Les textes des participants



Crépuscule de la terre



Raser les montagnes pour un mont de charbon

Aux toxiques fumées et relents de goudron ;

Sol souillé, noirci, vidé, "glyphosaté"

Faut-il qu'il explose d'être ainsi sulfaté ?


Océans et forêts, ces poumons de la terre

Asphyxient nos poissons au poison des rivières :

La Vistule qui brûle, est-ce dans la nature

D'une eau qui s'enflamme à l'appel du mercure ?


Abeilles en danger ; planète en sursis,

Fleurs du mal butinées sous un ciel obscurci

Où le miel est ce fiel du béton qu'on étale

Sur une herbe flétrie sans l'ombre d'un pétale


Pollution sans fond est cet œil du cyclone

Où tempête et typhon naissent comme des clones,

Neptune agonise en marées noires d'athées

Et gouffres d'ordures : folie d'humanité !


Lit du Pacifique tapissé de plastique

En chambre mortuaire et cercueil aquatique

Refermant sur la vie, pour seule sépulture

Le couvercle des mers aux mille pourritures


Cheminées qui crachent leur venin aérien

Pour qu'un jour on dise : l'air, il n'en reste rien !

Fonte des glaciers, icebergs en dérive

Pour qu'un jour on dise : seules, restent les rives !


Flèches d'ultraviolets sur bouclier d'ozone

Perce un bien vaste trou pour cercueil à la faune

Et l'effet de serre se réchauffe au tombeau

De nos lacs et forêts, en bien tristes lambeaux


Dinosaures lointains étaient graines d'humains

Et d'un monde englouti sans autre lendemain,

Avenir à genoux nous guette tout autant

Sous la chape de plomb où se courbe le temps


Métastases des villes est l'insidieux cancer

Qui ronge notre monde au fond de cet insert

Dévastant le jardin de la terre entière

Aux pôles du globe, ces derniers sanctuaires


Et coule aussi le sang ; celui vermeil des hommes

Qui rougeoient leurs couteaux sur des bêtes de somme

Ou égorgent un frère au détour d'une guerre :

La survie de la vie n'est-elle que guerrière ?


Ici et là, banquets, ripailles et festins

Oubliant ces gamins qui pleurent un matin

D'un tout dernier goûter où s'émiette leur fin

Et grave à leur ventre : je me meurs d'avoir faim !


Conscience de l'être, en crise avec lui-même

S'agenouille à l'espoir de guérir cet œdème

Qui hante le futur à ce deuil où la terre,

Dans un dernier souffle, priera Dieu le Père !






Dominique DERMENGHEM


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Crépuscule de la terre