Dans le cadre d'un scénario ou d'une campagne de l'Appel de Cthulhu, souvent les personnages incarnés commencent en étant des sceptiques du paranormal (à différents degrés) et finissent tôt ou tard, à force d'y être confrontés, par devoir l'accepter.
Même dans les scénarios où le surnaturel n'intervient pas (directement), les personnages sont confrontés à du paranormal (au sens premier du terme) qui les fait se questionner sur ce en quoi ils croient et sur la réalité elle-même.
Pour beaucoup de joueurs, surtout ceux habitués au Mythe et aux scénarios de jeu de rôle, il est difficile, voire presque impossible, de déterminer avec justesse à partir de quel moment il est cohérent que le personnage commence à réellement croire au Mythe, aux légendes, à la folie et à sa vision erronée de la réalité. Il est vrai que pour les personnages extrêmes dans le spectre de la crédulité il plus plus facile de trouver le bon moment pour passer de l'autre côté, mais pour beaucoup de personnages le joueurs qui le joue peut se sentir frustré du sentiment de mal l'avoir joué -- alors que c'est un évènement primordial pour tous les investigateurs.
Cet article s'adresse aux Conteurs qui souhaitent aider les joueurs dans cette procédure. Tous les joueurs n'ont pas besoin de cette aide, mais il est bon d'être prêt à soutenir quiconque ce serait pas sûr de sa démarche.
Conter le ressenti des personnages
Normalement, le ressenti des personnages est laissé à la discrétion du joueur. En effet, les réactions role-play sont engendrée par les sentiments que le joueur émule pour son personnage et chaque personnage sera émulé de manière différente.
Au bout d'un moment cependant, le Conteur pourra évaluer le degré de scepticisme de chaque personnage, et donc savoir à partir de quand celui-ci devrait commencer à basculer vers la croyance.
Le Conteur va donc pouvoir donner le ressenti personnel des personnages chaque fois qu'ils sont confronté à l'horreur, ce qui va crescendo et, petit à petit, guider les joueurs sur l'interprétation de leur personnage.
Exemple : Alice et Bob viennent tous deux de découvrir un cadavre horriblement mutilé.
Alice, policière et sceptique de nature, va recevoir la description suivante :
"Le corps a visiblement été lacéré jusqu'à ce que mort s'en suive. L'odeur cadavérique et la nausée d'horreur t'oblige à mettre un mouchoir devant ta bouche."
Bob, qui est plus crédule et à qui on a raconté une histoire impliquant des loups-garous plus tôt dans la journée, va recevoir cette description là :
"Le corps est horriblement mutilé, des lambeaux de chair ont été bestialement arrachés. Seule une créature plus forte que lui aurait pu le mettre dans cet état."
Dans les deux cas, l'horreur est réellement ressenties, mais Alice le voit de manière très pragmatique (comme l'investigation d'un crime terriblement glauque) alors que Bob a un registre qui le relie à ce qu'il a entendu avant, ce qui le pousse à y croire (ou non). Dans ce second cas, le joueur décide toujours de lui-même si son personnage bascule du côté de la croyance ou pas, mais la divergence de description permet de lui confirmer que c'est possible.
Donner des comparaisons personnalisées
Au delà des description du ressenti, on peut aussi personnaliser ce à quoi la scène fait penser, en la ramenant à quelque chose que le personnage connaît bien.
Cela permet de donner un point d'entrée au Mythe, sans pour autant lui donner l'aspect du Mythe lui-même. Il est en effet plus facile de croire à quelque chose auquel on croit déjà (ne serait-ce qu'un peut).
Exemple : Alice et Bob se retrouve face à une créature humanoïde difforme. Alice, toujours aussi pragmatique, va rapporter cela à ce que qu'elle a pu voir dans le cadre de son travail :
"L'homme qui se tient devant toi a l'expression défigurée par la folie, comme les malades psychopathes que tu as déjà plus voir, mais en dix fois plus horrifique."
Bob, lui qui est un fervent croyant juif, voit cela :
"La créature qui se tient devant toi porte le mal sur le visage, comme la description faite d'Azazel dans le Testament."
Libre à chacun de réagir, mais chaque description s'inscrit dans le réel du personnage.
Utiliser les tests de SAN à bon escient
Réussir ou rater une test de SAN peut aider à passer de l'autre côté ou à rester sceptique.
Si le Conteur donne une description très pragmatique suite à un test réussi cela permet de rester les deux pieds sur terre.
De manière similaire, le Conteur peut donner une description extrême lors d'un test de SAN échoué, ce qui donne au joueur l'opportunité de faire passer son personnage du côté de la croyance.
Exemple : Alice et Bob sont face à un cultiste qui vient de lancer un sort faisant apparaître une brume pour se cacher. Alice a réussi son test, alors que Bob a échoué.
Alice : "Suite à sa psalmodie, l'étranger disparaît dans un nuage brume. Ce brouillard ressemble à un fumigène, sa l'odeur. C'est étrange."
Bob : "L'incantation démoniaque prononcée par la voix rauque du cultiste te transperce violemment. Son incantation a fait apparaître une brume épaisse qui te glace le sang. Cette brume s'insinue entre tes vêtements, te pénètre et te paralyse."