La route qui longe la côte Ouest se termine en cul-de-sac quelques kilomètres après Le Prêcheur au niveau du parking de l’Anse Couleuvre. Il n’y a donc pas de liaison routière au Nord entre Le Prêcheur et Grand’Rivière (sauf un sentier que j’aurai l’occasion d’évoquer un peu plus loin). Plusieurs points d’intérêt sont néanmoins à découvrir dans ce coin de l’île.
Cascade Couleuvre
Le parcours balisé par l’ONF débute immédiatement à droite, en contrebas du parking de l’Anse Couleuvre. Les places de stationnement étant très limitées sur place, il est recommandé d’arriver très tôt, ce qui pour nous n’est pas un problème car nous logeons à moins de dix kilomètres. Quand le parking est complet, les voitures se garent le long de la route, congestionnant ainsi fortement l’accès.
Le sentier s’enfonce dans la forêt tropicale tout en suivant la rivière Couleuvre qu’il faut traverser à gué à plusieurs reprises. On y observe de nombreuses essences d’arbres.
Au premier-plan, liane boudin-tordu (Bauhinia guianensis)
Acomat boucan
On peut également distinguer quelques cacaoyers au milieu de ce foisonnement d’arbres géants. Nous nous trouvons en effet sur l’ancien domaine de l’Habitation Couleuvre qui était une vaste plantation de cacao et dont on retrouve quelques ruines près de l’anse Couleuvre.
En s’approchant de la cascade, la montée s’accentue et se termine par une succession d’escaliers. Au bout d’une heure, nous arrivons au pied de la chute d’eau dont nous avons la chance de profiter tout seuls. Le débit n’est pas très fort mais sa vingtaine de mètres de hauteur en fait l’une des cascades (accessibles) les plus hautes de Martinique.
Le retour se fait par le même chemin mais l’heure avançant nous croisons à présent de plus en plus de monde. En cours de route, nous remarquons deux randonneurs arrêtés au pied d’un arbre. Ont-ils vu quelque chose d’intéressant ? Ah, oui, une Matoutou falaise, cette mygale arboricole endémique de la Martinique et protégée au niveau national. Sans le sens de l’observation des deux hommes, nous l’aurions sans doute manquée.
Matoutou falaise
C’est par cette rencontre inattendue que se termine cette randonnée courte et facile sur un sentier beaucoup moins boueux qu’attendu. La faute en est sans doute à la saison sèche qui s’étire et aux très faibles quantités de pluie tombées durant ces derniers mois.
Anse Lévrier/Anse à voile/Anse Couleuvre
Nouvelle randonnée depuis le parking de l’Anse Couleuvre quelques jours plus tard. Départ matinal comme la fois précédente d’autant que nous sommes en plein pont des 8 mai + Ascension. Comme évoqué plus haut, ce parking est aussi le point de départ de la trace reliant Le Prêcheur à Grand’Rivière, à l’extrême nord de l’île : un parcours difficile de 14 kilomètres, un dénivelé de 700 mètres pour une durée de 6 heures, qui ne figure pas à notre programme. Nous nous contenterons plus modestement d’un petit fragment reliant le parking à Anse Lévrier et Anse à voile.
Pour commencer, le sentier suit l’itinéraire classique « Le Prêcheur - Grand’Rivière », se hissant péniblement au-dessus de la côte jusqu’à un promontoire où nous sommes récompensés par une magnifique vue plongeante sur la baie de l’Anse Couleuvre d’où émergent le rocher du Sous-Marin et l’îlet de la Perle.
Baie de l'Anse Couleuvre
Nous descendons ensuite vers Anse Lévrier, traversons la plage (l’arrière-plage est occupée par de nombreux campeurs) jusqu’à son extrémité percée d’une grotte où les vagues s’engouffrent allègrement.
Anse Lévrier
Par un court passage en sous-bois nous gagnons la plage voisine de l’Anse à Voile, beaucoup plus sauvage et (presque) déserte. Du fait de son éloignement, seule une poignée de campeurs est venue jusqu’ici. C’est par conséquent l’endroit idéal pour faire une pause.
Anse à Voile
Notre documentation préconisait une boucle en remontant sur le sentier principal depuis l’Anse à Voile. Nous avons préféré reprendre le même itinéraire craignant que la montée par ce côté-ci soit plus rude que celle côté Anse Lévrier.
Pour terminer, nous faisons une halte à l’Anse Couleuvre pour un bain de pieds, la mer étant trop agitée pour une véritable baignade. Un rafraîchissement bien mérité après une randonnée pas très difficile dans l’absolu mais que la chaleur prégnante a rendu fatigante.
Jardins de l’Habitation Céron
Toujours au nord du Prêcheur, en face de l’anse Céron (deux kilomètres avant le parking d’Anse Couleuvre) s’étend le domaine de l’Habitation Céron dont seul le jardin se visite. La maison principale est occupée par les actuels propriétaires qui restaurent avec passion depuis 1991 cette ancienne sucrerie mentionnée dès 1658 puis mise à l’écart de l’évolution industrielle par les éruptions de la montagne Pelée au début du XXe siècle.
Pour une fois, inutile de se lever aux aurores, le jardin n’ouvre ses portes qu’à 9 h 30. Nous sommes parmi les premiers visiteurs à pénétrer dans la propriété. Au gré d’une promenade dans la forêt tropicale, le long d’un torrent, nous découvrons petit à petit le somptueux parc aux variétés florales colorées.
Gingembre rouge (inflorescence)
Balisier jaune
Rose de porcelaine
Ixora rouge
Fleur de lune
Broméliacée
Tout en suivant le cours d'eau, le parcours serpente entre de nombreux arbres séculaires remarquables (fromagers, baobabs, figuiers maudits, manguiers, palmiers, arbres du voyageur…). Mais le plus exceptionnel de tous, c’est ce Zamana, répertorié comme l’un des plus grands des petites Antilles. Ce spécimen recouvre à l’aplomb de son feuillage près d’un hectare et a la particularité de rétracter ses feuilles lorsque la pluie tombe et de les déployer au retour du soleil. Il maintient ainsi une humidité constante pour le plus grand bonheur de tous ceux qu’il abrite, oiseaux comme lézards et même la fameuse Matoutou falaise.
A son pied, on se sent tout petit !
Zamana (Albizia saman) ou arbre à pluie ou bois noir d'Haïti
Nous finissons la visite en passant devant les plantations de cacao où de nouveaux arbres sont régulièrement replantés afin de continuer à réhabiliter cette ancienne cacaoyère vieille de plus de 80 ans qui avait disparu sous la végétation. Les cabosses de cacao sont récoltées et transformées sur l’Habitation et les tablettes de chocolat vendues sur place, à la boutique de l’accueil. Les gourmands que nous sommes n’ont pas pu y résister. Verdict : nous avons été conquis par la qualité exceptionnelle du produit !
Cacaoyer
Bref, nous nous sommes régalés (dans tous les sens du terme) dans ce lieu mêlant botanique, histoire et terroir !