Parution Jean-Tiburce dans les terres de l'Au-delà 25 et 30 janvier 2020

Janvier 2020, cette nouvelle année commence avec la parution d'un conte né d'une collaboration graphique originale puisque quelques-uns de mes dessins ont généré cette histoire écrite par Jacques Baulande.

Ces articles de presse sont suivis de la présentation de l'ouvrage et de lignes écrites par Jacques et moi pour présenter cette démarche commune, peu commune !

Voici quelques années, Jacques Baulande, écrivain devenu un ami, me demanda de lui « laisser » quelques-uns de mes dessins. C’est d’ailleurs la seule fois que je répondais favorablement à une telle requête. Jacques me confiait alors son idée de rédiger un jour un petit quelque chose à partir de mes dessins. Lesquels n’avaient aucun lien les uns avec les autres…

Quelques petites années s’écoulèrent pendant lesquelles chacun de nous œuvrait côtés romans, contes et livres de coloriage.

Puis, je sus que quelque chose se tramait sérieusement avec mes dessins. J’ignorais cependant lesquels, dans quel ordre. Le travail que s’était imposé Jacques lui donnait du fil à retordre. Je l’ai imaginé disposant mes dessins devant lui, tels de grandes cartes à jouer, convaincu qu’une histoire s’amorçait, puis renonçant au scénario d’alors, le récit ne se tenant plus ou étant bloqué… Jacques a dû donner une âme à mes personnages travaillés à l’encre de Chine, une personnalité même, une épaisseur, leur créer un costume intérieur, revisiter des paysages.

Enfin, sa plume experte partit dans un formidable au-delà, sans lamentation, nous faisant naviguer sur les flots d’un récit qui compte, conte, attestant d’une vraie plume qui sait « oh combien » nous faire voyager.

Quelques lignes de Jacques Baulande sur cette aventure littéraire :

Jean-Tiburce dans les terres de l’Au-delà est un conte illustré, certes. Mais l’expression est trompeuse car les « illustrations » existaient bien avant le texte. Je les avais depuis longtemps remarquées dans les ouvrages de Laurence F. Daigneau ou dans les expositions qui l’accompagnent de salon en salon. Je voyais ses personnages comme des héros sans emplois, des comédiens en quête d’un scénario et d’un langage, et j’avais envie de leur en inventer un. Je me décidai finalement à solliciter, assez hardiment, une faveur peu ordinaire : « Laisse-moi s’il te plaît fouiller dans tes archives, je voudrais voir si je peux en tirer quelque chose… » Laurence me connaissait, elle me fit confiance, et m’ouvrit tout grand le monde enchanté de ses images. Je compris rapidement mon imprudence que je pénétrais en terra incognita.

C’est que, posées en avant d’un texte encore à venir, comme les rimes que lançaient jadis les spectateurs des cabarets montmartrois aux chansonniers virtuoses des bouts-rimés, les images de Laurence F. Daigneau se sont révélées coriaces à la saisie littéraire. Stimulantes, certes, mais exigeantes. Il me fallut bien dix-huit mois pour en venir à bout !

Elles étaient stimulantes en ce sens que j’y ai trouvé tout prêt un personnel poétique abondant et varié, des décors originaux, des amorces de scénarios et, plus subtile mais incontournable, une tonalité esthétique qui faisait une large place à l’humour. Mais elles se révélèrent aussi exigeantes, voire intraitables, dans la mesure où, dépositaires d’une vérité obscure mais têtue, elles ne me permettaient pas de raconter n’importe quoi. Elles m’obligèrent souvent à emprunter des chemins dont je ne soupçonnais même pas l’existence. Il ne faut donc pas prendre trop au sérieux les quelques considérations « philosophiques » qui émaillent le conte. Quelques-unes paraîtront raisonnables, d’autres fantaisistes, imposées par des « illustrations » qui ne me laissaient pas le choix. Les hésitations qui ont marqué la recherche de l’épigraphe initiale témoignent de cette difficulté. J’ai finalement opté pour des vers « sérieux » de Jules Supervielle. Je donne ici la version alternative, que je trouve dans Fin de partie, une pièce de Samuel Becket, et que j’ai écartée à regret. La présente mise au point me donne l’occasion de la mettre un peu en lumière :

Ham : On n’est pas en train de… de… signifier quelque chose ?

Clov : Signifier ? Nous, signifier ! (Rire bref) Ah ! Elle est bonne !

À garder en mémoire pour accompagner Jean-Tiburce !