Noël ! Cette fête qui célèbre à la fois la naissance de Jésus et les promotions sur les machines à pain semble redevenir à la normale après l’accalmie de la pandémie de Covid19. 

Nous recommençons à faire de vrais dîners de famille et les vieilles habitudes reprennent. Cependant, malheureux serait « celiel » qui penserait que les retrouvailles familiales et amicales permises par Noël ne soient pas sans nouveautés ! Il s’agit là d’un moment qui permet à quiconque par sa vue, son odorat ou son ouïe de nager dans l’inconnu le plus total et de vivre d’incroyables et vivaces découvertes ! Oublions notre oncle qui crache sur la société en élaborant des théories fumeuses sur la vie. Ces théories, elles-mêmes tirées de conclusions personnelles faites à partir de sa dure et longue vie de labeur qui, au lieu de lui ouvrir l’esprit, n’a que modelé sur-mesure de parfaites œillères accrochées solidement à ses tempes. 

Prenons un temps de méditation individuelle, inspirons longuement et expirons deux fois plus longuement. Une fois chose faite, la salle à manger s’éclaircit et nous voyons au-delà de notre assiette remplie de victuailles qui semblent ne jamais s’amenuiser. Plusieurs faits et gestes nous surprennent alors. On remarque de nouveaux objets, de nouvelles boucles d’oreilles, deux ou trois lèvres bizarrement plus pulpeuses que l’année précédente mais aussi et surtout des habitudes inédites qui qualifient désormais certains de nos proches. Il convient en effet de s’attarder sur le processus de découverte de certains membres de la famille que l’on connaît pourtant depuis notre naissance : ces cousins et cousines qui viennent à peine de devenir parents pour la première fois ! On les remarque tout de suite à des kilomètres, ces petits couples qui viennent tout juste d’accueillir leur premier enfant : le père qui avance toujours à un rythme lent, la mère marchant les épaules basses à l’image d’une ado de 15 ans, des vêtements rarement bien arrangés et surtout, des cernes de la taille de hamacs. C’est le premier bébé ! Dès l’instant de sa première respiration, nos cousins et cousines sont définitivement changés, plus jamais nous ne les retrouverons dans un état similaire à leur état pré-parental. Tout d’abord, dès leur arrivée à la fête, impossible de souhaiter un « Joyeux Noël ! » sans être coupés court par un « Chut ! » très long suivi par un « Salut, elle dort enfin ! T’as pas une pièce au calme où l’installer assez loin de la salle à manger mais pas trop non plus ? Une pièce qui soit réchauffée mais à une température convenable dans laquelle les meubles ne sont pas trop hauts pour ne pas qu’elle se sente étouffée avec de préférence des murs bleus car elle adore la couleur de l’eau du sud pacifique ? ». C’est ce genre d’entrée en soirée qui marque le plus souvent le début de la fin. 

Il s’en est suivi d’un va-et-vient incessant pour vérifier le souffle de la gamine en passant le célèbre doigt sous le nez de l’enfant, doigt qui soi-disant passant venait de toucher malencontreusement du saumon, autant vous dire que si la gosse était morte elle se serait réveillée illico. 

Plus tard, quand la cousine est enfin assise sur sa chaise et pas auprès de son enfant qui souhaite uniquement dormir en paix, il est tout autant compliqué de finir une discussion sans parler d’autre chose que de l’éducation de son bébé qui lui paraît devoir être bien meilleure que celle que ses parents lui ont donnée. Cela peut malheureusement nuire à votre forfait téléphonique en raison d’un long appel passé avec le Samu pour essayer de réanimer les dits parents. 

Cependant, une des choses les plus frappantes durant ce type de Noëls, c’est qu’il est interdit de dépasser un niveau sonore de 75 dB, sachant que le niveau moyen d’une pièce calme est de 85 dB, le défi peut être très difficile à relever d’autant plus que l’alcool ne rend pas silencieux. Ainsi, avec les incessants « Chut ! » à répétition faisant monter la tension, des disputes peuvent vite éclater. Mais heureusement, avant qu’un froid ne s’installe dans la demeure des hôtes, un message met immédiatement fin aux requêtes incessantes de baisse de volume. Il s’agit de la photo des selles de la petite que le mari vient d’envoyer à sa femme de la pièce d’à côté avec en légende : « Ça va la matière ? Qu’est-ce que t’en penses de la couleur ? L’odeur est un peu particulière. ». La situation est si déconcertante et hilarante que la seule chose qui nous vient à l’esprit est de leur répondre : « Mais comment ça ? Oh ! C'est pas un canapé, c’est de la merde ! »… Alors oui bien entendu il est préférable de ne pas leur révéler notre avis immédiat sur ce message cocasse car en raison de la fatigue et du stress, la petite équipe pourrait bien péter les plombs. Plus encore, ce sont les malentendus futiles au sein du jeune couple qui sont réellement drôles. Il s’agit d’une espèce de clash/dispute mais à voix basse, on peut même, si on ferme les yeux, se croire en pleine séance d’ASMR. D’ailleurs, cette illusion auditive pourrait peut-être profiter au nouveau-né qui arriverait ainsi à mieux s’endormir, qui sait, cela pourrait même être le sujet de la prochaine étude en date des chercheurs sur le bien-être des bébés après-tout ! 

Enfin, ce Noël rythmé par les désirs du seul individu qui vient à cette fête sans apporter un seul cadeau mais qui en reçoit davantage que le nombre de kilos qu’il pèse, finit d’apporter de la nouveauté avec le départ du petit trio dans la même atmosphère qu’à leur arrivée, mêlant les « chut » aux salutations! 

Comme quoi, le soir de Noël qui peut sembler être la fête la plus banale de l’année peut autant permettre de découvrir et de rire qu’un spectacle de mimes. 

Léo Di Giorgio