Après avoir réalisé un binoscope, je pensais alors être arrivé au bout de mes projets astronomiques. C'est à mon goût un instrument exceptionnel de par la vision qu'il offre. Cependant, la frustration de ne pourvoir emmener l'engin lors de mes pérégrinations familiales sur le territoire de Nouvelle-Calédonie ou avec des amis, dans des lieux particulièrement préservés de lumières parasites, m'a amené à envisager une version compacte de Dobson comme il en existe déjà beaucoup.
Il ne m'en fallait pas plus pour me stimuler et me convaincre que construire cette nouvelle version était une nécessité ! La bonne excuse ...
Le cahier des charges de cette version était relativement simple :
être très économique
pouvoir réutiliser des éléments du binoscope
pouvoir rentrer dans une valise compacte, sauf le serrurier et le miroir qui en ont déjà une.
Techniquement et contrairement à mon premier T400, j'ai opté dans la partie basse pour l'option flex-rocker. Elle m'a semblé celle permettant le plus de légèreté et un encombrement minimum en hauteur afin de limiter l'épaisseur de la valise de transport. Autre option, le serrurier de 8 tubes aura les 2 tubes avant qui se reprendront sur le haut des tourillons.
Ce T400 nomade se décompose comme suit :
La base et le flex-rocker.
la cadre et son barillet 9 points.
Les tourillons en CP de 18 mm fibré.
le serrurier de 8 tubes d'aluminium diamètre 16 mm.
La cage du secondaire et son araignée tout en fibre de carbone.
Au final, le télescope seul avec sa base, mais sans le miroir primaire, pèse environ 12 kg.
Le colisage : une fois empaqueté, je me retrouve avec 3 colis.
La valise du télescope de dimension 61x61x22 cm : 12,3 kg
la valise du miroir : 16 kg
les tubes du serrurier : 1,7 kg.
La base, qui est aussi le capot de fermeture de la valise de transport, est une plaque carrée de 60 cm de côté et 47 mm d'épaisseur. C'est un sandwich en contreplaqué de 6 mm dessus, 3 mm dessous et une mousse polyuréthane de 38 mm d'épaisseur avec quelques renforts internes sur le chemin d'appui des patins du flex-rocker et des trois pieds d'appui au sol. Ce qui en fait un élément particulièrement léger. La bande de glissement des patins est toujours constituée de Formica de marque "Polyrey" et de qualité "surf".
Le flex-rocher est réalisé à partir d'une fine planche de contreplaqué de 3 mm d'épaisseur stratifiée des deux cotés avec de la fibre de verre de 200 g/m² et ajourée pour l'alléger. Souple et résistant, il permet le bon appui des 4 patins inférieurs sur la base.
Le cadre, qui reçoit les tourillons et les embases du serrurier, ne fait qu'un avec le barillet. Il est réalisé en tube aluminium carré de 20 mm de côté. Les éléments qui le constituent sont simplement collés avec de la résine Epoxy chargée en microfibre, la zone de collage ayant été poncée au préalable pour assurer une bonne accroche. De petits renforts en fibre de verre, coupés dans une plaque de circuit imprimé, renforcent les jonctions les plus sollicitées.
Le barillet à 9 points est plus un choix esthétique et pratique que qualitatif, car après simulation sur le logiciel Plop, il apparait que le gain en maintient du miroir par rapport à un barillet à 6 points est négligeable. Mon choix a aussi été guidé par les matériaux que j'avais déjà à disposition, à savoir une plaque d'aluminium d'épaisseur 5 mm, n’ayant plus de barres en acier comme celles utilisées sur le binoscope pour les barillets à 6 points !
La bonne articulation des triangles qui supportent les points d'appuis du miroir est réalisée par des billes en acier de 5 mm de diamètre, percées de part en part, et fixées aux leviers de collimations par des vis M3. La tête des vis retient les triangles, ce qui permet la manipulation et le transport du barillet sans dislocation de cette pièce.
Durant le transport en mode "rangé" dans la valise, j'ai rajouté 2 petits élastiques qui bloquent les triangles alors en appuis sur des cales en caoutchouc.
Le système de réglage de la collimation par le haut se fait par l'intermédiaire de simples balanciers placés sur les deux barres transversales du cadre. C'est simple et le réglage est très fin et sans points durs.
Le maintient latéral du miroir se fait par l’intermédiaire d'un câble inox de 2,5 mm de diamètre relié au cadre par l'intermédiaire de deux pattes triangulaires en plat aluminium de 5 mm d'épaisseur, elles même collées et rivetées au cadre. Le câble est pincé par une vis à tête large que j'ai percé transversalement. Enfin, des petits bouts de Velcro maintiennent le câble à la bonne hauteur sur la tranche du miroir.
Patte de sécurité anti-renversement : pour une utilisation en public et à des hauteurs très proches de l'horizon, j'ai prévu une petite patte en plexiglas qui reçoit une vis avec, en tête, une butée anti-renversement.
D'un rayon de courbure de 350 mm, ils sont en contreplaqué de 18 mm d'épaisseur fibrés sur toute les faces avec du tissu de verre de 200 gr/m² plus 100 gr/m² en finition. Ils sont fixés au cadre par deux vis M6. Le cadre, dans ces zones de fixation, est rempli de résine chargée en microfibre et possède, sur la face opposé à l'appui, un écrou en aluminium collé que j'ai taillé dans du plat de 5 mm.
Pour raidir la structure formée par le cadre et les tourillons, une entretoise et un contreventement, en tube aluminium rond de 16 mm de diamètre, viennent s'interposer entre les tourillons. Ils assurent aussi la fonction de point d'attache des deux tubes avant du serrurier. Pour cette partie, il m'a été nécessaire de réaliser 2 petites pièces complexes en fibre de carbone permettant plusieurs accroches au même endroit. Ces pièces ont une grande importance dans la rigidité de l'ensemble et sur le maintient de la collimation. Elles sont précisément positionnées par des cales collées sur les faces internes des tourillons.
Par simplicité et économie de temps, les pattes de fixations des tubes sont simplement obtenues par écrasement des extrémités. Après plusieurs essais sur des échantillons de tube, j'ai trouvé les bonnes tolérances et la bonne méthode à l'aide d'un étau de forte dimension.
Comme il est défini dans le cahier des charges, le télescope se veut économique. Cette partie est donc volontairement constituée de tubes ronds en aluminium de diamètre 16 mm. L'option 8 tubes et le choix de reprendre les deux tubes avants sur les tourillons, ce qui réduit leur longueur, m'ont permit d'utiliser ce diamètre sans que la structure ne souffre d'une déformation néfaste lors de manipulation de l'instrument à différentes hauteurs. A l'usage, la collimation ne s'en trouve que très peu affectée (voir "à l'usage" ci-après).
Les pattes de fixation basses sont fendues pour un montage rapide par serrage direct sur le cadre ou sur les pattes au niveau des tourillons. Comme je l'ai déjà signalé plus haut, elles sont obtenues par écrasement du tube dans un étau. Dans le cadre, sur ces zones de fort serrage, un insert en laiton fileté M6 est noyé avec de la charge Exopy. Les deux tubes avant sont aussi repris par serrage sur les pattes en fibre de carbone de l'entretoise des tourillons.
La fixation haute du serrurier, se fait par l'intermédiaire d'équerres en aluminium de 3 mm d'épaisseur sur lesquelles se reprennent les tubes articulés. L'équerre est elle même fixée à la cage du secondaire par une vis M6 (voir "cage du secondaire"). L’articulation des tubes en "compas" est obtenue grâce à des fentes réalisées à leur extrémité. Pour renforcer cette zone et insérer une vis de fixation, le bout de chaque tube est rempli de charge Epoxy avant de réaliser la fente qui est ajustée sans jeux sur l'équerre.
La cage du secondaire est constituée d'un sandwich fibre de carbone/mousse polystyrène. Pour l'âme, j'ai utilisé un bout de mousse de 20 mm d'épaisseur et 30 mm de large avec quelques renforts triangulaires dans les angles. La fibre de carbone vient de la récupération de mes dernières chutes de 600 g/m² utilisées lors de la construction du binoscope.
Quatre inserts filetés M5 traversent les bords de la cage pour permettre la fixation des équerres du serrurier. Une partie du taraudage des inserts a été éliminée en partie basse par perçage et une partie du filetage des vis de fixation des équerres a elle été limée en partie haute : ce qui permet de laisser à poste les vis de fixations sur la cage sans les perdre (astuce de Serge Vieillard).
Le porte-oculaire, très lourd, que j'avais en stock, un modèle "Low Profile" de marque Antares, est fixé sur un support triangulé réalisé avec du contreplaqué de 3 mm stratifié sur une face par de la fibre de carbone. Il permet entre autre de bien raidir la zone d’implantation. Ce porte-oculaire a vocation à être remplacé par un porte oculaire HC-2 Kineoptics hélicoïdal bien plus léger.
Le support du porte-oculaire est équipé d'un passe-filtre du même type que ceux installés sur le binoscope, ce qui me permet de réutiliser la plaque déjà existante sur laquelle sont montés mes filtres. L'indexation est réalisée par une bille en inox.
Le miroir secondaire de 104 mm de petit axe est celui d'un des deux "tubes" du binoscope. Il se démonte rapidement sur le binoscope comme sur ce T400. Ainsi, cela m'a évité de réaliser un nouveau support plan de miroir.
Encore une fois, comme pour le B400c, le support du miroir secondaire est techniquement une copie de celui qu'a mis au point le club "Magnitude78", basé sur 3 points d'appuis : point/trait/plan (voir la page des têtes du binoscope). Les éléments sont ici réalisés partiellement avec de la cornière aluminium de 3 mm d'épaisseur.
Les branches de l'araignée sont en plat de fibre de carbone de 3 mm d'épaisseur et 30 mm de large.
Le baffle est réalisé dans une feuille de plastique rigide peinte en noir mat à la bombe. Il est fixé par Velcro à l’intérieur de la cage et s'appuie sur une branche de l'araignée.
La transportabilité en mode "rangé" : après quelques sorties, je peux confirmer que cet instrument rempli pleinement sa fonction. Il ne prends que très peu de place dans le coffre de mon véhicule et il m'est donc possible de l'emmener quand je pars en famille, la voiture déjà bien chargée. Les colis sont facilement manipulables, le plus lourds étant la boite à miroir avec 16kg. Les différents éléments le constituant sont bien calés dans la caisse de transport et n'ont subit aucun dommage, même en empruntant quelques pistes. La caisse est réalisée en contreplaqué de 6 mm avec des renforts dans les angles et au niveau de la poignée de transport.
Poids des éléments principaux :
Structure du télescope sans base ni miroir : 9 kg
base + flex-rocker : 3,5 kg
Le télescope monté se manipule facilement car la structure seule est vraiment légère : se qui m’amène à m'en servir chez moi quand je ne veux pas avoir à démonter un instrument en fin d'observation. Il est stocké rapidement dans la maison et même parfois évacué en urgence de ma terrasse lors d'un risque d'averse, ce qui est assez fréquent sous les tropiques. Le poids minime est vraiment un atout.
En observation
Pour cette structure légère, la collimation tient bien. Elle ne bouge que très peu lors de grandes variations en hauteur. Et si on désire la réajuster, les tiges de collimation sont toujours à poste et elle est rapidement corrigée, pour observer les planètes par exemple.
Les mouvements sont doux et le "tube" est bien équilibré, sans contrepoids pour mon jeu d'oculaires de 82°, le plus lourd étant un Nagler 20 mm.
Le pendant de cette structure légère avec des tubes en aluminium est un instrument présentant une certaine souplesse et une sensibilité au vent, ce qui peut être pénible à fort grossissement. Il est très difficile d'obtenir un Dobson ultra léger avec une grande rigidité. Si l'occasion se présente, je passerai peut-être plus tard, soit à des tubes d'un diamètre de 20 mm, soit à des tubes en fibre de carbone qui devraient résoudre ce problème. Mais il y a peu de chance que j'investisse dans cette dernière option très couteuse sachant que si je souhaite une grande stabilité, il me suffit de sortir le binoscope.
L'objectif était d'avoir un instrument léger, très économique, qui réutilise certaines parties du binoscope et que je puisse transporter sans encombrement ni difficulté, quitte à rogner partiellement sur certaines caractéristiques. De ce point de vue, le but est atteint et il constitue pour moi un bon complément à mon binoscope.
commentaires :
premier assemblage à blanc du télescope pour tester l'équilibrage.
réalisation de la cage et de l'araignée.
visserie pour la fixation du serrurier (à noter, la partie limée des 4 vis qui restent à poste sur la cage)
support de porte-oculaire.
vérification de l'assemblage cadre / tourillons / barillet séchage, et en arrière plan, séchage du flex-rocker