Depuis le 19e siècle, la musicologie est marquée par un discours focalisé sur les objets – musicaux, textuels ou iconographiques – individuels et sur leur interprétation circonstanciée par le chercheur. Une perspective historique élargie montre toutefois que des modes de pensée axés sur la mesure et visant à identifier des régularités ont toujours existé en sciences humaines.
Un enjeu central consiste à dégager des épistèmes qui s'efforcent d'intégrer à la réflexion musicologue, axée sur le sens et la signification, des approches quantitatives fondées sur la mise en série. Outre la réarticulation des approches idiographique (l’interprétation des cas singuliers) et nomothétique (la déduction de régularités à partir d’un ensemble de faits), un défi majeur consiste à prendre en compte les contextes (de production et de réception) et à réévaluer le statut du chercheur (ou du groupe de chercheurs) dans la production informatisée de connaissances.
Mon intervention identifiera certaines pistes dans ces domaines pour esquisser les grandes lignes d’une musicologie qualitative-quantitative qui intègre les outils numériques. Seront abordés les enjeux épistémologiques de la production de connaissances entre formalisation rigoureuse et apprentissage machine ; les enjeux disciplinaires d’une articulation des approches immanentes et de la prise en compte informatisée des contextes ; enfin, les enjeux sociétaux que présentent les technologies du web pour la réalisation de travaux musicologiques collaboratifs et participatifs (réunissant interprètes, analystes, musicologues ethnologues et informaticiens – qu’ils soient amateurs, étudiants, enseignants ou chercheurs).