Le pêcher de mon jardin

Le pêcher de mon jardin -suite et fin-

.Les heurs et malheurs de mon pêcher !

Sujet très intéressant, surtout pour moi.

Suivre l'évolution d'un pêcher, venu de nulle part, sur plusieurs années, ça c'est captivant.

NON ?

A côté de la maison, ceint d'un mur de pierres sèches, à l'abri des regards, se tient un lieu où depuis des années, je jette tous mes déchets fermentescibles dans le but de créer un beau compost pour épandre sur le potager.

Il y a des années que s'accumulent, feuilles mortes, déchets alimentaires, fruits pourris, noyaux , sans compter un gros tas de coquilles d'huîtres que je désire léguer à ceux qui viendront après moi, pour qu'ils puissent dire, «ici habitait un homme qui aimait les huîtres.» Ah ! Bon !

Mais voilà, ce coin à compost est bien trop près des arbres, frênes, sureaux, ormeaux qui ne veulent pas mourir, et il faut reconnaître que ces arbres sont bien plus beaux que nulle part ailleurs, mais de compost à épandre, point, tout passe à nourrir ces magnifiques frênes, et autres commensaux.

Voilà quelques années un magnifique scion de pêcher est sorti, tout droit comme un I, résultat de la germination d'un noyau jeté dans ce lieu de perdition, il arrive aussi que de splendides pieds de courges se développent spontanément et comme disait un instituteur de mon enfance, « C'est là, sur le fumier qu'elles se développent le mieux », mais lui ne parlait pas forcément des courges. Quoique ?

Donc ce miraculé de la pourriture, ce petit pêcher m'a ému et j'en ai pris soin et d'année en année il devenait, plus beau, plus fort, jamais la moindre maladie, pourtant vu l'endroit ou il n'avait pas choisi de pousser, il était destiné à souffrir toutes les violences de la cloque, du botrytis, des chancres etc.… Et bien non, ce vagabond, se portait comme un charme, si j'ose dire.

Nous étions dans une période continue d'été secs et chauds, ceci expliquant peut être cela, il fleurissait de plus en plus beau et son feuillage était magnifique, je commençais à me poser des questions, à savoir, s'il allait produire des fruits, et quels fruits, des pêches, des brugnons, des nectarines, il était tellement vigoureux qu'il ne ferait peut être pas de fruits du tout ou bien pas plus gros qu'une agate.

Il faut savoir qu' en plantant des noyaux de fruits, surtout des fruits du commerce, on a peu de chances d'obtenir un fruit semblable à celui que l' on vient de manger, surtout si ce fruit est surtout si ce fruit est issu d'une variété hybride, tous les résultats sont possibles du plus décevant à la plus belle surprise.

L'an dernier mon superbe « prunus persica », mon pêcher quoi, il faut bien que j'étale mes connaissances, j'en ai si peu, (c'est comme la confiture et blablabla…). Je disais donc qu'après une luxuriante floraison, voilà-t-y pas qu'il enfante de deux petites pêches toutes vertes mais déjà douces, soyeuses comme leur peau en a la réputation, bin oui quoi, « la peau de pêche). Je les ai couvé ces petits "pêchons" (je viens de l'inventer, ne cherchez pas dans le dico). Tous les matins ils grossissaient, prospéraient, je leur parlais, ils rosissaient de plaisir, c'en était touchant…

Un beau matin, au pied de l'arbre , l'un des deux jolis fruits était mort, tombé de sa branche, j'ai redoublé de soins pour le survivant.

Seuls ceux qui savent ce que c'est d'avoir un arbre fruitier avec seulement 2 fruits et qui découvrent qu'un est tombé, peuvent comprendre par quelles affres on peut passer, quand tous les matins on va vérifier si le survivant est toujours accroché à sa branche.

Elle a bien tenue le coup la "pêchasse" (ne cherchez pas dans le dico, je viens de l'inventer) c'était devenue un grosse ventrue avec des joues carmins, aussi belle qu'une pêche du commerce .

Et un beau jour du mois d'août, trompez sonnettes, je l 'ai cueillie avec trois doigts, je l'ai présentée au soleil, comme s'il s'agissait du saint sacrement, j'ai fermé les yeux, tous mes sens en éveil, mais avec une certaine angoisse tout de même, et j'ai mordu, tout doucement en faisant une succion gourmande, super bonne, du jus a coulé à la commissure de mes lèvres……Je peux pas vous dire, alors je le dis pas !

Il y a des jours comme ça où l'on est confronté à l'indicible… Le noyau n'était pas complètement soudé et à l'intérieur se tapissait un petit forficule (Comme vous voulez : un pince ou perce-oreilles, pour les gens normaux.)

C'est ça les pêches bio, on est pas à l'abri des squatters…

Je voulais dire :

C'est ça LA pêche bio…………….

Mais ça c'était l'an dernier, la première pêche miraculeuse !

Cet hiver a été très doux et très pluvieux, (d'un an par rapport à l'an dernier et plus jeune par rapport à l'an prochain-très drôle !?), l'arbre a prospéré, il était magnifique au sortir de l'hiver.

Le printemps est arrivé, et la floraison pleine de promesse, et il pleuvait toujours, les feuilles ont commencé à s'ourler de pourpre, à se crisper, se gaufrer, la terrible maladie de la cloque est apparue.

Entre deux averses je pulvérisais des décoctions, style purins bio et l'espoir revenait.

Mais la pluie s'acharnait, malgré cela, plein de petites pêches s'égrenaient sur les rameaux flexibles. Je me prenais à rêver non pas d'une malheureuse pêche, mais d'une récolte, plein le panier…

Les petites grossissaient et les branches commençaient à ployer.

Je continuais mes traitements, régulièrement mais vu les conditions climatiques, je constatais que la chute inexorable avait commencé. A la fin du printemps, il restait 4 ou 5 pêches sur l'arbre, mais je voyais bien que certaines étaient rabougries, difformes et qu'elles ne grossiraient pas plus.

Finalement il resta 3 fruits qui avaient l'air viable, le vent, les éléments ont encore eu raison de celle qui était la moins bien accrochée.

Les deux qui restaient étaient semblables, bien accrochées, vigoureuses et pleines de promesses.

Tous les matins j'allais les voir, et j'étais bien content, ma récolte aura doublé, une pêche l'an dernier, deux cette année, quatre l'an prochain, soixante quatre en 2019….

Mais un matin en approchant, j'ai vu qu 'une de mes petites protégées, avait une grosse tache de pourriture sur la joue gauche, elle était foutue, la moitié de ma récolte était foutue !

Tout était à recommencer, et je ne suis pas encore sûr de manger la dernière….

Fataliste je dis, « advienne que pourra ». J'y crois !

FIN

Christian Vivier-dit Bartok79- La Garde le 20 août 2014