Sensibiliser les consciences

Quelles directions, vers où aller ?

Rencontre avec Matthieu Ricard, Christophe André, Alexandre Jollien et Ilios Kotsou

Les crises ont un effet de dévoilement de tout ce qui ne va pas mais aussi de tout ce qui est précieux et qu'on ne voyait pas, les "bienveilleurs". Nous avons aussi  pris conscience de l'importance de rester en vie et des liens, des relations humaines.

Pour beaucoup, le confinement nous a rigidifié dans nos certitudes. Le principal canal de communication avec le monde c'est les réseaux sociaux, les médias. On sait que cette façon de décrypter le monde est faussée : on fréquente les réseaux sociaux de ceux qui pensent comme nous, cela va amoindrir notre capacité à douter, à nous interroger, à douter, à nous poser des questions, à être flexible. On ne se frotte pas assez à la vraie vie où on rencontre toutes sortes de gens qu'on n'avait pas prévu de rencontrer, toutes sortes d'opinions qu'on n'avait pas prévu d'écouter et cela nous fait beaucoup de bien : cela nous entraîne à accepter la contradiction, à accepter la diversité et non la rejeter, l'ignorer. Confinés, chacun sort de la crise avec ses convictions renforcées : ceux qui sont pour l'écologie montrent les causes de la crise, ceux qui sont pour le libéralisme soulignent le rôle de l'Etat, ceux qui sont anti-capitalistes remettent en question les pulsions dictatoriales,... Et puis la majorité des citoyens sont encore flexibles, réceptifs à une "bonne parole".  Il faut lever le ton, militer davantage pour faire basculer la majorité silencieuse, "la masse critique", dans la  bonne direction. On demande aux gens s'ils sont prêts à s'engager pour l'environnement, 20% disent oui, 20% disent non, 60% disent "je le ferai si les autres le font".

 Avec le confinement, on voit que les gouvernements ont pris des mesures drastiques et la population a suivi, donc on voit que c'est possible de prendre des décisions très fortes, alors pourquoi ne pas prendre ne f^t-ce qu'une partie de cela pour prendre les décisions nécessaires au niveau de l'environnement, au niveau des choses essentielles : pour sa santé publique, il y a 9 millions de morts tous les ans à cause de la Malaria, 6 millions de morts à cause du tabac,  il suffirait d'un arrêté, pas compliqué, beaucoup moins qu'un confinement,on pourrait supprimer le tabac, interdire d'en vendre, la pollution, environ 8 millions de morts, ...On pourrait faire des choses, mais  sommes-nous suffisamment motivés ? La peur nous invite à réagir à des dangers immédiats. Le drame c'est que c'est beaucoup plus difficile de réagir à des dangers indirects, dont on ne voit pas tout de suite les conséquences,...des dangers à long terme comme les changements climatiques. Aura-t-on cette sagesse ? La bienveillance, l'altruisme, le discernement, la sagesse, sont plus nécessaires que jamais.

Un entrainement de l'esprit est nécessaire. On ne peut pas bien raisonner sur ce qu'on a à faire quand on est dans l'agitation émotionnelle. L'apaisement et le discernement : voir les choses telles qu'elles sont. Avoir un esprit qui fonctionne de manière harmonieuse avec soi-même et avec les autres. Cela demande de la pratique spirituelle, contemplative, pas seulement de l'intellect.

Il y a un travail de sensibilisation des consciences qui est à faire. C'est un travail de fourmi mais il se fait, notamment par les associations.

Par l'émerveillement et la gratitude on peut activer notre compassion. L'émerveillement agrandit notre esprit, dissout notre égo devant l'immensité, ça augmente le sentiment d'interdépendance avec les êtres vivants, la nature, cela induit du respect : ce qui nous émerveille, on va le respecter, le protéger, en prendre soin. Cela peut donc mener à l'action de protéger. 

Nous sommes liés,  interdépendants, tous concernés par ce commune humanité, par cette commune "terrestrialité".


"Rien ne nous vient que de nous: l'autre m'est nécessaire pour recevoir, je suis nécessaire à l'autre pour qu'il donne." Eve Ricard.

"Tant qu'il y aura des êtres et tant que l'espace durera, puissé-je moi aussi demeurer pour soulager la souffrance du monde »   Shantideva