Les parents regroupés en "réseau parents" du RÉPAQ se sont saisis à deux reprises du thème de réflexion "école inclusive". Une première fois, en novembre 2014 et une deuxième en octobre 2017.
La première invitation (2014) était ainsi libellée : "Présentation historique et mise en contexte par notre invité, Jean Horvais, professeur en éducation et formation spécialisée à l'UQAM ayant un intérêt particulier pour nos écoles et une expertise au sujet des enfants à défis." Puis, "discussion animée par notre invité sur la réalité dans nos écoles autour du sujet des enfants à défis particuliers suite à la rencontre conjointe précédente sur ce thème. Questions : doit-on parler d'enfants à défis particuliers ou doit-on considérer que tous les enfants sont à défis particuliers ? Le processus d'admission : les EA sont des écoles miracles ou des écoles de la dernière chance ? Le modèle : inclusion intégration, ouverture, innovation ? Le projet éducatif : souplesse, adaptation, coéducation, communication ? La condition n°4 à reconsidérer."
Voici la synthèse que j'avais proposée à la trentaine de participants en fin de journée :
C’est normal que cette question pose problème quand on cherche à trouver la voie pour passer d’une exigence éthique – à laquelle toutes les prises de parole étaient favorables – à sa mise en pratique. « Ce n'est pas le chemin qui est difficile, c'est la difficulté qui est le chemin. » (Simone Weil). Parmi ses raisons d’être, l’école peut être vue comme le moyen que se donne la société pour inventer son avenir; création et utopie… Une école inclusive peut devenir la matrice, le modèle social pour une société inclusive.
Pour avancer vers une école inclusive, il faut fixer ce cap et avancer par étapes en se posant la question pour chacune d’elle : est-ce qu’on va dans la bonne direction? Est-ce qu’on se rapproche d’une situation inclusive ?
On va trouver encore longtemps dans les écoles et dans les sociétés des traces de la persistance des modèles d’exclusion, ségrégation, intégration. Non seulement ils persistent mais ils sont souvent présents au sein des mêmes organisations. Il importe de savoir d’abord les identifier pour ensuite se demander si on peut les faire évoluer et comment on va le faire.
C’est un thème de réflexion et de pratique qui traverse tous les autres. Dans tous les ateliers portés par le REPAQ, on pourrait se poser régulièrement la question de savoir ce qu’il en est d’une dynamique inclusive dans l’évaluation, dans l’admission des élèves et des familles, dans le montage des nouveaux projets d’écoles…
Pour aller dans la bonne direction, l’école alternative a des atouts visibles parmi les 17 conditions, en particulier celles-ci :
des parents co-éducateurs
une volonté de prise en compte du désir des élèves considérés comme sujets
la conviction que chaque enfant est unique et progresse à sa vitesse
des classes multi-âges qui signent un savoir-faire en matière d’inclusion
Des freins, des obstacles ont été identifiés et évoqués. Ils sont de natures diverses. En voici quelques-uns :
barrières administratives, organisationnelles et financières
on est parfois contradictoire dans nos injonctions faites aux élèves. Ex : « Finis ton travail ! » Vs « On passe à autre chose… » Difficile alors pour l’enfant de s’adapter…
Des questions :
Est-ce que tout le monde est d’accord avec cette visée inclusive ?
Si on se dit « inclusif », ça veut dire qu’il n’y a plus de catégories ? Non, l’inclusion, ce n’est pas l’assimilation, le déni des singularités.
Des réflexions :
Faudrait y aller progressivement, commencer par des élèves ayant des difficultés légères… mais ce serait assez contradictoire de vouloir repousser les barrières de la ségrégation tout en en conservant le principe.
L’école alternative peut se vouloir inclusive mais… elle « sélectionne » les parents. En effet, les parents choisissent l’EA mais l’élève, lui, n’a pas choisi sa situation de handicap. Par conséquent, il n’y a rien à changer au mode de recrutement des EA : c’est un choix que font les parents supposant en engagement de leur part, pour leur enfant, dont ils n’ont pas plus choisi les facultés que les incapacités.
Les difficultés, les troubles, ça se situe sur un continuum. Voir par exemple, les troubles du spectre de l’autisme (TSA). Les élèves qui ont reçu ce diagnostic sont différents les uns des autres. Certains – et c’est très évolutif selon l’âge – sont très marqués par les symptômes propres à l’autisme, d’autres beaucoup moins. Les besoins éducatifs des uns et des autres peuvent être de ce fait, très différents.
Il faut essayer de sortir de la « raison diagnostique », de la « médicalisation » qui a envahi la pensée dans le monde scolaire. Au-delà de l’étiquetage, il y a un enfant, qui comme tous, est susceptible de progresser en particulier au contact des autres enfants.
Il faut éviter de tout réduire à l’individu, de lui attribuer toutes les difficultés qu’il rencontre. Le contexte – et par conséquent sa qualité, son organisation – ont une forte influence sur le comportement et les apprentissages des élèves.
Des espoirs :
Les enfants s’entraident, les plus habiles viennent volontiers en aide à leur amis HDAA[1]. Ils y apprennent tous quelque chose.
Par ce projet, en répondant à ce défi, nos communautés scolaires vont apprendre quelque chose. _____________________________________
[1] Élèves handicapés ou élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage
La deuxième rencontre, en octobre 2017, fut organisée en concertation par les responsables du réseau parents avec les chercheur·e·s et fut ainsi présentée dans l'invitation :
"L’école alternative, une école accueillante ?
Description : Cette rencontre permettra aux parents de rencontrer les chercheurs Jean Horvais (UQAM) et Mélanie Paré (UdeM) qui accompagnent des écoles du RÉPAQ dans leur questionnement sur la diversité dans les classes alternatives.
Une brève présentation de la démarche collaborative débutée en 2016 précèdera une présentation du concept d’inclusion et de la problématique observée ici et ailleurs dans le monde. Mélanie et Jean proposeront ensuite aux participants de recueillir leur point de vue sur ces questions de réflexion :
a) Dans quelle mesure notre école réussit-elle à la diversité des enfants, y compris ceux dont on dit qu’ils ont des besoins spéciaux ou des comportements perçus comme problématiques ?
b) Est-ce que l’organisation et l’enseignement en groupes multiâges dans écoles alternatives nuit ou contribue à soutenir les apprentissages de tous les élèves ?
c) Est-ce que le modèle pédagogique mis en œuvre dans les écoles alternatives soutient équitablement le développement global de tous les enfants ?
Déroulement :
Introduction : 30 minutes
Discussions en sous-groupes autour des trois questions : 15 minutes par question + 15 minutes de synthèse en plénière (3x 30 minutes)"
Avec l'accord signé de tous les participants, conformément au certificat éthique, nous avons pu enregistrer les échanges des 4 focus groupes de 8 à 10 participants qui se sont formés.