B400c - Principe retenu



Quel principe de fonctionnement choisir ?


Prise en compte des contraintes

Après avoir lu la plupart des quelques articles existants sur le sujet, il apparaît plusieurs difficultés majeures lors de la construction d'un binoscope. Je les ai ordonné de la plus contraignante à la moins significative :


  1. Comme vu en introduction, il faut disposer de deux miroirs de même focales. Communément, l'erreur limite admise est d'environ 0.5%, soit 9 mm pour une focale de 1800 mm qui est celle de mon premier miroir.

  2. La fusion des images issues des deux télescopes doit être aisée et ne pas se modifier durant les mouvements du binoscope et le passage à des grossissements différents par changement d'oculaire, sinon, c'est le mal de tête garanti.

  3. La collimation comme la fusion doivent être conservées lors de l'inclinaison du binoscope.

  4. Il doit exister un système de réglage de la distance entre les deux pupilles (au pire, elle peut-être fixe si l'instrument est construit pour un seul observateur...)

  5. Je pourrais presque en rajouter une qui est la possibilité d'avoir des porte-oculaires conçus de manière à avoir leurs tubes très proches l'un de l'autre, ce qui n'est pas trivial !


Hormis le fait de disposer de deux miroirs de focales proches qui n'est pas lié à la construction même de la structure, c'est de loin le système de fusion qui conditionne le choix technique et le type de construction.




Fusion par orientation des miroirs

Excepté le binoscope 16" de la société JMI dont les deux télescopes sont articulés séparément sur deux axes distincts, un dans l'axe de la structure et l'autre perpendiculaire, tous les binoscopes que j'ai eu l'occasion d'étudier ont les deux télescopes solidaires et fusionnent l'image par orientation des miroirs primaires dans leurs caisses, voire par l'intermédiaire des miroirs secondaires ou tertiaires.

La plupart du temps, une première approche du point de fusion a été réalisée avec les deux butées latérales des miroirs primaires et les réglages de collimation pour amener au mieux leurs axes parallèles (à ce point, on suppose qu'on est proche de la fusion et que la collimation est correcte, et si ce n'est pas le cas, on réduit les erreurs par réitération des opérations de fusion et de collimation). Ce préréglage se fait en général rarement, voire uniquement une seule fois, après construction de l'instrument.

La fusion s'effectue alors les yeux "aux oculaires" et par l'intermédiaire de longues tiges accessibles des mains, voire des systèmes motorisés pour les plus perfectionnés, qui influent sur un ou deux points de réglage du barillet.

On comprend alors facilement la nouvelle contrainte : fusionner l'image avec cette méthode induit irrémédiablement une petite modification de la collimation.

Cependant, cette solution est viable. Il existe une méthode pour s'approcher d'un préréglage optimum qui permet, au final, de jouer que très peu sur les tiges de fusion, et donc de modifier quasi insensiblement la collimation.

De plus, cette solution présente l'avantage de n'avoir à construire qu'une structure compacte où les deux télescopes ne forment qu'un bloc solide unique. C'est la première solution que j'ai envisagée.


Le prototype "fusion par orientation des miroirs"

N'ayant jamais eu de binoscope, j'ai donc décidé de construire un prototype en métal, le plus simple possible, pour comprendre la problématique de la fusion décrite ci-dessus et me faire mon propre avis sur ce type d'instrument. Ce prototype a été l'étape indispensable pour mieux me rendre compte de toutes autres difficultés insoupçonnées et enfin, malgré mes convictions, savoir après mes premières observations si le jeu en vaut vraiment la chandelle !

Site de Ouatom : le prototype avec ses butées latérales réglables de primaires (l'une d'elle est visible en bas à droite).La platine de tête est très sommaire et une simple cornière en "T" en acier supporte les secondaires.
Bras et support des primaires en tubes d'acier de 50 x 50 mm.

Bilan de la phase prototype

  • La collimation initiale, même avec un miroir tertiaire, ne pose pas de problème.

  • Dans les premiers temps, le préréglage de l'instrument, pour s'approcher d'une image presque fusionnée, m'a demandé une belle dextérité et l'aide d'un collègue. Après échange avec Eric Royer qui observe depuis longtemps à travers ses propres binoscopes, j'ai pu mettre en place une routine de préréglage qui m'a permis de comprendre et de m'approcher relativement rapidement de la fusion.

  • Cependant, à chaque remontage de mon prototype, la procédure me demandait quand même un temps non négligeable de mise en œuvre.

  • Régulièrement, la manipulation des miroirs durant l'observation s'est soldée par une forte décollimation, peut-être lié ici au manque de stabilité mécanique de mon prototype.

  • La décollimation impacte à nouveau la fusion (puisque les deux images à fusionner ne sont plus vraiment identiques).

  • La platine de tête et les porte-oculaires devront être soignés sous peine de perte de fusion.

  • Et surtout, malgré les difficultés, oui, le jeu en vaut la chandelle !


Fusion par orientation des télescopes : "fusion indépendante"

J'en suis donc venu à repenser un système de fusion basé sur des télescopes indépendants, comme chez JMI. Ce système doit obligatoirement dissocier le réglage de la fusion de celui de la collimation. Ce choix, que je nomme "fusion indépendante", n'est pas sans conséquence : l'instrument se complexifie et les contraintes mécaniques augmentent significativement.


Esquisses des versions envisagées

Ayant précédemment testé et validé la solution monobras avec le T400c, je l'ai naturellement intégré au cahier des charges du binoscope, car je n’envisage pas de monter et démonter un instrument avec un serrurier de 12 à 14 tubes. Que je parte sur la solution "fusion par orientation des miroirs" ou "fusion indépendante", la structure sera réalisée sur le principe du monobras.


Demi-vue de dessus de la structure (arrière en bas)

1 - Fusion par orientation des miroirs :


  • La structure est monobloc une fois assemblée.

  • En jaune, les caisses à miroirs soudées aux tourillons bleus reçoivent un unique bras central fixé par des grenouillères.

  • Le bras grisé supporte à son tour l'unique tête composée des 2 araignées et 2 portes-oculaires.

  • Le barillet est sur 18 points comme sur le T400c Monobras.



Demi-vue de dessus de la structure (avant en bas)

2 - Fusion indépendante : orientation des télescopes


  • une structure centrale en gris et vert, appelée corps, reçoit les deux télescopes, chacun constitué d'une caisse, d'un bras et d'une tête.

  • Les tourillons sont intégrés dans le corps.

  • Les caisses octogonales sont articulées dans un berceau dont l'axe est à 45° de l'axe central du binoscope.

  • Le barillet est ici simplifié à 6 points et son ossature est intégrée dans la caisse.

  • Les bras en bleu sont basés sur le principe du T400c monobras.

  • Chaque tête supporte l'araignée, le miroir tertiaire et le porte-oculaire.

  • le système de réglage de fusion se situe en haut du mat central du corps.


La fusion se fait par inclinaison de chaque télescope autour des axes des caisses, formant un angle de 90° entre eux.

La collimation est indépendante.



Principe retenu : la fusion indépendante


Le choix n'a pas été simple !

Le choix 1 m'assurait une structure extrêmement rigide, une tenue mécanique irréprochable et donc une fusion à priori stable. Mais aussi, il serait doté de jolis barillets 18 points et d'un nombre limité de pièces à assembler : le bloc caisses-tourillons, le gros mat central, une unique tête supportant les 2 araignées et les porte-oculaires. Par contre, la perspective d'avoir la fusion liée à la collimation restait un frein considérable.


Le choix 2 de fusion indépendante me paraissait bien plus complexe et plein d'inconnus ! D'autre part, la fabrication d'une grosse pièce principale, qui devra supporter les deux télescopes, va surement alourdir considérablement l'ensemble tout en rehaussant la hauteur des oculaires. Cependant, la perspective de régler rapidement la collimation pour la soirée et celle de pourvoir jouer à ma guise très simplement sur la fusion, sans toucher à la collimation, prenait doucement le pas sur tout autre considération.


Finalement, malgré la complexité, le surpoids et aucune certitude sur la viabilité finale du résultat, je n'ai pas pu me résoudre à un autre choix que celui de la fusion indépendante tant il me semblait évident. D'autre part, partir vers l'inconnu est un beau challenge, surtout en cas de réussite.





© Xavier Aubail 2020