Vers Gaamak Cove

Vers Gaamak Cove (Me 04/08)

Il pleut toute la nuit et au petit matin nous réalisons que nous avons douillettement dormi sur un lit de tourbe à présent totalement imbibée d’eau. Heureusement la tente est bien étanche.

Après cogitation nocturne, je réalise que ce matin la marée n’est pas propice pour voir la cascade.

Tant pis on laisse tomber d’autant plus que je ne sais pas trop où nous pourrons trouver à bivouaquer pour la prochaine étape.

La carte mentionne bien un bivouac au sud de Jackpot Bay mais Brooke a l’air de douter de son existence.

Nous replions le camp sous une pluie persistante et c’est reparti !


On se faufile le long de la côte, toujours au plus près des rochers, croisant des dizaines de loutres. On ne se les signale même plus, elles sont devenues banales. Idem pour les aigles pêcheurs, très faciles à repérer avec leur tête blanche.

Moins banal cet ours noir que l’on aperçoit s’enfuyant dans une zone herbeuse, pour une fois non envahie par la forêt. Je pense que nous l’avons effrayé, ce qui nous rassure, ainsi que sa petite taille. On dirait un gros chien s’exclament les enfants. Oui, disons un gros terre neuve, c’est vrai.

Un peu plus loin, nous remarquons un arbre qui se balance en cadence alors qu’il n’y a pas la moindre brise : un ours noir y est grimpé et ne nous a pas vus, il a l’air de bien s’amuser. Nous l’observons quelques dizaines de secondes puis il disparait dans la forêt.


A présent il pleut des cordes et ça dégouline de partout : des cascades éphémères, qui pour certaines ont un débit impressionnant. Elles se succèdent tout au long de la côte alors qu’hier, avant la pluie, nous n’en avons pas vu une seule.

Bien que la visibilité soit des plus réduites, nous reconnaissons bientôt nos premiers icebergs.

Plus nous avançons vers le sud, plus ils sont nombreux. Ils ont l’air de fondre à toute vitesse.

Comme je le craignais le bivouac espéré et indiqué sur la carte au sud de Jackpot Bay n’existe pas. Il y a bien une grande plage de galets mais la forêt occupe tout l’espace jusqu’à la mer.

Ca fait déjà quelques heures que l’on pagaie sous la flotte, les garçons sont trempés, on débarque en vain en plusieurs autres endroits sans succès. Pas le moindre recoin pour la tente.

Bon, ben, Gaamak Cove est à 8 km, on en a pour 2 heures, allons-y, ça va nous réchauffer.

Le vent se lève, de face bien sûr et on utilise au mieux les reliefs de la côte pour s’en abriter, pas toujours possible. Heureusement avec cette pluie (positivons) il reste faible.

On arrive enfin en vue du bivouac, situé sur une île reliée au continent par un isthme étroit à marée basse.

Les craquements du glacier (situé au-delà) sont de plus en plus intenses. On adore !

Nous sommes accueillis par les cris de centaines de mouettes. Une cascade magnifique tombe de la falaise où se trouve la colonie d’oiseaux. Il pleut des cordes, on ne passe pas tout près (rappelez-vous que je n’ai que mon 24 mm), ça manque de lumière, j’en ai plein les pattes : je ferai une belle photo demain...

Ce bivouac est du tonnerre ! Pas étonnant qu’il ait l’air relativement fréquenté : l’herbe est « usée ».


Tiens, il y a plein de traces et de crottes d’ours partout, hum !

Du bout du pied, en tâtonnant, on se choisit l’endroit qui fait le moins sploutch quand on prend appui. La vue est dégagée, il y a de l’espace pour se promener un peu et on est au milieu des fleurs et des glaçons.

Ne manque que le soleil ou au moins l’absence de pluie (à la longue, on devient moins exigeant)

On monte le tarp pour se changer.

Alors que nous portons des combinaisons théoriquement étanches et respirantes, Fred et Arnaud sont trempés jusqu’à l’os (Fred a une vieille combin’ Helly Hansen et Arnaud une combin’ Rasdex comme Marion mais moins imperméable, pourquoi ?), Marion a les épaules humides et Caroline et moi sommes sèches (c’est nous 2 qui avons les combin’ les plus simples et les moins chères pourtant, des Typhoon Racer drysuits)

Ce serait bien que la pluie cesse un jour afin de pouvoir un peu faire sécher le matériel. A la longue, l’humidité commence à s’infiltrer un peu partout. Heureusement la tente est bien ventilée mais il est pourtant impossible avec cette humidité ambiante d’y faire sécher quoi que ce soit.

On verra bien demain.

Pas de feu ce soir, tout est absolument détrempé !

Comme on a bien avancé (20 km à vol d’oiseau sous la flotte) on décide de rester là 2 nuits.

Il n’y a en ligne directe qu’une trentaine de km entre l’endroit où on s’est fait déposer et celui où nous allons être récupérés. Le but n’est pas d’aligner les km mais de découvrir cette région tranquillement à notre rythme en explorant criques et baies. Les américains ont d’ailleurs pour habitude de se faire déposer avec tout le confort moderne (glacière, bières, barbecue, grande tente moustiquaire, fauteuils…) dans un endroit sympa et de rayonner à partir de là.

Compte-tenu des aléas météorologiques, je ne voulais pas d’un parcours trop ambitieux qui nous aurait obligés à forcer ou à prendre des risques pour être au RDV à la fin de la semaine.

Nous avons la visite d'un colibri (qui l'eût dit en pareil endroit!) puis d'un lemming super culotté qui se faufile entre nos pieds pour ramasser la moindre miette. Trop mignon!