L'article de Factuel qui résume.
Détails points par points avec renvois aux sources.
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L'article de Factuel qui résume.
Détails points par points avec renvois aux sources.
Marcel Kuntz - Chercheur CNRS Grenoble : Comment la campagne de désinformation des glyphotests a-t-elle démarré ?
Jean Yves Chauveau (Hebdomadaire agricole Terre de Touraine) :
Son principe a été conçu dès 2014 en Allemagne. Elle ciblait le BFR, équivalent de l’Anses française, nommé pour l’expertise du renouvellement 2016.
Les opposants avaient besoin d’un outil qui frappe l’opinion. Monica Kruger, militante et directrice du laboratoire privé d’analyse vétérinaire Biocheck avait connaissance d’un test vendu par la société Abraxis. Il alerte sur la potentialité de présence du glyphosate dans l’eau ou l’urine. Il utilise la méthode Elisa, peu couteuse, basée sur des anticorps. Mais d’autres molécules, inconnus, réagissent et produisent des faux positifs (un « bruit de fond »). Le fabricant fixe donc un seuil de détection. Si la valeur affichée est en deçà du seuil, c’est du « bruit de fond » et l'utilisateur indique : «Absence de glyphosate ». Au-delà, pour faire la part entre le « bruit de fond » et le glyphosate : « présence à contrôler par une technique de confirmation (chromatographie) ». En respectant ce protocole, la mesure finale (chromatographie) chez les européens indique des traces dans 15 à 25 % des cas, avec des valeurs proches du seuil de détection.
Ce n’était adapté à créer une campagne anxiogène.
Qu’à cela ne tienne, en 2014, M Kruger s’est autorisée à rabaisser le seuil de l’urine à celui de l’eau (8 fois plus bas) et à transformer l’outil d’alerte en un outil de quantification directe. Pour valider la manœuvre elle a publié une étude dans une revue scientifique en sélectionnant 13 valeurs parmi plus de 400.
Biocheck prend la précaution juridique d’indiquer que la procédure est « nicht adkrediertes» en bas de ses analyses.
Cela leur a permis d’afficher 99,6 % de résultats positifs en 2016 dans une campagne de 2000 analyses via les magasins bio.
Michel Vaudour (agriculteur , responsable du dossier pour la FNSEA37 et FNSEA CVL - Centre Val de Loire) :
Les Verts au Parlement Européen ont repris la méthode (48 analyses). Elle a été importée en France par l’association anti-pesticide Génération Futures en avril 2017, avec 30 tests dont ceux de personnalités et en introduisant un confusion de valeurs entre eau et urine. Guillaume Tumerelle, l’avocat des « Faucheurs Volontaires » (d’OGM), a utilisé ce test pour convaincre un juge dans un procès le 17 août 2017. Le succès de l’opération a conduit les faucheur à le développer à grande échelle (6648 tests), avec des plaintes collectives (5400) . L’émission de Elise Lucet le 17 janvier 2019, « Glyphosate : comment s’en sortir ? » avec des tests réalisés sur 15 « peoples » a donné une exposition médiatique forte et une légitimité à la campagne au-delà du réseau des militants actifs.
MK : Devant le silence des pouvoirs publics, ce sont les agriculteurs qui ont dû réagir ?
MV : Les autorités sanitaires auraient dû effectuer le travail. Mais, à l’époque (2018-2019), les « pisseurs » étaient les alliés objectifs de Nicolas Hulot et du gouvernement qui avaient programmé l’interdiction de la molécule.
Le monde agricole, naïf, n’imaginait pas que les opposants aient pu construire une campagne en s’appuyant sciemment sur un protocole de mesure dévoyé.
Ce n’est qu’après Envoyé Spécial qu’il y a réalisation de deux premiers contre-tests au CHU de Limoges au printemps 2019. Résultat : aucune trace. Le choix a été ensuite de réaliser des tests croisés, Elisa et Chromatographie à Labocéa de Brest ou au CHU de Limoges.
Mais les pisseurs dénigraient ces tests réalisés par le réseau FNSEA et la presse locale n’enquêtait pas. A Tours nous avons donc ouvert les contre-tests aux parlementaires, journalistes et « pisseurs » en janvier 2020 avec le regards d’experts pour comprendre. Les responsables départementaux de CG ont refusé d’y participer. Même refus pour une conférence avec un toxicologue du CHU.
JYC : Oui. À la suite de dissensions internes, depuis fin 2021 ses comptes rendus de conseil d’administration sont publics. Celui du 14 janvier 2020 se suffit à elle-même. Eux aussi, ont conclu que la méthode Elisa n’était pas fiable. Mais cela posait la question « des réactions dans les médias, le risque que, aux yeux du public, la campagne soit décrédibilisée ».
MV : Le politique a donc repris le dessus, surtout que c’était le leader du dossier, l’avocat, qui était questionné. Le CRIIGEN a participé à étouffer l’affaire. Il fallait éviter que les 5400 plaignants, en très large majorité sincères, comprennent et demandent des comptes car CG leur a fait engager leur signature de citoyen en bas d’une plainte. L’avocat des faucheurs devait aussi éviter que le procureur en charge de l’appel du procès du 17/0/2017 comprenne la supercherie.
MK. Plus de 700 articles de presse ont été consacrés aux « pisseurs » plus les couvertures radiophoniques et télévisuelles. La presse française a-t-elle enquêté ?
JYC. Non, à part ceux cités par Heintz ainsi que Le Mensuel du Morbihan à l’automne 2019. Frédéric Taddeï a, lui aussi, eu un regard critique. Enquêter signifiait remettre en cause Générations Futures et Elise Lucet. Peu osent et c’était sur un thème qui faisait consensus dans l’opinion. Nos conférences de presse ont été relayées par la presse locale, mais en donnant, en retour, la parole aux pisseurs, sans les interroger sur le fond du dossier. Pourtant, nous demandions aux experts scientifiques d’exposer et donnions tous les éléments aux journalistes pour qu’ils les vérifient. Avec des conférences à Tours ou Rennes, nous n’avons pas les liens directs avec la presse nationale. Et l’AFP nous a indiqué que son rôle n’est pas d’enquêter.
MV : Il faut souligner le travail de fonds très utile pour comprendre les enjeux que Gil Rivière et vous-même, Marcel Kuntz, avez réalisés en 2020 avec vos publications « Glyphosate, l'impossible débat » et « Glyphosate, le bon grain et l'ivraie ». Elles éclairent sur l’alliance d’intérêts entre les avocats américains, les commerçants bio des deux côtés de l’Atlantique et les activistes décroissants français et européens.
Le récent article de Géraldine Woessner « Glyphosate : La saga d’une manipulation » dans Le Point du 12 octobre 2023, libre d’accès, est la référence actualisée. Il résume les enjeux et détaille le « récit d’une tromperie ».
La persévérance paie, en témoigne l’évolution des articles de la Nouvelle République à Tours. Au départ, elle relatait de manière dithyrambique les tests des pisseurs. Ensuite, elle a repris une partie significative de notre démonstration. Mais c’est en échange direct.
MK : Est-ce que le classement sans suite des plaintes met fin à la guerre des tests entre pisseurs de glyphosate et agriculteurs ?
MV et JYC : Non. Les pisseurs veulent étouffer l’affaire pour éviter la démonstration publique de leurs mensonges (ou incompétence, quel est le pire pour eux ?). Ils gardent secret les 110 pages du classement sans suite de leur plainte fin septembre 2023. Mais, nous ne lâchons pas. Est-ce qu’un journaliste national arrivera à en savoir plus via le pôle santé du parquet de Paris ?
L'interview se poursuit par le témoignage de André Heitz A retrouver ICI.
Comment les « pisseurs » tel qu’ils se nomment, ont construit Campagne Glyphosate
Michel Vaudour : CG a copié les affirmations fallacieuses de Générations Futures en 2017 (et des concepteurs de la campagne en Allemagne en 2014-2016) en utilisant une confusion entre l’urine et l’eau qui donnait un crédit à la campagne. Les fabricants de glyphosate n’ont pas réagi et le monde agricole (et une partie de la presse) ne l’a fait que tardivement, après l’émission d’Elise Lucet de janvier 2019 qui avait donné une légitimité à ce test.
Notre enquête a démontré que le test détectait du glyphosate là où il n’y en avait pas et que, pour ce faire, le protocole du fabricant avait été volontairement non respecté. Les mesures accréditées, comme celles réalisées par le laboratoire du CHU de Limoges indiquent des traces infimes, de l’ordre de 0,2 ng/ml pour 15 à 25 % des cas. La moyenne des glyphotests Elisa est de 1,19 ng/ml. Que ce soit l’un ou l’autre résultat, dans les deux cas, les toxicologues rassurent. L’ANSES indique que « 1 ng/mL dans les urines correspond à une exposition par voir orale inférieure à 1 % de la dose journalière admissible ». La dose journalière admissible, elle-même définie avec un facteur de sécurité d’au moins 100.
Jean Yves Chauveau : Dans ses fiches de résultats, le laboratoire de Limoges indique que, dans les cas d’intoxications aiguës, la concentration est supérieure à 1 g/l : 5 millions de fois plus que les 0,2 ng/ml !
Le glyphosate "rentre et sort" dans l'organisme très rapidement (24 h) et sans être dégradé. Une partie, environ 30 % ressort par les urines, le reste par les fèces. C’est ainsi que la quantité absorbée peut être estimée, expliquent les toxicologues du laboratoire du CHU de Limoges.
Les agriculteurs ont dû réagir devant le silence des pouvoirs publics
MV : Les autorités sanitaires auraient dû effectuer le travail et indiquer que le test Elisa n’était pas fiable. Mais, à l’époque (2018-2019), les pisseurs étaient les alliés objectifs de Nicolas Hulot et du gouvernement qui avaient programmé l’interdiction de la molécule. L’AGPB, syndicat des producteurs de blé, lui avait demandé une expertise, mais il était difficile pour l’ANSES de réagir car visée par la plainte.
Les agriculteurs n’avaient pas la connaissance du fonds du dossier dont nous disposons aujourd’hui après enquête. Et surtout, sans doute un peu naïf, nous n’imaginions pas que Générations Futures et CG aient pu construire une telle campagne en s’appuyant sciemment sur un protocole de mesure dévoyé. Par ailleurs, CG avait pris la précaution de ne pas interpeller directement le monde agricole pour ne pas susciter sa réaction. Ce n’est qu’après Envoyé Spécial de janvier 2019 qu’il y a réalisation de deux premiers contre tests au laboratoire de Limoges au printemps 2019 : résultat, aucune trace. Le choix a été ensuite de réaliser des tests croisés, Elisa-Chromagraphie, directement à Labocéa de Brest ou au CHU de Limoges, via les laboratoires médicaux de quartier. Mais les pisseurs dénigraient ces tests réalisés par le réseau FNSEA et la presse locale n’enquêtait pas. A Tours nous avons donc ouvert les contre tests aux parlementaires, journalistes et pisseurs en janvier 2020.
Les pisseurs ont-ils accepté les tests et débats contradictoires ?
MV : Dès le départ, la consigne de CG à ses troupes a été d’éviter tout échange. Les responsables d’Indre et Loire ont refusé de participer à ce test croisé transparent. Deux mois après, ils ont refusé de participer à une conférence débat avec un toxicologue du CHU.
Après une mobilisation au Palais de justice de Tours, le parquet avait demandé à la PJ de Tours de nous auditionner en juin 2021 afin de joindre les éléments de notre enquête au dossier. Les pisseurs en ont été informés.
A chaque fois vous avez interpellé les promoteurs des glyphotests. Que répondent-ils ?
JYC : Stéphane Foucart (Le Monde) et l’avocat de CG, Guillaume Tumerelle, nous ont bloqués. Générations Futures, Elise Lucet, CG prennent la précaution de ne jamais répondre. Ils savent que leur test Elisa n’est pas défendable.
Depuis fin 2021 et la publication des comptes rendus du CRIIGEN c’est « silence radio » sur ces tests. CG ne peut pas avouer sa forfaiture à ses 6600 militants de base qu’ils ont bernés. A part quelques politiques non avertis, comme Manon Aubry le 28/09/2023 ou des journalistes ayant participé au glyphotest et aveuglés par l’effet de groupe, plus personne ne se risque à les mettre en avant.
Évoquer les glyphotests en 2023 aurait été « donner le fouet pour se faire battre ». Ceux qui accusent des agences européennes et scientifiques de manque de rigueur, auraient été « pris la main dans le sac » en utilisant un résultat d’un test qu’ils savaient ne pas être fiable.
S’ils savaient que le test n’était pas fiable, ont-ils donc menti sciemment ?
JYC : Cette question se pose, en premier à François Veillerette, responsable de Générations Futures qui a introduit et légitimé le test en France ainsi qu’Elise Lucet. Elle aussi à visiblement fait confiance aveuglément à GF, sans un minimum de contrôle. Cela n’était pas bien difficile, il suffisait de poser la question au distributeur européen du test, Abraxis à Nantes, comme nous l’avons fait. Les auditeurs attendent d’une grande émission d’enquête du service public plus de rigueur que celle d’ONG qui défendent des intérêts particuliers ou de militants faucheurs opposants dogmatiques.
MV : Côté CG, est-ce qu’il y avait une intention délibérée de mensonge ou est-ce au départ de l’incompétence puis une opération pour couvrir le mensonge ? La justice en dira peut-être plus si la plainte en diffamation déposée par la FDSEA 35 va au bout. En tout cas les pisseurs de base étaient de bonne fois mais n’ont pas été très interrogatifs.
A partir de janvier 2020, et l’épisode CRIIGEN, c’est devenu un mensonge assumé par CG pour ne pas décrédibiliser leur campagne. Beaucoup d’éléments laissent à penser que, initialement, c’était un coup de bluff de l’avocat Tumerelle dans un procès des faucheurs avec comme objectif de remonter à la Cour Européenne de justice.
A noter : Après de très lourdes dissensions au sein du CRIIGEN allant jusqu’à un procès en appel, une partie des comptes rendus de ces CA sont d’accès libre sur le web. Ce depuis fin novembre 2021, date où les glyphotests avaient déjà été décrédibilisés.
Extrait conseil ad CRIIGEN du 14 janvier 2020.
Un document "très embarrassant" pour le CRIIGEN
Pourquoi un « mensonge assumé » à partir de janvier 2020 ? Est-ce à la suite des contre tests des agriculteurs et des articles de journalistes ?
Jean Yves Chauveau : Oui, malgré les fanfaronnades de Campagne Glyphosate en novembre 2019, cela a mis le doute, notamment auprès du CRIIGEN, fondé par Corinne Lepage. Lors de son conseil d’administration du 14 janvier 2020 ils ont demandé des explications à Guillaume Tumerelle et sa spécialiste environnement Aude Dessaint. La lecture du compte rendu ne laisse pas de doute : ces derniers se sont interrogés sur la fiabilité de Elisa, mais ils ont malgré tout décidé de l’utiliser. Faire le contraire leur aurait porté un lourd préjudice dans un procès en cours à l’époque.
Campagne Glyphosate s'était contenté « d’une réponse rassurante par mail » du laboratoire Biotcheck. Ce laboratoire qui envoie des résultats d’analyses précisant « nicht adkrediertes» !
Le CRIIGEN, même si, lui aussi, était opposé au glyphosate a conclu que le test Biockeck n’était pas fiable ?
JYC : Oui. Le 14 janvier 2020, le cabinet d’avocat « marche sur des œufs ». Il ne peut pas réfuter les alertes, notamment celle d’Arnaud Poteker qui déclare « La réputation de Biocheck est en jeu, il faut leur réécrire et si leurs procédures ne sont pas fiables, il y a un préjudice. Ils doivent une réponse. » et soulève le dilemme des scientifiques du Criigen : « Il faudrait voir avec François Veillerette (Ndlr : qui a conseillé les faucheurs) sur la question du choix du laboratoire, sachant que la crédibilité de la campagne est en jeu. » Il ajoute un point crucial : « cela remettrait également en
cause des analyses précédentes commanditées par Générations Futures ». Elise Lucet n’est pas citée.
Pour s’en sortir, l’avocat des pisseurs ose affirmer « la campagne nationale a été stoppée avant les articles critiques » ce qui est totalement faux. Les dépôts de plaintes se poursuivaient. Et, ensuite, interrogé sur la viabilité du test en février 2021, un responsable (49) indiquait qu’il avait contacté la structure nationale qui l’avait rassuré « nos avocats ont des preuves qu’ils produiront le moment voulu ». Et, elles n’ont jamais été produites.
Le CRIIGEN, après son CA de janvier 2020 a voulu étouffer l’affaire ?
Michel Vaudour : Oui, et très probablement sur consignes des Faucheurs et leur avocat. Nous l’expliquons dans un article de l’Aurore Paysanne du 15 octobre 2023. Après l’article de Gil Rivière-Wekstein sur son site Agriculture & Environnement, le CRIIGEN, et les pisseurs savaient que le monde agricole avait connaissance de ces comptes rendus de CA. Début 2022 nous avions interrogé le CRIIGEN en leur demandant de partager les résultats de leurs tests croisés Elisa/Chromatographie (comme ceux des agriculteurs) annoncé dans le compte rendu de CA du 30 juin 2020. Il a répondu en indiquant qu’une étude allait être publiée et qu’il nous informerait. Ce qu’il n’a bien sûr pas fait car, sans aucun doute, leurs tests ont confirmé l’analyse des agriculteurs.
JYC : Au CA du CRIIGEN du 14 janvier, Miguel Garcia Casas (Eaux et rivières Bretagne) pose la question « des réactions dans les médias, le risque que, aux yeux du public, la campagne soit décrédibilisée ». Après une courte période de réflexe scientifique, les membres du CRIIGEN, son président Spiroux de Vendomois en tête, ont cherché les moyens pour participer à l’étouffement de l’affaire. Il fallait que les responsables départementaux aient les éléments de langage.
Pour ce faire, Christian Vélot et Spiroux de Vendomois ont publié une étude mise en avant sur https://pig.log.bzh/ sous le titre « Nous avons raison ». Mais il se sont bien gardés d’en faire une publicité externe car, de fait, sa lecture confirme la présence de faux positifs dans les tests Elisa.
Autre coup porté à leur crédibilité, l’utilisation du laboratoire, décrié, Labocea de Brest par les anti-glyphosates Québécois pour réaliser une campagne de mesure au printemps 2020. Les « cousins » ont surtout évité le test Elisa (lire partie Québec du site) .
Faux tests de détection du glyphosate
et mensonges de Générations Futures, les Faucheurs d'OGM, Campagne Glyphosate, Elise Lucet.
L’instrumentalisation des médias.
Le bilan (provisoire) de 4 ans d'enquête.
Vous attirez l’attention sur le rôle du cabinet Guillaume Tumerelle, pourquoi ?
Jean Yves Chauveau : Nous ne l’avions pas compris au départ de l’enquête, mais la genèse de CG remonte à un procès du 17 août 2017 à Foix. Comme l’explique l’avocat dans une vidéo de Secret Toxique : « pour la défense des faucheurs, les avocats et prévenus se sont soumis à un test d’analyse d’urine (NDLR : tests Elisa). On avait tous du glyphosate dans nos urines. On a montré cela au juge pour insister sur le fait que les prévenus étaient directement touchés par le glyphosate. Et le juge a considéré qu’il y avait effectivement un problème … ». Le juge, qui a validé quasiment tous les arguments des faucheurs, n'a pas vérifié la validité des tests. Le parquet non plus. Fort du succès du procès, les militants se sont très probablement dit que multiplier l’opération pouvait être un formidable outil de médiatisation.
A ce moment-là, début 2018, soit le cabinet d’avocat savait que le test était très critiquable, mais il ne pouvait pas l'expliquer aux militants car une procédure en appel était en cours et le parquet aurait compris qu’il avait été berné. Soit, non compétent, il n’avait pas compris que le test était valable pour l’eau mais pour l’urine comme l’a fait croire Générations Futures.
En tout état de cause, c’est l’avocat qui avait lancé l’opération sous son nom propre. Ce n’est qu’après que l’opération a été séparée, en apparence, des Faucheurs avec la création du site Campagne Glyphosate.
Au final, l’avocat a organisé la « retraite » pour que le mensonge ne soit pas connu de l’opinion publique ?
JYC : Oui. Le parquet a classé l’affaire sans suite et à une date clé, fin septembre 2023, avant les votes des États membres.
Pour éviter des impairs des pisseurs, G. Tumerelle a adressé des éléments de langage à tous les plaignants, y compris les journalistes et députés « pisseurs ». Interrogé le 24 octobre, le leader de CG, Dominique Masset, refuse de faire connaître le rapport de 110 pages du parquet. Il précise « je préfère par précaution que ce soit lui (l’avocat) qui décide de qu’il doit dire ou ne pas dire ».C’est on ne peut plus explicite ! Le rapport doit rester confidentiel. Aude Dessaint, contactée le 22/11/2023, affirme : « il n’y a rien de ce que disent les agriculteurs de Touraine » mais refuse de donner plus de détails.
Mais s’il n’y a rien, pourquoi ne pas rendre ce rapport public ?
JYC : Effectivement ! La raison est que les pisseurs savent que la presse ne pourra faire autrement que d’en faire état et de constater que l’accusation de mensonge du monde agricole était fondée. Cela donnerait un mauvais éclairage à toutes les études, de divers scientifiques, mises en avant pour contrer le rapport de l’ESFA qui recommande le renouvellement de la molécule.
Cela pourrait avoir aussi des impacts défavorables dans les divers procès des faucheurs.
JYC. Les « pisseurs » ont repris à leur compte en 2018 une campagne conçue dès 2014 en Allemagne et utilisant le test Elisa d’Abraxis. Les opposants avaient ciblé leur action sur l’Allemagne car l’expertise du renouvellement 2016 était sous la responsabilité du BFR, équivalent Allemand de l’Anses française. Il leur fallait un outil qui frappe l’opinion. Un test, peu coûteux, fabriqué par Abraxis indique la présence de glyphosate dans l’eau. Pour l’urine, milieu trop complexe , où d’autres molécules parasitent le test, les seuil de détection est 8 fois plus élevé. Qu’à cela ne tienne, en 2014, Monica Kruger, militante et directrice du laboratoire privé d’analyse vétérinaire BioChek, à Liepzig a publié une étude dans une revue scientifique. Elle s’est ainsi autorisée à étendre les seuils de l’eau à l’urine ce qui lui permet d’afficher au moins 99 % de résultats positifs.
En 2015 les opposants ont présenté des mesures Elisa détectant du glyphosate dans 16 (100 %) laits maternels. La contre étude du BFR de janvier 2016 avec les deux méthodes de chromatographie liquide et gazeuse n’a trouvé aucune trace. Malgré ce revers, les opposants ont créé une campagne de mesure dans l’urine (99,6 % de positifs). Pour des raisons de calendrier (ou de politique intérieure) il n’y a pas eu de contre-expertise du BFR.
La méthode a été reprise par le groupe de Verts au Parlement Européen (48 analyses), ainsi qu’au Danemark en 2017. Elle a été importée en France par Génération Futures en avril 2017 avec 30 tests dont ceux de Marie Monique Robin, Delphine Batho ; Guillaume Meurise, Stéphane Foucart, ….
MV : Ensuite le test a été utilisé par l'avocat des Faucheurs Volontaires puis développé à grande échelle. L’émission de Elise Lucet le 17 janvier 2019, « Glyphosate : comment s’en sortir ? » avec des glyphotests réalisés par 15 « peoples » avait donné un validation forte à la campagne des « pisseurs involontaires », au-delà du réseau des militants actifs.
Lire Terre de Touraine du 4 avril 2021 en bas de page. Comment Générations Futures à fait croire que le test était valable pour l'urine et introduit un seuil pour l'eau (sans signification sanitaire) comme une référence.
Elise Lucet : pourquoi n'a t-elle pas fait un minimum de vérification ? Mais on peu retourner la question, elle n'a pas fait de vérification du serieux de Séralini, pourquoi en aurait-elle fait pour le glyphotest tamponné "outil fiable" par Générations Futures ?