2023 : Corps et paysages sonores

Le jeudi 20 avril, à partir de 9 h, aura lieu à l’ÉSA Réunion, une journée d’études avec pour thème, Corps et paysages sonores.

En plus de la découverte d’œuvres, plastiques, sonores et digitales, reliées au thème de l’évènement, qui seront exposées dans la galerie de l’école, de nombreux intervenants viendront échanger avec les élèves, sur l’ensemble de la journée.

Ces moments d’échanges questionneront les notions de corps sonore, de paysage sonore, mais aussi des difficultés, liées au territoire, à créer des pratiques artistes sonores sur celui-ci.


Salle de conférence

9 h : Ouverture de la galerie — accueil du public

9 h 30 : Mounir Allaoui, Présentation de la journée d’étude, du programme et des intervenants 

9 h 45 : Eve-Marie Montfort, Les expériences d’écoute dans les installations sonores performatives

10 h 30 : Mathilde Lauret, Vibrophonie — immersion entre paysages et sons

11 h 15 : Leslie Ranzoni, De l’audible à l’inaudible, tout n’est que vibration

12 h : Pause déjeuner

13 h : Alexandre Castant, Corps, espaces, paysages, quelques modalités du son dans l’art contemporain

13 h 45 : Hasawa, Le texte est un tissu

14 h 30 : Esther Hoareau, Construction musicale et vidéo : structure et entrelacs

15 h 15 : Pause

15 h 30 : Nina Sanchez, Pratique sonore en territoire insulaire entre glanage et ingéniosité

16 h 15 : Jérôme Li-Thiao-Té, Biosonification et spatialisation sonore dans le projet Vibrotanica

17 h : Compte-rendu de la journée d’étude

Dans la Galerie

Axel Girard, À la recherche de tessitures, 2022-2023

Mathilde Lauret, En mémoire des silences, 2021 et Mon sang, 2022

Camille Maillot, Les micro-ondables, 2021

Naïssa Pequignot-Zerkoum, Où ça, 2022-2023



Résumé des interventions de nos intervenants :

Eve-Marie Montfort, Les expériences d’écoute dans les installations sonores performatives

Dans une installation sonore, l’œuvre est pensée à partir de la sensibilité du spectateur. Le participant module et concrétise l’œuvre sonore par sa présence et ses actions dans l’espace sonore. Le corps devient un outil qui permet de faire l’expérience de l’œuvre. Prendre en considération le corps du spectateur en tant qu’être sensible dans l’élaboration des œuvres sonores en tenant compte de la notion d’espace, interroge l’écoute d’un point de vue physique et physiologique. En effet, le son étant un phénomène physique, il peut être ressenti par le corps de maintes façons du fait de son caractère vibratoire. L’exploitation de ce caractère vibratoire permet d’aller au-delà de la sensibilité auditive pour atteindre d’autres sens. Le corps sensible perçoit à travers un parcours anatomique, il capte les informations données, les transmet et les transforme en signaux. De ce fait, les œuvres présentées dans cette communication sont dites esthésiques c’est-à-dire qu’elles ont pour objet les sensations. L’esthésie est définie physiologiquement comme étant la sensibilité ou encore, la capacité à percevoir des sensations en opposition à l’anesthésie qui est la privation ou l’affaiblissement de la sensibilité.

Eve-Marie Montfort est docteure en Histoire et critique des arts (Université de Rennes 2), commissaire d’exposition, vice-présidente de REZOM, Pôle des arts visuels de La Réunion. Elle travaille sur les expériences d’écoute et les pratiques performatives engendrées par le son dans les marches et installations sonores de l’art contemporain abordant les notions de perception, de spatialisation et d’écologie sonore. En 2021, elle est chercheure-associée au Laboratoire APILAB de l’École Supérieure d’Art de la Réunion et l’année suivante, coordonne La Semeuse – plateforme de professionnalisation des étudiants et jeunes diplômés de l’école.

 

 

Mathilde Lauret, Vibrophonie – immersion entre paysages et sons

Entre le protocole du spectre des sourds, le phénomène lyrique du silence ou l’interrogation d’étiquettes sonores, mes œuvres plastiques naissent d’une expérience sensorielle d’un monde silencieux où un sens fait défaut : l’ouïe. « Persilences, vibrophonie », sont des définitions développées et qui identifient ma démarche artistique en rapport avec les vibrations. Elles participent à traduire plastiquement une perception du sensible, jouent avec l’imagination et amènent une meilleure compréhension de l’écoute cognitive, de la perception et de la communication. Le paysage devient un cadre entre le sonore et le visuel, autant qu’il mène discrètement une sensibilisation écologique. Il ne dérange pas l’ouïe mais dérange les idées qu’on se fait du monde. Les espaces géographiques ou acoustiques sont remaniés pour questionner ce trouble dérangeant et poétique à la fois, qui existe entre le monde audible et le monde non-audible. Mon objectif est de saisir ces enjeux des expériences de l’écoute et de la perception synesthésique de ces pratiques artistiques, de leur réception au sein d’un champ pluridisciplinaire, avant d’aborder la surdité comme un outil relatif à l’art visuel.

 

Artiste plasticienne, Mathilde Lauret vit et travaille à La Réunion. Elle obtient le DNSEP en 2020 à l’ESA de La Réunion. Née sourde unique d’une famille réunionnaise-créole, mêlée d’un héritage multiculturel et d’un entre-deux mondes, elle interroge des étiquettes sonores du silence en relation avec le corps ou le paysage réunionnais. Sa démarche s’inscrit principalement dans des installations sonores et visuelles, accompagnée de sculptures, de vidéos et d’autres médiums polyvalents.

 

Leslie Ranzoni, De l'audible à l'inaudible, tout n'est que vibration

Engagé dans la mise en valeur des paysages sonores et dans la préservation du vivant, mon travail est transdisciplinaire. Il met en avant l’environnement et le collectif, via des pratiques artistiques, scientifiques et numériques, dans une nécessité́ de sensibilisation, de valorisation du patrimoine naturel.

 

/Inaudible

EDEN (Éthique - Durable - Écologie - Nature) est un projet de recherche mené depuis 2012 sous la direction d’Olga Kisseleva. L’art écologique numérique est au coeur de ce projet. L'installation se déploie sous la forme de différents capteurs qui captent les fréquences des arbres pour les convertir en sons. Il est question de révéler l'invisible pour créer des expériences perceptives et sensorielles.

 

/Audible

LE SON DU VIVANT est un projet artistique qui donne voix à la nature pour raconter des histoires poétiques et interactives pensées avec les témoignages de scientifiques, de jardiniers, d'individus, mais aussi de paysages sonores composés par l'artiste Hugo Mir-Valette. Cette installation sonore immersive dispersée en plusieurs points transforme l'environnement de manière sensorielle, pour inviter le public à un dialogue émotionnel et intellectuel, en harmonie avec le monde végétal.

 

Leslie Ranzoni est artiste et chargée de projets culturels sur l’île de La Réunion. Elle est aussi directrice artistique du festival pluridisciplinaire de l’association de Réunion Metis et rédige actuellement une thèse, “Jardin de l'espoir’. Arbres en tant que monuments commémoratifs : Le cas des îles Mascareignes” en Art et Sciences à l'Institut ACTE de l'Université de la Sorbonne

Paris 1. En tant qu’artiste ou dans la direction artistique, elle cherche à créer des connexions entre les disciplines scientifiques, sociales et culturelles. Sa connexion avec la nature dans l’art à commencé à Berlin en travaillant en tant que coordinatrice de projet pour l’artiste Janet Laurence. Notamment pour : WATER (PROOF) : exposition et performance à Momentum gallery Berlin (2019); AFTER NATURE Solo Show au Musée d’art Contemporain d’Australie MCA Sydney 2018/2019 et LANDSCAPES OF LOSS : Exposition pour UN Climate Change Conférence, COP23 (2017)

 

 

Alexandre Castant

« Cette communication se déroulera en deux temps. Il s’agira préalablement de faire une petite synthèse de l’histoire du son dans l’art contemporain et actuel dans la mesure où, de premier abord, il n’y a tout même pas d’évidence à ce qu’un artiste plasticien, « visuel », travaille avec le son l'expérience du regard… Après cette introduction, historique et esthétique, il s’agira plus précisément à travers la question de l’espace et des volumes, de voir comme le corps et la voix, mais aussi le paysage (sonore, in situ, mais aussi quand il ressort du field recording) interrogent la perception et de fait l’histoire invisible et hyper-contemporaine, peut-être, de sa sculpture et de sa possible immatérialité.

 

Docteur en esthétique (Université Paris I Panthéon-Sorbonne), Alexandre Castant est professeur à l’École nationale supérieure d’art de Bourges où il anime, notamment, L’Atelier sonore d’esthétique. Essayiste, critique d’art, écrivain, il a entre autres publié trois ouvrages consacrés aux relations entre les arts plastiques et la création sonore (Planètes sonores – Radiophonie, arts, cinéma, Monografik, Blou, 2007 et 2010 ; Journal audiobiographique – Radiophonie, arts, cinéma, Nouvelles Éditions Scala, Paris, 2016 ; Les Arts sonores, son & art contemporain, Transonic, Bruxelles, 2017) et récemment dirigé l’ouvrage collectif Les Cahiers du son, Éditions Naima, 2023. En 2022 et 2023, il est associé, en tant qu’essayiste et écrivain, au Festival international de musique de création Ars Musica (Bruxelles).

 

 

Hasawa, Le texte est un tissu

Hasawa est un nom composite, il unit les trois premières syllabes des deux prénoms et du nom de l’artiste. C’est ainsi que l’on japonise les consonnances anglaises de Harrington Samuelsen Warren, artiste à la triple nationalité : française par sa mère réunionnaise, marocaine par son père, seychelloise par sa terre de naissance. […]

Polyglotte, son verbe joue a minima de l’anglais, du français, des créoles de l’océan indien et a maxima parle un langaz inspiré des multiples colliers à son cou, aux graines glyphes. La parole et le geste.

L’usage des langues n’est pas son seul acte artistique, elles les activent, cependant l’artiste n’arrive à la poésie, au fonnkèr, qu’en ultime révélation, après un long cheminement dans l’apprentissage des Beaux-Arts. […]

Il fait des installations doublées de performances où l’œuvre, finalement, n’est plus la sculpture, n’est plus le bois, ni la corde, seuls, mais est partie intégrante du rituel auquel il nous convie et dans lequel il nous accompagne.

Il fait des installations doublées de performances où l’œuvre, finalement, n’est plus la sculpture, n’est plus le bois, ni la corde, seuls, mais est partie intégrante du rituel auquel il nous convie et dans lequel il nous accompagne.

Si bien qu’une installation, sans Hasawa, est dans l’attente de sa présence pour se réaliser pleinement. L’œuvre plastique est plus qu’une trace, elle est l’artefact qui contient l’énergie non pas créatrice mais performative. L’énergie de la performance, du diseur, et du rond. L’écoute de la poésie et le toucher autorisé des statues, l’approche sensible et sensitive de l’artiste, usent de tous nos sens, jusqu’au sixième, pour, au milieu des encens, rendre perceptible le sacré du réel. Ce qu’aucun des sens ne sait seul capter peut alors, dit-on, être rendu perceptible.

La sculpture d’oralité, concept moderne de Hasawa, c’est nous, l’installation et lui, le griot-ganiste, unis dans le chemin des psalmodies et des égrégores. Puisant dans l’ancestralité de l’art, Hasawa régénère la relation au monde et nous adresse une invitation à « déchirer le voile » à « démultiplier les mondes ».

Francky Lauret, auteur, 2020.

Hasawa est un artiste plasticien performeur. Passionné par la métamorphose, il se forme au maquillage cinéma et en fait sa profession. Il est également artiste associé à la Cité des Arts de La Réunion et fait partie des membres fondateurs de Fat Fingers puis du collectif de plasticien Fukushima.

 

Esther Hoareau, Construction musicale et vidéo : structure et entrelacs

Dans mes vidéos le rythme s’approche de manière musicale même quand elles sont muettes.

Le son guide l’image ou est généré par elle, par les objets s’y trouvant.

Cette interconnexion construit davantage qu’une simple dynamique, c’est une symbiose du son à l’image animée, parfois il la supplante comme un corps vivant émergeant de son substrat.

Diffusion en avant-première de la vidéo ORGAN tirée d’une expérience immersive à bord du Marion Dufresne sur l’océan Indien en juillet 2023

 

Esther HOAREAU vit et travaille à la Réunion. Elle est diplômée de L'ENSA de Dijon après un parcours à l'École des Beaux-Arts de la Réunion et l'Université d'Art de Nagoya au Japon. Elle a exposé au Japon, en Islande, en Belgique, en France et à la Réunion, à l’île Maurice et en Afrique du Sud. Ses vidéos ont été sélectionnées au Brésil, en Argentine, à Cuba et en Italie. Son travail appartient à la collection du CNAP, du FRAC Réunion, de la Région Réunion, du Musée de la Photographie Nicéphore Nièpce, de la Ville de Saint-Pierre, de l'Artothèque de la Réunion, et à des collections privées. Son travail multidisciplinaire questionne principalement la vidéo autour de la thématique du paysage, de la relation du corps à la Nature, relation d’extase ou d’impuissance, dans un rapport d’échelle ou de temporalité dilaté.

 

Nina Sanchez, Pratique sonore en territoire insulaire entre glanage et ingéniosité

Découvrez les pièces sonores et les sources d'inspirations de l'artiste Nina Sanchez. L'installation est une grande composante du travail de Nina, elle investit l'espace à sa manière en y disposant ses sculptures hybrides, visuelles et sonores, matérielles et immatérielles, issues d'une imagination qui n'admet pas de limites. Ses sources d'inspirations sont multiples ; n'importe quel objet, n'importe quel bruit, anodins aux yeux du plus grand nombre, peuvent se transformer, entre ses mains, en un matériau nouveau au service de la création. Le maître mot de sa pratique plastique est le glanage, elle récupère des objets, des informations, des détails, qu'elle s'approprie et mélange pour faire émerger de nouvelles formes d'expression, de nouvelles idées.

 

 

Artiste plasticienne native de la Réunion, Nina Sanchez a obtenu le DNSEP à l'École Supérieure d'Art de la Réunion en 2019. Elle nous invite à entrer dans son univers caractéristique où se mêlent babioles, sons, fragments, pensées, fête et lumière.

 

“J'ai envie de bousculer nos habitudes perceptives et de mettre en éveil tous nos sens.”

 

 

Jérôme Li-Thiao-Té, Biosonification et spatialisation sonore dans le projet Vibrotanica

 

Le projet Vibrotanica explore l'interaction entre les plantes et le son en utilisant la biosonification pour transformer les fréquences électriques des plantes en son. L'aspect de spatialisation sonore est au cœur de l'expérience sensorielle offerte par le projet.

Le processus de biosonification est réalisé à travers un système de capteurs qui mesure l'activité électrique des plantes et la convertit en signaux audio. Ces signaux sont ensuite transmis à un dispositif de diffusion sonore qui permet une spatialisation du son en utilisant différents canaux.

La spatialisation sonore permet de créer un environnement immersif où les spectateurs peuvent explorer les différentes textures et nuances sonores des plantes. Les effets sonores peuvent être dispersés dans l'espace, créant ainsi un paysage sonore complexe et dynamique qui peut être adapté à différents contextes et lieux.

L'installation sonore utilise également la réverbération naturelle de l'espace pour créer un effet de spatialisation plus réaliste et authentique. Les spectateurs peuvent ainsi percevoir les sons comme s'ils provenaient directement de la source.

La spatialisation sonore est un élément clé pour amplifier l'expérience sensorielle offerte par Vibrotanica. Elle permet de créer une atmosphère immersive et enveloppante qui transporte les spectateurs dans un monde sonore inédit, où la musique et la nature se rejoignent pour créer une expérience artistique unique.

 

Jérôme Li-Thiao-Té (connu sous le pseudonyme J3ZZ) est un artiste protéiforme originaire de l'île de La Réunion. Il s'intéresse particulièrement aux interactions entre l'homme et la nature. Son travail artistique prend souvent la forme d'installations, de performances, de sculptures sonores et de compositions musicales, qui cherchent à créer des espaces immersifs et à solliciter les sens du public. Il est notamment connu pour son projet "Vibrotanica", qui explore les propriétés sonores des plantes et des végétaux en utilisant des techniques de biosonification.

Contact : vibrotanica@j3zz.com et réseaux sociaux @iamj3zz