Traduction de l'article de Kungur Krai Novosti

Redactrice en chef: Лена Теплякова,

Journaliste: Светлана ПЕРМИНОВА

Interview d'Hélène Texier, présidente de l'association "Pour Kungur" et de Svetlana Barsukova, directrice de la Maison des enfants de Kungur

Une collecte de fonds est en cours dans le monde entier pour offrir un nouveau minibus à la Maison d’enfants de Kungur

Ni des mécènes, ni des députés. Ce sont des familles du monde entier qui collectent de l’argent pour offrir un nouveau minibus à la Maison d’enfants de Kungur.

Ils voient loin. C’est devenu chez nous une habitude de regarder de loin ce qui se passe sous notre nez. La majorité d’entre nous consacrent leur vie à assurer un bel avenir à leurs enfants. Et du coup ils oublient de les regarder dans les yeux. Nous édifions des sanctuaires pour que l’on nous glorifie dans les siècles à venir, mais nous laissons notre voisin mourir de faim. Nous dénonçons, l’écume aux lèvres, la tragédie des enfants russes adoptés par des étrangers, mais nous passons sans nous arrêter devant un petit déguenillé qui demande un morceau de pain.

… Il y a quelque temps, les principaux sites d’information ont parlé d’une famille française qui avait adopté à la Maison d’enfants de Kungur. En fait, des familles élevant des enfants de Kungur, il y en a plein dans le monde. Nous allons vous parler d’Hélène et Jean-Sébastien Texier, à l’initiative desquels le personnel de la Maison d’enfants et ses pupilles se sentent faire partie d’une immense famille internationale.

Une chance existe. La procédure d’adoption en France est assez longue et exige des candidats à l’adoption une patience digne d’éloge.

Un couple désirant adopter doit d’abord recevoir des services sociaux un agrément. Pendant 9 à 12 longs mois, les futurs parents subissent toute sorte de tests, d’entretiens et de passages en commission, et c’est sur la base des résultats obtenus qu’on leur accorde ou leur refuse cet agrément. Quand on leur accorde, c’est pour l’adoption d’un nombre précis d’enfants d’un âge précis. L’agrément est valable 5 ans.

Une fois l’agrément obtenu, le couple se retrouve automatiquement dans une liste d’attente d’adoptants. Comme nous l’a raconté Hélène, il y a très peu en France d’enfants adoptables, et c’est pourquoi les familles françaises se tournent souvent vers l’adoption internationale.

Un élan du cœur. "Nous avons choisi la Russie parce que nous nous sommes toujours sentis proches de ce pays. Et nous connaissions des familles qui avaient adopté en Russie", ajoute Hélène Texier." Nous avons envoyé des lettres à tous les ministères de la Politique sociale de Russie. Et nous avons reçu une réponse positive de celui de la région de Perm. Ce n’est pas nous qui avons choisi Kungur, c’est le ministère de la Politique sociale qui réunit les dossiers des parents et des enfants.

C’est ainsi qu’en 2007 nous avons fait la connaissance de nos enfants à Kungur… Nous sommes tombés amoureux d’eux, de Kungur et du pays. Les femmes de la Maison d’enfants sont étonnantes. Elles étaient aux petits soins pour nos enfants ! Nous les considérons comme faisant partie de notre famille, bien que, malheureusement, elles soient loin de nous, mais nous leur envoyons constamment des nouvelles."

Quand Hélène et Jean-Sébastien se sont rendus à Kungur pour rencontrer « leurs » enfants, la fillette de 3 ans ne parlait pas du tout et venait juste de commencer à marcher. Le garçon de 4 ans était un peu mieux loti. Hélène a passé avec les enfants les dix jours qu’ont duré les démarches, alors qu’elle n’était pas tenue de le faire. C’est alors que sa future fille a prononcé son premier mot. En français.

Là où les enfants s’épanouissent. Le personnel de la Maison d’enfants a gardé le souvenir d’une Espagnole bien dans sa peau, qui avait réussi dans les affaires. Elle venait chercher une fillette à la lourde hérédité. Une hérédité qui se lisait sur son visage. Quand les éducatrices, émues, essayèrent de dissuader la belle Espagnole d’un geste aussi inconsidéré, ses yeux lancèrent des éclairs. « Elle a des bras. Elle a des jambes. Une tête sur les épaules. Tout le reste viendra ! » Une année plus tard, toujours grâce aux Texier, les employées de la Maison d’enfants reçurent la photo de la fillette « difficile »… et elles ne la reconnurent pas. Et la même chose se répète pour tous les enfants qui se retrouvent dans des familles étrangères. Il suffit d’un an pour que les éducatrices peinent à reconnaître sur les photos les enfants qui ont quitté la Russie.

L’album familial. En 2009, Hélène se démena pour retrouver les familles qui avaient adopté des enfants de Kungur. Au début ils furent 26. Aujourd’hui ils sont plus de 60 dans le monde entier. Tous échangent entre eux des nouvelles, des dessins d’enfants et des photos de famille. Hélène envoie traditionnellement comme cadeau de Nouvel An à la Maison d’enfants de Kungur, et toute l'année, des albums de familles.

-" Nous savons combien ces femmes prennent à cœur les enfants et quel amour elles leur donnent. Grâce à ces échanges, nous pouvons parler avec nos enfants de leur pays. Nous n’avons pas tous la possibilité de leur conserver leur langue, mais tous savent d’où ils sont originaires, quelles sont leurs racines, et nous faisons tout notre possible pour qu’ils en soient fiers.

Nos enfants sont fiers d’être français et d’être russes. Ils n’ont pas le moindre doute que nous sommes bien leurs parents, car un parent, c’est celui qui est au côté de l’enfant dans son quotidien, qui le nourrit, qui lui donne son amour, qui l’élève et lui apprend la morale de la vie. Nous sommes leurs parents. Mais de toute façon leur pays natal est et demeurera la Russie."

Svetlana Barsoukova, directrice du Centre inter-administrations d’aide aux enfants privés de la sollicitude de leurs parents de la ville de Koungour :

- Nous sommes en contact permanent avec Hélène, avec les membres de l’association Pour Kungur. Nous échangeons parfois plusieurs mails dans la même journée. Et nous communiquons toutes ces nouvelles aux enfants, pour leur plus grande joie. Et même les albums photo que nous envoient les familles qui ont adopté nos enfants sont conservés dans les groupes, de façon que les enfants puissent les feuilleter quand ils le désirent et positiver. Regardez donc les visages radieux sur toutes les photos. Leurs yeux sont vraiment rayonnants, il est impossible de feindre des sourires aussi lumineux.

Tout récemment, nous avons reçu un album photo d’une jeune Canadienne. Elle nous a retrouvés grâce à l’association Pour Kungur. Elle a maintenant 21 ans, et elle a été adoptée à l’âge de 6 ans. Et pourtant elle a gardé le souvenir de sa ville natale.

Un minibus de 35 000 euros. L’activité débordante d’Hélène ne se borne pas aux colis et aux petits mots. En 2012, l’association Pour Kungur s’est fixé un objectif concret : acheter un minibus pour la Maison d’enfants.

- En 2012, nous avons appris que la Maison d’enfants accueillerait les enfants jusqu’à 9 ans. Nous avons senti que le personnel était heureux de pouvoir accompagner plus longtemps les petits, mais nous avons perçu également qu’il leur fallait s’adapter matériellement à cette nouvelle situation.

Quand nous leur avons demandé ce qu’il manquait à la Maison d’enfants, Olga Terechtchenko, la directrice d’alors, une femme d’une bonté fantastique, répondit : « Notre rêve, c’est un minibus, pour que les enfants ne pensent pas que le monde s’arrête aux murs de la Maison d’enfants. »

"C’est pour cela que nous avons décidé de nous atteler à ce projet. Nos familles ne sont pas riches. Mais nous nous sommes dit que si nous nous y mettions tous, c’était à notre portée. Nous avons mobilisé toutes les familles, nos amis, nous avons organisé des brocantes, de petites manifestations, et maintenant nous touchons au but. Il nous manque encore 9 000 euros, et nous espérons les réunir d’ici avril.

Nous poursuivons ce projet avec Svetlana Barsukova, désormais directrice de la Maison d’enfants. Cette femme porte elle aussi en elle des trésors de bonté.

La Terre promise

Svetlana Barsukova :

- Notre centre d’aide aux enfants accueille des enfants de tout le district. Et, en général, ce sont des enfants venant de familles en détresse. Ici nous tâchons de réchauffer et de revigorer leur âme traumatisée. Nous bénéficions pour cela de l’aide de psychologues, d’orthophonistes, de pédagogues. Les enfants commencent ainsi à rattraper leur retard. Et quand nous disposerons d’un minibus, nous accroîtrons nos possibilités de rééducation des enfants, de leur socialisation. Grâce à l’aide financière de notre Chambre d’enregistrement et de la société Electromax de Perm nous achetons du matériel pédagogique et éducatif, des jouets. Parfois nous avons la venue de personnes privées désireuses de nous venir en aide. Nous les accueillons tous avec joie, car ils obéissent à leur cœur. Mais pour l’essentiel, nous essayons de nous en tirer par nous-mêmes.

Les difficultés financières et matérielles ne sont rien à côté de la question de l’enfant : « Dis, tu me trouveras une gentille maman ? »…

Nous avons un garçon qui attend l’arrivée de ses parents de la lointaine France depuis avril de l’an dernier. Les adoptions avaient été suspendues en raison d’une révision de la législation. Et ce n’est que tout récemment que la situation s’est éclaircie avec la France. Nous espérons que dès février, l’enfant pourra enfin avoir une famille à lui et des parents qui l’aiment.

Hélène Texier :

- Bien sûr, nous sommes tristes devant les nouvelles lois qui veulent rendre plus difficile l’adoption d’enfants russes par des étrangers. Nous comprenons parfaitement que cela fait mal au cœur de voir ces enfants quitter leur pays, mais je ne suis pas sûre qu’il y ait assez de familles russes désireuses de les adopter… Alors qu’il y a dans le monde tant de familles comme la nôtre prêtes à offrir leur affection, leur maison, leur famille à ces enfants, et à devenir ainsi leurs parents. Sans leur laisser oublier d’où ils sont originaires.

En guise de postface : il est difficile, n’est-il pas vrai, d’imaginer dans notre pays une association s’intitulant « Pour Châteauroux » (Châteauroux est la patrie du couple Texier et, désormais aussi, de deux petits « Koungourites »). Tout autant que le phénomène de l’adoption dans son ensemble.

Si vous ressentez le désir de vous joindre à cette œuvre internationale, rendez-vous sur le site https://sites.google.com/site/associationpourkungur

pourkungur@gmail.com et apportez-leur votre contribution. Ou mieux encore, venez à la Maison d’enfants. Elle est tout près, à Kungur.

©http://kungur-krai.ru - lien pour l'article en russe: http://kungur-krai.ru/obsestvo/2685-v-kungure-dlya-doma-rebenka-semi-so-vsego-mira-sobirayut-dengi-na-novyy-mikroavtobus.html

Traduction Robert Giraud

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