Auteur : Emmanuel Swedenborg
Traduit du latin par J.-F.-E. Le Boys des Guays sur l'Édition princeps (Amsterdam, 1768)
D'après une édition de 1854
Source : Livres-mystiques.com
1. L'homme sait que l'amour existe, parce qu'on dit : Un tel m'aime, le roi aime ses sujets, le mari aime son épouse, la mère aime ses enfants, et réciproquement. Pareillement on aime sa patrie, ses concitoyens et son prochain. Il en est de même des choses : on aime une chose ou une autre. Cependant, malgré l'usage universel de ce mot, peu de personnes savent ce que c'est que l'amour. Quand l'homme médite sur l'amour et qu'il ne peut s'en former une idée, il dit que ce n'est rien, ou seulement une chose qui influe par la vue, l'ouïe, le toucher et la fréquentation, et ainsi émeut. Il ignore totalement que l'amour est sa vie même, non seulement la vie de tout son corps et de toutes ses pensées en général, mais aussi celle de chacune de leurs parties. Le sage peut le percevoir quand il est dit : Si tu éloignes l'affection qui appartient à l'amour, peux-tu penser ou faire quelque chose ? La pensée, la parole et l'action ne se refroidissent-elles pas selon que se refroidit l'affection qui appartient à l'amour ? Ne s'échauffent-elles pas quand l'affection s'échauffe ? Mais le sage perçoit par l'expérience et non par la connaissance que l'amour est la vie de l'homme.
2. Personne ne sait ce qu'est la vie de l'homme, à moins qu'il ne sache que cette vie est l'amour. Celui qui l'ignore peut croire que la vie de l'homme est seulement sentir, agir et penser. Cependant la pensée est le premier effet de la vie ; la sensation et l'action en sont le second. Il est dit que la pensée est le premier effet de la vie, mais il y a une pensée intérieure et une autre plus intérieure encore ; il y a aussi une pensée extérieure et une autre plus extérieure encore. La pensée intime, qui est la perception des fins, est en actualité le premier effet de la vie. Il en sera parlé quand il s'agira des degrés de la vie.
3. Par la chaleur du soleil dans le monde, on peut percevoir que l'amour est la vie de l'homme. On sait que cette chaleur est comme la vie commune de toute végétation de la terre, car par elle au printemps, les végétaux de tout genre sortent de terre, s'ornent de feuilles, puis de fleurs et enfin de fruits, et ainsi sont comme vivants. Quand la chaleur se retire en automne et en hiver, ils se dépouillent de ces signes de leur vie, et se flétrissent. Il en est de même de l'amour chez l'homme, car l'amour et la chaleur se correspondent mutuellement ; pour cette raison l'amour aussi est chaud.
4. Ce sujet est illustré par un grand nombre d'explications dans les traités sur la Divine Providence et sur la vie. Ici il sera seulement dit que le Seigneur, qui est le Dieu de l'univers, est incréé et infini, mais que l'homme et l'ange sont créés et finis. Comme le Seigneur est incréé et infini, Il est l'Être même qui est appelé Jéhovah, la Vie Même ou la Vie en Soi. Nul ne peut être créé immédiatement de l'Incréé, de l'Infini, de l'Être Même, ni de la Vie Même, parce que le Divin est Un et non divisible, mais il faut que chacun le soit de choses créées et finies, formées de telle façon, que le Divin puisse être en elles. Comme les hommes et les anges sont ainsi créés, ils sont des réceptacles de la vie. Si un homme se laisse entrainer à croire qu'il n'est pas un réceptacle de la vie, mais qu'il est la vie, il ne peut être détourné de la pensée qu'il est Dieu. C'est d'après une illusion, que l'homme sent qu'il est la vie, et par suite croit qu'il est la vie, car dans la cause instrumentale, la cause principale est toujours perçue comme étant une avec elle. Dans Jean V. 26. Le Seigneur enseigne Lui Même qu'Il est la Vie en Soi : « Comme le Père a la Vie en Lui-Même, ainsi Il a aussi donné au Fils d'avoir la Vie en Lui-Méme ». - Il enseigne aussi qu'Il est la Vie Même, Jean XI, 25 ; XIV, 6 - Puisque la vie et l'amour sont un, comme il a été dit aux Nos 1 et 2, il s'ensuit que le Seigneur, parce qu'Il est la Vie Même, est l'Amour Même.
5. Pour comprendre cela, il faut absolument savoir que le Seigneur, parce qu'il est l'Amour dans son essence même, c'est-à-dire le Divin Amour, apparait comme Soleil devant les anges dans le ciel, et que de ce Soleil procèdent une chaleur et une lumière. La chaleur qui en procède est dans son essence l'amour, et la lumière, la sagesse. Autant les anges sont des réceptacles de cette chaleur et de cette lumière spirituelles, autant ils sont des amours et des sagesses, non des amours et des sagesses d'après eux-mêmes, mais d'après le Seigneur. Cette chaleur et cette lumière spirituelles influent non seulement chez les anges et les affectent, mais aussi chez les hommes dans la mesure où ils deviennent des réceptacles. Ils le deviennent selon leur amour envers le Seigneur et leur amour à l'égard du prochain. Ce Soleil lui-même, ou le Divin Amour, ne peut par sa chaleur et sa lumière créer quelqu'un immédiatement d'après Lui-Même, car un être ainsi créé serait l'Amour dans son essence, qui est le Seigneur Lui-Même. Mais ce Soleil peut le créer d'après des substances et des matières formées de telle façon, qu'elles peuvent recevoir la chaleur même et la lumière même. Pareillement, le soleil du monde ne peut par sa chaleur et sa lumière, produire immédiatement des germinations dans la terre, mais il le peut par l'effet de sa chaleur et de sa lumière dans les matières de l'humus, et donner ainsi la végétation. On voit dans le traité du ciel et de l'enfer, aux N°s 116 à 140, que le Divin Amour du Seigneur apparaît comme Soleil dans le monde spirituel, et que de ce Soleil procèdent une chaleur et une lumière spirituelles, d'après lesquelles les anges ont l'amour et la sagesse.
6. Puisque l'homme n'est pas la vie, mais qu'il est un réceptable de la vie, il s'ensuit que la conception de l'homme par le père n'est pas la conception de la vie, mais seulement celle de la première et de la plus pure forme qui peut recevoir la vie. A cette forme, comme à un noyau ou à un point de départ, se joignent successivement dans l'utérus, les substances et les matières adaptées en des formes pour la réception de la vie dans leur ordre et dans leur degré.
7. Le Divin n'est pas dans l'espace, quoiqu'Il soit omniprésent chez l'homme dans le monde, chez l'ange dans le ciel et chez l'esprit sous le ciel. Cela peut être compris par l'idée spirituelle, mais ne peut l'être par l'idée purement naturelle, parce qu'en cette dernière il y a la notion de l'espace. En effet celle-ci a été formée d'après les choses qui sont dans le monde, et l'espace est dans toutes et chacune des choses qui sont vues par les yeux. Là, tout ce qui est grand, petit, long, large et haut, en un mot toute mesure, figure et forme appartiennent à l'espace. Ainsi par l'idée purement naturelle, on ne peut saisir que le Divin n'est pas dans l'espace, quand on dit qu'Il est partout. Néanmoins l'homme peut le saisir par la pensée naturelle, pourvu qu'en elle il admette quelque peu la lumière spirituelle. Pour cette raison, il sera d'abord traité de l'idée spirituelle, et ensuite de la pensée qui en découle. L'idée spirituelle ne tire rien de l'espace, mais elle tire tout de l'état. L'état dépend de l'amour, de la vie, de la sagesse, des affections, des joies qui en proviennent ; en général du bien et du vrai. L'idée vraiment spirituelle sur ces choses n'a rien de commun avec l'espace, elle est au-dessus, et elle regarde les idées d'espace au dessous d'elle comme le ciel regarde la terre. Puisque les anges et les esprits voient par les yeux comme les hommes dans le monde, et que les objets ne peuvent être vus que dans l'espace, il s'ensuit que dans le monde spirituel où sont les esprits et les anges, il apparait des espaces semblables aux espaces sur terre. Néanmoins ce ne sont pas des espaces mais des apparences d'espaces, car ils ne sont ni fixes, ni déterminés comme sur terre. En effet, ils peuvent être allongés, rétrécis, changés et variés. Ainsi, ne pouvant être déterminés par la mesure, ils ne peuvent être saisis par aucune idée naturelle, mais seulement par l'idée spirituelle. Pour celle-ci, les distances de l'espace ne sont autres que les distances du bien et les distances du vrai, qui sont des affinités et des ressemblances selon les états du bien et du vrai.
8. Il en découle que l'homme, par une idée purement naturelle, ne peut saisir que le Divin est partout, et cependant n'est pas dans l'espace. Les anges et les esprits le saisissent clairement. L'homme aussi peut le comprendre, pourvu que dans sa pensée il admette quelque chose de la lumière spirituelle, alors c'est son esprit qui pense et non son corps, ainsi c'est son spirituel et non son naturel.
9. Certains ne le comprennent pas, parce qu'ils aiment le naturel, et de ce fait ne veulent pas élever les pensées de leur entendement au-dessus du naturel, dans la lumière spirituelle. Ils ne peuvent alors penser que d'après l'espace, même à Dieu. Mais penser à Dieu d'après l'espace, c'est y penser d'après l'étendue de la nature. Ce préliminaire est nécessaire, car sans la connaissance et la perception que le Divin n'est pas dans l'espace, on ne peut rien comprendre de la Vie Divine, qui est l'amour et la sagesse. Et par suite, on ne comprendrait presque rien sur la Divine Providence, l'Omniprésence, l'Omniscience, l'Omnipotence, l'Infinité et l'Eternité dont il sera traité en série.
10. Dans le monde spirituel, il apparaît des espaces comme dans le monde naturel, par conséquent aussi des distances, mais ce sont des apparences selon les affinités spirituelles qui appartiennent à l'amour et à la sagesse, ou au bien et au vrai. C'est pourquoi le Seigneur, bien qu'Il soit partout chez les anges dans les cieux, apparaît néanmoins, en haut, au-dessus d'eux comme Soleil. Puisque la réception de l'amour et de la sagesse fait l'affinité avec le Seigneur, les cieux où les anges sont, d'après la réception, dans une affinité plus proche, apparaissent plus près de Lui que ceux où les anges sont dans une affinité plus éloignée. Il s'ensuit que les cieux qui sont au nombre de trois, ont été aussi distingués entre eux ; il en est de même des sociétés de chaque ciel. De plus, les enfers qui sont sous les cieux, sont éloignés selon le rejet de l'amour et de la sagesse. Sur la terre aussi, le Seigneur est présent chez tous les hommes, pour l'unique raison qu'Il n'est pas dans l'espace.
11. Dans tous les cieux il n'y a d'autre idée de Dieu que l'idée d'un Homme. Il en est ainsi, parce que le ciel dans le tout et dans la partie, a la forme d'un homme, et que le Divin qui est chez les anges fait le ciel. Or, comme la pensée s'étend selon la forme du ciel, il est impossible aux anges de penser autrement de Dieu. Dans le monde aussi, tous ceux qui ont été conjoints au ciel, pensent pareillement de Dieu, quand ils pensent intérieurement ou dans leur esprit. Parce que Dieu est Homme, tous les anges et tous les esprits sont hommes dans une forme parfaite. Cela provient de la forme du ciel qui est toujours la même dans les très grands et dans les très petits. On voit dans le traité « Le ciel et l'enfer », aux N°s 59 à 87, que le ciel dans le tout et dans la partie a la forme d'un homme ; aux N°s 203, 204, que les pensées s'étendent selon la forme du ciel. Il est dit dans Genèse 1, 26, 27, que les hommes ont été créés, à l'image et à la ressemblance de Dieu. On sait aussi que Dieu a été vu comme Homme par Abraham et par d'autres. Les anciens, les sages comme les simples, n'ont eu de Dieu aucune autre pensée que celle d'un Homme. Quand ils ont commencé à adorer plusieurs dieux, comme ils l'ont fait à Athènes et à Rome, ils les ont tous adorés comme hommes. Ceci peut être illustré par ce passage extrait de l'opuscule « La continuation sur le jugement dernier » N° 74 :
« Les nations, surtout les Africains, qui reconnaissent et adorent un seul Dieu, Créateur de l'univers, ont de Dieu l'idée d'un Homme. Ils refusent de croire que certaines personnes qui pensent que Dieu est une petite nuée quelque part, puissent être parmi les Chrétiens. Mais il leur est dit qu'une telle idée vient aux Chrétiens parce que Dieu dans la Parole, est appelé Esprit, et que pour ces Chrétiens, un esprit est comme une petite nuée, parce qu'ils ne savent pas que les esprits et les anges sont hommes. Cependant on a examiné ceux qui reconnaissent intérieurement le Seigneur pour Dieu du ciel et de la terre, et on a découvert que leur idée spirituelle et leur idée naturelle n'étaient pas semblables. J'ai entendu un prêtre chrétien dire que personne ne peut avoir une idée du Divin Humain. On le conduisit successivement vers différentes nations qui avaient une perception de plus en plus intérieure, ensuite vers leurs cieux, et enfin vers le ciel chrétien. Partout il lui fut donné communication de leur perception intérieure sur Dieu, et il remarqua qu'ils n'avaient d'autre idée de Dieu, que celle d'un Homme, qui est la même que l'idée du Divin Humain ».
12. Dans le Christianisme l'idée populaire de Dieu est celle d'un Homme, parce que Dieu est nommé personne, dans la doctrine de la Trinité Athanasienne. Ceux qui se croient plus sages que le peuple, déclarent Dieu invisible, parce qu'ils ne peuvent saisir comment Dieu, comme Homme, aurait pu créer le ciel et la terre, et remplir l'univers de Sa présence, ni saisir d'autres choses qui ne peuvent être comprises tant qu'on ignore que le Divin n'est pas dans l'espace. Mais ceux qui s'adressent au Seigneur Seul conçoivent le Divin Humain, ainsi Dieu comme Homme.
13. On peut voir combien il est important d'avoir une juste idée de Dieu, en ce que cette idée de Dieu fait l'intime de la pensée chez tous ceux qui ont de la religion, car toutes les choses de la religion et toutes celles du culte regardent Dieu. Comme Dieu est universellement et particulièrement dans toutes les choses de la religion et du culte, il en résulte que sans une juste idée de Dieu, il ne peut y avoir communication avec les cieux. Ainsi chaque nation dans le monde spirituel obtient sa place selon son idée de Dieu comme Homme, car dans cette idée, et non dans une autre, il y a l'idée du Seigneur. On voit clairement par son opposé que l'état de la vie de l'homme après la mort est selon l'idée de Dieu confirmée chez lui, car la négation de Dieu, et dans le Christianisme la négation de la Divinité du Seigneur, fait l'enfer.
14. Où est l'Être, là est l'Exister l'un n'est pas sans l'autre, car l'Être est par l'Exister, et non sans Lui. Le rationnel le comprend quand il se demande s'il peut y avoir un Être qui n'Existe pas, et s'il peut y avoir un Exister sinon d'après l'Être. Puisque l'un n'est possible qu'avec l'autre, et non sans l'autre, il s'ensuit qu'ils sont un, mais distinctement un. Ils sont distinctement un comme l'amour et la sagesse. En fait l'amour est l'Être, et la sagesse est l'Exister, car il ne peut y avoir d'amour sans la sagesse ni de sagesse sans l'amour. Par conséquent lorsque l'amour est dans la sagesse, alors il existe. Ces deux sont tellement un, qu'ils peuvent, il est vrai, être distingués par la pensée, mais non en fait ; c'est pourquoi il est dit distinctement un. L'Être et l'Exister dans Dieu-Homme sont aussi distinctement un comme l'âme et le corps. Il ne peut y avoir d'âme sans son corps, ni de corps sans son âme. C'est la Divine Ame de Dieu-Homme qui est entendue par le Divin Être, et c'est son Divin Corps qui est entendu par le Divin Exister. C'est une erreur qui provient d'illusions que de croire que l'âme puisse exister sans le corps, et qu'elle puisse penser et être sage sans lui, car toute âme d'homme est dans un corps spirituel après qu'elle a rejeté l'enveloppe matérielle qu'elle portait dans le monde.
15. L'Être n'est pas l'Être à moins qu'il n'Existe, parce qu'auparavant il n'est pas dans une forme. S'il n'est pas dans une forme, il n'a pas de qualité ; et ce qui n'a pas de qualité n'est pas quelque chose. Ce qui existe d'après l'Être, fait un avec l'Être parce qu'il vient de l'Être. Ainsi il y a l'union de deux en un, et c'est de là que l'un appartient à l'autre mutuellement, et que l'un est tout dans toutes les choses de l'autre comme en soi.
16. D'après ces explications, on peut voir que Dieu est Homme, par conséquent qu'il est Dieu-Existant, existant non par Soi, mais en Soi. Celui qui existe en Soi est Dieu, de Qui procède toute chose.
17. On sait que Dieu est Infini, en effet il est appelé Infini. Mais il est appelé Infini, parce qu'il est Infini. Il est Infini, non seulement parce qu'il est l'Être Même et l'Exister Même en Soi, mais parce que les Infinis sont en Lui. L'infini sans les Infinis en Lui n'est Infini que de nom seulement. Les Infinis en Lui ne peuvent être appelés ni infiniment nombreux, ni infiniment tous, à cause de l'idée naturelle attachée aux expressions «nombreux» et «tous» car l'idée naturelle d'infiniment nombreux est limitée, et celle d'infiniment tous est illimitée, il est vrai, mais elle tient aux choses limitées dans l'univers. Ainsi, l'homme parce qu'il est dans l'idée naturelle, ne peut par sublimation, ni par approximation venir dans la perception des Infinis en Dieu. Mais l'ange, parce qu'il est dans l'idée spirituelle, peut par sublimation et par approximation venir au dessus du degré de l'homme, sans cependant atteindre cette perception.
18. Celui qui croit en Dieu peut trouver en lui la preuve que les Infinis sont en Dieu. Puisque Dieu est Homme, Il a un corps et tout ce qui appartient au corps, c'est-à-dire une face, une poitrine, un ventre, des lombes, des pieds, car sans ces parties Il ne serait pas Homme. Puisqu'il a ces parties, Il a aussi des yeux, des oreilles, des narines, une bouche, une langue, et aussi les parties qui sont intérieurement dans l'homme, comme le cœur et le poumon, et celles qui en dépendent, qui toutes prises ensemble font que l'homme est homme. Dans l'homme créé, ces parties sont en grand nombre, et considérées dans leur contexture, elles sont innombrables. Mais dans Dieu-Homme, elles sont infinies, rien n'y manque, d'où découle Son Infinie Perfection. Il est fait une comparaison de l'Homme incréé, qui est Dieu, avec l'homme créé, parce que Dieu est Homme et que Lui-même a dit que l'homme a été créé à Son image et selon Sa ressemblance, - Gen. 1, 26, 27.
19. Pour les anges, d'après les cieux dans lesquels ils sont, il est bien plus évident que les Infinis sont en Dieu. Le ciel entier, qui consiste en myriades de myriades d'anges, dans sa forme universelle est comme un homme. Il en est de même de chaque société du ciel, tant grande que petite. Il s'ensuit que l'ange est homme, car un ange est le ciel dans sa forme la plus petite. On le voit dans le traité « Le ciel et l'enfer », N°s 51 à 86. Le ciel, dans le tout, dans la partie et dans l'individu, est dans une telle forme d'après le Divin que les anges reçoivent, car autant l'ange reçoit du Divin, autant il est homme dans une forme parfaite. C'est pourquoi il est dit que les anges sont en Dieu, et que Dieu est en eux, et aussi que Dieu est leur tout. Il est impossible de décrire quelle multitude de choses il y a dans le ciel. Comme le Divin fait le ciel, et que par conséquent cette multitude inexprimable de choses procède du Divin, il devient bien évident que les infinis sont dans l'Homme Même, qui est Dieu.
20. On peut tirer une semblable conclusion d'après l'univers créé, quand on le considère par les usages et leurs correspondances. Mais au préalable des explications sont nécessaires pour une bonne compréhension.
21. Puisque dans Dieu-Homme, il y a les infinis, qui, dans le ciel, dans l'ange et dans l'homme, apparaissent comme dans un miroir, et puisque Dieu-Homme n'est pas dans l'espace, ainsi qu'il a été montré ci-dessus, N°s 7 à 10, on peut en quelque sorte voir et saisir comment Dieu peut être Omniprésent, Omniscient et Tout-Prévoyant, et comment il a pu en tant qu'Homme créer toutes choses, et peut en tant qu'Homme tenir éternellement dans leur ordre toutes les choses créées par Lui.
22. D'après l'homme, on peut encore voir comme dans un miroir, que les infinis sont distinctement un dans Dieu-Homme. Dans l'homme il y a une quantité innombrable de parties comme il a déjà été dit, néanmoins l'homme les sent comme un. Par la sensation il ne sait rien de ses cerveaux, de son cœur, de ses poumons, de son foie, de sa rate et de son pancréas ; ni rien des parties innombrables qui sont dans les yeux, dans les oreilles, dans la langue, dans l'estomac, dans les organes de la génération, et dans toutes les autres choses qui le constituent ; et parce qu'il ne sait rien par la sensation, il est pour lui-même comme un. Il en est ainsi, parce que toutes ces choses sont dans une telle forme, qu'il ne peut en manquer une seule, car l'homme est une forme récipiente de la vie qui procède de Dieu-Homme, comme il a été démontré ci-dessus, N°s 4, 5, 6. D'après l'ordre et la connexion de toutes ces choses dans une telle forme, le sentiment et par suite l'idée se présentent comme si elles étaient non pas en quantité innombrable, mais un. On peut donc conclure que ces parties en quantité innombrable, qui font comme un dans l'homme, sont distinctement et même très distinctement un dans l'Homme Même qui est Dieu.
23. Tout ce qui appartient à la raison humaine se réunit et pour ainsi dire se concentre pour conclure qu'il n'y a qu'un seul Dieu Créateur de l'univers. Par conséquent, l'homme qui a de la raison, d'après la nature même de son entendement, ne pense et ne peut penser autrement. Un homme qui jouit d'une raison saine éprouvera immédiatement de la répugnance s'il entend dire qu'il y a deux Créateurs de l'univers. Il est donc évident que tout ce qui appartient à la raison humaine se réunit et se concentre pour conclure qu'il n'y a qu'un seul Dieu. Voici quelles en sont les deux causes :
l° ) La faculté même de penser rationnellement, considérée en elle-même, appartient non pas à l'homme, mais à Dieu chez l'homme. De cette faculté dépend la raison humaine dans sa généralité, et cette généralité fait que l'homme voit, comme par lui-même que Dieu est un.
2° ) L'homme, par cette faculté, est dans la lumière du ciel, ou tire la généralité de sa pensée de cette lumière ; et l'universel de la lumière du Ciel est que Dieu est un. Il en est autrement si l'homme, d'après cette faculté, a perverti les parties inférieures de son entendement. Un tel homme, il est vrai, jouit de cette faculté, mais par la torsion de ces parties inférieures, il l'a tournée dans un sens contraire, et sa raison cesse d'être saine.
24. Tout homme, sans le savoir, pense d'une assemblée d'hommes comme d'un seul homme. C'est même pour cela qu'il perçoit aussitôt, quand on dit que le roi est la tête et les sujets le corps, que tous forment partie d'un corps commun qui est le royaume. Il en est du corps spirituel comme du corps civil. Le corps spirituel est l'Eglise, et sa tête est Dieu-Homme. Si on ne pensait pas à un seul Dieu Créateur et Conservateur de l'univers, mais à plusieurs dieux, l'église n'apparaîtrait plus comme un homme, mais comme un corps à plusieurs têtes, donc comme un monstre. Si on disait que ces têtes ont une seule essence, et qu'ainsi elles font ensemble une seule tête, il n'en pourrait résulter d'autre idée sinon qu'une tête a plusieurs faces, ou que plusieurs têtes ont une seule face, ainsi l'Eglise dans cette perception, se présenterait difforme. Mais en vérité, un seul Dieu est la tête, et l'Eglise est le corps, qui agit au gré de la tête, et non de lui-même. Il en est de même pour l'homme. Il en résulte qu'il ne peut y avoir qu'un seul roi dans un royaume, car plusieurs en détruiraient l'unité.
25. Il en est de même de l'Eglise qui est répandue sur tout le globe, et qui est nommée Communion, parce qu'elle est comme un seul corps sous une seule tête. Celle-ci dirige à son gré le corps, car dans la tête résident l'entendement et la volonté. Ceux-ci mettent en action le corps, à tel point que ce dernier ne fait qu'obéir. Comme le corps ne peut rien faire sans l'entendement et la volonté, de même l'homme de l'Eglise ne petit rien faire sans Dieu. Il semble que le corps agisse de lui-même, que les mains et les pieds se meuvent d'eux-mêmes, que la bouche et la langue en parlant remuent d'elles-mêmes, cependant il n'en est rien, car ils agissent d'après l'affection de la volonté, et par suite d'après la pensée de l'entendement, qui sont dans la tête. Si un seul corps avait plusieurs têtes, et que chaque tète fût indépendante quant à son entendement et à sa volonté, ce corps pourrait-il subsister ? Il n'y aurait pas entre elles l'unité d'action telle qu'elle existe avec une seule tête. S'il en est ainsi dans l'Église, il en est de même dans le ciel qui se compose de myriades de myriades d'anges ; si tous et chacun ne portaient leurs regards vers un Seul Dieu, ils s'éparpilleraient et le ciel serait dissipé. C'est pourquoi dès qu'un ange du Ciel pense seulement à plusieurs dieux, il est aussitôt séparé, car il est repoussé jusqu'aux derniers confins des cieux, et il tombe. L'allégorie est intéressante et donne une signification symbolique valable à la "chute des anges". L'auteur ne place donc pas la "chute" dans une perspective spatiale.
26. Comme tout le ciel et toutes les choses du ciel se réfèrent à un seul Dieu, le langage angélique est tel, que par une certaine harmonie découlant de l'harmonie du ciel, il se termine en une unité d'expression, indice qu'il est impossible aux anges de penser autrement qu'à un seul Dieu, car le langage procède de la pensée.
27. Tout homme raisonnable doit percevoir que le Divin est indivisible, et qu'il n'y a ni plusieurs infinis, ni plusieurs incréés, ni plusieurs tout-puissants, ni plusieurs dieux. Si quelqu'un, privé de raison, disait le contraire et affirmait que cette pluralité peut exister, pourvu qu'elle soit d'une même essence et forme ainsi un seul Infini, un seul Incréé, un seul Tout-Puissant et un seul Dieu, cette même essence ne serait-elle pas une même chose ? Et une même chose peut-elle être chez plusieurs ? Si l'on disait que l'un procède de l'autre, alors celui qui procède d'un autre n'est pas Dieu en soi, et cependant Dieu en soi est Dieu de qui procède toute chose, voir ci-dessus N° 16.
28. Si l'on soumet toutes ses connaissances à un examen attentif, et qu'on recherche, dans une élévation de l'esprit, l'universel de toutes choses, on arrive inéluctablement à la conclusion que cet universel est l'Amour et la Sagesse, qui sont les deux essentiels de toutes les choses de la vie de l'homme. Toute la vie civile, morale et spirituelle de l'homme en dépend et ne serait rien sans eux. Il en est de même de toutes les choses de la vie d'une société grande ou petite, d'un pays, de l'Eglise, et aussi du ciel angélique. Sans l'amour et la sagesse dont ils procèdent, ils ne sont rien.
29. Personne ne peut nier qu'en Dieu il y ait l'Amour et en même temps la Sagesse dans leur essence même, car d'après l'Amour en Soi, Dieu aime tous les hommes, et d'après la Sagesse en Soi Il les conduit tous. L'univers créé, considéré d'après l'ordre, est même tellement plein de la sagesse procédant de l'amour, que toutes les choses dans le complexe paraissent comme la sagesse même. Car elles y sont successivement et simultanément sans limite dans un tel ordre, que prises ensemble elles font un tout. C'est seulement ainsi, et non autrement, qu'elles peuvent être tenues en cohésion et être perpétuellement conservées
30. Parce que la Divine Essence Même est l'Amour et la Sagesse, l'homme a en lui deux facultés de la vie ; d'après l'une il a l'entendement, et d'après l'autre il a la volonté. La faculté d'après laquelle il a l'entendement, tire tout ce qui lui appartient de l'influx de la sagesse procédant de Dieu, et la faculté d'après laquelle il a la volonté, tire tout ce qui lui appartient de l'influx de l'amour procédant de Dieu. Lorsque l'homme n'est pas sage et n'aime pas comme il le devrait, ces facultés ne sont pas ôtées, mais elles sont seulement fermées ; et tant qu'elles le sont, l'entendement, il est vrai, est appelé entendement, et la volonté est appelée volonté, mais toujours est-il qu'en essence ils ne le sont pas. Si ces deux facultés étaient ôtées, alors périrait tout ce qui est humain, car l'humain consiste à penser, et d'après la pensée à parler et aussi à vouloir, et d'après la volonté à agir. Il est donc évident que le Divin réside chez l'homme dans ces deux facultés, qui sont celle d'être sage et celle d'aimer, c'est-à-dire que l'homme peut être sage et peut aimer. L'homme garde toujours la possibilité d'aimer et d'être sage, même s'il ne s'en sert pas comme il le devrait ; je l'ai compris par de nombreuses expériences qui seront rapportées ailleurs.
31. Parce que la Divine Essence Même est l'Amour et la Sagesse, toutes les choses dans l'univers se réfèrent au bien et au vrai, car tout ce qui procède de l'amour est appelé bien, et tout ce qui procède de la sagesse est appelé vrai. Mais ce sujet sera traité plus amplement dans la suite.
32. Parce que la Divine Essence Même est l'Amour et la Sagesse, l'univers et toutes les choses qu'il renferme, tant vivantes que non vivantes, subsistent d'après la chaleur et la lumière ; car la chaleur correspond à l'amour, et la lumière correspond à la sagesse. De ce fait la chaleur spirituelle est l'amour, et la lumière spirituelle est la sagesse. Il en sera donné de plus amples détails ci-dessous.
33. Toutes les affections et toutes les pensées de l'homme tirent leur origine du Divin Amour et de la Divine Sagesse, lesquels font la Divine Essence qui est Dieu ; les affections proviennent du Divin Amour, et les pensées de la Divine Sagesse. Toutes et chacune des choses de l'homme ne sont qu'affection et pensée, qui sont comme les sources de toutes les choses de sa vie. Tous les plaisirs de sa vie proviennent de l'affection de son amour, et tous les charmes de la pensée de cette affection. Maintenant, puisque l'homme a été créé pour être un réceptacle, et qu'il est réceptacle dans la mesure où il aime Dieu, et que d'après l'amour envers Dieu il a de la sagesse, c'est-à-dire dans la mesure où il a de l'affection pour les choses qui procèdent de Dieu, et qu'il pense d'après cette affection, il s'ensuit que la Divine Essence qui est le Créateur, est le Divin Amour et la Divine Sagesse.
34. On voit ci-dessus, aux N°s 14 à 16, que le Divin Être et le Divin Exister dans Dieu-Homme sont distinctement un. Comme le Divin Être est le Divin Amour, et que le Divin Exister est la Divine Sagesse, ainsi le Divin Amour et la Divine Sagesse sont de même distinctement un. Ils sont dits distinctement un, parce que l'amour et la sagesse sont deux choses distinctes, mais tellement unies, que l'amour appartient à la sagesse, et la sagesse à l'amour, car l'amour est dans la sagesse, et la sagesse existe dans l'amour. Comme la sagesse tire son exister de l'amour, N° 15, il en résulte que la Divine Sagesse est aussi l'Être. Il s'ensuit que l'amour et la sagesse pris ensemble sont le Divin Être, mais que pris distinctement, l'amour est appelé Divin Être, et la sagesse Divin Exister. Telle est l'idée angélique sur le Divin Amour et la Divine Sagesse.
35. Puisque telle est l'union de l'amour avec la sagesse et de la sagesse avec l'amour dans Dieu-Homme, la Divine Essence est une. Car la Divine Essence est le Divin Amour parce que cet Amour appartient à la Divine Sagesse, et elle est la Divine Sagesse parce que cette Sagesse appartient au Divin Amour. Puisque telle est leur union, la Divine Vie aussi est Une. La vie est la Divine Essence. Le Divin Amour et la Divine Sagesse sont un parce que l'union est réciproque, et que l'union réciproque fait l'unité. Il en sera dit davantage ailleurs sur l'union réciproque.
36. L'union de l'amour et de la sagesse est aussi dans toute œuvre Divine ; de cette union vient la perpétuité et même l'éternité de l'œuvre. S'il y avait plus de Divin Amour que de Divine Sagesse, ou plus de Divine Sagesse que de Divin Amour dans quelque œuvre créée, celle-ci ne subsisterait qu'en tant qu'il y aurait autant de l'un que de l'autre ce qu'il y a en surplus se dissiperait.
37. La Divine Providence dans l'action de réformer, régénérer et sauver les hommes, participe également du Divin Amour et de la Divine Sagesse. Avec plus de Divin Amour que de Divine Sagesse, ou plus de Divine Sagesse que de Divin Amour, l'homme ne peut être ni réformé, ni régénéré, ni sauvé. Le Divin Amour veut sauver tous les hommes, mais il ne peut sauver que par la Divine Sagesse, et à la Divine Sagesse appartiennent toutes les lois par lesquelles se fait la salvation. L'Amour ne peut transgresser ces lois, puisque le Divin Amour et la Divine Sagesse font un, et agissent en union.
38. Dans la Parole le Divin Amour est entendu par la justice et la Divine Sagesse par le jugement, c'est pourquoi il y est dit justice et jugement en parlant de Dieu. Par exemple, dans David La justice et le Jugement sont le soutien de ton trône. Ps. LXXXIX, 15. - Jéhovah fera sortir comme la lumière ta justice et ton jugement comme le midi. - Ps. XXXVII, 6. - Je me fiancerai à toi pour l'éternité en justice et en jugement - Osée 11, 19. Je susciterai à David un germe juste qui régnera en roi il pratiquera le jugement et la justice dans le pays - Jérémie XXIII. 5. Il sera assis sur le trône de David et sur son royaume, pour l'affermir en jugement et en justice - Esaïe IX, 6. Exalté sera Jéhovah parce qu'Il a rempli Sion de jugement et de justice - Esaïe XXXIII, 5. - Quand j'aurai appris les jugements de ta justice : sept fois dans le jour je te loue sur les jugements de ta justice - Ps CXIX, 7, 164. - La même chose est entendue par la vie et par la lumière dans Jean 1, 4 : En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes. Par la vie est entendu le Divin Amour du Seigneur, et par la lumière sa Divine Sagesse. La même chose est encore entendue par la vie et par l'esprit dans Jean VI, 63 : Jésus dit : les Paroles que je vous ai dites sont esprit et vie.
39. Dans l'homme, l'amour et la sagesse paraissent comme deux choses séparées, néanmoins en elles-mêmes elles sont distinctement un, parce que chez l'homme la sagesse est telle qu'est l'amour, et l'amour tel qu'est la sagesse. La sagesse qui ne fait pas un avec son amour, semble être la sagesse, cependant elle ne l'est pas ; et l'amour qui ne fait pas un avec sa sagesse, semble être l'amour de la sagesse, mais il ne l'est pas, car réciproquement, l'un doit tirer de l'autre son essence et sa vie. La sagesse et l'amour chez l'homme paraissent comme séparés, parce que chez lui la faculté de comprendre est susceptible d'être élevée dans la lumière du ciel, mais non la faculté d'aimer, si ce n'est dans la mesure ou l'homme agit d'après sa compréhension. Toute sagesse apparente qui ne fait pas un avec l'amour de la sagesse, retombe dans l'amour qui fait un avec elle ; amour qui peut être celui de la non-sagesse, et même celui de la folie. Ainsi l'homme peut savoir d'après la sagesse, qu'il doit faire telle ou telle chose, et néanmoins il ne la fait pas, parce qu'il ne l'aime pas. Mais dans la mesure où l'homme fait par amour ce que la sagesse enseigne, il est une image de Dieu.
40. Pour les hommes en général, l'amour et la sagesse sont comme des choses qui planent et flottent dans un air raréfié ou éther, ou comme ce qui émane de quelque chose de semblable. Très rares sont ceux qui pensent que cet amour et cette sagesse sont en réalité et en actualité une substance et une forme. Même ceux qui le pensent croient que l'amour et la sagesse sont hors du sujet et découlent de lui. Car ils nomment substance et forme ce qu'ils pensent être hors du sujet et découlant de lui, même si c'est quelque chose qui plane et flotte, ne sachant pas que l'amour et la sagesse sont le sujet lui-même, et que ce qui est perçu comme planant et flottant n'est que l'apparence de l'état du sujet en lui-même. Pour plusieurs raisons cela n'a pas été vu jusqu'à présent. Par exemple, les apparences sont les premiers rudiments par lesquels le mental humain forme son entendement, et il ne peut les dissiper que par la recherche de la cause. Si la cause est profondément cachée, le mental ne peut l'explorer, à moins qu'il ne garde longtemps son entendement dans la lumière spirituelle ; mais il ne peut l'y tenir longtemps parce que la lumière naturelle l'en retire continuellement. Néanmoins l'amour et la sagesse sont en réalité et en actualité une substance et une forme, qui constituent le sujet lui-même. Telle est la vérité.
41. Mais comme cette vérité est contre l'apparence, elle ne peut être acceptée sans être démontrée, et elle ne peut être démontrée que par des choses que l'homme peut percevoir d'après les sens de son corps. L'homme a cinq sens externes. Le sujet du toucher est la peau dont l'homme est enveloppé ; la substance même et la forme même de la peau font qu'il sent les choses qui y sont appliquées. Le sens du toucher, n'est pas dans les choses appliquées, mais il est dans la substance et la forme de la peau, lesquelles sont le sujet. Ce sens n'est que l'impression produite sur le sujet par les choses qui ont été appliquées. Il en est de même du goût ; ce sens n'est que l'impression produite sur la substance et la forme de la langue qui, elle, est le sujet. Il en va de même de l'odorat ; on sait que l'odeur affecte les narines, qu'elle est dans les narines, et qu'elle est l'impression produite dans les narines par les particules odoriférantes qui les touchent. Il en est de même de l'ouïe ; il semble que l'ouïe soit dans le lieu où le son commence, mais l'ouïe est dans l'oreille, et elle est l'impression produite sur la substance et la forme de l'oreille. Que l'ouïe soit à distance de l'oreille n'est qu'une apparence. Il en est de même de la vue ; lorsque l'homme voit des objets, il semble que la vue soit à une certaine distance, néanmoins la vue est dans l'oeil qui est le sujet, et pareillement elle est l'impression produite sur le sujet. La distance vient seulement du jugement qui conclut sur l'espace d'après les intermédiaires, ou d'après la diminution et par suite d'après l'imprécision de l'objet, dont l'image se présente intérieurement dans l'oeil selon l'angle d'incidence. Il est donc évident que la vue ne va pas de l'oeil vers l'objet, mais que l'image de l'objet entre dans l'oeil, et en affecte la substance et la forme. En effet, il en est de la vue comme de l'ouïe, celle-ci ne sort pas non plus de l'oreille pour saisir le son, mais le son entre dans l'oreille et l'affecte.
D'après ces explications, on peut voir que l'impression produite sur la substance et la forme, qui fait le sens, n'est pas quelque chose de séparé du sujet, mais qu'elle y occasionne seulement un changement, le sujet restant toujours le même. Il s'ensuit que la vue, l'ouïe, l'odorat, le goût et le toucher ne sont pas quelque chose de subtil effluant de leurs organes, mais qu'ils sont les organes considérés dans leur substance et dans leur forme ; quand les organes sont affectés, la sensation se produit.
42. Il en est de même de l'amour et de la sagesse, avec la seule différence que les substances et les formes, qui sont l'amour et la sagesse, ne paraissent pas devant les yeux, comme les organes des sens externes. Néanmoins personne ne peut nier que les choses de l'amour et de la sagesse, qui sont nommées pensées, perceptions et affections, soient des substances et des formes, et non des entités subtiles qui sortent du néant ou qui proviennent de substances et de formes réelles et actuelles qui sont des sujets. En effet, il y a dans le cerveau d'innombrables substances et d'innombrables formes, dans lesquelles réside tout sens intérieur qui se réfère à l'entendement et à la volonté. On peut voir d'après ce qui vient d'être dit des sens externes, que toutes les affections, les perceptions et les pensées n'y sont pas des souffles exhalés de ces substances et de ces formes, mais qu'elles sont en actualité et en réalité des sujets qui n'émettent rien d'eux-mêmes, mais qui seulement subissent des changements selon ce qui leur parvient et les affecte. Il en sera dit davantage ci-dessous.
43. On peut voir d'après ces explications que le Divin Amour en soi et la Divine Sagesse en soi sont une substance et une forme, car ils sont l'Être même et l'Exister même. Si un tel Être et un tel Exister n'étaient, comme ils le sont, une substance et une forme, ils ne seraient qu'un être de raison, qui en soi n'est rien.
44. Il vient d'être confirmé que le Divin Amour et la Divine Sagesse sont une substance et une forme ; il a aussi été dit que le Divin Être et le Divin Exister sont l'Être et l'Exister en soi. Il ne peut être dit que c'est l'Être et l'Exister d'après soi, parce que cela implique un commencement, commencement d'après quelqu'un en qui serait l'Être et l'Exister en soi.
Mais l'Être même et l'Exister même en soi est de toute éternité. L'Être même et l'Exister même en soi est aussi incréé, et toute chose créée ne peut l'être que d'après l'Incréé. Ce qui a été créé est aussi fini, et le fini ne peut non plus exister que d'après l'Infini.
45. Celui qui peut, par une pensée profonde, percevoir et saisir l'Être et l'Exister en soi, percevra et saisira pleinement que c'est le Soi-Même et l'Unique. Est appelé le Soi-Même ce qui seul Est, et l'Unique ce dont procède tout autre. Maintenant comme le Soi-Même et l'Unique est une substance et une forme, il s'ensuit que c'est la Substance même et Unique, et la Forme même et Unique. Comme cette Substance même et cette Forme même est le Divin Amour et la Divine Sagesse, il s'ensuit que c'est l'Amour même et unique et la Sagesse même et unique. Par conséquent c'est l'Essence même et unique, et aussi la Vie même et unique, car l'Amour et la Sagesse, c'est la Vie.
46. Ainsi, on peut voir combien ceux qui disent que la nature est d'après elle-même, pensent sensuellement, c'est-à-dire, d'après les sens du corps, et d'après l'aveuglement de ces sens dans les choses spirituelles. Ils pensent d'après l'apparence, pensée qui ferme l'entendement, et ne peuvent penser d'après l'entendement, pensée qui ouvre la vue. Ils ne peuvent penser quelque chose sur l'Être et l'Exister en soi, ni penser que c'est l'Eternel, l'Incréé et l'Infini. Ils ne peuvent également rien penser sur la vie, sinon comme d'une chose éthérée qui tombe dans le néant ; ils pensent de même de l'Amour et de la Sagesse, ne comprenant pas que de l'un et de l'autre procèdent toutes les choses de la nature. On ne peut non plus voir que toutes les choses de la nature procèdent de l'Amour et de la Sagesse, à moins que la nature ne soit considérée, non d'après quelques-unes de ses formes, qui sont les objets de l'oeil seul, mais d'après les usages dans leur série et dans leur ordre. Car les usages ne proviennent que de la vie, et leur série et leur ordre ne proviennent que de la sagesse et de l'amour, cependant que les formes ne sont que les contenants des usages. Si on ne considère donc que les formes, on ne peut voir quelque chose de la vie dans la nature, ni à plus forte raison quelque chose de l'amour et de la sagesse, ni par conséquent, quelque chose de Dieu.
47. L'essentiel de l'amour n'est pas de s'aimer, mais d'aimer les autres et d'être conjoint à eux par amour. L'essentiel de l'amour est aussi d'être aimé des autres, car alors la conjonction se fait. L'essence de tout amour consiste dans la conjonction, qui est sa vie même qu'on appelle plaisir, charme, délice, douceur, béatitude, bonheur et félicité. Aimer, c'est vouloir que ce qui est sien soit à un autre, et sentir le plaisir de l'autre comme un plaisir en soi ; c'est aimer le prochain. Mais sentir son plaisir dans un autre, et non le plaisir de l'autre en soi, ce n'est pas aimer, c'est s'aimer soi-même. Ces deux amours sont diamétralement opposés. L'un et l'autre, il est vrai, conjoignent, et il ne semble pas que s'aimer dans un autre disjoigne, cependant cela disjoint au point, qu'autant quelqu'un a aimé un autre de cette façon, autant ensuite il le déteste, car une telle conjonction se dissout graduellement d'elle-même, et l'amour se change en haine dans le même degré.
48. Celui qui peut discerner le caractère essentiel peut voir cela. En effet, n'aimer que soi et non un autre de qui on est aimé en retour, n'est-ce pas une séparation plutôt qu'une conjonction ? La conjonction de l'amour existe par la réciprocité, et il n'y a pas de réciprocité dans un seul être. Croire que cela est possible n'est que pure imagination. Il est ainsi évident que le Divin Amour doit nécessairement être et exister en d'autres, qu'il aime, et dont il est aimé. Puisque cette nécessité existe dans tout amour, elle doit être dans toute sa plénitude, c'est-à-dire, infiniment dans l'Amour Même.
49. Quant à ce qui concerne Dieu, il lui est impossible d'aimer d'autres et d'être aimé par d'autres, dans lesquels il y aurait quelque chose de l'infini, ou quelque chose de l'essence et de la vie de l'amour en soi, ou quelque chose du Divin. Car si quelque chose de l'infini, ou de l'essence et de la vie de l'amour en soi, c'est-à-dire, quelque chose de Divin était en eux, alors Dieu ne serait pas aimé par d'autres, mais Il s'aimerait Lui-même. Puisque l'infini ou le Divin est unique, s'Il était dans d'autres, le Soi-Même serait en eux, et ce serait l'amour même de soi, dont il ne peut y avoir la moindre trace dans Dieu, car c'est absolument l'opposé de l'essence Divine. Par conséquent, pour que cette relation d'amour ait lieu, il faut qu'il y ait des êtres n'ayant rien du Divin en eux. On verra plus loin que cela a lieu dans des êtres créés par le Divin. Mais pour cela il faut qu'il y ait la Sagesse Infinie qui fasse un avec l'Amour Infini, c'est-à-dire, qu'il y ait le Divin Amour de la Divine Sagesse, et la Divine Sagesse du Divin Amour, dont il a été traité ci-dessus, aux N°s 34 à 39.
50. De la perception et de la connaissance de cet arcane dépendent la perception et la connaissance de toutes les choses de l'existence ou de la création, aussi de toutes celles de la subsistance ou de la conservation par Dieu, c'est-à-dire, de toutes les œuvres de Dieu dans l'univers créé, dont il sera parlé dans la suite.
51. Mais il faut se garder d'obscurcir ses idées avec la notion de temps et d'espace. En effet, dans la mesure où cette notion occupera les idées, on ne comprendra pas ce qui va suivre, car le Divin n'est ni dans le temps ni dans l'espace. On le verra clairement tout au long de cet ouvrage, spécialement dans les explications au sujet de l'Éternité, de l'Infinité et de la Toute-Présence.
52. L'univers, dans les très grands et dans les très petits, dans les premiers et dans les derniers, est tellement plein du Divin Amour et de la Divine Sagesse, qu'on peut dire qu'il est le Divin Amour et la Divine Sagesse en image. On voit manifestement qu'il en est ainsi d'après la correspondance de toutes les choses de l'univers avec toutes celles de l'homme. Cette correspondance est si exacte qu'on peut dire que l'homme aussi est un univers. Il y a correspondance de ses affections, et par suite de ses pensées avec toutes les choses du règne animal ; de sa volonté, et par suite de son entendement avec toutes celles du règne végétal ; et de sa vie la plus externe avec toutes celles du règne minéral. Une telle correspondance n'est pas apparente dans le monde naturel, mais elle est visible dans le monde spirituel pour quiconque y fait attention. Dans ce monde il y a toutes les choses qui existent dans les trois règnes du monde naturel, et elles sont les correspondances des affections, d'après la volonté, et des pensées d'après l'entendement, et aussi des choses les plus externes de la vie de ceux qui y sont. Les unes et les autres apparaissent autour d'eux dans un aspect tel qu'est celui de l'univers créé, avec cette différence que c'est dans une plus petite effigie. Par là il est bien évident pour les anges que l'univers créé est l'image représentative de Dieu-Homme, et que c'est son Amour et sa Sagesse qui se présentent en une image dans l'univers, non pas que l'univers créé soit Dieu-Homme, mais parce qu'il vient de Lui ; car rien dans l'univers créé n'est substance et forme en soi, ni vie en soi, ni amour et sagesse en soi ; l'homme non plus n'est pas homme en soi, mais tout vient de Dieu qui est l'Homme, la Sagesse et l'Amour, la Forme et la Substance en soi. Ce qui est l'Être-en-Soi est Incréé et Infini ; mais ce qui vient de Dieu, puisqu'il ne contient rien de l'Être-en-Soi, est créé et fini, et présente une image de Celui par qui il est et existe.
53. L'être et l'exister, puis la substance et la forme, comme aussi la vie et même l'amour et la sagesse, peuvent être attribués aux objets créés et finis, mais ces attributs sont tous créés et finis. Si ces choses peuvent être attribuées à ces objets, ce n'est pas qu'elles possèdent quelque Divin, mais c'est qu'elles sont dans le Divin et que le Divin est en elles. En effet, tout ce qui a été créé est en soi inanimé et mort, mais il est animé et vivifié parce que le Divin est dans les choses créées et finies, et qu'elles sont dans le Divin.
54. Le Divin est toujours le même dans tous les sujets, mais ce sont les sujets créés qui diffèrent les uns des autres, car il n'y en a pas deux qui soient semblables, par suite chaque chose est un contenant différent ; il en résulte que le Divin dans son image se présente sous des formes variées. La présence du Divin dans les opposés sera traitée ultérieurement.
55. Il est généralement admis que toutes et chacune des choses de l'univers ont été créées par Dieu ; l'univers, par conséquent, avec toutes et chacune des choses qu'il contient est appelé, dans la Parole, l'œuvre de Jéhovah. Certains pensent que le monde dans son complexe a été créé du néant, et ils conservent du néant l'idée d'un néant absolu. Cependant d'un néant absolu rien n'est fait ou ne peut être fait. C'est une vérité acceptée. L'univers donc, qui est l'image de Dieu, et par suite plein de Dieu, n'a pu être créé qu'en Dieu et par Dieu ; car Dieu est l'Être Même, et de l'Être doit venir ce qui est. Créer ce qui est du néant qui n'est pas, est une absolue contradiction. Néanmoins ce qui a été créé en Dieu par Dieu n'est pas une continuité de Dieu, car Dieu est l'Être en soi, et dans les objets créés il n'y a rien de l'Être en soi. S'il y en avait quelque chose, ce serait une continuité de Dieu, et une continuité de Dieu est Dieu. Voici l'idée angélique sur ce sujet : Ce qui a été créé en Dieu et par Dieu est comme une chose qui, dans l'homme, a été tirée de sa vie, mais de laquelle la vie a été extraite, et qui est telle, qu'elle est en accord avec sa vie,et néanmoins n'est pas sa vie. Les anges le confirment d'après plusieurs choses qui existent dans leur Ciel, où ils disent qu'ils sont en Dieu et que Dieu est en eux, et que cependant ils n'ont dans leur être rien de Dieu qui soit Dieu. D'autres raisons seront données ultérieurement, d'après lesquelles ils confirment cela.
56. Toute chose créée, en vertu de cette origine, est telle dans sa nature, qu'elle est un réceptacle de Dieu, non par continuité, mais par contiguïté. Elle est susceptible d'être conjointe par la contiguïté et non par la continuité, car ayant été créée en Dieu par Dieu elle est faite pour la conjonction ; et parce qu'elle a été ainsi créée, elle est une chose analogue, et par cette conjonction elle est comme une image de Dieu dans un miroir.
57. De là vient que les anges sont des anges, non par eux-mêmes, mais par cette conjonction avec Dieu-Homme. Cette conjonction est selon la réception du Divin Bien et du Divin Vrai, qui sont Dieu, et qui semblent procéder de Lui,bien qu'ils soient en Lui.Cette réception a lieu chez les anges dans la mesure où ils s'appliquent à observer les lois de l'ordre, qui sont les Divines Vérités, d'après la liberté de penser et de vouloir selon la raison, facultés qu'ils tiennent du Seigneur comme si elles leur appartenaient. Par là, comme par eux-mêmes, ils ont la réception du Divin Bien et du Divin Vrai, et par là il y a la réciprocité de l'amour ; car, ainsi qu'il a déjà été dit, l'amour n'existe pas sans réciprocité. Il en est de même des hommes sur terre. D'après ces explications on peut d'abord voir que toutes les choses de l'univers créé sont des réceptacles du Divin Amour et de la Divine Sagesse de Dieu-Homme.
58. On ne peut expliquer maintenant comment toutes les choses de l'univers qui ne sont ni comme les anges ni comme les hommes, mais qui sont au-dessous des hommes dans le règne animal, au-dessous des animaux dans le règne végétal, et au-dessous des végétaux dans le règne minéral, sont aussi des réceptacles du Divin Amour et de la Divine Sagesse de Dieu-Homme, car auparavant il y a plusieurs explications à donner sur les degrés de la vie et sur les degrés des réceptacles de la vie. La conjonction avec ces choses est selon les usages ; car tous les usages bons tirent leur origine d'une conjonction avec Dieu, conjonction semblable pour tous, mais dissemblable selon les degrés. Successivement dans la descente elle devient telle, qu'il n'y a en ces choses rien de la liberté, parce qu'il n'y a rien de la raison, et par suite rien de l'apparence de la vie ; néanmoins elles sont des réceptacles. Comme elles sont des réceptacles, elles sont réagissantes ; et parce qu'elles sont réagissantes, elles sont des contenants. La conjonction avec les usages qui ne sont pas bons sera traitée lorsque l'origine du mal sera exposée.
59. D'après ces explications on peut voir que le Divin est dans toutes et dans chacune des choses de l'univers créé, et que par conséquent l'univers créé est l'œuvre des mains de Jéhovah, comme il est dit dans la Parole, c'est-à-dire, l'œuvre du Divin Amour et de la Divine Sagesse, car cet Amour et cette Sagesse sont entendus par les mains de Jéhovah. Bien que le Divin soit dans toutes et dans chacune des choses de l'univers créé, cependant il n'y a rien du Divin en soi dans leur être, car l'univers créé n'est pas Dieu, mais il est de Dieu. Et parce qu'il est par Dieu, il y a en lui l'image de Dieu comme il y a l'image d'un homme dans un miroir, dans lequel l'homme apparaît il est vrai, sans qu'il n'y ait rien de lui dans cette image.
60. J'ai entendu dans le monde spirituel plusieurs esprits dire qu'ils voulaient bien reconnaître qu'il y a le Divin dans toutes et dans chacune des choses de l'univers, parce qu'ils voyaient en elles les œuvres merveilleuses de Dieu, et d'autant plus merveilleuses qu'elles sont vues plus intérieurement. Mais quand il leur fut dit qu'il en était réellement ainsi, ils furent indignés, indice qu'ils le disaient sans le croire. Il leur fut alors demandé s'il ne pouvait le voir seulement d'après l'admirable faculté que possède toute semence de produire sa propre forme végétale dans l'ordre voulu jusqu'à de nouvelles semences ; et en ce que dans toute semence il y a l'idée de l'infini et de l'éternel, car en elle il y a une tendance à se multiplier et à fructifier à l'infini et éternellement. Cela n'est-il pas aussi évident pour l'animal, même le plus petit, qui possède des organes et des viscères avec leurs propres fonctions, sans parler des choses merveilleuses que présente leur caractère. Toutes ces merveilles viennent de Dieu, mais les formes dont elles ont été revêtues proviennent des matières de la terre ; de ces matières proviennent les végétaux et dans leur ordre les hommes. C'est pourquoi il est dit de l'homme, qu'il a été créé de l'humus, qu'il est poussière de la terre, et qu'une âme de vies a été soufflée dans ses narines - Gen. II. 7 - d'où il est évident que le Divin n'appartient pas à l'homme, mais qu'Il lui a été adjoint.
61. On peut le voir d'après toutes et chacune des choses du règne animal, du règne végétal et du règne minéral.
Le rapport avec l'homme dans toutes et dans chacune des choses du règne animal est évident par le fait que les animaux de tout genre ont en commun avec l'homme, des membres, des organes et des viscères. Ils ont aussi des appétits et des affections semblables aux appétits et aux affections naturels de l'homme. Ils ont des connaissances innées correspondantes à leurs affections ; dans quelques-unes de ces connaissances on voit comme un spirituel qui apparaît dans une certaine mesure. C'est pourquoi les hommes purement naturels se voient semblables aux êtres animés de ce règne, sauf en matière de langage.
Le rapport avec l'homme par toutes et chacune des choses du règne végétal est évident par le fait que les végétaux tirent leur existence d'une semence, et d'après elle, progressent par étapes. Il y a chez eux quelque chose qui ressemble au mariage, suivi de prolification. Leur âme végétative est l'usage dont ils sont les formes ; sans parler de plusieurs autres choses qui ont un rapport avec l'homme, et qui ont été décrites par plusieurs auteurs.
Le rapport avec l'homme par toutes et chacune des choses du règne minéral se montre seulement dans la tendance à produire des formes représentatives de toutes et chacune des choses du règne végétal, et par conséquent à remplir des usages. En effet, dès que la semence tombe dans le sein de la terre, celle-ci la réchauffe et lui donne tous les moyens pour qu'elle germe, et qu'elle se montre dans une forme représentative de l'homme. On voit aussi une semblable tendance dans les objets solides de ce règne, par les coraux dans le fond des mers, et par les efflorescences dans les mines, qui proviennent des minéraux et des métaux. L'effort pour la végétation, et ainsi pour l'accomplissement des usages, est le dernier effet qui procède du Divin dans les choses créées.
62. comme les minéraux font un effort vers la végétation de même les végétaux font un effort vers la vivification. De là les insectes de différents genres qui correspondent aux exhalaisons odoriférantes des végétaux. On verra plus loin que cela provient non de la chaleur du soleil du monde, mais de la vie opérant par cette chaleur selon l'état des réceptacles.
63. D'après ce qui vient d'être exposé, on peut savoir qu'il y a un rapport de toutes les choses de l'univers créé, avec l'homme, mais on ne peut le voir qu'obscurément, tandis qu'on le voit clairement dans le monde spirituel. Là sont aussi toutes les choses des trois règnes, au milieu desquelles est l'ange. Il les voit autour de lui, et sait aussi qu'elles sont ses représentations ; bien plus, quand l'intime de son entendement est ouvert, il se connaît, et voit son image en elles, à peu près comme dans un miroir
64. Par ces rapports et par plusieurs autres concordances, que je n'ai pas le loisir d'exposer ici, on peut savoir avec certitude que Dieu est Homme, et que l'univers créé est l'image de Dieu ; car il y a un rapport commun de toutes choses avec Lui, de même qu'il y a un rapport particulier de toutes choses avec l'homme.
65. Les derniers sont, comme il a déjà été dit, toutes et chacune des choses du règne minéral. Ces choses sont les matières de différents genres qui renferment la fin et aussi l'origine de tous les usages qui procèdent de la vie. La fin de tous les usages est l'effort pour produire les usages, et l'origine est la force qui agit d'après cet effort. Ceci est pour le règne minéral.
Les moyens sont toutes et chacune des choses du règne végétal. Ces choses sont tous les végétaux dont les usages sont pour tous et pour chacun des êtres du règne animal, tant imparfaits que parfaits. Ils nourrissent leurs corps par les matières, délectent leurs sens par la saveur, l'odeur, la beauté, et vivifient leurs affections. L'effort pour cela est aussi en eux par la vie.
Les premiers sont toutes et chacune des choses du règne animal. Les vers et les insectes sont parmi les infimes de ce règne ; les oiseaux et les bêtes sont les moyens ; et les hommes, les suprêmes, car dans tout règne il y a les infimes, les moyens et les suprêmes ; les infimes pour l'usage des moyens, et les moyens pour l'usage des suprêmes. Les usages de toutes choses créées montent ainsi en ordre depuis les derniers jusqu'à l'homme, qui est le premier dans l'ordre.
66. Il y a trois degrés d'ascension dans le monde naturel, et il y a trois degrés d'ascension dans le monde spirituel. Tous les animaux sont des réceptacles de la vie. Les animaux les plus parfaits sont des réceptacles de la vie des trois degrés du monde naturel, les moins parfaits de la vie de deux degrés de ce monde, et les imparfaits de la vie d'un seul degré. Mais l'homme seul est un réceptacle de la vie des trois degrés du monde naturel et des trois degrés du monde spirituel. Il s'ensuit que l'homme est différent de tout animal, car il peut être élevé au-dessus de la nature. Il peut penser analytiquement et rationnellement sur les choses civiques et morales qui sont au-dedans de la nature ; il le peut aussi sur les choses spirituelles et célestes qui sont au-dessus de la nature ; il peut même être élevé dans la sagesse jusqu'au point de voir Dieu. Mais, dans un article spécial, il sera traité des six degrés par lesquels les usages de toutes les choses créées montent, dans leur ordre, jusqu'à Dieu Créateur. D'après cet exposé sommaire, on peut voir que, de toutes les choses créées, il y a une ascension vers le Premier, qui seul est la Vie, et que les usages de toutes les choses sont les réceptacles mêmes de la vie, et que de là viennent les formes des usages.
67. Il sera dit aussi en peu de mots comment l'homme monte, c'est-à-dire, est élevé du dernier degré au premier. L'homme naît dans le dernier degré du monde naturel ; par les connaissances il est ensuite élevé dans le second degré, et selon le perfectionnement de son entendement par les connaissances, il est élevé dans le troisième degré, alors il devient rationnel. Les trois degrés d'ascension dans le monde spirituel sont dans l'homme au-dessus des trois degrés naturels, et ne se montrent pas avant qu'il ait dépouillé le corps terrestre. Quand cela a lieu, le premier degré spirituel lui est ouvert, ensuite le second, et enfin le troisième, mais celui-ci seulement chez ceux qui deviennent anges, du troisième Ciel, ce sont eux qui voient Dieu. Ceux chez qui le second et le dernier degré peuvent être ouverts deviennent anges du second et du dernier Ciel. Tout degré spirituel chez l'homme est ouvert selon la réception du Divin Amour et de la Divine Sagesse procédant du Seigneur. Ceux qui en reçoivent un peu viennent dans le premier degré spirituel ou le plus bas ; ceux qui reçoivent davantage viennent dans le second degré spirituel ou le moyen ; et ceux qui en reçoivent beaucoup viennent dans le troisième ou suprême degré. Mais ceux qui n'en reçoivent rien restent dans les degrés naturels, et ne tirent des degrés spirituels que ce qui est indispensable pour qu'ils puissent penser et par suite parler, et vouloir et par suite agir, mais sans intelligence.
68. Sur l'élévation des intérieurs de l'homme qui appartiennent à son mental, il faut encore savoir que dans tout ce qui a été créé par Dieu il y a une réaction. L'action appartient à la Vie seule, et la réaction est excitée par l'action de la Vie. Cette réaction semble appartenir à la chose créée parce qu'elle a lieu quand la chose est actionnée ; ainsi dans l'homme elle semble lui appartenir, parce qu'il sent absolument que la vie lui appartient, alors que l'homme est seulement un réceptacle de la vie. Cette cause fait que l'homme, en raison de son mal héréditaire, réagit contre Dieu. Mais autant il croit que toute sa vie vient de Dieu, et que tout bien de la vie vient de l'action de Dieu, et tout mal de la vie de la réaction de l'homme, autant la réaction devient de l'action, et l'homme agit avec Dieu comme par soi-même. L'équilibre de toutes choses vient de l'action et de la réaction simultanée, et il faut que tout soit dans l'équilibre. Ceci a été dit afin que l'homme croie que c'est par le Seigneur qu'il monte vers Dieu, et non par lui-même.
69. Il y a deux attributs de la nature, l'espace et le temps. L'homme dans le monde naturel forme d'après eux les idées de sa pensée, et par suite son entendement. S'il n'élève pas son mental au-dessus de ces idées, il ne peut rien percevoir du spirituel ni du Divin, car il enveloppe le spirituel et le Divin d'idées qui tiennent à l'espace et au temps, et dans la mesure où il le fait, la lueur de son entendement, devient purement naturelle. Penser d'après l'espace et le temps en raisonnant sur les spirituels et sur les Divins, c'est comme penser d'après l'obscurité de la nuit sur les objets qui apparaissent seulement dans la lumière du jour. De là vient le naturalisme. Mais celui qui sait élever son mental au-dessus des idées de la pensée qui tiennent à l'espace et au temps, passe de l'obscurité à la lumière, et il discerne les spirituels et les Divins, et voit enfin les choses qui sont en eux et qui en procèdent. Alors d'après cette lumière il dissipe l'obscurité de la lueur naturelle, et il en relègue les illusions du milieu sur les côtés. Tout homme doué d'entendement, peut penser au-dessus de ces attributs de la nature, et lorsqu'il le fait, il affirme et voit que le Divin, parce qu'Il est Omniprésent, n'est pas dans l'espace. Il peut aussi affirmer et voir ce qui a été exposé ci-dessus ; mais s'il nie la Divine Omniprésence et attribue toute chose à la nature, alors il ne veut pas être élevé, bien qu'il le puisse.
70. Tous ceux qui meurent et deviennent des anges se dépouillent de ces deux propriétés de la nature, qui, ainsi qu'il a été dit, sont l'espace et le temps ; car ils entrent alors dans la lumière spirituelle, dans laquelle les objets de la pensée sont les vrais, qui ne tirent absolument rien de l'espace et du temps, et dans laquelle les objets de la vue sont semblables à ceux du monde naturel, mais correspondants à leurs pensées. Ces objets, il est vrai, apparaissent comme dans l'espace et dans le temps, néanmoins les anges ne pensent pas d'après l'espace et le temps. Il en est ainsi, parce que les espaces et les temps n'y sont pas fixes comme dans le monde naturel, mais varient selon les états de la vie des anges. Par suite, dans les idées de leur pensée, au lieu des espaces et des temps, il y a les états de la vie ; au lieu des espaces, les choses qui se rapportent aux états de l'amour ; et au lieu des temps les choses qui se rapportent aux états de la sagesse. Il s'ensuit que la pensée spirituelle et que le langage spirituel qui en provient diffèrent totalement de la pensée et du langage naturels ; ils n'ont en commun que les intérieurs des choses, intérieurs qui tous sont spirituels. Il sera donné ailleurs de plus grands détails sur cette différence. Puisque les pensées des anges ne tirent rien de l'espace, ni rien du temps, mais tirent tout des états de la vie, il est évident que les anges ne comprennent pas quand il est dit que le Divin remplit les espaces, car ils ne savent pas ce que c'est que les espaces, mais qu'ils comprennent clairement quand sans l'idée d'aucun espace, il est dit que le Divin remplit toutes choses.
71. Ce qui suit permettra d'illustrer que l'homme purement naturel pense aux spirituels et aux Divins, d'après l'espace, et que l'homme spirituel y pense sans l'espace. L'homme purement naturel pense par les idées qu'il s'est acquises d'après les objets de la vue, qui tous ont une figure tenant de la longueur, de la largeur et de la hauteur, et dont la forme angulaire ou circulaire est déterminée par ces dimensions. Ces figures et ces formes sont évidemment présentes dans les idées de sa pensée sur les objets visibles de la terre, et le sont aussi sur les choses non visibles, c'est-à-dire civiques et morales. Il ne voit pas celles-ci, il est vrai, mais elles y sont comme des continuations des objets visibles. Il en est autrement de l'homme spirituel, et surtout de l'ange du ciel dont la pensée n'a rien de commun avec la figure et la forme tenant quelque chose de la longueur, de la largeur et de la hauteur de l'espace, mais elle est sur l'état de la chose d'après l'état de la vie. Par conséquent, au lieu de la longueur de l'espace il pense au bien de la chose, d'après le bien de la vie ; au lieu de la largeur de l'espace, au vrai de la chose d'après le vrai de la vie ; et au lieu de la hauteur, aux degrés du bien et du vrai. Ainsi il pense d'après la correspondance qui existe entre les spirituels et les naturels. D'après cette correspondance, dans la Parole la longueur signifie le bien de la chose, la largeur le vrai de la chose, et la hauteur les degrés du bien et du vrai. Il est donc évident que l'ange du ciel, quand il pense à l'Omniprésence Divine, ne peut que penser que le Divin, sans espace, remplit toutes choses. Ce que l'ange pense est le vrai, parce que la lumière qui éclaire son entendement est la Divine Sagesse.
72. Sans cette pensée fondamentale sur Dieu, les choses qui seront dites sur la création de l'univers par Dieu-Homme sur sa Providence, sa Toute-Puissance, son Omniprésence et son Omniscience peuvent, il est vrai, être comprises, mais ne peuvent être retenues. Car l'homme purement naturel quand il les comprend, retombe toujours dans l'amour de sa vie, qui appartient à sa volonté, et cet amour les dissipe, et plonge la pensée dans l'espace, dans lequel est sa lueur, qu'il appelle le rationnel, ne sachant pas qu'autant il nie ces choses, autant il est irrationnel. On peut confirmer qu'il en est ainsi par l'idée de ce vrai, que Dieu est Homme. On peut aussi le comprendre en lisant avec attention ce qui a été dit ci-dessus, N°s 11 à 13, et ce qui a été écrit ensuite. Mais si la pensée est remise plus ou moins dans la lueur naturelle qui tient à l'espace, ces choses paraîtront comme des paradoxes, et pourront même être rejetées. Pour cette raison il est dit que le Divin remplit tous les espaces de l'univers, et il n'est pas dit que Dieu-Homme les remplit, car la lueur purement naturelle n'y acquiescerait pas, mais elle accepte l'idée que le Divin les remplit parce que cela concorde avec cette formule du langage des théologiens, que Dieu est Omniprésent, et qu'il entend et sait tout. Voir sur ce sujet les N°s 7 à 10.
73. Comme le Divin sans espace est dans tout espace, de même Il est dans tout temps sans temps. En effet, ce qui est propre à la nature ne peut se dire du Divin, et l'espace et le temps sont propres à la nature, et sont mesurables. Comme on le sait le temps est mesuré par les jours, les semaines, les mois, etc. et la nature tire cette mesure du mouvement apparent de rotation et de circonvolution du soleil du monde. Mais il en est autrement dans le monde spirituel, où les progressions de la vie apparaissent pareillement dans le temps, car les habitants y vivent entre eux comme les hommes dans le monde, ce qui n'est pas possible sans l'apparence du temps. Mais le temps n'y est pas divisé en périodes comme dans le monde, car leur Soleil est constamment à l'Orient et ne se déplace jamais, puisque c'est le Divin Amour du Seigneur qui leur apparaît comme Soleil. Ainsi ils n'ont pas des jours, semaines, mois, etc., mais à la place ils ont des états de la vie, par lesquels se fait la distinction, qui n'est pas une distinction en périodes, mais qui est une distinction en états. Il s'ensuit que les anges ne connaissent pas le temps, et lorsqu'on en parle, à sa place ils perçoivent l'état. Lorsque l'état détermine le temps, celui-ci est seulement une apparence, car le plaisir de l'état le fait apparaître court, et le déplaisir le fait apparaître long. Il est donc évident que dans le monde spirituel, le temps n'est que la qualité de l'état. Ainsi, dans la Parole, les états et les progressions des états dans la série et dans le complexe sont signifiés par les heures, les jours, les semaines, etc. Quand les temps se réfèrent à l'Eglise, le matin signifie son premier état, midi son apogée, le soir son déclin et la nuit sa fin. Les quatre saisons de l'année ont la même signification.
74. De ce qui précède on peut voir que le temps fait un avec la pensée procédant de l'affection, car la qualité de l'état de l'homme en provient. Dans le monde spirituel, les progressions du temps sont étroitement unies aux progressions des distances dans l'espace. Les chemins y sont en actualité raccourcis ou allongés selon les désirs qui appartiennent à la pensée procédant de l'affection. De là vient l'expression, « les espaces de temps ». De plus, lorsque la pensée ne se conjoint pas avec l'affection propre de l'homme, comme dans le sommeil, le temps n'est pas perçu.
75. Maintenant, comme les temps, qui sont propres à la nature dans son monde, sont de purs états dans le monde Spirituel, états qui apparaissent progressifs, parce que les anges et les esprits sont finis, on peut voir que dans Dieu ils ne sont pas progressifs, parce que Dieu est Infini, et que les Infinis en Lui sont un, selon ce qui a été démontré ci-dessus, aux N°s 17 à 22. Il en résulte que le Divin est dans tout temps sans le temps.
76. Celui qui n'a aucune connaissance ou aucune perception de Dieu sans le temps, ne peut concevoir l'éternité que comme une éternité de temps. Sa pensée ne peut que s'égarer sur Dieu de toute éternité, car il pense d'après un Commencement, et le commencement appartient uniquement au temps. Son égarement le mène à penser que Dieu a existé par Soi, d'où il tombe facilement dans l'origine de la nature par soi. Il ne peut en être détaché que par l'idée spirituelle ou angélique sur l'éternité, qui est sans le temps. Quand il est fait abstraction du temps, l'éternité et le Divin sont une même chose, et le Divin est le Divin en Soi et non par Soi. Les anges déclarent qu'ils peuvent percevoir un Dieu de toute éternité, mais non une nature de toute éternité, encore moins une nature par soi, et nullement une nature qui serait une nature en soi. Car ce qui est en soi est l'Être même de qui toutes choses procèdent ; et l'Être en Soi est la Vie même, qui est le Divin Amour de la Divine Sagesse et la Divine Sagesse du Divin Amour. Telle est l'éternité pour les anges ; ainsi elle est hors du temps, comme l'Incréé est hors du créé, ou comme l'Infini est hors du fini, entre lesquels, en fait il n'y a aucun rapport.
77. Cela résulte des deux articles précédents qui nous disent que le Divin est dans tout espace sans espace, et que le Divin est dans tout temps sans le temps. Or les espaces varient depuis les très grands jusqu'aux très petits ; et comme les espaces et les temps font un, ainsi qu'il a été dit, il en est de même des temps. Le Divin est le même en eux, parce que le Divin n'est ni variable ni muable, comme l'est tout ce qui appartient à l'espace et au temps, ou tout ce qui appartient à la nature, mais le Divin est invariable et immuable, par conséquent Il est partout et toujours le même.
78. Il semble que le Divin ne soit pas le même dans chaque homme, pas le même dans le sage et dans le simple, dans le vieillard et dans l'enfant ; mais c'est une illusion provenant de l'apparence, l'homme est différent, mais le Divin n'est pas différent en lui. L'homme est un réceptacle, et chaque réceptacle est différent. L'homme sage reçoit le Divin Amour et la Divine Sagesse d'une manière plus adéquate, ainsi plus pleinement que l'homme simple, et le vieillard qui est sage aussi, plus pleinement que le petit enfant et l'enfant, néanmoins le Divin est le même dans tous. C'est aussi une illusion d'après l'apparence de croire que le Divin est différent chez les anges du Ciel et chez les hommes de la terre, parce que les anges du ciel sont dans une sagesse ineffable, et que les hommes ne le sont pas. Mais la différence apparente est dans les sujets selon la qualité de la réception du Divin, et non dans le Seigneur.
79. on peut voir d'après le ciel et d'après l'ange dans le ciel, que le Divin est le même dans les très grands et les très petits. Puisque le Divin dans le ciel entier et le Divin dans un ange est le même, le ciel entier peut apparaître comme un seul ange. Il en est de même de l'Eglise et d'un homme de l'Eglise. La plus grande forme réceptrice du Divin est le ciel entier et en même temps l'église entière, et la plus petite est l'ange du ciel et l'homme de l'église. J'ai quelquefois vu une société entière du ciel comme un homme-ange, et il m'a été dit qu'elle pouvait apparaitre comme un homme grand, tel qu'un géant, et comme un homme petit, tel qu'un enfant, parce que le Divin est le même dans les très grands et dans les très petits.
80. Le Divin est aussi le même dans les très-grands et dans les très-petits de toutes les choses créées qui ne vivent pas, car Il est dans tout bien de leur usage. Elles ne vivent pas, parce qu'elles sont, non des formes de la vie, mais des formes des usages ; et la forme varie selon l'excellence de l'usage. Dans la suite, lorsqu'il s'agira de la création, il sera dit comment le Divin est en elles.
81. Si l'on fait abstraction de l'espace, et qu'on n'accepte absolument pas l'idée du vide, et qu'alors on pense au Divin Amour et à la Divine Sagesse comme étant l'Essence même, sans espace et sans vide ; ensuite si l'on pense, d'après l'espace, on percevra que le Divin est le même dans les plus grandes et dans les plus petites choses de l'espace ; car dans l'Essence abstraite de l'espace il n'y a ni grand ni petit, mais le même.
82. Un jour, j'ai entendu des anges s'entretenir avec Newton sur le vide. Ils disaient qu'ils ne supportaient pas l'idée du vide comme néant, parce que dans leur monde qui est spirituel, donc en dedans et au-dessus des espaces et des temps du monde naturel, ils ont également la sensation, la pensée, l'affection, l'amour, la volonté, la respiration et même la parole et l'action, toutes choses qui seraient absolument impossibles dans le vide qui serait le néant, parce que rien est rien, et qu'aucune chose ne peut provenir du néant. Newton leur dit qu'il savait que le Divin qui est l'Être Même remplit tout, et que l'idée du néant à propos du vide lui faisait horreur, parce qu'elle est destructrice de tout. Il exhortait ceux qui parlaient avec lui sur le vide à se garder de l'idée du néant, appelant cette idée une défaillance parce que dans le néant aucune activité du mental, n'est possible.
Source : Livres-mystiques.com