Des creux et des vides


Parfois, c’est le vide qui “parle” le plus !

Il est intéressant de constater que les creux, les vides, sont parfois les éléments qui donnent sens ou qui infléchissent la portée symbolique d'une œuvre.

Bien sûr, la sculpture consiste à creuser, tailler, dégrossir un morceau de tronc d’arbre. Ce qui reste, après cet élagage, c’est l’œuvre. Sa forme, ses dimensions, ses détails contribuent à représenter quelque chose, à évoquer, à susciter impressions et sentiments.

Dans certains cas, l’artiste fait plus qu’ “arrondir les angles” des pièces de bois dont il dispose. Il creuse profondément, troue, ne garde que peu de matière. Il peut alors donner vie aux vides qu’il a créés. Il se peut que ces néants de matière, ces portions d’espaces plus ou moins délimités par l’œuvre fassent vraiment partie de celle-ci. Qu’ils ajoutent une note particulière ou même qu’ils transforment la première impression que procure l’objet.

Il arrive donc que, dans ces morceaux de bois, ce soit les creux, les vides qui parlent le plus, qui sont l’élément principal de l’œuvre.

Dans l’œuvre 110, dès que l’on quitte le langage descriptif, c’est autour de ce qui n’est plus là, du vide à l’intérieur du vêtement que se développent les expressions. Concernant le 015, son originalité est dans le fait que le personnage qui souvent est attaché à la croix manque, sans toutefois être totalement absent.

Pour la 012, c’est le vide central qui permet de passer de 2 à 3 dimensions, et donc de 3 cœurs à 1 seul cœur. D’unir donc, de façon originale mais simple, l’un et le triple.

Pour la 046, c'est manifestement l'ombre qui remplit les creux qui permet la lecture du mot.

Quant à la place vide dans la 025, toutes les projections y trouvent leur expression, que l’on se sente à la place de la personne représentée ou de celle qui ne l’est pas.

Comme dans la vie !

Comment cela se fait-il que parlent les vides, les creux ? Est-ce ainsi aussi dans la vie ?

Parfois, dans une conversation, un dialogue, ce qui n’est pas dit en dit long, dit-on. Un silence peut être très éloquent. Dans un dessin d’enfant, ce qui n’est pas dessiné, ce qui manque, peut être révélateur.

Ce qui est toujours là, ce à quoi on s’attend, ce qui est dans la norme ... n’attire pas l’attention. C’est parfois lorsque quelqu’un est absent que l’on remarque la richesse de sa présence en temps ordinaire. Je pourrais multiplier les exemples.

Quoi de plus pertinent donc que ces vides, ces creux. Spécialement dans le cas des œuvres 025, 110, mais aussi 004, 013, 018, 040, 059, 074, 095 et 124.

Jacques Renders

Août 2003, Italie