Les autorités de surveillance de la santé enquêtent sur un médicament populaire contre la perte de cheveux après que le nombre d'hommes signalant des effets secondaires graves, notamment la dépression, l'insomnie, la baisse de la libido et les troubles de l'érection, a triplé depuis 2020.
Les chiffres du gouvernement montrent également que le médicament, le finastéride, a été associé à au moins 70 rapports de patients souffrant de pensées suicidaires en tant qu'effet secondaire présumé.
Il est prouvé que cette pilule quotidienne fait repousser les cheveux et qu'elle est prise par des millions d'hommes dans le monde entier - bien que le nombre exact d'utilisateurs au Royaume-Uni ne soit pas clair, car le médicament n'est pas prescrit pour la perte de cheveux par le NHS.
Des études antérieures ont suggéré que le finastéride est sûr et efficace. Mais certains utilisateurs ont signalé des troubles de l'élocution, une gynécomastie (croissance douloureuse du tissu mammaire) et un rétrécissement du pénis.
Certains affirment que les symptômes persistent longtemps après l'arrêt du traitement, un état que les patients ont baptisé "Syndrome Post-Finasteride".
Merck & Co, qui a créé le finastéride, a longtemps nié tout lien avec de graves effets secondaires à long terme, mais a versé des millions de dollars pour régler des procès avec des patients américains.
Le Mail on Sunday a appris que l'Agence britannique de réglementation des médicaments et des produits de santé (MHRA) a lancé un examen de la sécurité du médicament.
Le finastéride est prescrit par le NHS aux hommes souffrant d'une hypertrophie de la prostate, mais l'examen ne portera que sur son utilisation dans le traitement de la chute des cheveux.
Selon les experts, la recrudescence des déclarations d'effets secondaires est due en grande partie à l'émergence de sociétés en ligne qui vendent le finastéride pour traiter la chute des cheveux sur ordonnance privée.
Les patients commandent le médicament sur Internet après avoir rempli un questionnaire en ligne qui est signé par un clinicien interne.
Simon Breidert, président de la Post-Finasteride Syndrome Research Association, déclare : "Les pharmacies en ligne sont en mesure de commercialiser librement ce médicament comme une solution rapide et facile à la perte de cheveux.
Les hommes qui ont honte de perdre leurs cheveux sont des proies faciles. Nous avons besoin d'une réglementation plus stricte afin que seuls les médecins puissent prescrire le finastéride, et non des sites web.
La MHRA a commencé à interroger les personnes qui affirment souffrir du syndrome post-finastéride.
Ryan Clark, 56 ans, défenseur des patients, qui s'est entretenu avec des représentants de la MHRA la semaine dernière, déclare : "Je souffre de cette horrible condition depuis la fin des années 1990, et j'essaie de faire en sorte que la MHRA prenne des mesures depuis 2017. Les gens doivent être correctement informés des risques liés au finastéride avant de le prendre. Ces effets secondaires ont été dévastateurs et ont progressivement aggravé mon état au fil des ans.
Plus d'un million d'hommes prennent ce médicament aux États-Unis, dont l'ancien président Donald Trump.
Il agit en bloquant la conversion de l'hormone mâle testostérone en dihydrotestostérone, ou DHT. On pense qu'un taux élevé de DHT entraîne la chute des cheveux en rétrécissant les follicules du cuir chevelu.
À l'origine, le finastéride a été mis au point, et pris à des doses plus élevées, pour traiter l'hypertrophie de la prostate. Mais les utilisateurs ont rapidement commencé à observer une croissance inattendue des cheveux.
Lors d'études portant sur des doses plus faibles, plus de 80 % des hommes ont cessé de perdre leurs cheveux et 65 % d'entre eux ont vu leurs cheveux commencer à repousser, souvent en l'espace de quelques mois.
Les premières études ont montré que, dans environ 4 % des cas, la prise de finastéride peut entraîner des problèmes temporaires de santé mentale et des troubles de l'érection. Les sites web qui vendent le traitement avertissent que ces symptômes peuvent survenir.
Mais le Syndrome Post-Finasteride, où les symptômes persistent pendant des mois et des années après l'arrêt du médicament, est vivement contesté.
La société américaine Hims, spécialisée dans la santé masculine et qui vend également le finastéride au Royaume-Uni, a récemment déclaré : "Il n'y a pas beaucoup de preuves scientifiques de haute qualité pour étayer son existence". Le NHS affirme que les effets secondaires graves sont "rares", se produisant chez moins d'une personne sur 1 000, et ne reconnaît pas le syndrome.
Cependant, en 2021, l'agence de presse Reuters a déclaré avoir obtenu des documents judiciaires américains montrant que les autorités sanitaires américaines avaient reçu plus de 700 rapports de suicide et de pensées suicidaires liés au médicament depuis 2011. Parmi ceux-ci, au moins 100 suicides ont été signalés. Les documents révèlent également que Merck & Co a payé environ 3,5 millions de livres sterling pour régler des procès intentés par des personnes affirmant souffrir d'effets secondaires persistants.
Devant le tribunal, Merck a nié que le médicament ait causé des problèmes de fonction sexuelle après que les hommes aient cessé de le prendre, ainsi que des liens avec des maladies mentales. Les plaintes ont été réglées sans reconnaissance de responsabilité.
Dans sa déclaration à Reuters, Merck a déclaré : "Bien que les consommateurs et les professionnels de la santé soient encouragés à signaler les effets indésirables, la réaction peut avoir été liée à la maladie sous-jacente traitée, ou causée par un autre médicament pris simultanément, ou s'être produite pour d'autres raisons".
Un article publié en 2020 par l'université Baylor au Texas a examiné l'effet du finastéride sur un groupe de 25 jeunes hommes et a constaté que près de 70 % des participants à l'étude ont subi un rétrécissement anormal du pénis.
Les médecins qui prescrivent le médicament affirment que le risque d'effets secondaires graves est rare, mais ajoutent qu'il est irresponsable de laisser les pharmacies en ligne le distribuer, compte tenu de sa puissance.
Le Dr David Fenton, dermatologue consultant à Harley Street, contrôle régulièrement les taux d'hormones de ses patients traités au finastéride. Il déclare : "Le médicament abaisse le taux de DHT, mais il s'agit d'une hormone dont l'organisme a besoin. Par conséquent, si quelqu'un a des taux faibles au départ et qu'il commence à prendre du finastéride, il est possible que vous supprimiez complètement son apport en DHT, ce qui pourrait expliquer un grand nombre des effets secondaires rares mais horribles.
Les pharmacies en ligne n'ont pas la possibilité de contrôler les patients, il est donc inquiétant de voir à quel point la pratique consistant pour les entreprises à envoyer ces pilules aux patients s'est répandue".
Tom Brown, 28 ans, employé de banque à Manchester, dit avoir souffert du Syndrome Post-Finasteride après avoir commencé à prendre le médicament en 2012 parce qu'il perdait ses cheveux autour des tempes. Il l'a commandé à l'étranger après avoir rempli un questionnaire.
Il a pris du finastéride tous les jours jusqu'en 2019. Pendant cette période, il n'a constaté aucun changement au niveau de ses cheveux et a donc décidé d'arrêter de le prendre. Mais peu de temps après, Tom dit avoir remarqué des symptômes qu'il pensait être des effets secondaires. Je me suis senti déprimé. Ensuite, j'ai ressenti toute une série d'autres symptômes extrêmes, notamment un rétrécissement du pénis, des difficultés à uriner, des insomnies et des troubles de l'élocution. Cela a duré des années et la vie est devenue un combat quotidien. Ma dysfonction érectile était si grave que même le Viagra n'y changeait rien".
J'ai commencé à prendre ce médicament parce que tout ce que je lisais disait qu'il n'y avait aucun risque", dit-il. Il a fini par bouleverser ma vie".
Un porte-parole de la MHRA a déclaré : "Nous sommes en train d'examiner les données disponibles sur les avantages et les risques du finastéride. Cela fait partie de notre responsabilité permanente de contrôler si les avantages de tous les médicaments disponibles au Royaume-Uni l'emportent sur leurs risques".