Notre monde de demain, la bioarchitecture pour assurer un futur éco-durable

Depuis la révolution industrielle, l'être humain a adopté le consumérisme et s’est habitué à la production de masse sans limites. Les industries se développent à une vitesse impressionnante, ayant comme conséquence principale la destruction de nos écosystèmes. Cependant, l'évolution est-elle forcément synonyme d’extinction? Les entreprises du monde entier cherchent à se développer très rapidement et à intégrer au plus vite le marché international. Cette vive concurrence incite de nombreuses grandes entreprises à diminuer leur coût de production pour augmenter leurs gains. On remarque ainsi que l'intérêt principal de beaucoup de sociétés se tourne vers les profits économiques et non vers le bien-être du consommateur ou des producteurs, ni vers la qualité des produits. Des études montrent que l’année 2020 est un tournant pour l’humanité et les projections prévoient que dans les années futures la masse anthropique dépassera la biomasse vivante, à l’échelle mondiale. Quel est alors l’avenir de l'architecture moderne et même de nos sociétés contemporaines?

C'EST QUOI LA BIOARCHITECTURE?

Le groupe de recherche Mediated Matter s’investit notamment dans la création de bâtiments multifonctionnels qui ne vont pas endommager la nature. Ces projets vont sortir du commun et seront construits à partir de matériaux peu conventionnels. L’architecture n’est plus une question d’assemblage de parties; on assiste à la création et à la croissance d’une nouvelle tendance dans le monde industriel.

Neri Oxman stipule que c’est la convergence de quatre champs qui vont donner aux scientifiques les outils nécessaires pour avancer dans ce domaine: premièrement, la conception informatique, qui permettra de programmer des projets complexes et de concevoir des modèles théoriques. Deuxièmement, la fabrication additive, fondée sur l’idée de réutiliser un matériel ou de l’ajouter à un autre, au lieu de le jeter. Troisièmement, l’ingénierie de matériaux qui va permettre aux techniciens d’avoir une conception des matériaux utilisés dans une haute résolution et finalement la biologie de la synthèse qui va aider à concevoir de nouvelles fonctionnalités biologiques en éditant l’ADN.

De plus, grâce au développement de nombreuses techniques, telles que le biomimétisme, qui consiste en l'imitation des formes de la nature (par exemple, l’homme va chercher à reproduire techniquement un processus naturellement mis en oeuvre par la nature, comme la photosynthèse) ou le design bio-informé, qui désigne le processus par lequel on ajoute des matériaux d’origine naturelle à des infrastructures et à des bâtiments, ces scientifiques cherchent à changer la perception et la conception du monde dans lequel on vit aujourd’hui. Ce qui est certain, c’est que les ressources ne sont pas illimitées...

DES FIGURES PIONNIÈRES DANS LE MONDE DE DEMAIN

Qui est Neri Oxman?

Neri Oxman est une femme qui reconcilie l’architecture et la nature. Elle est à la tête d’un groupe d'architecture bioclimatique et a fondé le groupe de recherche Mediated Matter. Considérée comme une pionnière de l’architecture contemporaine, elle définit son travail comme celui de ‘‘l’écologie du matériel’’. Elle est l’une des rares figures féminines aussi bien dans le domaine de l’architecture que dans celui de la science, des secteurs largement dominés par les hommes.

Neri est née en 1976, à Haïfa, à Jérusalem, dans une famille d’architectes et d’intellectuels. Elle s’inscrit à la faculté de médecine, à l'université hebraïque de Jérusalem, où elle étudie durant 2 années. Puis elle décide de poursuivre des études d’architecture à Londres et au MIT. De ce fait, elle possède une double culture, tant dans le domaine architectural que dans celui de la science.


Elle va notamment réinventer l’architecture moderne en ayant un regard sur la protection des écosystèmes, et en s’appuyant sur la complémentarité entre l’architecture et la science. Nombre de scientifiques et de visionnaires disent que la bio-architecture est le futur de l’architecture contemporaine. Neri Oxman est principalement en quête de nouvelles solutions aux problèmes contemporains et même à ceux qui n’existent pas encore. Sa vision va au-delà des règles physiques et de ce que l’on considère normal aujourd’hui. Elle veut développer des solutions durables à long terme qui permettront de conscientiser l'être humain à la destruction et à la catastrophe qu’il est en train de causer à son environnement.

LES MATÉRIAUX DU FUTUR

Neri Oxman présente différents matériaux qui, elle l’assure, vont drastiquement changer notre mode de consommation puisqu’il s’agit de matériaux présents en abondance sur notre planète et qui, la plupart du temps, passent inaperçus.

Le chitin est connu pour être le deuxième biopolymère le plus abondant dans le monde. Selon des études, chaque année sont produits 100 millions de tonnes de ce matériau par des organismes vivants comme les papillons, les crabes, les scorpions, etc. Il s’agit d’une bonne solution pour remplacer le plastique. Ce matériau a toujours été présent sur Terre,et étant l’une des premières formes de vie de la planète, il ne nuit pas à l'environnement et pourrait en effet représenter le futur. Aujourd’hui, avec la technologie moderne et l’intelligence de plusieurs ingénieurs, il a été possible de transformer la structure en coquilles des crevettes en une infrastructure architecturale qui possède les mêmes fonctions qu’un arbre.


Si l’on incitait à l’utilisation de ces matériaux naturels, qui sont présents depuis les débuts de l’histoire de l'humanité, on pourrait notamment réduire la consommation des sables, des métaux, des graviers et plus globalement des matériaux utilisés pour la fabrication d'infrastructures.

“Les technologies ne doivent pas – et ne peuvent pas – servir uniquement nos aspirations formelles. Il faut créer un langage commun entre les designers et architectes et les spécialistes de la chimie moléculaire” -Neri Oxman

THE SILK PAVILLON

L’un des plus extraordinaires exemples d’architecture moderne et naturelle est ce qu’on appelle le Silk Pavillon. Il s’agit d’une énorme structure construite à l'aide de vers à soie. Le laboratoire du MIT a créé un dôme gigantesque de fibres de soie, tissé par un bras robotique, qui a ensuite été achevé par des vers à soie vivants. On peut dire que d’une certaine manière cette réalisation s'est auto-construite. Ce projet cherche à démontrer comment, à travers l’usage des techniques biologiques et digitales, on peut créer des structures architecturales. On s’inspire particulièrement du processus de métamorphose des vers à soie qui, lorsqu’ils se retrouvent à l’étape de leur métamorphose, vont fabriquer un refuge, basé sur les deux forces de vie principales: la pression et la compression.

Le Silk Pavillon est donc l’exemple parfait de la relation que devraient entretenir l’environnement et les sociétés humaines à travers une coordination entre la fabrication biologique et digitale dans les constructions.


On trouve d’autres projets importants comme ce bras robotique de 24 mètres de hauteur qui, un jour, pourra imprimer des bâtiments tout entiers. Néanmoins, les projets s’étendent non seulement aux infrastructures mais aussi à d'autres domaines, comme celui de la mode. Le groupe de recherche a présenté au Paris Fashion Show une tenue de jour, flexible, adaptable et entièrement réalisée par une imprimante 3D. Elle ne possède aucune couture entre les cellules et a la faculté de s’adapter au corps et aux tissus humains. Plusieurs visionnaires s'inspirent de cette technique et commencent à se tourner vers l’impression 3D pour la réalisation de vêtements haute couture. On trouve des marques comme Adidas ou des designers comme Maartje Dijkstra ou encore Zac Posen, qui créent des pièces uniques et inimaginables, en révolutionnant totalement le monde de la mode.

Est-ce qu’on parle d’évolution, véritablement? Est-ce que ces projets constituent l’avenir d’un futur plus éco-durable?


D’une part, on pourrait dire que oui, puisque ces nouvelles techniques et manières de travailler cherchent à réduire notre impact environnemental et surtout à réconcilier la nature et le monde anthropique. L’indice démographique ne cesse de s'accroître, c’est un phénomène inévitable. Même si les nouvelles technologies nous permettent de réaliser des projets de si grande ampleur, aujourd’hui on perçoit comme impossible l’idée de créer un bâtiment intégralement conçu avec des matériaux entièrement naturels et qui n'endommagent pas la planète. Notre monde est en train d’évoluer et nous devons nous adapter en modifiant nos façons de vivre et de consommer.

Amelia Albuja

Janvier 2021