Ouvrages de Louis BOULET (ancien vice-président de l'ASVAC)

 Plongé dans un coma profond, immobile mais conscient, le narrateur subit le flot des images et des idées tout droit sorties du kaléidoscope de sa vie. Les fibrillations du cerveau accusent le discontinu de ses remontées de mémoire et l'enchevêtrement de ses élucubrations insolites. D'où ce désordre apparent du discours intérieur que l'auteur développe à l'oreille - pour lui tellement présente - d'un compagnon de chevet familier. Mais demeure la logique souterraine qui donne du sens à la discontinuité affichée.

   

Des bouts de son enfance et de son adolescence quasi rousseauiste, des bribes de son temps professionnel, des reliefs de ses lectures littéraires et scientifiques, philosophiques aussi, des réflexions sur le passé, sur le futur, sur soi, le rappel de l'Odyssée cosmique depuis l'étincelle primordiale - tout cela s'interpénètre. S'interpelle. Ce sont ces mots qui maintenant remontent à la surface, en paragraphes entremêlés, en un mouvement incessant de flux et de reflux, en un rythme hypnotique, imposant un tempo singulier qui, avec brio, transporte le lecteur vers des contrées inconnues. Une litanie mélancolique, humaniste, sensitive, parfois au bord du surréalisme. Au total, une véritable ode à la vie.

 Virtuosité poétique, exigence stylistique et réelle maîtrise du langage, l'auteur crée des formes inédites, des images troublantes, comme des évocations ou des rêves éveillés, servis par une langue affûtée et imaginative, un souffle tout à la fois souverain et délicat.

   

Louis Boulet est un ancien fonctionnaire. Il s'efforce de garder un contact étroit avec les sujets d'actualité, notamment à ceux qui touchent à l'homme, à la société, à l'univers. Nourri depuis l'adolescence par la fréquentation familière des auteurs, gardien des gênes des aïeux soucieux de transmettre la part convenable des siens, il entend ne pas laisser au temps le loisir de faire son office. L'oubli est haïssable, la nostalgie vertueuse.   

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Les spécialistes synthétisent le contenu des événements, en ce qu'ils sont le substrat de l'Histoire, pour les ériger ainsi en faits de mémoire collective. Les historiens publient régulièrement, et encore aujourd'hui, sur la première Guerre mondiale. Pour sa part, la France ne manque pas de célébrer ses enfants morts pour la Patrie aux cours des différents conflits du XX° siècle. Et ce n'est que justice.

Mais pourquoi laisser cette initiative aux seules entités traitant de la "Grande Mémoire" de la France ?      

Et si le souvenir se faisait plus intime et revenait aux sources ? Si la reconnaissance s'exprimait aussi, au-delà du recueillement devant le monuments aux Morts des villes et des villages, à travers la trajectoire combattante de chaque victime dont le sacrifice fait partie intégrante de l'Histoire de chaque commune - et donc de celle de la France ?

Telle est la motivation qui justifie cette recherche documentaire pour chacun des trente et un enfants qui ont quitté Saint-Genis entre le 1er août 1914, jour de la mobilisation générale, et le 26 août 1918, date où l'un d'eux - il n'avait pas dix-huit ans - s'était volontairement engagé pour la durée de la guerre et mourrait dix jours plus tard.

Puisse ce retour aux hommes donner plus de relief encore aux propos des historiens et nourrir tout à la fois la mémoire des plus anciens et la conscience de tous.

Ainsi le présent document pourra-t-il légitiment mériter le titre de Mémorial de Saint-Genis-des-Fontaines.

Les historiens ont tout dit, ou presque, de cette période innommable que fut le conflit mondial de 1914-1918. Certains ont livré, à partir des événements, des commentaires divers, souvent différents, qui laissent parfois perplexe le lecteur mais toujours ému. Tous sont d’accord pour reconnaître que cette guerre fut une « boucherie » pour les deux nations les plus directement engagées. Si cette guerre est dite la « Grande », c’est parce qu’elle fut la « guerre des hommes et non des machines et des visites ministérielles » (Emile Simon).

En complément des éléments de l’Histoire, d’autres écrivains ont recueilli des témoignages individuels, ou de petits groupes, qui apportent un éclairage directement humain : la vie et la mort de soldats accomplissant leur devoir de soldat-citoyen.

Le présent document est de cette dernière veine. Mais les missives émanent du même rédacteur, en continuité, pour l’essentiel sur six mois de calendrier. « François aime l’écrit, la rigueur dans l’écriture et la distance aux événements » (René Malgoire). Ce livre retranscrit mot à mot la correspondance d’un jeune catalan de 23 ans, mobilisé lui aussi, instruit des choses militaires à Carcassonne, au 143ème régiment d’Infanterie, d’abord envoyé en Belgique, à Ypres, en décembre 1914, où il connut son premier engagement véritable. Puis la longue route depuis la Belgique jusqu’en Champagne, en février 1915, afin de grossir les troupes que le général Joffre entendait engager dans cette bataille de Champagne-Marne qui, en un mois de temps, faucha 90 000 enfant de France. François fut du nombre.

Sans préjudice des quelques lettre écrites durant son apprentissage de postier, puis de la tenue de son premier poste, à Paris, la cinquantaine de messages qu’il adresse à sa famille, du début du conflit jusqu’à sa mort, le 9 mars 1915, décrit, quasi au quotidien, la vie d’un soldat parmi d’autres, ni plus exalté ni plus discipliné. Lucide, simplement « Que de choses à retenir, quelle simplicité dans l’expression du courage, quelle grandeur dans la manière d’être patriote, quel amour et quelle délicatesse vis-à-vis de ses parents et de ses frères ! » (Michèle Aumont).

Un témoignage de plus à verser au dossier qui donne un contenu humain à ce que l’Histoire retient des évènements en oubliant trop, ou trop souvent, que ce sont des hommes qui les ont faite.

Louis Boulet a également fait carrière au sein du ministère des Postes et Télécommunications, de 1948 à 1992.

François Boulet : 1892-1915, commis des Postes à Paris, mobilisé au 143ème RI en septembre 1914, mort pour la France le 9 mars 1915.