09- Rationalisme vs systémique

http://www.sites.fse.ulaval.ca/reveduc/html/vol1/no1/apsyst.html

Parmi les procédés utilisés pour développer le savoir humain, la méthode expérimentale, parfois qualifiée de scientifique, d'analytique ou de rationaliste, semble celle qui, en Occident, a eu l'impact le plus important. Le savoir obtenu par cette méthode est qualifié de scientifique, d'objectif et il diffère du sens commun. Il est créé par une approche rigoureuse, contrôlable et susceptible de remises en question continuelles des principes, des lois et des théories qu'elle élabore. Un "systémiste" serait tenté d'affirmer que la méthode scientifique est un système d'apprentissage doté d'un sous-système auto-correctif qui lui permet de vérifier la véracité, la transférabilité et la validité des connaissances qu'il produit.

Selon Checkland (1981), cette méthode s'appuie sur certaines règles qu'il présente de la façon suivante: "...la diversité et la complexité de la réalité peuvent se réduire par le biais d'expériences dont les résultats seront validés par leur récurrence, et la connaissance peut s'obtenir par la réfutation d'hypothèses... la caractéristique essentielle de la science est sa méthode réductionniste". Le Moigne (1977) renforce cette position en affirmant que "le précepte du réductionniste est devenu synonyme de la méthode". Il constitue pour plusieurs (Checkland, 1981; Commoner, 1972; Fourez, 1974; Kerlinger, 1964; Le Moigne, 1977) le fondement même de la méthode expérimentale. Ce précepte est basé sur une conception de la science selon laquelle "il serait impossible de parvenir à comprendre les systèmes complexes si l'on n'avait pas commencé au préalable par isoler les diverses parties qui les composent" (Commoner, 1972, p.193).

Cette prétention a eu des conséquences qui n'ont pas toujours été positives. Mentionnons:

    • la fragmentation du savoir en autant de domaines qu'il y a de phénomènes à étudier;
    • l'isolement des disciplines scientifiques les unes envers les autres d'une part, et face au monde réel d'autre part ;
    • l'exigence de définir, de façon étroite, les problèmes que nous affrontons;
    • la sur-spécialisation;
    • une difficulté grandissante pour les spécialistes de communiquer entre eux;
    • une efficacité "douteuse" face à la résolution de problèmes qualifiés de complexes;
    • une tendance à n'envisager qu'une seule chose à la fois et à en déduire des attributs appartenant à l'ensemble sous investigation.

Traitant de l'approche expérimentale, Checkland (1976) ajoute qu'"étant aujourd'hui, conscient de l'incapacité manifeste, des pays les plus avancés sur le plan scientifique, à résoudre les problèmes du monde réel (par opposition aux problèmes artificiels de type laboratoire), on se demande si la fragmentation de la science en plusieurs disciplines isolées n'est pas une de ses principales faiblesses"