte Warner d'une de ses observations sur un chalutier. Une autre fois, il remarqua lors de la remontée du filet « une grande écume de bulles... provenant des milliers de vessies natatoires rompues . »

Les poissons relativement petits tels les flets sont d'ordinaire déversés sur de la glace pilée ; la plupart y meurent d'étouffement ou écrasés par les couches suivantes. Les poissons plus grands tels aiglefins ou morues sont vidés sur le pont. William MacLeish décrit la méthode de tri qu'il a vue pratiquer : l'équipage larde les poissons de coups au moyen de courtes tiges pointues, « jetant ici les morues, là les aiglefins, là-bas encore les queue-jaunes » [Yellowtail]. Ensuite, on leur coupe la gorge et le ventre (pas nécessairement dans cet ordre). Entre-temps, les poissons non désirés (« déchets »), qui représentent parfois la majorité de la prise, sont rejetés par dessus bord, parfois à la fourche.

En un seule après-midi, les pêcheurs peuvent poser jusqu'à 60000km de filets maillants, qui, dans les hautes eaux du Pacifique, sont surtout des filets dérivants, mais qui peuvent être aussi dans les eaux côtières des filets amarrés. Ce sont des filets en plastique munis de flotteurs sur un bord et lestés de l'autre, qui pendent comme des rideaux sous la surface, généralement jusqu'à une profondeur de 10m. En plus de la mort non intentionnelle de plus d'un million de mammifères, de tortues et d'oiseaux chaque année, ces filets infligent une souffrance énorme aux poissons.

Ceux-ci ne voient pas le filet et nagent droit dedans. Si leur taille est trop grande pour qu'ils passent à travers, ils se coincent la tête dans une maille. Ils tentent alors de reculer, mais la maille les prend par les opercules des branchies ou par les nageoires. Beaucoup d'entre eux vont alors mourir étouffés. D'autres luttent si désespérément dans les mailles coupantes que souvent ils saignent et meurent vidés de leur sang, qu'ils aient ou non réussi à se libérer. Beaucoup de pêcheurs ne remontent pas leurs filets tous les jours, et la mort peut mettre plusieurs jours à venir. Dans Sports Illustrated (16 mai 1988), le journaliste Clive Gammon décrit les morues ramenées après deux jours. Beaucoup d'entre elles étaient « sans yeux, sans nageoires, sans écailles » ; de nombreuses autres avaient été dévorées par des puces de mer. Les poissons immobilisés sont une proie sans défense (les prédateurs qu'ils attirent se prennent souvent eux aussi dans les filets). Quand le filet est remonté, les poissons sont extraits au crochet.

Certains pêcheurs commerciaux prennent encore les poissons les plus gros et précieux (les espadons, les thons et les requins) au harpon, ou les crochètent individuellement. Mais bien plus souvent ils les prennent par palangres flottantes (ou « longues lignes »). Cette méthode, également employée pour des poissons plus petits, consiste à dérouler une grande longueur de fil (jusqu'à 50km) portant des centaines ou des milliers de hameçons munis d'appâts.

Texte de Joan Dunayer tirés de Cahiers antispécistes