Ras le bol

Je n'en peux plus de cette baraque, mais un jour j'en partirai, sûr.

Les pieds devant certainement, pour utiliser l'expression consacrée, ou dans un sac poubelle, si mes voisins s'aperçoivent un peu tard de mon absence, de voir la maison, volets toujours ouverts, ou fermés, gênés par l'odeur ou par les aboiement de mon chien, et ce jour là, je partirai pour un grand voyage dont paraît-il on ne revient pas..mais je demande à voir.

Ce sera ma dernière migration.

Ce sera la première fois que j'irai au bout de quelque chose, sans penser à me tirer ailleurs, pour la bonne raison que je n'aurais pas le choix.

J'ai eu l'occasion de la faire estimer cette bicoque, pour une raison obscure de divorce, le gars m'a dit "très bien pour les vacances d'été", il avait tout compris.

Pourtant, j'y ai passé de bons moments, voire de très bons moments dans cette maison, j'y ai ri, pleuré, souffert, joui, aimé,rêvé,maudit, on y a fait de belles fêtes, insouciants, heureux.

Elle m'a accueilli quand j'étais candidat à la rue et comme m'avait dit un manouche rencontré lors de mes tribulations, "toi, tu finiras sous les ponts".

J'étais à la rue et elle m'a offert son toit, ses murs, ses portes et fenêtres qui ferment et abritent du mauvais vent d'autan.

Je me demandais chaque jour de quoi demain serait fait, mais j'avais la certitude de pouvoir dormir dans un lit et non sous les ponts.

Mais voilà, je n'en peux plus et il avait raison le gars de l'agence qui me disait "parfait pour les vacances en été" mais moi, j'y vis toute l'année et j'en peux plus...

INGRAT va !

Christian Vivier-Damiani le 2 mars 2020