Poème gnomique de 71 hexamètres attribué à tort à Pythagore de Samos, puis à Lysis de Tarente. Il s'agit d'une composition tardive du IIIe ou du IVe siècle de notre ère. À travers ces vers, il est possible de se représenter la règle de vie de l'École des Pythagoriciens.
Au Ve siècle de notre ère, Hiéroclès d'Alexandrie - un philosophe néopythagoricien - écrivit un commentaire des Vers d'or, dont il divisa l'exégèse en trois parties. C'est cette tripartition que l'on retrouve dans la traduction de Fabre d'Olivet.
Traduit du grec par Léonard Saint-Michel, Éditions Adyar (1991)
Source : Blog Delisle (blog fermé)
1. Les Dieux Immortels d'abord, comme la Loi les a établis,
2. Honore-les et vénère le Serment. Puis les Héros dignes d'honneur,
3. Ainsi que les Génies terrestres vénère-les, en exécutant les choses de la Loi.
4. Honore aussi tes parents, et ceux qui te sont très proches en parenté.
5. Parmi les autres fais ton ami de qui est le meilleur en vertu.
6. Cède aux douces paroles, aux travaux utiles,
7. N'aie point de haine pour ton ami à cause d'une faute petite,
8. Tant que tu le peux ; car le pouvoir habite auprès de la nécessité.
9. Ces choses-là, d'une part, sache qu'elles sont ainsi. D'autre part, habitue-toi à maîtriser celles-ci :
10. L'estomac tout d'abord, le sommeil ainsi que la sexualité
11. Et l'emportement. Ne pratique jamais de chose honteuse ni avec un autre.
12. Ni en particulier. Mais plus que tout respecte-toi toi-même.
13. Ensuite exerce la justice et en acte et en parole.
14. Ne prends pas l’habitude de te comporter en tout sans réflexion.
15. Mais sache que mourir est la destinée de tous.
16. Quant aux richesses, accepte tantôt de les acquérir et tantôt de les perdre.
17. Tout ce que, de par les Divines Destinées, les mortels reçoivent de douleurs,
18. Si tu en as une part fatale, supporte-la et ne t'en indigne pas.
19. Il te convient d’y remédier autant que tu le peux. Sache
20. Qu'aux gens de bien, la Destinée ne donne pas beaucoup de ces choses-là.
21. Devant les hommes beaucoup de paroles viles ou vertueuses
22. Tombent ; ne t'en frappe point, ni ne permets
23. Que tu t'en écartes ; et si quelque mensonge se prononce,
24. Montre de la douceur. Ce que je vais te dire, que cela en toute circonstance s'accomplisse.
25. Que nul en parole ne t'induise, ni en acte,
26. A faire ou à dire, ce qui pour toi n'a point d'avantage.
27. Délibère avant l'action, pour que n'existent point de choses blâmables.
28. C'est en effet d'un homme faible que de faire ou de dire des folies.
29. Mais accomplis ces choses, qui plus tard point ne te chagrineront.
30. Ne fais rien de ce que tu ignores, mais apprends
31. Tout ce qu'il te faut, et c'est la plus agréable vie qu'ainsi tu passeras,
32. Il ne faut pas non plus de la santé de ton corps avoir négligence.
33. Mais que dans la boisson la nourriture et la gymnastique la mesure
34. Soit gardée. J'appelle mesure ce qui point ne te chagrinera.
35. Habitue-toi à mener genre de vie pur, sans mollesse.
36. Et garde-toi de faire toutes ces choses, qui provoquent l'envie.
37. Ne dépense pas mal à propos, comme celui qui ignore la beauté.
38. Ne sois avare non plus. La mesure en toutes choses est excellente.
39. Fais ce qui ne te nuira point. Et réfléchis avant d'agir.
40. N'accueille point le sommeil sous la douceur de tes yeux,
41. Avant d'avoir examiné chacun de tes actes du jour.
42. En quoi ai-je commis une erreur ? Qu'ai-je fait ? Que n'ai-je pas fait qu'il me fallait faire ?
43. En commençant par le premier point va jusqu'au bout. Et ensuite,
44. Si ce sont des choses honteuses que tu as commises, punis-toi ; mais si tu as bien agi, réjouis-toi.
45. À ces choses donne ta peine, et ton application. Il faut que tu les aimes,
46. Elles te placeront sur les traces de la divine vertu.
47. Oui par celui qui à notre âme a transmis le Quaternaire,
48. Source de l'éternelle Nature. Mais entreprends une tâche,
49. Après avoir prié les Dieux de l'achever. Et devenu maître de ces choses,
50. Tu sauras quelle est des Dieux Immortels et des hommes mortels
51. La constitution, et jusqu'à quel point les éléments se séparent et jusqu'où ils se tiennent.
52. Et tu connaîtras dans la mesure de la Justice, que la Nature est en tout semblable,
53. En sorte que pour toi il n'y ait nul espoir de ce qui est sans espoir, et que rien ne se dissimule.
54. Et tu sauras que les hommes ont les maux qu'ils ont eux-mêmes choisis.
55. Les malheureux, qui ne voient les biens qui sont près d'eux
56. Ni ne les entendent se libérer du mal peu de gens le savant.
57. Tel est le sort qui égare les esprits des mortels. Et comme des objets qui roulent,
58. De part et d'autre ils se portent, souffrant des maux infinis.
59. Triste compagne la Discorde égare sans qu'on s'en aperçoive
60. Innée en eux, il ne faut la faire avancer, mais en lui cédant la fuir.
61. Ô Zeus, notre père, certes de bien des maux tu délivrerais tous les hommes.
62. Si à tous tu montrais, de quel Génie ils se servent.
63. Mais toi prends courage, puisqu'ils sont de race divine les mortels,
64. A qui la nature sacrée présente la révélation de toutes choses.
65. Si tu y prends part, tu triompheras de ce que je t'ordonne,
66. Et après avoir guéri ton âme tu la sauveras de ces peines.
67. Mais abstiens-toi des aliments, dont nous avons parlé, et dans les purifications,
68. Comme dans la libération de l'âme, décide et réfléchis sur chaque chose,
69. Après avoir établi comme conducteur l’excellente Intelligence d'En Haut.
70. Puis après l'abandon de ton corps si tu arrives au libre Éther,
71. Tu seras immortel, un dieu qui ne meurt point, non plus un mortel.
Traduit du grec par Fabre d'Olivet dans Les vers dorés de Pythagore (1813)
Source : Gallica
1. Vers dorés des Pythagoriciens
Préparation
2. Rends aux Dieux immortels le culte consacré ; Garde ensuite ta foi :
3. Révère la mémoire des Héros bienfaiteurs, des Esprits demi-Dieux.
Purification
4. Sois bon fils, frère juste, époux tendre et bon père.
5. Choisis pour ton ami, l'ami de la vertu ;
Cède à ses doux conseils, instruits-toi par sa vie,
Et pour un tort léger ne le quitte jamais;
6. Si tu le peux du moins : car une loi sévère
Attache la Puissance à la Nécessité.
7. Il t'est donné pourtant de combattre et de vaincre
Tes folles passions : apprends à les dompter.
8. Sois sobre, actif et chaste ; évite la colère.
En public, et en secret ne te permets jamais
Rien de mal ; et surtout respecte-toi toi-même.
9. Ne parle et n'agis point sans avoir réfléchi. Sois juste.
10. Souviens-toi qu'un pouvoir invincible ordonne de mourir ;
11. que les biens, les honneurs
Facilement acquis, sont faciles à perdre.
12. Et quant aux maux qu'entraîne avec soi le Destin,
Juge-les ce qu'ils sont : supporte-les ; et tâche,
Autant que tu pourras, d'en adoucir les traits :
Les Dieux, aux plus cruels, n'ont pas livré les sages.
13. Comme la Vérité, l'Erreur a ses amants :
Le philosophe approuve, ou blâme avec prudence ;
Et si l'Erreur triomphe, il s'éloigne ; il attend.
14. Écoute, et grave bien en ton cœur mes paroles.
Ferme l’œil et l'oreille à la prévention ;
Crains l'exemple d'autrui ; pense d'après toi-même :
15. Consulte, délibère, et choisis librement.
16. Laisse les fous agir et sans but et sans cause.
Tu dois dans le présent, contempler l'avenir.
17. Ce que tu ne sais pas, ne prétends point le faire.
Instruis-toi : tout s'accorde à la constance, au temps.
18. Veille sur ta santé :
19. dispense avec mesure,
Au corps les aliments, à l'esprit le repos.
20. Trop ou trop peu de soins sont à fuir ; car l'envie,
À l'un et l'autre excès, s'attache également.
21. Le luxe et l'avarice ont des suites semblables.
Il faut choisir en tout, un milieu juste et bon.
Perfection
22. Que jamais le sommeil ne ferme ta paupière,
Sans t'être demandé : Qu'ai-je omis ? qu'ai-je fait ?
23. Si c'est mal, abstiens-toi : si c'est bien, persévère.
24. Médite mes conseils ; aime-les ; suis-les tous :
Aux divines vertus ils sauront te conduire.
25. J'en jure par celui qui grava dans nos cœurs,
La Tétrade sacrée, immense et pur symbole,
Source de la Nature, et modèle des Dieux.
26. Mais qu'avant tout, ton âme, à son devoir fidèle,
Invoque avec ferveur ces Dieux, dont les secours
Peuvent seuls achever tes œuvres commencées.
27. Instruit par eux, alors rien ne t'abusera :
Des êtres différents tu sonderas l'essence ;
Tu connaîtras de Tout le principe et la fin.
28. Tu sauras, si le Ciel veut, que la Nature,
Semblable en toute chose, est la même en tout lieu :
29. En sorte qu'éclairé sur tes droits véritables,
Ton cœur de vains désirs ne se repaîtra plus.
30. Tu verras que les maux qui dévorent les hommes,
Sont le fruit de leur choix ;
31. et que ces malheureux
Cherchent loin d'eux les biens dont ils portent la source.
32. Peu savent être heureux : jouets des passions,
Tour à tour ballotés par des vagues contraires,
Sur une mer sans rive, ils roulent aveuglés,
Sans pouvoir résister ni céder à l'orage.
33. Dieu ! vous les sauveriez en dessillant leurs yeux...
34. Mais non : c'est aux humains, dont la race est divine,
À discerner l'Erreur, à voir la Vérité.
35. La Nature les sert.
36. Toi qui l'as pénétrée,
Homme sage, homme heureux, respire dans le port.
Mais observe mes lois, en t'abstenant des choses
Que ton âme doit craindre, en les distinguant bien ;
En laissant sur le corps régner l'intelligence :
37. Afin que, t'élevant dans l'Éther radieux,
Au sein des Immortels, tu sois un Dieu toi-même.