Le Cercle L’Âne d’or a été créé par Joachim Durel et Maurice David, professeurs au Lycée Carnot, en 1926 sous le nom de l’Abbaye de l’Âne d’or, associant l’auteur latin d’Afrique du Nord, Apulée auteur de l’Âne d’or, à l’Abbaye de Thélème (Rabelais) qui a elle-même inspiré le Groupe de l’Abbaye (qui comporte notamment René Arcos, Georges Duhamel et Jules Romain). Yves Chatelain (La Vie littéraire et intellectuelle en Tunisie de 1900 à 1937. Paul Geuthner, Paris, 1937) précise que « le but était, d’une part, de réunir des personnes capables de s’intéresser à des discussions courtoises sur des sujets philosophiques et littéraires et, d’autre part, de recevoir les écrivains et conférenciers de passage à Tunis, nombreux à cette époque. » L’Abbé en fut le Docteur Charles Nicolle, médecin biologiste, pilier de l’Institut Pasteur de Tunis et – à ce jour – seul lauréat d’un Nobel scientifique pour des travaux effectués en Tunisie. Parmi les conférenciers reçus, les écrivains Georges Duhamel et Henri de Montherlant, les philosophes Lucien Levy-Bruhl et Félicien Challaye ou encore le juriste, économiste, homme politique et résistant, André Philip.
Toujours selon Chatelain, « l’Essor a été fondée le 1er avril 1905, par Alexandre Fichet, professeur de dessin au Collège Alaoui, et passionnément épris d'art théâtral. Il donna d'abord un cours de diction [...] et constitua avec ses élèves une petite troupe d'acteurs amateurs dont le concours fut bientôt sollicité par diverses sociétés pour des fêtes de bienfaisance et des cérémonies. Outre des représentations théâtrales données soit à Tunis, soit au théâtre antique de Carthage, soit en tournées à l'intérieur, l’Essor a organisé aussi des causeries littéraires accompagnées d'auditions littéraires et musicales avec récitations de poèmes et chants.
En 1923, [...] Georges Duhamel et René Arcos, de passage à Tunis, font, sous les auspices de la société, des conférences qui remportent, du fait de la qualité propre et de la célébrité de leurs auteurs, un vif succès. Des conférences du même ordre ont été faites encore les années suivantes, par d'autres écrivains de France. La même année est inauguré un genre nouveau [...] la tribune libre. Ces séances soulèvent chacune une question controversée, d'ordre politique, social, littéraire ou autre. Un orateur expose le sujet en proposant telle ou telle solution. La parole est ensuite donnée à toute personne de l'assemblée qui désire appuyer ou contredire l'orateur. Après quoi, celui-ci répond aux contradictions et tire la conclusion du débat. [...] Par ses conférences, comme par ses tribunes libres, [...] l’Essor constitue à Tunis, une sorte d'université libre, féconde et utile.»
L’Essor continuera à innover avec des projections de films d’avant-garde en 1929 et 1930, des récitals de poésie nord-africaine conjointement avec la Société des écrivains d’Afrique du Nord, des séances de lecture de théâtre classique, etc. Chaque année enfin, une ou plusieurs séances sont organisées pour les meilleurs élèves des lycées de la ville.
Serge Moatti relate dans, Villa Jasmin que c’est au cours d’une conférence organisée, vers 1930, à Tunis, par l’Essor, décrite comme une association culturelle de gauche, à laquelle son père, socialiste, libre penseur et laïque avait été convié, que Habiba Menchari, prit la parole pour réclamer l’abolition du voile, imposé aux femmes musulmanes, puis s’était soudainement découverte.
L'Institut de Carthage est initialement créé, le 20 novembre 1893, sous le nom d’Association Tunisienne des Lettres, Sciences et Arts et se définit dans l’Article 1 de ses statuts comme « une société d’études dont le but général est suffisamment défini par son titre même et dont l’objectif particulier, est de faire connaitre sous toutes ses faces et de toutes les manières possibles, la Tunisie. […] le champ d’études de l’Association […] embrasse par conséquent : la littérature, l’histoire, la géographie, l’ethnographie, l’anthropologie, l’archéologie, la numismatique, les sciences physiques et naturelles, la linguistique, la paléographie, la marine, l’économie sociale et politique, la colonisation, etc. » Il prend le nom d’Institut de Carthage dès l’année 1894 et crée la Revue Tunisienne la même année qui publie 4 numéros annuels jusqu’en 1948.
En 1920 commence une période de déchéance de l’Institut et de la Revue. Chatelain indique que « faute de direction ferme, l'Institut de Carthage se peuple de vaniteux et de non-valeurs, et les collaborateurs sérieux se retirent. Ch. Saumagne essaie d'endiguer le flot et de sauver l'embarcation. Mais en 1924, il renonce. De cinq à six numéros par an, nous tombons à deux [...] c'est la mort lente, et en 1927, la revue cesse de paraître, en même temps que l'Institut de Carthage n'est plus qu'un nom. Tout semblait irrémédiablement perdu, lorsqu'un jeune, Robert Brunschwig, professeur au lycée de Tunis et grand érudit, estimant la revue parfaitement viable, à condition de la reprendre sur de nouvelles bases, sollicite une réunion de l'Institut de Carthage, expose son plan et demande pleins pouvoirs pour redresser la situation. C'est un vrai coup d'État, à la suite duquel Ch. Saumagne, un jeune lui aussi, est rétabli président de l'Institut de Carthage, et Brunschwig directeur de la revue. Dès lors celle-ci repart allègrement. Cette nouvelle série [...] s'adresse à un public plus restreint, mais elle est très appréciée du monde savant par ses nombreux articles historiques, archéologiques, et aussi numismatiques, géographiques, géologiques. Dirigée par Robert Brunschwig jusqu’en 1931, puis par Jean Despois, professeur à Tunis, [...] la revue tunisienne est, dans sa sphère, un organe très vivant, d'une qualité scientifique unanimement reconnue. »
On remarquera dans la bibliographie de Mohamed-Salah Mzali que c'est précisément pendant cette période de déchéance de l'Institut de Carthage et de la Revue qu'il cesse d'y apporter son concours : il ne publie rien dans cette dernière de 1918 à 1931.
En 1925, à l’initiative de Maurice David, l’Institut de Carthage fusionne avec la section tunisienne de la Société des écrivains d’Afrique du Nord (société dont Abderrahmane Guiga est l’un des fondateurs) et prenant modèle sur l’Essor, organise des conférences avec la participation d’intervenants tels que Jules Romain, Henri de Montherlant, Paul Langevin, etc.